Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

11/05/2020

La pomme de terre, un bon révélateur des relations entre politique, marché et sécurité alimentaire en République populaire de Chine

En avril 2020, un article publié dans le Journal of current chinese affairs revient sur les campagnes de promotion de la pomme de terre (Solanum tuberosum) lancées ces dernières années par le ministère de l’agriculture chinois à destination des producteurs, des professionnels de l’industrie agroalimentaire et des consommateurs. En Chine, l’idée selon laquelle la capacité des gouvernants à nourrir la population garantit, en retour, la loyauté des gouvernés, remonte aux dynasties impériales. Pour l’auteur, la promotion du tubercule renouvelle cette économie morale de l’alimentation en octroyant désormais une place centrale au marché : consommer de la pomme de terre, dans un pays qui en est devenu le premier producteur mondial, est un moyen de soutenir l’économie nationale et de garantir la sécurité alimentaire. Pour mener son enquête, dans le prolongement de ses précédents travaux anthropologiques, il procède à une analyse de contenu classique (ouvrages et documentaire télévisé sur la pomme de terre, tous produits par le ministère de l’agriculture).

La première partie de l’article porte sur la diffusion du tubercule dans les régimes alimentaires depuis le XVIIe siècle. Le repas chinois est structuré autour du couple fàn (denrée centrale) et cài (plat d’accompagnement). La pomme de terre est aujourd'hui devenue un élément de garniture important dans le Yunnan ou le Gansu mais elle est, ailleurs, considérée comme un produit allogène ou associée à la famine. La seconde partie montre comment la politique publique chinoise tente d’agir sur les représentations pour stimuler la consommation. Ainsi, il a été avancé que le tubercule présentait toutes les caractéristiques du fàn – neutralité gustative et forte capacité nutritive. Vanté comme étant à la fois une céréale, un légume, un fruit et un médicament, sa consommation participerait également de la bonne santé. Par ailleurs, le ministère de l’agriculture a encouragé le remplacement, dans la production agroalimentaire, de farines de riz ou de blé par leur équivalent à base de pomme de terre. Ainsi, à la différence de la période maoïste pendant laquelle les régimes alimentaires étaient strictement encadrés, les messages actuels du pouvoir valorisent le choix du consommateur et sa possible contribution au bien national commun.

Nathalie Kakpo, Centre d’études et de prospective

Source : Journal of current chinese affairs

10:09 Publié dans 4. Politiques publiques, Alimentation et consommation | Lien permanent | Tags : chine, pomme de terre |  Imprimer | | | | |  Facebook

07/05/2020

Droit et relocalisation des systèmes alimentaires

L’Institut de droit rural de l’université de Poitiers a organisé, le 11 mars 2020, un colloque consacré aux défis, pour le droit, du thème de la « relocalisation » des systèmes alimentaires. Des intervenants variés y participaient et les captations vidéos des différentes séquences sont accessibles en ligne. Divers sujets ont été abordés : les collectivités territoriales comme acteurs majeurs, la « démocratie alimentaire » locale comme processus à encourager, le foncier comme support à mobiliser, les moyens d'agir sur l'entreprise agricole, sur l'économie agricole et sur les filières.

Parmi les analyses présentées figure la nécessité de repenser la gouvernance du territoire. Bien que mentionnées dans la définition législative de la politique en faveur de l'agriculture et de l'alimentation, les collectivités locales ont peu de compétences en matière d'alimentation. Elles disposent toutefois de moyens juridiques leur permettant de développer leurs propres politiques : passation de marchés publics (dont restauration collective), urbanisme, foncier, développement économique. Elles doivent cependant tenir compte de la jurisprudence du Conseil d’État (1930), subordonnant cette intervention à deux conditions : la légitimité du besoin à satisfaire et la carence de l’initiative privée. Le foncier constitue un support à mobiliser, notamment pour pérenniser la vocation agricole d'un terrain. Plusieurs outils existent, dont la possibilité pour les départements de créer des périmètres de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels péri-urbains. La collaboration avec les SAFER est ici fondamentale.

Parmi les autres enseignements de ce colloque, on retiendra les échanges relatifs aux moyens juridiques d'action sur les filières agricoles, de la fourche à la fourchette. Bien qu'envisagées dans la loi d’avenir en 2014 et précisées par une résolution du Parlement européen (14/01/2014), les filières territorialisées sont très imparfaitement prises en considération par le droit. Dans ces conditions, une évolution juridique pourrait offrir deux voies complémentaires : d’une part une forme de « laisser agir » de ces filières, en levant les obstacles juridiques (ex. : critères locaux dans les marchés publics) ; d’autre part donner des moyens pour structurer de véritables filières locales (ex. : inclusion dans les obligations des projets territoriaux d'une clause similaire à celle, prévue par le Code rural, d'une part minimale de produits locaux dans les magasins de producteurs).

Franck Bourdy, Centre d’études et de prospective

Source : université de Poitiers

09:54 Publié dans 4. Politiques publiques, Société, Territoires | Lien permanent | Tags : droit, relocalisation, systèmes alimentaires |  Imprimer | | | | |  Facebook

09/04/2020

L'ingénierie territoriale au service de la transition agricole et alimentaire

Dans un rapport publié fin février, les gions de France et l'association RESOLIS présentent 25 mesures régionales emblématiques pour accompagner la transition agricole et alimentaire. Ces mesures, choisies parmi un échantillon de 100 fiches descriptives recensées auprès de ces collectivités territoriales en 2019, sont classées en fonction des cinq axes énoncés dans le Livre blanc des Régions pour une agriculture durable et une alimentation responsable paru en décembre 2018. Plus d'un tiers des dispositifs cherchent à agir sur la structuration de filières et la mise en réseau d'acteurs, et la plupart utilisent l'outil des subventions (42 %), pour des projets dont les budgets varient généralement entre quelques centaines de milliers et plusieurs millions d'euros.

Répartitions des dispositifs selon les cinq axes du Livre Blanc

Regions.jpg

Source : Régions de France

L'intérêt des Régions est particulièrement marqué pour l'axe « Simplifier l’accès aux soutiens publics et les réorienter vers la transition en partant des projets d’acteurs et des territoires » : il regroupe 41 % des mesures répertoriées. Si 60 % des acteurs soutenus par ces dispositifs viennent du secteur de la production agricole, les projets font aussi appel à une variété d'acteurs publics et privés. Ainsi, le dispositif Alterna (Nouvelle Aquitaine) mobilise des crédits publics régionaux et européens (FEADER, fonds Juncker) pour favoriser l'accès au financement pour les projets risqués ou pour les nouvelles entreprises sans historique de crédit, en allégeant les conditions et exigences en cas de garanties insuffisantes : le dispositif est déployé en partenariat avec trois banques qui proposent et octroient les prêts, et avec des « points relais » variés (chambres d'agriculture, coopératives, associations, fédérations de producteurs, etc.). D'autres mesures font aussi la part belle aux associations d'acteurs (chambres d'agriculture, instituts techniques et de recherche, fermes expérimentales, etc.), à l'expérimentation et au portage des projets par les acteurs locaux. Il s'agit, par exemple, du soutien de collectifs d'agriculteurs rassemblés autour de la réduction de l'impact environnemental (sols, émissions de gaz à effet de serre, etc.) en Bretagne, ou de la recherche d'une autonomie protéique pour les exploitations d'élevage dans les Pays de la Loire. Ces mesures illustrent l'évolution actuelle de l'ingénierie territoriale face aux enjeux de la transition, en particulier pour essayer de déverrouiller les blocages économiques et financiers.

Marie-Hélène Schwoob, Centre d'études et de prospective

Source : Régions de France

18:06 Publié dans 4. Politiques publiques, Territoires | Lien permanent | Tags : ingénierie territoriale, transition, régions |  Imprimer | | | | |  Facebook

17/03/2020

Modélisation des impacts post-Brexit d'une divergence sur les mesures non tarifaires entre le Royaume-Uni et l'Union européenne

La Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (UNCTAD) a publié, en février, une analyse des impacts des mesures non tarifaires (MNT) sur les futures relations commerciales du Royaume-Uni (RU) avec l'Union européenne (UE). Les MNT sont les mesures autres que les droits de douane, notamment sanitaires et phytosanitaires, qui peuvent avoir un effet sur le commerce. Elles induisent des coûts liés à la mise en conformité et à la preuve de cette conformité des produits qui sont, en agriculture, trois fois supérieurs à ceux résultant de l'application de droits de douane.

Comparaison des coûts commerciaux liés aux MNT et aux droits de douane, pour l'agriculture et pour les autres secteurs de production, à l'échelle mondiale, en % de la valeur des biens échangés

UNCTAD1.jpg

Source : UNCTAD

Les auteurs ont utilisé un modèle gravitaire à partir de données de panel sur 1990-2015. Ils montrent d'abord que seule l'appartenance à l'UE favorise le commerce au-delà de la mise à zéro de tous les droits de douane sur les échanges commerciaux, contrairement aux accords de libre-échange classiques et aux unions douanières (figure ci-dessous). Les auteurs attribuent ce résultat à l'importance accordée par l'Union aux MNT. Ils ont ensuite simulé les impacts potentiels d'un retrait du Royaume-Uni de l'UE, selon une relation future sans droits de douane (scénario 1) ou sans droits de douane et sans l'effet facilitateur des MNT (scénario 2).

Ils montrent que les impacts potentiels les plus forts sur les PIB nationaux (référence 2015), toutes choses égales par ailleurs, concernent l'Irlande (- 0,278 % pour le scénario 1 et - 0,736 % pour le scénario 2), le RU (respectivement - 0,233 % et - 0,607 %) et les Pays-Bas (resp. - 0,049 % et - 0,128 %). Les effets économiques sont en moyenne 2,5 fois plus élevés si le Royaume-Uni ne bénéficie plus de la proximité avec l'UE en matière de MNT. Les exports des pays tiers vers le RU évoluent aussi : + 1,3 à 1,5 % dans le scénario 1, et + 3,5 à 4 % dans le scénario 2. Les secteurs les plus impactés sont l'agriculture, l'alimentation, les boissons, le bois et le papier.

En conclusion, pour les auteurs, les mesures non tarifaires devront être suivies avec plus d'attention dans la négociation de la future relation RU-UE que dans les accords de libre-échange et unions douanières classiques.

Effets moyens respectifs de l'appartenance à un accord de libre-échange (Free trade agreement), à une union douanière (Customs Union) et à l'UE (European Union), en % d'augmentation du commerce

UNCTAD2.jpg

Source : UNCTAD

Vincent Hébrail-Muet, Centre d'études et de prospective

Source : UNCTAD

L’impact persistant des droits de douane sur les importations européennes de produits agricoles et agroalimentaires

Dans son numéro de février 2020, l’European Review of Agricultural Economics (ERAE) a publié un article analysant les effets de la politique commerciale de l’Union européenne (UE) sur ses importations de produits agricoles et agroalimentaires avec le reste du monde, entre 2005 et 2017. Les données proviennent des bases COMEXT pour les échanges et TRAINS pour les droits de douane. Depuis le démantèlement tarifaire engagé à l’OMC, à la fin des années 1990, les droits de douane ont fortement diminué. Il est généralement admis qu'ils constituent aujourd'hui une entrave mineure aux échanges, à l'inverse des barrières non tarifaires qui en sont les principaux obstacles. Cet article apporte un éclairage intéressant en se penchant à nouveau sur les droits de douane.

Afin d’estimer l’impact de la politique tarifaire de l’UE sur ses importations, les auteurs utilisent un modèle gravitaire, qui permet de comparer deux situations, avec et sans politique commerciale. L’originalité de l’analyse porte sur la variable tarifaire utilisée. Au lieu de considérer les tarifs douaniers européens appliqués à chaque pays partenaire, l’étude estime un « écart tarifaire » qui mesure l’avantage ou le désavantage tarifaire d’un pays exportateur, compte tenu des droits de douane appliqués aux autres pays. L’idée sous-jacente est que, du point de vue d'un exportateur, l'accès au marché de l’UE dépend davantage du niveau relatif des tarifs que des niveaux absolus.

L'étude montre que les droits de douane influencent encore les importations de l’Union de manière significative, sauf pour les produits animaux et les boissons (tableau ci-dessous). Ces deux groupes sont plus impactés par des barrières non tarifaires : règles sanitaires et phytosanitaires (SPS) pour les premiers, réglementations (monopoles d’État, licences d'importation, etc.) et taxes internes pour les seconds. L’analyse des effets sur le commerce montre, par ailleurs, que les tarifs appliqués par l'UE ont réduit ses importations de 14 % (par rapport à une situation sans tarifs), tandis que les accords préférentiels signés avec certains pays en développement les ont augmentées d'environ 10 % (par rapport à une situation sans préférence tarifaire). Enfin, l’impact est très hétérogène selon les produits considérés.

Estimations des impacts de la politique commerciale de l’UE sur ses importations de produits agricoles et agroalimentaires

Commerce.jpg

Source : ERAE

Lecture : pour chaque groupe de produits, les étoiles indiquent un impact significatif de la variable « écart tarifaire » sur les importations. Trois étoiles : impact très significatif. Pas d'étoile : impact non significatif. Prepared foodstuffs : préparations alimentaires.

Raphaël Beaujeu, Centre d'études et de prospective

Source : European Review of Agricultural Economics

16/03/2020

Les politiques alimentaires des villes allemandes

Après une deuxième moitié de XXe siècle plutôt favorable aux institutions centrales et nationales, on assiste depuis vingt ans en Europe au renouveau des politiques urbaines alimentaires, notamment en Allemagne. Cet article analyse cette réémergence des enjeux alimentaires sur l'agenda politique des municipalités. Quelles capacités et quels outils ont-elles à leur disposition en la matière ? Comment les mettent-elles en œuvre, avec quels acteurs et quelles ressources ?

Les politiques alimentaires des dix plus grandes villes allemandes (de 500 000 à 3 millions d'habitants) sont analysées, au travers des processus (impulsion, mise en œuvre, résultats) et des types d'instruments mobilisés. Les auteurs ont procédé à une soixantaine d'entretiens avec des acteurs de profils variés et ils ont étudié 41 documents officiels de programmation politique, sur la période 2000-2014, renseignant sur le cycle de construction des politiques alimentaires urbaines.

Les résultats mettent en évidence une faible intégration des enjeux alimentaires dans les politiques urbaines (figure ci-dessous). Les ressources dédiées sont limitées et l'action publique en matière d'alimentation résulte d'une collection de projets sectoriels à petite échelle (problem-oriented), impulsés par des acteurs divers (entreprises, ONG, collectifs citoyens, administration, etc.) et bénéficiant de financements extérieurs à la municipalité (Agenda 21 locaux, réseaux Fair Trade Towns, etc.). Les priorités sont la santé publique, l'approvisionnement de la restauration collective et l'information des citoyens. Ce dernier registre est particulièrement utilisé, pour influer sur la consommation alimentaire. Les métropoles ont aussi recours, dans une moindre mesure, à des incitations économiques : production biologique, rémunération de services écosystémiques, etc. Les instruments réglementaires ou de planification urbaine, ciblant l'amont du système alimentaire et qui permettraient une intégration plus large (production, transformation), sont eux peu utilisés.

Orientation des approches et projets de politiques alimentaires des 10 plus grandes villes allemandes

Allemagne.jpg

Source : Food Policy

Claire Bernard-Mongin, Centre d'études et de prospective

Source : Food Policy

12/03/2020

Intégrer les coûts environnementaux et sociaux de la production de viande dans les prix au consommateur pour encourager la transition écologique et alimentaire

Un rapport publié par le groupement TAPPC (True Animal Protein Prices Coalition), en février, propose que l'UE crée une taxe sur la viande pour internaliser les coûts environnementaux (émissions de gaz à effet de serre - GES, etc.) et sociaux (santé publique, etc.) liés à sa production et à sa consommation en Europe. Selon les auteurs, le prix de la viande bovine devrait être augmenté de 4,8 €/kg, celui de la viande porcine de 3,6 €/kg et celui de la volaille de 1,7 €/kg d'ici à 2030. Cela réduirait leur consommation, permettant en particulier une limitation des émissions de GES de 3 %. De plus, cette taxe générerait 32,2 milliards d'€ de revenus supplémentaires pour les États membres, à la même échéance. Les auteurs suggèrent d'utiliser ces fonds pour soutenir les exploitations agricoles ayant des pratiques durables (10-15 Md€), réduire la taxe sur la valeur ajoutée sur les fruits et légumes (7-12 Md€), encourager l'adaptation au changement climatique et la protection des forêts dans les pays du Sud (4 Md€), et, dans un but redistributif, soutenir les foyers à faibles revenus (6 Md€).

Effet de la taxe sur la consommation européenne de viande

TAPPC.jpg

Source : TAPPC, d'après FAOSTAT, CE Delft 2012, 2018 et 2019

Source : TAPPC

16:11 Publié dans 4. Politiques publiques, Alimentation et consommation | Lien permanent | Tags : tappc, viande, taxe |  Imprimer | | | | |  Facebook

12/02/2020

Une évaluation de l'impact des Programmes de développement rural sur le secteur agroalimentaire

Si les Programmes de développement rural (PDR) du second pilier de la PAC bénéficient d'abord aux agriculteurs, ils ont également des effets sur les industries agroalimentaires (IAA). Pourtant, la plupart des évaluations des PDR se focalisent sur le secteur agricole et abordent peu celui de la transformation. Dans un article publié dans la revue Regional Studies, une équipe du Joint Research Centre a cherché à pallier cette lacune, en étudiant le cas polonais.

Les auteurs commencent par rappeler que les PDR touchent directement les industries agroalimentaires, au travers de mesures visant à soutenir leurs investissements, mais aussi de façon indirecte, au moyen de dispositifs cherchant à développer les infrastructures publiques, les services de base dans les territoires ruraux, etc. Ils considèrent dès lors que l'évaluation doit porter non seulement sur l'effet des mesures spécifiquement dédiées aux IAA, mais également sur l'effet global du programme.

Pour ce faire, les auteurs mobilisent des approches économétriques quasi-expérimentales, reposant sur des données agrégées à une échelle cantonale, et non sur des données collectées à l'échelle micro des entreprises. Ces dernières ne sont en effet pas toujours accessibles et elles ne permettent pas de saisir les effets indirects.

Pour estimer l'effet direct des dispositifs dédiés aux IAA, une première analyse compare des cantons ayant bénéficié de telles mesures avec d'autres qui n'en ont pas bénéficié. Elle montre que ces soutiens ont un effet négatif sur l'emploi, en raison des substitutions capital/travail qu'ils favorisent. Une telle comparaison entre cantons bénéficiaires et non-bénéficiaires n'est pas possible pour mesurer l'effet global des PDR, car très peu d'entre eux n'ont bénéficié d'aucun soutien. Aussi, les auteurs ont plutôt regardé si le niveau de soutien reçu dans un canton donné influait sur la structure de son secteur agroalimentaire. Ils mettent en évidence une corrélation positive entre le niveau d'aides reçues et le nombre d'IAA et, partant, sur l'emploi.

Ces résultats illustrent les effets ambivalents et potentiellement contradictoires des programmes de développement rural et interrogent leur cohérence interne.

Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective

Source : Regional Studies

09:40 Publié dans 2. Evaluation, 4. Politiques publiques, IAA, PAC | Lien permanent | Tags : pdr, agroalimentaire, pologne |  Imprimer | | | | |  Facebook

07/02/2020

Boissons sans alcool et sucre au Royaume-Uni : évolutions entre 2015 et 2018

Publié en janvier 2020 par BMC Medicine, un article traite des effets des incitations à réduire la consommation de sucre via les sodas et autres boissons rafraîchissantes sans alcool au Royaume-Uni, entre 2015 et 2018. Alors que les apports en sucres ajoutés dans le pays excèdent les recommandations nutritionnelles, ces boissons en sont une source importante, à hauteur de 21 % pour les adultes et de 33 % pour les enfants. Les pouvoirs publics britanniques ont engagé différentes actions afin d'inciter les consommateurs à modifier leurs pratiques (initiative Change4Life) et les industriels à réduire la teneur en sucre ajouté de leurs produits. Annoncée en mars 2016, une taxe sur les sodas est entrée en vigueur en avril 2018. Elle comporte trois niveaux selon la concentration en sucres ajoutés : i) 24 pence/l pour une teneur supérieure à 8 g/100 ml, ii) 18 pence/l pour une teneur comprise entre 5 et 8 g/100 ml, iii) pas de prélèvement en-dessous.

Les auteurs ont associé des données sur la composition nutritionnelle des boissons (recueillies sur les sites Internet de trois distributeurs) et sur les volumes de ventes (supermarchés, distributeurs automatiques, etc.). Huit types de boissons ont été étudiés, incluant, à titre de comparaison, les eaux minérales et les jus de fruits « purs ». Sur la période 2015-2018, la consommation par personne a augmenté de 5 %, passant de 351 à 367 ml journaliers. Si les volumes globaux des ventes de boissons soumises à taxation se sont réduits de 50 %, ceux de la troisième catégorie ont crû de 40 %. Par ailleurs, le volume total de sucre vendu a diminué de 29 % (soit - 4,6 g/pers/j). La teneur moyenne des boissons étudiées a également baissé de 1,5 g/100 ml, soit 2,9 g en 2018 ; cette tendance est la plus marquée pour les boissons énergétiques. Enfin, six des dix entreprises analysées ont reformulé plus de la moitié de leurs produits entrant dans le champ de la taxe.

Malgré plusieurs limites (ex. : pas de prise en compte des fluctuations saisonnières, ni des caractéristiques socio-économiques des consommateurs), les auteurs soulignent l'intérêt de leur méthode pour une analyse similaire d'autres catégories de produits alimentaires. En particulier, par rapport aux enquêtes nutritionnelles, les données de vente ont l'avantage de ne pas reposer sur les déclarations des mangeurs et d'apporter des détails sur les marques. Enfin, selon eux, ces bons résultats pourraient inviter à élargir le champ de la taxe et à baisser les seuils.

Julia Gassie, Centre d'études et de prospective

Source : BMC Medicine

09:11 Publié dans 2. Evaluation, 4. Politiques publiques, Alimentation et consommation | Lien permanent | Tags : royaume-uni, taxe, sodas, sucre |  Imprimer | | | | |  Facebook

06/02/2020

Concevoir une politique agri-environnementale et climatique efficace pour la prochaine PAC

Le Conseil scientifique consultatif du ministère de l'Alimentation et de l'Agriculture allemand a publié, en décembre, un rapport sur l'architecture environnementale de la future PAC. En effet, la Commission européenne a proposé en 2018 un nouveau modèle de mise en œuvre de la politique agricole, basé sur l'élaboration de plans stratégiques nationaux. Ceux-ci peuvent combiner trois outils pour atteindre les objectifs agro-environnementaux : la conditionnalité, les éco-programmes, les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC).

Les auteurs évaluent cette proposition et formulent 42 recommandations pour les plans stratégiques nationaux. Il s'agit notamment d'augmenter progressivement les budgets alloués aux objectifs agro-environnementaux et, sur le long terme, de supprimer les paiements de base. Ils proposent également de définir le niveau de co-financement national des mesures en fonction de leur valeur ajoutée aux niveaux européen et international : ainsi, celles pour le climat ou la biodiversité seraient financées à 100 % par les fonds européens. Il s'agirait aussi de prendre en compte le bien-être animal dans les éco-programmes, et de tester et développer des instruments incitatifs innovants (ex. : utilisation d'enchères, de paiements à obligation de résultats, etc.). Enfin, différentes structures d'éco-programmes sont discutées en détail.

Différents types d'éco-programmes possibles

PAC.jpg

Source : Scientific Advisory Board on Agricultural Policy, Food and Consumer Health Protection at the Federal Ministry of Food and Agriculture

Source : Scientific Advisory Board on Agricultural Policy, Food and Consumer Health Protection at the Federal Ministry of Food and Agriculture

09:06 Publié dans 4. Politiques publiques, Climat, Environnement, PAC | Lien permanent | Tags : allemagne, conditionnalité, éco-programmes, maec, bmel |  Imprimer | | | | |  Facebook

05/02/2020

Politique agricole commune et « données retardataires »

Dans un article publié par la revue d'anthropologie Techniques & Culture, L. Magnin (université Paris-Est et ENS-Lyon) livre un aperçu de sa thèse en cours sur l'écologisation des politiques agricoles vue à travers le prisme des haies. Il s'intéresse aux retards de paiement des aides PAC suite aux difficultés de refonte du registre parcellaire graphique (RPG) : cette pièce centrale du système intégré de gestion et de contrôle, dont l'unité de référence était l’îlot de culture, a dû intégrer et « numériser des composantes paysagères de plus en plus petites » (ex. : mares, cours d'eau, bosquets, haies).

Son enquête de terrain, menée dans les services chargés de l'instruction des demandes d'aides, de l'alimentation du RPG et du paiement aux agriculteurs (services d'économie agricole des Directions départementales des territoires - DDT, Institut géographique national - IGN, Agence de services et de paiement - ASP), et des entretiens avec des acteurs impliqués dans le chantier de refonte du RPG, lui permettent de proposer deux explications de ces retards. L'une tient, selon lui, à l'organisation et à la gouvernance du chantier, constat qui recoupe des conclusions de la Cour des comptes. L'autre est liée à la complexité de la numérisation, et en particulier à « la sous-estimation, quantitative et qualitative, du travail de mise en données auquel ont œuvré des centaines de ''photo-interprètes'' ».

Capture d’écran du « registre parcellaire graphique » (RPG) sur le site de déclaration Telepac

RPG.jpg

Source : Techniques & Culture

Source : Techniques & Culture

08:57 Publié dans 4. Politiques publiques, PAC | Lien permanent | Tags : rpg, numérisation |  Imprimer | | | | |  Facebook

03/02/2020

Détournements des aides de la PAC dans des pays d'Europe de l'Est : retour sur une enquête du New York Times

The Conversation France revient, dans un récent article, sur une enquête au long cours du New York Times consacrée à la PAC. Les journalistes américains ont mis en évidence un système de détournement des fonds européens agricoles par certains oligarques dans plusieurs pays d'Europe centrale et de l'Est. L'enquête a d'ailleurs conduit à une récente prise de position du nouveau commissaire européen à l'agriculture devant le Parlement. Dans ce contexte, les auteurs s'interrogent sur les évolutions à venir de la PAC et leurs conséquences potentielles sur ces pratiques.

Source : The Conversation

08:38 Publié dans 4. Politiques publiques, PAC | Lien permanent | Tags : new yok times, aides, europe centrale, europe de l'est |  Imprimer | | | | |  Facebook

21/01/2020

Recommandations du Haut conseil pour le climat pour l'évaluation des lois ayant des effets sur les émissions françaises de GES

Le Haut conseil pour le climat (HCC) a été chargé, par le gouvernement, de cadrer les méthodes d'évaluation des lois d'orientation ayant des effets sur les émissions françaises de gaz à effet de serre : il s'agit de pouvoir juger de leur contribution aux objectifs de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC), et de leur capacité à promouvoir des leviers de la transition énergétique et écologique. Dans un rapport publié en décembre, le HCC apporte une première réponse, portant notamment sur l'opportunité d'évaluer les projets de loi et sur la robustesse de la méthodologie.

Les principales conclusions visent d'abord à trier les projets pertinents à évaluer au regard de la SNBC, afin de ne pas engorger le dispositif de préparation des textes et de pouvoir évaluer en détail les projets importants. Ensuite, les auteurs rappellent la nécessité de fonder l'évaluation sur des principes de transparence (critères, méthodes), d'indépendance de l'évaluateur, et de diffusion des résultats sous une forme appropriable par les acteurs concernés. Ils notent enfin que, en l'état actuel, les études d'impact environnemental sont généralement incomplètes ou insatisfaisantes (sources insuffisamment étayées, choix arbitraire des articles évalués), qu'elles ne sont obligatoires que pour les « projets » de loi émis par le gouvernement (pas pour les « propositions » venant du Parlement), et qu'elles deviennent obsolètes dès que les textes évoluent du fait des amendements déposés.

Un focus est notamment fait sur la loi Égalim, promulguée en octobre 2018. Les auteurs soulignent les points suivants : pas de consultation du CESE sur aucun des 98 articles ; pour quatre articles, étude d'impact repoussée aux ordonnances qui en découleront ; évaluation environnementale des seuls articles 11 (« composition des repas en restauration collective ») et 14 (« pratiques commerciales prohibées à l'occasion des ventes de produits phytopharmaceutiques »). Par ailleurs, selon les auteurs, l'article 11 a été évalué sur la base d'une étude controversée et sans se pencher sur ses impacts sur les indicateurs de la SNBC.

En conclusion, les auteurs invitent à systématiser les évaluations rigoureuses de la contribution des lois d'orientation aux objectifs de la SNBC, quand cela est pertinent, et à s'inspirer de méthodes développées aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Australie, pour améliorer le processus, dans la transparence vis-à-vis du public et des parties prenantes.

Vincent Hébrail-Muet, Centre d'études et de prospective

Source : Haut conseil pour le climat

16:26 Publié dans 2. Evaluation, 4. Politiques publiques, Climat | Lien permanent | Tags : hcc, snbc, lois, ges |  Imprimer | | | | |  Facebook

20/01/2020

Évaluation de l'efficacité du système de surveillance de la tuberculose bovine en Espagne

La revue Preventive Veterinary Medicine a publié un article présentant les travaux menés par le Centre de recherche de la santé animale et le département vétérinaire de l'université de Barcelone, avec le ministère espagnol chargé de l'agriculture, sur l'efficacité du système de surveillance de la tuberculose bovine en Espagne. Cette maladie infectieuse chronique est causée par l'un des trois germes du complexe Mycobacterium tuberculosis (M. bovis, M. caprae et M. tuberculosis). Le protocole de surveillance comprend trois étapes : tests cutanés de routine, contrôles avant les déplacements des animaux vivants (ex. : entre élevages, transhumances, vers les marchés à bestiaux, etc.) et dans les abattoirs. Cette étude évalue la contribution de chacun de ces éléments à l'efficacité du système.

La longue incubation asymptomatique de la maladie entravant son observabilité, les auteurs ont utilisé un modèle mathématique permettant de simuler la propagation de l'infection au sein des troupeaux. Ce modèle SOEI considère quatre grands types d'animaux, selon qu'ils sont réceptifs à la maladie (« Sensibles »), infectés mais non encore détectables et non infectieux (« Occultes »), infectés et détectables mais non encore infectieux (« Exposés »), infectés, détectables et infectieux (« Infectieux »). À partir d'un seul animal infecté à T0, la propagation a été simulée pendant cinq ans, les animaux changeant de catégorie en fonction de l'évolution de la maladie.

Les résultats montrent que les tests cutanés de routine sont l'élément le plus efficace du système, devant la surveillance en abattoirs et les contrôles avant déplacements. L'étude démontre que 96 % des troupeaux infectés sont, en principe, détectés dans l'année suivant leur contamination, avec un délai moyen de 178 jours. La période d'évaluation (intervalle entre deux contrôles) est un facteur déterminant de l'efficacité de la surveillance. Dans les faits, la fréquence des tests de routine est le plus souvent annuelle mais peut varier selon la situation épidémiologique : tous les deux ans dans les îles (Canaries, Baléares), ou deux fois par an en Andalousie ou Estrémadure. Par ailleurs, les contrôles à l'abattoir permettent de détecter 9,5 % des troupeaux contaminés, mais aussi d'identifier d'autres maladies passées inaperçues. En revanche, les auteurs recommandent aux pouvoirs publics de réévaluer le rapport coût/efficacité des tests préalables aux déplacements.

Cartes des temps de détection (en jours) pour les différents composants du système de surveillance de la tuberculose

Tuberculose.jpg

Source : Preventive Veterinary Medicine

Lecture : A : détection en abattoir ; B : détection avant mouvement ; C : détection lors de tests de routine ; D : système complet de surveillance de la tuberculose.

Madeleine Lesage, Centre d'études et de prospective

Source : Preventive Veterinary Medicine

14/01/2020

Évaluation d'impact des politiques publiques : quelles bonnes pratiques d'autres pays pourraient-elles être adoptées en France ?

L'évaluation d'impact vise à apprécier (ex post) les effets propres d'une politique publique au regard des objectifs qui lui étaient assignés, au moyen de méthodes statistiques et économétriques. Si cette pratique est bien établie aux États-Unis et au Royaume-Uni, son développement est plus tardif dans notre pays. Dans ce contexte, France Stratégie a dressé un panorama de l'évaluation d'impact en France, et dans cinq pays économiquement proches et considérés comme avancés en la matière : Allemagne, Canada, États-Unis, Royaume-Uni, Suède. Ces éléments sont notamment intéressants pour les actions portées par le ministère en charge de l'agriculture.

Les résultats, publiés en décembre, identifient une douzaine de bonnes pratiques, notamment : i) une articulation adéquate entre la demande et la production d'évaluations d'impact (ex. : via une plus grande mobilité de carrière entre administration publique et recherche aux États-Unis) ; ii) la définition de principes communs garantissant l'indépendance, la crédibilité et la transparence des évaluations (ex. : accréditation des évaluateurs au Canada) ; iii) le partage des pratiques et des résultats (géré par les What Works Centres au Royaume-Uni et les Clearinghouses aux États-Unis), mais également des enjeux de politiques publiques. Ainsi, au Royaume-Uni, les ministères sont encouragés à communiquer sur les domaines où des besoins de preuves scientifiques existent.

Source : France Stratégie

14:37 Publié dans 2. Evaluation, 4. Politiques publiques | Lien permanent | Tags : france stratégie, évaluation d'impact |  Imprimer | | | | |  Facebook