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15/06/2022

Soja : les défis de la dépendance européenne

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Les défis liés à la dépendance européenne au soja importé font l'objet de nombreuses analyses. Ils s'inscrivent dans la continuité de problématiques déjà rencontrées à diverses périodes : accords politiques à l'origine de la Politique agricole commune (non-subvention du soja en échange du soutien des céréales), embargo américain de 1973 (prise de conscience de la dépendance européenne au soja américain), cultures OGM (brevetage du vivant, principe de précaution, etc.), destruction de la forêt amazonienne, etc. Sur plusieurs de ces aspects, des publications récentes apportent des éclairages intéressants.

Tout d'abord Solagro, dans une étude intitulée La face cachée de nos consommations, s'intéresse aux surfaces agricoles et forestières associées aux importations de soja pour l'élevage. À la base du modèle de nutrition animale depuis les années 1960, fondé sur l'association maïs ensilé-soja pour la production laitière, il est aussi une composante essentielle de l'alimentation des volailles et des porcs. Pour réduire sa dépendance en soja américain, l'Union européenne (UE) s'est tournée vers l'Amérique latine, contribuant dès lors indirectement à la déforestation amazonienne. De façon originale, Solagro évalue les superficies correspondant aux importations françaises de soja à plus d'un million d'hectares.

Alors que la Commission européenne a déposé une proposition de règlement visant à lutter contre la déforestation importée (voir à ce sujet une précédente brève), l'association Canopée - Forêts vivantes a publié une étude sur les allégations de durabilité avancées par les principaux négociants en soja, qui révèle de nombreuses contradictions avec leurs stratégies réelles d'approvisionnement. S'appuyant sur des données satellitaires d'occupation du sol et sur le suivi des infrastructures des négociants (silos, voies ferrées privées, etc.), elle met en évidence le développement de la production de soja, entre 2018 et 2020, dans les municipalités brésiliennes présentant des risques de déforestation.

Une autre étude récente (Science Advances), sur les stratégies d'approvisionnement des négociants, confirme que le traçage de l'origine du soja fait en Amérique latine via des intermédiaires locaux ne permet pas de lutter efficacement contre la déforestation. Par ailleurs, une évaluation ex ante des paiements pour services écosystémiques (World Development) conclut à la nécessité de combiner incitations financières au changement et politiques d'exclusion du soja issu de la déforestation.

Enfin, réduire la dépendance européenne au soja latino-américain et la déforestation induite passe par le développement de la production européenne. Des chercheurs ont par exemple identifié trois variétés adaptées au climat de l'est de l'Europe, avec des résultats économiques positifs (European Journal of Agronomy). Une autre équipe a calculé que l'UE pouvait devenir autosuffisante à 50 %, y compris en tenant compte du changement climatique (Nature Food).

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

13/06/2022

La déforestation tropicale ralentit, mais reste sous forte pression de l'agriculture

À l'occasion du 15e congrès forestier mondial, l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a publié l'édition 2022 de la Situation des forêts du monde, ainsi que les résultats de la nouvelle enquête, par télédétection, conduite dans le cadre de l'évaluation des ressources forestières mondiales, en 2020. Elle fait suite à celles de 2000 et 2010, permettant de mesurer les changements intervenus sur longue période.

Mobilisant plus de 800 experts nationaux et s'appuyant sur des données satellitaires en accès libre, elle permet non seulement de suivre les tendances en matière de déforestation, mais aussi d'en identifier les principales causes. Si la déforestation a ralenti de près de 30 % sur la période 2010-2018 par rapport à 2000-2010, elle se poursuit à un niveau soutenu (3,1 millions d'hectares par an), imputable pour 50 % à l'expansion des surfaces cultivées et pour près de 40 % au développement du pâturage.

Motifs de déforestation par région FAO entre 2000 et 2018 (en Mha)

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Source : FAO

Source : FAO

09:41 Publié dans Forêts Bois, Production et marchés, Territoires | Lien permanent | Tags : déforestation, agricuture, pâturage |  Imprimer | | | | |  Facebook

16/05/2022

Des forêts en libre évolution, au croisement d'enjeux scientifiques et sociaux

La Revue forestière française consacre un numéro double à une thématique originale, les forêts en libre évolution. Croisant des regards de forestiers, d'historiens, d'écologues, de statisticiens, de géographes, de sociologues, de juristes, etc., le dossier fait un état des lieux des connaissances actuelles et identifie de nombreux champs de recherche pour l'avenir.

Les forêts primaires et les vieilles forêts (qui ne font plus l'objet d'intervention depuis plus de 100 ans environ) représenteraient 3 % de la surface forestière européenne, et 90 % d’entre elles seraient localisées dans les pays scandinaves ou d'Europe centrale et orientale. Si ces forêts sont donc marginales en Europe, elles attirent l'attention depuis les années 1990. On cherche à mieux comprendre le fonctionnement de leurs écosystèmes et elles sont désormais explicitement mentionnées dans la stratégie européenne pour la biodiversité. En France également, l'identification et la préservation des forêts « à forte naturalité » deviennent des objectifs à part entière de la stratégie nationale en faveur de la biodiversité. Dans cet esprit, pour 2020-2030, au titre des aires protégées, est fixé un objectif de 70 000 ha de forêt bénéficiant d'un régime de protection forte (sans sylviculture ni exploitation), renforçant le besoin de recensement des forêts à fort niveau de naturalité. Celles-ci regroupent les forêts anciennes et matures (qualifiées de « vieilles forêts ») et les forêts férales récentes (en voie d'ensauvagement), principalement issues des reboisements spontanés d'anciens terrains agricoles (figure ci-dessous).

Comparaison des trajectoires écosystémiques et des niveaux théoriques de complexité écologique de forêts spontanées et de forêts d’origines artificielles ou contraintes

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Source : Revue forestière française

L'intérêt récent pour la libre évolution (« laisser faire la nature ») est porté par des enjeux scientifiques relatifs au stockage de carbone, à l'adaptation au changement climatique par sélection naturelle, à la résilience des écosystèmes, etc. L'évolution des représentations et des attentes de la société en faveur d'une nature « authentique » y contribue également. L'expression de cette envie croissante de nature pourrait se traduire par une surfréquentation préjudiciable des zones sous protection. Il s'agit donc d'accroître la naturalité de l'ensemble des forêts, en systématisant des pratiques déjà existantes comme, par exemple, le maintien des gros bois et des bois morts sur les parcelles. Des débats persistent toutefois sur le degré souhaitable de non-intervention humaine, notamment dans le contexte du changement climatique. Enfin, les forêts même ouvertes au public restent des propriétés privées, qu'elles relèvent de propriétaires privés ou de la propriété de l’État ou des collectivités territoriales. Les responsabilités et les devoirs des propriétaires vis-à-vis des promeneurs et de la lutte contre les incendies doivent donc être clarifiés pour faciliter ce mouvement vers plus de naturalité.

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : Revue forestière française

12:18 Publié dans Climat, Environnement, Forêts Bois, Territoires | Lien permanent | Tags : forêt-bois, stockage carbone, climat |  Imprimer | | | | |  Facebook

15/03/2022

Louis Bockel, Aristide S. Ouedraogo, Kouakou Aphely Amon Auguste, Padmini Gopal, Analyse prospective de la filière cacao en Côte d'Ivoire 2020-2030. Vers une politique commune de marché de cacao en Afrique de l’Ouest, FAO, novembre 2021, 49 pages

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La réflexion prospective publiée par l’Organisation mondiale des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), en novembre 2021, expose deux scénarios de développement de la chaîne de valeur du cacao en Côte d’Ivoire à l’horizon 2030. Elle s’inscrit dans le contexte de l’alliance stratégique nouée en 2018, avec le Ghana, pour lutter contre la chute des prix. Un état des lieux de la filière précède ces deux scénarios.

Le scénario de référence (« Business as usual ») est proche de la tendance actuelle. Le niveau moyen annuel de déforestation, estimé à 28 800 ha (référence 2000-2015), décroît lentement pour arriver à un niveau nul en 2030. Au cours de la période, 158 400 ha de forêts sont détruits. Simultanément, 10 000 ha de cacaoyères installées en zone forestière protégée sont reboisés.

Le second scénario (« Du développement durable ») propose un plan bien plus ambitieux de sortie de la déforestation : 7 420 ha seulement sont déboisés sur l’ensemble de la période ; l’extension de la culture de cacao est permise par la mise en culture de jachères, de zones dégradées ainsi que par la mobilisation de parcelles dédiées à des cultures annuelles. Ce scénario prévoit le reboisement de 40 000 ha de cacaoyères installées en zone forestière protégée. Il s’accompagne de mesures de réhabilitation de 816 000 ha de plantations existantes ainsi que d'un meilleur entretien de plus d’un million d’hectares. Il table également sur la diffusion de pratiques agroforestières permettant de lutter contre les effets du changement climatique, auxquels les cacaoyers sont très exposés. Des objectifs de transformation locale de 50 % des volumes de cacao sont fixés, alors que seuls 30 % sont actuellement traités en Côte d’Ivoire.

Les investissements publics à prévoir et les mesures incitatives à déployer, dans le cadre du second scénario, sont exposés : appui aux pratiques durables, soutien à la transformation et aux exportateurs, aide logistique aux coopératives, subvention des intrants, etc. Une estimation de ses impacts économiques, sociaux et environnementaux, met en évidence la possible augmentation des revenus des producteurs de cacao, de 60 à 70 % sur 10 ans, la création de 180 000 emplois (en équivalent temps plein), l’accroissement du stockage du carbone et la diminution des émissions de gaz à effet de serre.

Projection des changements d’usage des terres selon les deux scénarios étudiés

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Source : FAO

Lecture : situation actuelle dans le haut du tableau (intitulés sur fond gris) ; effets du scénario « business as usual » dans la partie centrale (lignes violettes) ; effets du scénario de développement durable dans le bas du tableau (lignes vertes et grises).

Amandine Hourt, Centre d’études et de prospective

Lien : FAO

11/03/2022

Une modélisation des futures aires de répartition des essences forestières

Le changement climatique aura des répercussions sur les aires de répartition des essences forestières. Les anticiper est un enjeu majeur, afin d'adapter les pratiques de gestion, notamment le choix des espèces plantées. Dans un article publié en février 2022 dans Nature, des chercheurs de l'université d'Helsinki et du Joint Research Center (JRC) présentent un modèle permettant de projeter les aires de répartition potentielles de 67 espèces, à différents horizons temporels (2035, 2065, 2095) et selon des scénarios d'émissions de gaz à effet de serre contrastés (scénarios RCP 4.5 et RCP 8.5 du GIEC, soit un réchauffement global de l'ordre de +2 °C et +4 °C). L'originalité de ces travaux tient au fait qu'ils portent sur un grand nombre d'essences et sont conduits à une résolution élevée. De façon générale, ils montrent une remontée vers le nord des aires de répartition potentielles, dans des proportions variables selon les espèces (figure ci-dessous).

Aires de répartition potentielles de différentes espèces (érable champêtre, épicéa commun, chêne sessile) selon le scénario RCP 4.5

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Source : Nature

Lecture : « stable presence » désigne des zones qui resteront adaptées à l'espèce considérée en 2095 ; « decolonized » des zones qui deviendront inadaptées d'un point de vue climatique ; « suitable but not occupied » des zones qui deviendront adaptées mais qui ne seront pas occupées selon les modèles de dispersion utilisés ; « always absent » des zones qui ne sont pas aujourd'hui occupées par l'espèce concernée et ne le seront pas davantage à l'avenir.

Source : Nature

10:33 Publié dans Climat, Forêts Bois | Lien permanent | Tags : forêt-bois, modélisation, essences forestières |  Imprimer | | | | |  Facebook

Lutte contre la déforestation importée : une proposition européenne innovante à affiner

Dans un article publié dans le Journal of Environmental Law, des chercheurs analysent la récente proposition de règlement européen visant à réguler le commerce des matières premières associées à un fort risque de déforestation.

Les auteurs passent en revue les difficultés juridiques éventuelles qui pourraient être rencontrées lors de sa mise en œuvre. Le périmètre restreint des produits nécessiterait une révision régulière pour éviter les effets de substitutions. L'exigence de non-dégradation pourrait se heurter à une définition inconsistante, notamment sur les aspects liés à l'exploitation forestière durable. De plus, le classement des pays d'origine, en trois catégories de risque de déforestation, ouvre la porte à d'éventuelles contestations, en raison de certains aspects discrétionnaires des critères utilisés. Pour les auteurs, afin d'être compatibles avec les règles du commerce international, ces deux derniers points doivent être clarifiés.

Source : Journal of Environmental Law

10/02/2022

Le Comité des forêts et de l'industrie forestière

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Après la Seconde Guerre mondiale, en 1947, les Nations unies ont créé la Commission économique pour l'Europe (CEE-ONU) afin de coordonner l'effort de reconstruction du continent. Les forêts avaient été ravagées et surexploitées, lors des deux conflits mondiaux, et les pays risquaient une pénurie de bois. La conférence internationale organisée sur ce sujet par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), et par le gouvernement tchécoslovaque d'alors, a débouché sur la création de deux organismes, ayant chacun leur domaine d'intervention. Le Comité des bois de la CEE-ONU (devenu depuis le Comité des forêts et de l'industrie forestière, COFFI) s'est centré sur la demande de bois, alors que la Commission européenne des forêts (CEF) de la FAO était focalisée sur la gestion durable des forêts et la production de bois. Dès l'origine, ces deux organismes ont travaillé de concert, mettant en place une gouvernance conjointe.

Structure de la gouvernance de la CEF et du COFFI

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Source : CEE-ONU

Les deux institutions ont rapidement acquis un rôle central dans la connaissance du marché des bois. Elles rassemblent aujourd'hui les éléments statistiques fournis par les pays, mènent des enquêtes dédiées (bois énergie par exemple) et s'appuient sur des experts nationaux. Elles couvrent près de la moitié des forêts mondiales et une partie essentielle de la consommation de bois. Leur travail donne lieu à la publication périodique de statistiques (notamment les rapports sur l'état des forêts européennes) et, récemment, au lancement d'un portail statistique.

Dès 1953, elles ont conduit conjointement la première analyse prospective du secteur, pour dégager les tendances de long terme et élaborer des recommandations en matière de politique forestière et industrielle. Cet exercice est depuis régulièrement renouvelé, le dernier ayant été publié récemment (voir à ce sujet un précédent billet). Bénéficiant de son positionnement au sein de la CEE-ONU, le COFFI a plus particulièrement développé une expertise en matière de bioéconomie et de marché des produits forestiers (bois énergie en particulier). Enfin, il a également noué des liens étroits avec l'Organisation internationale du travail, sur divers sujets : emploi dans la filière, amélioration des conditions de travail, formation. Plusieurs publications récentes les ont abordés, parmi lesquelles des lignes directrices pour la promotion des emplois verts en foresterie ou la main-d’œuvre en forêt dans la région CEE-ONU.

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : CEE-ONU

14/01/2022

Quel avenir pour les marchés forestiers à l'horizon 2040 ?

La commission économique des Nations unies pour l'Europe (UNECE) et l'organisation des Nations unies pour l'agriculture et l'alimentation (FAO) ont publié récemment leurs projections à 2040, pour les marchés forestiers, en explorant différents scénarios. Ces deux organisations travaillent de concert sur les forêts tempérées et boréales de la région couverte par l'UNECE : Europe, Amérique du Nord, Caucase et Asie centrale (carte ci-dessous). Cet ensemble représente 42 % des forêts mondiales, 60 % de la production de bois rond commercialisée et 85 % des forêts certifiées.

Régions et pays couverts par la commission économique des Nations unies pour l'Europe

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Source : UNECE/FAO

Les projections sont établies à l'horizon 2040 grâce au modèle GFPM (Global Forest Products Model), qui décrit le fonctionnement du marché forestier mondial (forêts, produits bois, commerce, prix). Les conséquences de différents changements structurels de la demande ou de l'offre sont évaluées, par contraste avec un scénario de référence conservateur (y compris sur le climat). Parmi les scénarios alternatifs, certains consistent en une accélération des tendances déjà présentes : par exemple l'accroissement de la part du bois dans la construction en Europe. D'autres étudient les conséquences de ruptures comme la mise en œuvre de politiques favorables à la construction bois en Chine ou le remplacement de 30 % des fibres textiles par des fibres issues du bois.

Le rapport reprend également les principales conclusions d'un focus spécifique, à paraître, sur l'impact du changement climatique sur les forêts des régions étudiées, et sur les conséquences des différents scénarios sur les stocks et les flux de carbone. Ainsi, un bond de l'incorporation du bois dans la construction en Chine (passant de 0,1 à 10 % environ) se traduirait par une réduction des émissions par effet de substitution et un stockage accru. Néanmoins, l'accroissement des prélèvements en forêt induits conduirait à une baisse de l'effet « puits de carbone » forestier, de nature à largement inverser l'impact favorable.

Pour conclure, plusieurs défis pour les politiques forestières sont identifiés : réduire l'utilisation de produits issus de la pétrochimie sans surexploitation de la ressource ; identifier des sylvicultures renforçant la résilience des forêts face aux risques naturels croissants, tout en maximisant le volume de bois produit ; évaluer l'espace disponible pour une augmentation des surfaces forestières, tout en préservant les autres usages des terres ; etc.

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : UNECE/FAO

14/12/2021

L'impact du climat sur la recherche forestière

Dans un article récemment publié dans Terrains&travaux, Antoine Dolez présente des résultats de sa thèse de sociologie sur les communautés françaises de recherche forestière. Ces équipes ont des approches soit sylvicoles, soit écologiques. L'auteur aborde plus particulièrement la façon dont elles anticipent le devenir des peuplements forestiers et des écosystèmes, les choix de modélisation induits (tableau ci-dessous), ainsi que les conséquences de l'irruption de la question climatique.

Les communautés françaises de recherche forestière

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Source : Terrains&travaux

À partir d'entretiens auprès de 26 chercheurs des principaux laboratoires français, il montre que la prise en compte du climat dans l'analyse du futur des forêts a rebattu les cartes de la modélisation forestière. Ainsi, une troisième catégorie de modèles, portés par des outsiders (climatologues, statisticiens, etc.), est apparue, bousculant les pratiques des sylviculteurs et des écologues, sans pour autant réconcilier les différentes approches.

Source : Terrains&travaux

13/12/2021

Progression des « solutions basées sur la nature » dans les contributions nationales à la Convention cadre sur les changements climatiques

Dans un rapport récent, le WWF a analysé les nouvelles contributions nationales (CDNs) présentées au cours des deux dernières années par les États parties à la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques. Il en résulte une augmentation notable des mentions concernant les « solutions basées sur la nature » (SBNs) : 105 CDNs sur 114 incluent aujourd'hui ces solutions pour l'atténuation ou l'adaptation (contre 94 pour les précédentes contributions). Cet accroissement est notamment porté par l'Union européenne, qui n'y faisait pas référence dans sa première contribution en 2016, tout comme le Royaume-Uni et les États-Unis, qui ont également fait évoluer leurs positions en la matière. Si la plupart des écosystèmes mentionnés sont des forêts, les terres agricoles sont aussi largement présentes (figure ci-dessous). Pour ces dernières, les SBNs peuvent être la séquestration du carbone dans les sols, la diversification des assolements, le développement de l'agroforesterie, etc.

Pourcentage de CDNs faisant référence aux différents écosystèmes

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Source : WWF

Source : WWF

08:20 Publié dans Climat, Environnement, Forêts Bois | Lien permanent | Tags : changement climatique, solutions fondées sur la nature, wwf |  Imprimer | | | | |  Facebook

Des serious games pour anticiper l'impact du changement climatique sur les forêts et adapter leur gestion

Dans un article publié dans Forest Policy, des chercheurs canadiens présentent leur adaptation d'un « jeu sérieux » d'aide à la prospective (IMPACT), dans le domaine de la gestion forestière. Il s'agit de stimuler l'imagination des acteurs de la filière face aux défis posés par le changement climatique. Notons également que la région Nouvelle-Aquitaine et l'Office national des forêts ont également fait le choix du jeu pour favoriser la prise de conscience, par le grand public, des enjeux liées à la gestion forestière, avec l'originalité de proposer aux joueurs une visite sur le terrain.

Source : Forest Policy

10/11/2021

Un rapport FAO-NEPAD évalue les progrès de la restauration des forêts et des paysages en Afrique

Cinq mois après le lancement de la décennie des Nations unies pour la restauration des écosystèmes (2021-2030), l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) ont publié un rapport évaluant l'effet des programmes de restauration des forêts et des paysages, conduits en Afrique au cours des deux dernières décennies. Les auteurs estiment qu'en dépit de ces projets et des engagements (African Forest Landscape Restoration Initiative, Grande Muraille verte, etc.), 4,4 millions d'hectares de forêts (sur 637 millions) ont été perdus chaque année, entre 2015 et 2020. L'agriculture industrielle et de subsistance, l'exploitation du bois et le changement climatique figurent parmi les causes principales des pertes et dégradations. Entre 2010 et 2020, seuls 11 pays sur 58 ont vu leur couverture forestière augmenter (figure ci-dessous). Le rapport, qui détaille une riche sélection d'études de cas, s'appuie sur une série d'entretiens avec des acteurs engagés dans des projets de restauration pour fournir des recommandations sur les facteurs clés de succès, comme l'appropriation locale.

11 pays et régions qui ont vu leur couverture forestière s'étendre entre 2010 et 2020

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Source : FAO

Source : FAO

09/11/2021

Paiement pour services écosystémiques en forêt : des dispositifs encore récents à améliorer selon le WWF

À l'occasion du congrès de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), en septembre 2021, le Fonds mondial pour la nature (WWF) a publié une analyse critique des paiements pour services écosystémiques existant dans le domaine forestier en France depuis 2018 : la procédure dédiée du Forest Stewardship Council (FSC) et le label bas carbone.

Si le premier dispositif touche des surfaces plus importantes et des thématiques plus variées, pour un faible nombre de certifications (4 dont 3 exclusivement sur la biodiversité, en février 2021), le label bas carbone forestier concerne 76 projets pour 489 ha, mais ne porte que sur des boisements ou reboisements, ou l’amélioration de taillis (figure ci-dessous). Pour les auteurs, ces dispositifs sont encore très récents et perfectibles. En particulier, pour le label bas carbone, le champ des techniques couvert est trop restreint, la rémunération de la réduction des émissions de carbone permise par la substitution de matériaux discutable, et l'absence de vision systémique (co-bénéfices) critiquable.

Localisation et types de projets forestiers du label bas carbone en février 2021

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Source : WWF

Source : WWF

07:02 Publié dans 4. Politiques publiques, Environnement, Forêts Bois | Lien permanent | Tags : pse, forêt, politiques publiques |  Imprimer | | | | |  Facebook

08/11/2021

Biodiversité et changement climatique en forêt : des mesures européennes peu contraignantes et faiblement financées

Dans un rapport spécial publié en octobre 2021, la Cour des comptes européenne évalue les actions publiques en faveur de la biodiversité et de la lutte contre le changement climatique en forêt (figure ci-dessous). Beaucoup sont intégrées dans des stratégies juridiquement non contraignantes (biodiversité, bioéconomie, forêt, changement climatique) et financées via le FEADER. Les fonds alloués à la forêt sont limités et faiblement utilisés : 4,2 % des montants totaux étaient fléchés sur les deux mesures forestières et, en février 2021, la moitié seulement des sommes avait été engagée. Cela correspond à 3 % du total des dépenses sur le FEADER, qui sont concentrés dans cinq pays (Espagne, Italie, Pologne, Portugal et Royaume-Uni).

Principaux instruments de l'Union européenne portant sur la biodiversité et la lutte contre le changement climatique en forêt

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Source : Cour des comptes européenne

Pour les dispositions plus contraignantes, comme en matière de lutte contre l'exploitation illégale, la Cour a constaté, grâce à cinq enquêtes en Espagne, Pologne et Allemagne, que la faiblesse des contrôles limite leur efficacité. Elle conclut à l'importance de mieux cibler les dispositifs actuels et de s'appuyer sur des systèmes de contrôle plus performants, notamment par le biais de la télédétection.

Source : Cour des comptes européenne

20/10/2021

L. Magnin, La haie requalifiée, Enquête sur un dispositif d’écologisation de la Politique agricole commune (2014-2019), thèse de doctorat, université Paris-Est, 2021, 509 p.

La thèse de doctorat de Léo Magnin, soutenue en 2021, analyse la requalification par le droit d’un élément paysager et environnemental, la haie, longtemps considéré comme un obstacle à l’utilisation rationnelle du sol. Mobilisant une variété de méthodes d'enquête, dans les départements de l'Allier et du Puy-de-Dôme, le chercheur met au centre de son étude la septième « bonne condition agricole et environnementale » (BCAE) de la Politique agricole commune (programmation 2014-2019), qui « oblige tout agriculteur bénéficiaire des aides à maintenir les haies présentes sur son exploitation », disposition précisée en 2015 par arrêté.

Après une analyse des évolutions des travaux en sciences sociales sur cet élément paysager, l’auteur montre que l’introduction dans l’ordre juridique de la haie, en tant qu’« élément ordinaire de la nature ordinaire » devant être protégé, ne résulte pas tant d’un mouvement d’écologisation des politiques que d’une lutte définitionnelle entre syndicats agricoles, associations d’agroforesterie et environnementales. Cette lutte a autant mobilisé les paramètres budgétaires et les intérêts productifs des agriculteurs que les ambitions environnementales (chapitre 2). La haie, surface agricole payée, valorisée parce que d’intérêt écologique et protégée en tant que particularité topographique, est une requalification environnementale mais aussi économique. Le chapitre 3 donne à voir une dimension originale de la performativité du droit : le comptage, la localisation et la caractérisation des haies, dans le registre parcellaire graphique, qui permet de contrôler leur maintien (voir à ce sujet une précédente brève). Le quatrième chapitre, sur la réception de la requalification des haies, montre des agriculteurs qui trouvent un appui critique, paradoxal, dans le contenu même du travail administratif. La numérisation souligne, à leurs yeux, la déconnexion des services de l’État d’avec leur vécu : à l’interprétation de photos aériennes, ils opposent la vision de terrain, horizontale et piétonne (« ils ont trouvé des haies là où il n’y en a jamais eu »).

Le chapitre final revient sur le contrôle de la protection des haies, mis en œuvre par les services de l’État. Selon l’auteur, la faiblesse de ces contrôles dessine une écologie « spectrale », « diffuse, invisible et sans réelle action sur le monde », qu’il nuance cependant en mettant en évidence « la diplomatie agro-écologique » déployée par les conseillers agroforestiers regroupés au sein de l’association AFAC-Agroforesteries. S’appuyant tant sur des dispositifs pratiques que sur des énoncés relatifs aux raisons de laisser les arbres debout (depuis le point de vue des agriculteurs) (p.405), ils sont les artisans d’une requalification effective des haies.

Nathalie Kakpo, Centre d’études et de prospective

Lien : HAL

17:00 Publié dans 4. Politiques publiques, Agriculteurs, Environnement, Forêts Bois | Lien permanent | Tags : haies, politique publique, ue, pac |  Imprimer | | | | |  Facebook