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19/04/2022

Stephen C. Wegren, Frode Nilssen, Russia's Role in the Contemporary International Agri-Food Trade System, Palgrave Macmillan, 2022, 343 pages

agrifood system.JPGCe livre récemment publié, coordonné par deux chercheurs américain et norvégien, revient sur l'évolution récente de l'agriculture russe et sur le nouveau positionnement géostratégique du pays dans le système agroalimentaire mondial.

Dans une première partie, les auteurs retracent les politiques et conditions économiques ayant permis à la Russie de devenir, en une quinzaine d'années, un acteur de premier plan sur les marchés des grains et des produits de la mer. Pour la pêche, la politique mise en œuvre visait à atteindre une couverture de 80 % des besoins nationaux par la production nationale. Elle s'est traduite par la mise en place de contrôles sur les échanges, d'entraves diverses aux activités des compagnies étrangères et d'incitations aux chantiers navals russes pour renouveler la flotte. Dans une deuxième partie, l'évolution des relations commerciales régionales est analysée, en particulier avec la Chine, le Moyen-Orient, l'Afrique du Nord et les États-Unis, la Russie ayant inversé la situation et les rapports de force en devenant un fournisseur incontournable et en réduisant sa propre dépendance.

Source : Palgrave Macmillan

14/04/2022

Régulation de la publicité sur les produits gras, salés et sucrés et comportements d'achat

La mise en place de restrictions concernant la publicité relative aux produits gras, salés et sucrés fait partie des recommandations de politiques publiques fréquemment mises en avant pour lutter contre l'obésité et promouvoir des régimes alimentaires sains. Dans un article publié en février 2022 dans la revue PloS Medicine, des chercheurs ont évalué l'impact de telles mesures sur le comportement d'achat des consommateurs. Le travail porte sur l'agglomération londonienne, qui, à de rares exceptions près, a interdit ce type de publicité en 2019 dans son réseau de transports en commun.

Pour estimer l'effet de cette réglementation sur l'achat de produits gras, salés et sucrés par les Londoniens, les auteurs ont conduit une analyse contre-factuelle, à partir de données d'achat issues d'un panel de 32 000 foyers. Au sein de ce panel, deux échantillons aléatoires ont été constitués (figure ci-dessous). Le premier était composé de foyers londoniens (977 ménages) ayant eu affaire à la réglementation. Le second, faisant office d'échantillon témoin, comprenait des foyers du nord de l'Angleterre (993 ménages), suffisamment éloignés de la capitale britannique pour pouvoir faire l'hypothèse qu'ils n'avaient pas bénéficié de la réglementation évaluée. Ce dispositif quasi-expérimental a permis de contrôler les facteurs dits « confondants » car susceptibles d’influer eux aussi sur les variables observées : fluctuations saisonnières des comportements d'achat, tendances structurelles concernant la consommation des produits étudiés, etc.

Caractéristiques des échantillons

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Source : PloS Medicine

Les tests statistiques réalisés mettent en évidence un effet positif et statistiquement significatif de la réglementation sur la consommation de produits gras, salés et sucrés. Ainsi, celle-ci a diminué de 6,7 % suite à la mise en œuvre des mesures évaluées. Cela représente environ 1 000 kcal/semaine/foyer, soit l'équivalent de 70 grammes environ de chocolat au lait standard par personne et par semaine. Quoique positif, cet effet demeure trop faible pour contre-balancer la tendance à la hausse de la consommation de ces produits. Enfin, l'effet de la réglementation semble plus prononcé pour certaines catégories de populations (personnes en surpoids, catégories socio-économiques intermédiaires), sans que cela ne soit statistiquement significatif. En conclusion, les auteurs estiment que cette recherche confirme l'efficacité de mesures ciblant la publicité, pour limiter la consommation de certains aliments contribuant à des régimes néfastes pour la santé.

Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective

Source : PloS Medicine

Patrimoine alimentaire et relance des produits

La revue Anthropology of food consacre un numéro aux produits de terroir et aux dynamiques de patrimonialisation dans le domaine agroalimentaire. On y trouvera notamment informations et analyses sur les appellations corses (farine de châtaigne, fromages, charcuterie), et sur le travail des syndicats et associations de défense et de promotion pour « relancer » des produits typiques en déclin.

Parmi les études de cas, signalons l'article de A. Broccolini sur la lentille de Rascino, en Italie, aliment de pauvres « cultivé seulement pour la consommation quotidienne des familles paysannes », et devenu « produit-icône d’un territoire », porté par des producteurs professionnels et un circuit de commercialisation. Parmi les articles plus généraux, P. Pesteil livre une réflexion sur la fraude et ses contre-feux. Après avoir rappelé l'étendue des pratiques de contrefaçon dans le domaine alimentaire, il s'appuie sur différents terrains (Corse, Yakutie en Russie, Italie) pour discuter les intérêts et limites des systèmes de certification d'une part, et des alternatives de « reconquête alimentaire » dite « par le bas » (mouvement Slow Food, certification participative).

Enfin, l'historien P. Meyzie consacre un article aux « produits d'origine » dans la France des XVIIe et XVIIIe siècles. À partir d'archives diverses (livres de cuisine, documents marchands), il retrace l'association entre produits, origine et qualité, avant la mise en place des systèmes de certification officielle (protection intellectuelle en 1824, puis développement des appellations à partir de 1905). On voit ainsi émerger des noms de produits et des conventions de qualité, qui sont aussi des dispositifs de jugement : fromage « de Roquefort », moutarde « de Dijon », etc. Le plus souvent liés à de grandes villes, ils encadrent le commerce et les attentes des contractants, et concernent en premier lieu des produits très circulants, plutôt qu'en danger de disparition. Ces proto-appellations reflètent les perceptions d'une élite de consommateurs parisiens, soucieux d'un certain exotisme culinaire. La carte ainsi établie (figure ci-dessous) est largement familière, mais elle fait aussi apparaître quelques produits oubliés, ou très confidentiels. Selon l'auteur, ces « gisements de patrimonialisation » pourraient servir de base à des initiatives de redynamisation territoriale.

Localisation des produits d'origine (1680-1830)

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Source : Anthropology of food

Lecture : la taille des points associés à chaque produit est proportionnelle au nombre de mentions identifiées dans le corpus.

Florent Bidaud, Centre d'études et de prospective

Source : Anthropology of food

18/03/2022

Une analyse des gains de productivité dans le secteur laitier aux États-Unis

La production laitière étasunienne a connu d'importantes restructurations au cours des deux dernières décennies : accroissement de la taille des troupeaux et des volumes produits, essor spectaculaire de la production dans l'ouest du pays, etc. Dans un rapport publié par l'Economic Research Service de l'USDA, E. Njuki analyse les gains de productivité du secteur entre 2000 et 2016. Le travail porte essentiellement sur une estimation de la productivité globale des facteurs (PGF), c'est-à-dire du rapport entre la croissance de la production et celle de l'ensemble des facteurs nécessaires à cette production : terres, consommations intermédiaires, main-d’œuvre, capital (voir à ce sujet un précédent billet).

L'analyse montre qu'entre 2000 et 2016, la PGF du secteur laitier aux États-Unis a augmenté de 2,51 % par an. Des disparités notables s'observent toutefois selon la taille des troupeaux : alors que la croissance est de presque 3 % pour les troupeaux de plus de 1 000 têtes, elle n'est que de 0,6 % pour ceux de moins d'une centaine d'animaux.

L'augmentation de la PGF peut résulter du changement technique (innovations), d'économies d'échelle, d'une utilisation plus efficace des ressources ou de facteurs environnementaux. Dans la seconde partie du rapport, l'auteur décompose les gains de productivité observés selon chacune de ces composantes. Il en ressort (figure ci-dessous) que l’accroissement de la PGF sur la période étudiée résulte essentiellement du progrès technique, surtout pour les plus gros troupeaux, et de facteurs environnementaux (conditions climatiques favorables à la croissance des fourrages), notamment pour les plus petits cheptels. En revanche, dans tous les cas, il n'y a pas d'augmentation de la productivité du fait d'économies d'échelle ou d'une utilisation plus efficace des ressources disponibles.

Croissance de la productivité globale des facteurs et de ses composantes selon la taille des troupeaux, entre 2000 et 2016

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Source : USDA

Lecture : TFPI = index de productivité globale des facteurs : TPI = index de progrès technique ; SMEI : index d'économies d'échelle ; TEI : index d'efficience dans l'utilisation des ressources ; EI = index environnementaux.

En conclusion, l'auteur considère que les politiques publiques visant à soutenir la productivité dans le secteur agricole devraient s'appuyer sur un diagnostic précis des tendances en la matière, afin d'en identifier les composantes devant faire l'objet d'une vigilance accrue.

Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective

Source : USDA

15/03/2022

Livre blanc de l'alimentation durable en Espagne

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Publié en mars 2022, ce Livre blanc propose une analyse approfondie des défis associés à l'évolution des systèmes alimentaires espagnols vers plus de durabilité. 53 experts, en treize chapitres, abordent divers sujets : productions primaires, offre et consommation, logistique et distribution, risques sanitaires, etc. Ils analysent la situation actuelle, identifient les principaux défis et proposent des pistes d'action, classées selon leur faisabilité.

Ainsi, les auteurs du chapitre dédié à la pêche et à l'aquaculture invitent à améliorer le système de contrôle dédié, à adapter les financements et aides pour soutenir des pratiques à faibles impacts, ou encore à promouvoir une aquaculture plus extensive (utilisant notamment des espèces de bas niveau trophique). En matière de gestion de l'eau, sont par exemple identifiés le recours à des approches systémiques, des évolutions de la gestion de l'offre (désalinisation, réutilisation, etc.) et de la demande (planification des cultures, amélioration du système de conseil, etc.), le développement de cultures non irriguées. Un autre chapitre envisage l'efficacité future de politiques fiscales, modélisant les effets sur la demande de deux scénarios de taxation des produits alimentaires, la composition du régime, les émissions de gaz à effet de serre et le bien-être des individus.

Dans le chapitre conclusif, les nombreuses pistes identifiées sont reprises pour dessiner une « feuille de route », avec divers objectifs. Ils concernent par exemple les moyens d'information de la population espagnole sur les denrées alimentaires. Ils portent aussi sur l'encadrement politique et institutionnel (ex. amélioration des règles de la commande publique) et sur des systèmes incitatifs cohérents avec les objectifs de durabilité alimentaire. Ils visent également à améliorer la chaîne de valeur pour plus d'équilibre ou de transparence (par exemple avec l'évaluation participative de la Ley de la cadena alimentaria) et des systèmes productifs respectueux de la nature.

Les auteurs pointent plusieurs limites de ce travail collectif, et des tensions possibles entre objectifs, par exemple entre revenus et prix, entre réduction de la consommation de viande et maintien d'un élevage extensif, ou encore entre usages alimentaires et non alimentaires des productions. Ces analyses constituent néanmoins une bonne base pour contribuer aux débats publics sur les défis actuels et à venir, et sur les réponses possibles.

Julia Gassie, Centre d'études et de prospective

Source : Fundación Alternativas

14/03/2022

La « vie chère » dans les Outre-mer

Dans la dernière livraison de la revue Géographie, économie, société, mise en ligne en février 2022, l'article de J.-F. Hoarau (université de La Réunion), identifie les facteurs et mécanismes qui participent aux différentiels de prix entre la métropole et les départements et régions d’Outre-mer (DROM), principalement tirés par les prix alimentaires. De plus, la vulnérabilité au changement climatique et la dépendance externe de ces territoires pourraient accroître prochainement les coûts d'accès à l'alimentation humaine (mais aussi animale).

Pour l’auteur, les forts handicaps structurels des économies ultra-marines sont à l'origine des écarts de prix. Ils les conduisent à une plus grande exposition aux chocs et à une situation de fragilité économique. Ces handicaps entraînent des surcoûts qui se traduisent par un surenchérissement des prix à la consommation et un défaut de compétitivité. L’auteur rappelle aussi que la localisation dans l’espace est un facteur crucial du développement économique. La distance importante entre les territoires et les grands marchés internationaux (figure ci-dessous) s’accompagne de coûts d’approche élevés (frais supplémentaires liés au conditionnement, au transport, etc.). De plus, leur insularité empêche les entreprises locales de bénéficier d’effets d’agglomération tels que la densité d’emplois, la présence d’une main-d’œuvre spécialisée ou l’existence d’infrastructures modernes. Cette limite est par exemple visible dans la quasi-absence d’effort de recherche des entreprises ultramarines.

Le système de transport global (terrestre, maritime et aérien)

productivité globale des facteurs,etats-unis,filière lait

Source : Géographie, économie, société

Lecture : en vert, le transport routier ; en bleu, les routes maritimes ; en rouge, les réseaux aériens.

De plus, pour J.-F. Hoarau, en économie, « l’histoire compte ». Les structures sociales issues des institutions coloniales traversent les âges et se manifestent dans la prévalence d’une logique « exportations de produits agricoles tropicaux contre importations de produits manufacturés » (figure ci-dessous).

Décomposition (en %) du commerce extérieur des DROM, en 2018

productivité globale des facteurs,etats-unis,filière lait

Source : Géographie, économie, société

Enfin, un troisième ensemble de facteurs touche à l’étroitesse économique des marchés et au défaut de concurrence associé. La faiblesse de la demande limite le nombre d’entreprises capables de desservir de manière efficace le marché local, favorisant des situations de monopole et d’oligopole qui concernent les industries de transformation locale comme la grande distribution. D'après l'auteur, l’intensité concurrentielle pourrait être renforcée et la recherche de compétitivité des entreprises resserrée sur le commerce extérieur à l’échelle régionale, par exemple au moyen du développement d’une industrie agroalimentaire de haute qualité, tournée vers les petits marchés touristiques « de luxe » avoisinants.

Nathalie Kakpo, Centre d’études et de prospective

Source : Géographie, économie, société

L'Institut wallon de l'évaluation, de la prospective et de la statistique (IWEPS)

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L'Institut wallon de l'évaluation, de la prospective et de la statistique (IWEPS) est un organisme belge, public et indépendant, ayant pour mission de produire des connaissances utiles à la prise de décision en Wallonie. Ses trois directions produisent des statistiques publiques (l'IWEPS est l'autorité statistique de la région), des évaluations de politiques publiques et des travaux d'anticipation. Ses domaines d'intervention sont larges et ils mobilisent des disciplines variées (sciences économiques, sociales, politiques et environnementales). Son équipe de 63 personnes publie des notes de conjoncture, des séries statistiques mensuelles, des analyses de tendances économiques.

En matière d'anticipation, l'IWEPS coordonne depuis 2018, avec le Centre wallon de recherches agronomiques, une étude prospective intitulée Co-contruire les futurs de l'élevage bovin en Wallonie à l'horizon 2040. Le projet doit se terminer fin 2022, mais deux livrables sont déjà disponibles et les premiers résultats ont été présentés lors de quatre conférences en février. La première présentait un état des lieux de l'élevage bovin, constitué à 45 % de vaches laitières et à 55 % de vaches allaitantes. Le cheptel est en baisse constante, particulièrement dans le secteur laitier (figure ci-dessous). En parallèle, la taille moyenne des élevages a doublé en 30 ans, passant de 70 à 140 têtes.

Évolution du cheptel bovin wallon (en milliers), depuis 1990

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 Source : IWEPS

La deuxième conférence expliquait la démarche prospective et la troisième détaillait les résultats. La réflexion prospective, réalisée à partir de 41 entretiens auprès de représentants des parties prenantes, a permis de dégager quatre dynamiques clés : la spécialisation des filières, la prise en compte des enjeux sociétaux, accroissement de la pénibilité du métier, la réappropriation des activités relevant de l'aval de la filière par l'exploitation (ex. vente en circuit court). Grâce à un questionnaire en ligne, cinq facteurs clés d'évolution ont ensuite été identifiés (flèches vertes dans la figure ci-dessous).

Degré d'importance des facteurs d'évolution de l'élevage bovin

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Source : IWEPS

Les scénarios ont été élaborés par des groupes de travail comprenant les différentes parties prenantes, en choisissant et en opposant deux facteurs sur la base de leur importance et de l'imprévisibilité de leur évolution. Enfin, une table ronde a envisagé les facteurs d'évolution de l'élevage wallon : importance du sociétal et de l'environnement, vieillissement de la population des agriculteurs, risque de non-remplacement des départs en retraite, foncier, etc.

Franck Bourdy, Centre d'études et de prospective

Source : IWEPS

11/03/2022

Lutte contre la déforestation importée : une proposition européenne innovante à affiner

Dans un article publié dans le Journal of Environmental Law, des chercheurs analysent la récente proposition de règlement européen visant à réguler le commerce des matières premières associées à un fort risque de déforestation.

Les auteurs passent en revue les difficultés juridiques éventuelles qui pourraient être rencontrées lors de sa mise en œuvre. Le périmètre restreint des produits nécessiterait une révision régulière pour éviter les effets de substitutions. L'exigence de non-dégradation pourrait se heurter à une définition inconsistante, notamment sur les aspects liés à l'exploitation forestière durable. De plus, le classement des pays d'origine, en trois catégories de risque de déforestation, ouvre la porte à d'éventuelles contestations, en raison de certains aspects discrétionnaires des critères utilisés. Pour les auteurs, afin d'être compatibles avec les règles du commerce international, ces deux derniers points doivent être clarifiés.

Source : Journal of Environmental Law

10/03/2022

Le bien-être animal au regard du droit de l'Union européenne

La dernière livraison de la Revue Semestrielle de Droit Animalier propose les actes de la Journée de la Jeune Recherche de l'Association française d'études européennes (octobre 2021) sur le thème « Le bien-être animal dans l'Union européenne : le temps d'accélérer la cadence ? ». Selon les conférenciers, le bien-être animal fait l'objet d'une multitude de textes normatifs, allant de l'article 13 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) à de la jurisprudence, et construisant ainsi un véritable droit européen de l'animal. Toutefois, sa mise en œuvre achoppe sur une application différenciée selon les États membres et sur des contradictions avec des dispositions relevant d'autres domaines (économie, principes du droit, liberté de religion, etc.). Le rôle de divers instruments juridiques est étudié : droit pénal, droit international économique et accords de libre-échange, etc. Enfin, l'extension de la notion de « bien-être animal » à la faune sauvage est un sujet de débat, pour ses conséquences sur la pêche et l'aquaculture par exemple.

Source : Revue Semestrielle de Droit Animalier

10:28 Publié dans 4. Politiques publiques, Pêche et aquaculture, Société | Lien permanent | Tags : bien être animal, droit animalier, tfue |  Imprimer | | | | |  Facebook

16/02/2022

Réorienter la moitié des subventions agricoles pour de meilleurs résultats environnementaux, sanitaires et économiques

Dans un article publié dans Nature Communications, deux chercheurs britannique et allemand ont analysé des scénarios de réorientation des subventions agricoles, au niveau mondial. Pour les auteurs, celles-ci sont des déterminants majeurs de la production alimentaire, considérée en l’état comme non durable et ne permettant pas de fournir des régimes équilibrés à la population.

Cinq scénarios ont été modélisés : une suppression de l'ensemble des subventions dédiées au secteur agricole, à l'exception de celles liées au commerce des marchandises (scénario RMV) ; une réallocation de la moitié (scénario S50) ou de la totalité (scénario S100) de ces aides à des productions bénéfiques pour le climat (émettant moins de gaz à effet de serre (GES) que d'autres productions) et la santé des populations (fruits, légumes et noix) ; une réallocation des subventions combinée à leur rééquilibrage mondial, en fonction du PIB (scénario GDP) ou de la population (scénario POP) de chaque pays. Les impacts sont évalués à différents niveaux : monde, pays membres de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), pays non membres de l'OCDE et distribuant des subventions, pays non membres de l'OCDE et sans subventions. Les effets de la réorientation des aides sont étudiés pour la production agricole, les émissions de GES en lien avec l’alimentation, la consommation, les décès évités et la prospérité économique (figure ci-dessous).

Impacts des cinq scénarios de réorientation des subventions agricoles

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Source : Nature Communications

Les résultats montrent la nécessité de réaliser des arbitrages entre les objectifs environnementaux, économiques et de santé publique : tandis que la suppression des subventions a des impacts bénéfiques pour l'environnement et l'économie, la modélisation met en évidence des conséquences négatives en matière de santé publique. En revanche, la réorientation de l'ensemble des aides vers les fruits et légumes impacte positivement la santé publique et diminue les émissions de GES, mais s'avère défavorable pour l'économie. Les scénarios touchent aussi différemment les pays avec et sans subventions : le scénario RMV entraîne une baisse de la production dans les premiers, non compensée par la hausse de la production dans les seconds. De son côté, la réallocation des aides vers les fruits et légumes entraîne une hausse de la production horticole dans les pays avec subventions et une baisse dans ceux qui n’en allouent pas. Ainsi, le scénario que semblent privilégier les auteurs est celui de la réallocation partielle des subventions, combinée à un rééquilibrage de celles-ci au niveau mondial.

Marie-Hélène Schwoob, Centre d'études et de prospective

Source : Nature Communications

15/02/2022

Sécurité sanitaire : stratégie globale de l'OMS 2022-2030

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) vient de publier sa stratégie globale 2022-2030 en matière de sécurité sanitaire. Faisant suite à une résolution adoptée en 2020, visant le renforcement des efforts pour une nourriture saine, ce rapport a été soumis à un comité technique puis à une large consultation : États membres, institutions scientifiques, agences onusiennes, ONG, etc. Le rapport publié sera présenté à l'Assemblée générale de l'OMS de mai 2022.

600 millions de personnes tombent malades chaque année, dans le monde, suite à l'ingestion d'aliments insalubres, surtout dans les pays à faible niveau de revenu. Ces aliments perturbent aussi les chaînes alimentaires et donc le commerce mondial (interdictions d’importation, etc.). Ces problèmes de qualité sanitaire ont de plus des conséquences négatives sur la sécurité alimentaire, et ils impactent plusieurs objectifs onusiens de développement durable. Pour y répondre, quatre principes régissent la stratégie sur la sécurité sanitaire (figure ci-dessous) : selon l'OMS, elle doit être « prospective », « basée sur les faits », « centrée sur les acteurs » et « efficiente ».

Principes sous-jacents aux priorités stratégiques de l'OMS en matière de sécurité sanitaire

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Source : OMS

Cette stratégie est faite de cinq priorités. La première porte sur la création ou l'amélioration des systèmes de contrôle nationaux. Ils doivent être établis selon des normes modernes, harmonisées et conformes aux données scientifiques et à la législation, régulièrement contrôlés et mis à jour. Des plans de gestion de crise sont à prévoir. La deuxième priorité recommande que les pays aient une attitude proactive, anticipant les changements mondiaux et les transformations des systèmes alimentaires. Pour cela, les impacts de ces changements sur la sécurité sanitaire (ex. augmentation ou émergence de zoonoses transmises par l'aliment) doivent être identifiés et des options de gestion des risques d'apparition étudiées. L'utilisation des données scientifiques et des informations remontées tout au long de la chaîne alimentaire (résultats de contrôles sanitaires, origine géographique, etc.) constitue la troisième priorité. Par ailleurs, l'ensemble des parties prenantes devrait être impliqué (quatrième priorité) grâce à un système d'échange d'informations performant, mobilisant les outils adaptés. Enfin, la sécurité sanitaire est à considérer comme une composante essentielle du commerce alimentaire national, régional et international (cinquième priorité). Dans ce cadre, les systèmes alimentaires doivent se conformer aux normes du Codex alimentarius pour protéger la santé publique et faciliter les échanges.

Franck Bourdy, Centre d'études et de prospective

Source : Organisation mondiale de la santé

14/02/2022

Covid-19 et pratiques alimentaires : des enseignements pour la conception des politiques publiques

En janvier 2022, ont été publiés dans la revue Sustainability: Science, Practice and Policy les résultats d'un travail mené sur les effets des restrictions associées au Covid-19 sur les pratiques alimentaires. Pour les auteurs, les perturbations soudaines des routines quotidiennes (ex. télétravail) et des systèmes d'approvisionnement (ex. fermeture des restaurants) constituent une opportunité pour étudier ces pratiques et leurs dynamiques : obtention, stockage, préparation et consommation d'aliments, gestion des déchets, etc. De mai à juillet 2020, ils ont réalisé 119 entretiens semi-directifs auprès de ménages aux profils diversifiés dans sept pays : Allemagne, France, Italie, Norvège, Pays-Bas, Royaume-Uni et Vietnam.

Des résultats communs aux différents terrains d'enquête sont identifiés. Tout d'abord, les mesures de gestion de la crise sanitaire ont perturbé des pratiques alimentaires habituellement déterminées par d'autres activités (travail, école, etc.), modifiant les temporalités, localisations et fréquences des achats. Les mesures d'hygiène et de nouvelles conceptions des risques y ont également contribué, et ont joué sur les modalités de choix et de stockage des produits. La planification des repas et la gestion des denrées ont aussi été impactées. Par ailleurs, les ménages interrogés ont expérimenté de nouvelles pratiques alimentaires, déterminées par divers facteurs : préoccupations accrues pour la santé et prise en considération du rôle de l'alimentation ; recherche de diversité, de sociabilité et de divertissement, habituellement apportés par les repas au restaurant ; nouvelles pratiques culinaires (menus, équipements, services, outils numériques, etc.). Enfin, les expériences individuelles sont diverses, plaisantes ou difficilement vécues, notamment selon la composition du foyer et les activités professionnelles.

Pour les auteurs, des enseignements peuvent en être tirés quant à l'accompagnement du changement des pratiques alimentaires, notamment en ce qui concerne l'adoption d'alternatives face aux défis contemporains de la durabilité. Il s'agit de considérer la diversité des habitudes et routines, de mieux cibler les facteurs les conditionnant, d'en intégrer les dimensions sociales et culturelles, ou encore de tenir compte des capacités variables des individus à mettre en œuvre les changements. Les politiques publiques auraient alors à la fois un périmètre plus large et des ambitions plus modestes.

Julia Gassie, Centre d'études et de prospective

Source : Sustainability: Science, Practice and Policy

11/02/2022

FAO, The University of the West Indies, A review of school feeding programmes in the Caribbean Community, 2021, 194 pages

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L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a publié en décembre 2021 une étude sur la restauration scolaire dans les 14 États membres de la Communauté des Caraïbes (Caricom). Recourant à plusieurs méthodes (entretien, recherche documentaire, analyse des avantages nets), l’étude met en évidence trois types d’organisation de la restauration qui impliquent des coopérations différentes avec les petites exploitations agricoles locales. Celles-ci sont considérées par les auteurs comme les plus aptes à fournir une alimentation saine, diversifiée, ancrée dans les cultures locales.

Dans le premier type, majoritaire, les repas sont préparés et consommés dans l’enceinte scolaire. Si les produits sont principalement issus de la commande publique, ce modèle autorise l’introduction d’aliments par les familles, l’association de celles-ci à la préparation des repas et l’achat auprès d'agriculteurs locaux. Dans le deuxième type d’organisation, des prestataires contractualisés du secteur marchand prennent en charge l’approvisionnement, l’acheminement et la préparation des repas. Ces processus normés sollicitent peu les petites exploitations environnantes. Enfin, dans le dernier modèle, les repas sont préparés, conditionnés et acheminés dans les écoles par des prestataires dépendant, par exemple, du ministère de l’Éducation ou d'une grande entreprise publique.

Pour les auteurs, ce troisième type d’organisation recourt en général peu aux produits agricoles locaux, la grande majorité des denrées consommées à l’école étant importée. Toutefois, le cas d’Antigua-et-Barbuda conduit à nuancer cette affirmation (figure ci-dessous). La mise en œuvre du Programme alimentaire national permet en effet un approvisionnement local pour 80 % des œufs, légumes et autres produits frais, 120 exploitants agricoles sont des fournisseurs du ministère de l’Éducation et six entreprises locales sont chargées de la découpe de la viande.

Organisation de la restauration scolaire à Antigua et Barbade

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Source : FAO

Lecture : les flèches bleues relient les fournisseurs à des destinataires (ou clients) ; celles en noir désignent l’action de rendre compte de l’activité auprès d’un tiers ; les flèches rouges se rapportent aux flux monétaires (paiement ou allocation de ressources).

Parmi les freins identifiés à l’approvisionnement local figure la difficulté, pour les organismes chargés de la restauration scolaire, de gérer les flux logistiques occasionnés par le recours à une variété d’exploitations. La FAO préconise une augmentation du volume des produits en provenance de l’agriculture de petite échelle, pour réduire la valeur des importations, augmenter la production nationale et l’emploi dans les zones rurales. Désignant le Brésil voisin comme lieu de bonnes pratiques, l’organisation recommande que 50 % du contenu des repas proviennent des « fournisseurs locaux ou régionaux ».

Nathalie Kakpo, Centre d’études et de prospective

Source : FAO

10/02/2022

Une analyse des dispositifs agro-environnementaux en Amérique latine

En Amérique latine, les années 2000 ont été marquées par une avancée rapide des fronts agricoles et sylvicoles, les surfaces exploitées se développant au détriment des forêts et prairies primaires. Il en a résulté une dégradation importante des écosystèmes, que plusieurs gouvernements ont tenté de limiter au moyen de dispositifs agro-environnementaux. Dans un article publié sur le site Géoconfluences, des chercheurs analysent trois de ces mesures : la loi forestière argentine, le décret sur l'usage des sols agricoles en Uruguay et le zonage environnemental de la sylviculture dans le Rio Grande do Sul au Brésil.

Caractéristiques des mesures étudiées

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Source : Géoconfluences

Les auteurs constatent d'abord que ces mesures cherchent à réguler l'exploitation des agro-écosystèmes, afin de combiner activité productive et préservation de l'environnement. Cette orientation constitue, selon eux, un changement de paradigme dans la mesure où les politiques environnementales, en Amérique du Sud, privilégiaient jusqu'alors la protection d'écosystèmes perçus comme « naturels » ou « vierges », en y interdisant toute activité sylvicole ou agricole.

Une deuxième partie de l'article s'intéresse aux facteurs ayant permis l'adoption de ces réglementations. Dans la mesure où les exploitations présentes sur les fronts agricoles ou sylvicoles sont pour l'essentiel de grandes entreprises détenues par des capitaux étrangers, ces régulations sont pour les gouvernements le moyen d'en limiter l'essor. Ils entendent ainsi répondre aux préoccupations d'une partie de leur population. Mais il arrive que ces régulations soient soutenues par ces entreprises elles-mêmes, certaines souhaitant protéger leur réputation et disposer d'un cadre juridique leur permettant de certifier la durabilité de leurs activités.

Pour terminer, les auteurs se sont intéressés aux stratégies des acteurs agraires dominants, face à ces nouvelles normes. Ils montrent que ces derniers concentrent leur action d'influence sur la phase de conception des dispositifs, dont ils cherchent à limiter l'ampleur. En revanche, une fois ceux-ci adoptés, ils ne s'y opposent plus frontalement, sans doute, selon les auteurs, parce qu'ils sont parvenus à les rendre finalement peu contraignants.

Mickaël Hugonnet, Centre d’études et de prospective

Source : Géoconfluences

Le Comité des forêts et de l'industrie forestière

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Après la Seconde Guerre mondiale, en 1947, les Nations unies ont créé la Commission économique pour l'Europe (CEE-ONU) afin de coordonner l'effort de reconstruction du continent. Les forêts avaient été ravagées et surexploitées, lors des deux conflits mondiaux, et les pays risquaient une pénurie de bois. La conférence internationale organisée sur ce sujet par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), et par le gouvernement tchécoslovaque d'alors, a débouché sur la création de deux organismes, ayant chacun leur domaine d'intervention. Le Comité des bois de la CEE-ONU (devenu depuis le Comité des forêts et de l'industrie forestière, COFFI) s'est centré sur la demande de bois, alors que la Commission européenne des forêts (CEF) de la FAO était focalisée sur la gestion durable des forêts et la production de bois. Dès l'origine, ces deux organismes ont travaillé de concert, mettant en place une gouvernance conjointe.

Structure de la gouvernance de la CEF et du COFFI

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Source : CEE-ONU

Les deux institutions ont rapidement acquis un rôle central dans la connaissance du marché des bois. Elles rassemblent aujourd'hui les éléments statistiques fournis par les pays, mènent des enquêtes dédiées (bois énergie par exemple) et s'appuient sur des experts nationaux. Elles couvrent près de la moitié des forêts mondiales et une partie essentielle de la consommation de bois. Leur travail donne lieu à la publication périodique de statistiques (notamment les rapports sur l'état des forêts européennes) et, récemment, au lancement d'un portail statistique.

Dès 1953, elles ont conduit conjointement la première analyse prospective du secteur, pour dégager les tendances de long terme et élaborer des recommandations en matière de politique forestière et industrielle. Cet exercice est depuis régulièrement renouvelé, le dernier ayant été publié récemment (voir à ce sujet un précédent billet). Bénéficiant de son positionnement au sein de la CEE-ONU, le COFFI a plus particulièrement développé une expertise en matière de bioéconomie et de marché des produits forestiers (bois énergie en particulier). Enfin, il a également noué des liens étroits avec l'Organisation internationale du travail, sur divers sujets : emploi dans la filière, amélioration des conditions de travail, formation. Plusieurs publications récentes les ont abordés, parmi lesquelles des lignes directrices pour la promotion des emplois verts en foresterie ou la main-d’œuvre en forêt dans la région CEE-ONU.

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : CEE-ONU