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10/02/2022

Une analyse des dispositifs agro-environnementaux en Amérique latine

En Amérique latine, les années 2000 ont été marquées par une avancée rapide des fronts agricoles et sylvicoles, les surfaces exploitées se développant au détriment des forêts et prairies primaires. Il en a résulté une dégradation importante des écosystèmes, que plusieurs gouvernements ont tenté de limiter au moyen de dispositifs agro-environnementaux. Dans un article publié sur le site Géoconfluences, des chercheurs analysent trois de ces mesures : la loi forestière argentine, le décret sur l'usage des sols agricoles en Uruguay et le zonage environnemental de la sylviculture dans le Rio Grande do Sul au Brésil.

Caractéristiques des mesures étudiées

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Source : Géoconfluences

Les auteurs constatent d'abord que ces mesures cherchent à réguler l'exploitation des agro-écosystèmes, afin de combiner activité productive et préservation de l'environnement. Cette orientation constitue, selon eux, un changement de paradigme dans la mesure où les politiques environnementales, en Amérique du Sud, privilégiaient jusqu'alors la protection d'écosystèmes perçus comme « naturels » ou « vierges », en y interdisant toute activité sylvicole ou agricole.

Une deuxième partie de l'article s'intéresse aux facteurs ayant permis l'adoption de ces réglementations. Dans la mesure où les exploitations présentes sur les fronts agricoles ou sylvicoles sont pour l'essentiel de grandes entreprises détenues par des capitaux étrangers, ces régulations sont pour les gouvernements le moyen d'en limiter l'essor. Ils entendent ainsi répondre aux préoccupations d'une partie de leur population. Mais il arrive que ces régulations soient soutenues par ces entreprises elles-mêmes, certaines souhaitant protéger leur réputation et disposer d'un cadre juridique leur permettant de certifier la durabilité de leurs activités.

Pour terminer, les auteurs se sont intéressés aux stratégies des acteurs agraires dominants, face à ces nouvelles normes. Ils montrent que ces derniers concentrent leur action d'influence sur la phase de conception des dispositifs, dont ils cherchent à limiter l'ampleur. En revanche, une fois ceux-ci adoptés, ils ne s'y opposent plus frontalement, sans doute, selon les auteurs, parce qu'ils sont parvenus à les rendre finalement peu contraignants.

Mickaël Hugonnet, Centre d’études et de prospective

Source : Géoconfluences

08/02/2021

Le Centre états-unien de recherche comportementale et expérimentale sur l'agro-environnement

Le Centre de recherche comportementale et expérimentale sur l'agro-environnement (Center for Behavioral and Experimental Agri-Environmental Research, CBEAR), basé à l'université du Delaware et à l'université John Hopkins, a été créé en 2014 pour utiliser l'économie comportementale et expérimentale à des fins d’amélioration des programmes agro-environnementaux nationaux. Son lancement a bénéficié d'un financement du service de recherche économique du ministère de l'agriculture des États-Unis (USDA). Depuis, le CBEAR a été nommé deux fois centre d'excellence par l'USDA.

Le CBEAR développe une stratégie « tester, apprendre, adapter », visant à améliorer la participation des agriculteurs aux programmes agro-environnementaux, leur satisfaction et les résultats de ces dispositifs, tout en réduisant leurs coûts. Pour ce faire, il développe quatre axes de travail : i) concevoir et développer des mesures agro-environnementales basées sur la preuve ; ii) conduire des expériences en laboratoire ou sur le terrain, pour tester les hypothèses des sciences comportementales et développer les connaissances scientifiques (carte ci-dessous) ; iii) former les chercheurs et les professionnels pour améliorer les mesures mises en œuvre ; iv) communiquer auprès des décideurs publics et des médias sur l'intérêt de prendre en compte les effets comportementaux. Il valorise ses résultats notamment via des Behavioral Insights Brief.

Communes dans lesquelles des agriculteurs ont participé à des expériences aléatoires de terrain du CBEAR

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Source : CBEAR

Le CBEAR a notamment piloté un projet, visant à tester différents types de communication pour encourager les agriculteurs à se renseigner sur les pratiques agricoles réduisant les émissions de gaz à effet de serre et à participer aux programmes mis en place par l'USDA en la matière. 10 000 producteurs de la région des Grands lacs ont donc été contactés pour tester différentes options. Certains recevaient une invitation à consulter un site internet pour en savoir plus, tandis que d'autres étaient conviés à participer à un webinaire. Très peu d'agriculteurs ont finalement participé à cet événement. Par ailleurs, le simple fait d'offrir aux producteurs la possibilité de suivre le séminaire a réduit de 50 % la probabilité qu'ils visitent le site internet, et qu'ils en apprennent ainsi plus sur les pratiques bonnes pour le climat (figure ci-dessous). Les chercheurs ont également étudié si, après de multiples tentatives par courriel, il était pertinent d'appeler les agriculteurs au téléphone. Les résultats n'ont pas montré d'effet significatif de ces appels. Ces résultats confirment l'intérêt de mener des tests à petite échelle avant la mise en œuvre de politiques publiques agro-environnementales.

Impact de l'invitation à un webinaire sur le nombre de visites du site internet

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Source : CBEAR

Estelle Midler, Centre d'études et de prospective

Source : CBEAR

15:21 Publié dans Agriculteurs, Environnement, Travail et emploi | Lien permanent | Tags : usda, agro-environnement, formation, etats-unis, portrait |  Imprimer | | | | |  Facebook

08/07/2020

Une évaluation de l’efficacité et de l'efficience de différents outils de politique agro-environnementale

L'Institute for Climate Economics (I4CE) a publié, en juin 2020, une étude consacrée à la Politique agricole commune (PAC). Si la prochaine réforme de la PAC est toujours en cours de négociation, la Commission européenne a d'ores et déjà annoncé sa volonté de passer d'une logique d'obligation de moyens à une logique d'obligation de résultats. Ce changement d'approche vise notamment à améliorer l'efficacité et l'efficience des aides agro-environnementales. Mais qu'en serait-il vraiment si de telles mesures étaient adoptées ?

Pour répondre à cette question, l'étude analyse six outils de politique agro-environnementale : le paiement vert, les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC), les aides à l'agriculture biologique (conversion et maintien), la certification Haute valeur environnementale (HVE), le label bas carbone (LBC) et un dispositif australien relatif à la séquestration du carbone dans les sols agricoles. Les quatre premiers sont considérés comme des outils à obligation de moyens, visant à promouvoir des pratiques supposées bénéfiques pour l'environnement, alors que les deux derniers relèvent davantage d'une obligation de résultats. Pour chacun de ces outils, les auteurs ont estimé les impacts ainsi que les coûts (conception, fonctionnement, suivi, contrôle) associés à leur mise en œuvre.

Ils tirent plusieurs enseignements de leurs analyses. En premier lieu, les mesures à obligation de résultats n'entraînent pas nécessairement une plus grande efficacité : celle-ci dépend de l'ambition du dispositif et de son niveau d'exigence en matière d'additionnalité. Elles sont en revanche très pertinentes lorsque les liens entre les pratiques agricoles et les impacts sont mal connus au niveau global, car elles laissent à l'agriculteur la responsabilité de choisir les pratiques permettant d'atteindre localement le résultat visé. De plus, les mesures à obligation de résultats peuvent être moins coûteuses à administrer que celles à obligation de moyens, à l’instar des cadres de certification carbone, dont les coûts de gestion sont généralement plus faibles que ceux des MAEC. Enfin, l'approche basée sur une obligation de résultats faciliterait l'évaluation environnementale de la PAC, conduisant les auteurs à souligner, en conclusion, l’opportunité d’un tel dispositif dans la prochaine programmation.

Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective

Source : Institute for Climate Economics

16/03/2020

Des propositions d'indicateurs agro-environnementaux pour renforcer le suivi des exploitations européennes

Principal outil de suivi des exploitations européennes, le Farm Accountancy Data Network (FADN) rassemble des informations comptables de plus de 80 000 exploitations. Il ne contient toutefois que très peu d'éléments relatifs aux enjeux environnementaux, ce qui complique l'évaluation des dispositifs de politique publique dédiés. Pour pallier cette difficulté, dans un article publié dans la revue Ecological Indicators, une équipe allemande a étudié la possibilité de compléter le FADN par des indicateurs agro-environnementaux.

Les auteurs ont d'abord procédé à une revue de littérature afin d'établir une liste d'indicateurs potentiellement mobilisables. Pour réduire les coûts de collecte, ils se sont limités aux indicateurs pouvant être renseignés à partir des informations issues des déclarations PAC remplies chaque année par les agriculteurs. Cinq entrées ont ainsi été retenues : l'indice de Shannon des cultures, qui rend compte de leur diversité sur une exploitation ; le nombre de cultures occupant plus de 5 % de la surface cultivée ; la taille médiane des parcelles ; la densité de haies ; la part des éléments paysagers dans la surface totale. Pour apprécier la pertinence des indicateurs proposés, ces derniers ont été calculés pour les exploitations du Land du Brandebourg, en Allemagne. Ces calculs montrent qu'ils sont pertinents pour discriminer les exploitations, mais ils mettent en évidence de fortes corrélations entre certaines variables, qui conduisent les auteurs à éliminer les indicateurs « nombre de cultures occupant plus de 5 % de la surface cultivée » et « part des éléments paysagers dans la surface totale ».

Les trois indicateurs finalement proposés permettraient de compléter le dispositif de suivi des exploitations européennes, mais ils présentent toutefois certaines limites. Ne portant que sur une partie des enjeux agro-environnementaux, ils laissent de côté des sujets tels que les émissions de gaz à effet de serre ou l'utilisation des intrants (engrais, pesticides, etc.). Par ailleurs, ils supposent la mobilisation de données administratives qui n'ont pas été collectées à des fins de suivi et d'évaluation, ce qui nécessiterait d'obtenir l'autorisation préalable des agriculteurs les ayant fournies.

Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective

Source : Ecological Indicators

16:52 Publié dans Environnement, Exploitations agricoles | Lien permanent | Tags : indicateurs, agro-environnement, exploitations, europe |  Imprimer | | | | |  Facebook

13/06/2019

Un rapport de la délégation à la prospective du Sénat sur l'adaptation aux dérèglements climatiques à l'horizon 2050

En mai 2019, la délégation à la prospective du Sénat a publié un rapport consacré à l'adaptation de la France aux changements climatiques à l'horizon 2050. Prenant acte d'une « réalité présente » et d'une « inexorable aggravation à moyen terme », les auteurs soulignent l'importance cruciale de l'adaptation, moins traitée et mise en avant que l'atténuation. S'ils s'intéressent aux prochaines décennies, l'horizon plus lointain (fin du siècle) est également considéré (projections climatiques à long terme, temporalité des actions).

Temporalité des actions d'adaptation

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Source : Sénat

S'appuyant sur 36 auditions et la mobilisation de diverses publications, le document dresse, dans une première partie, un panorama des impacts actuels et à venir du changement climatique (hausse des températures, transformation du régime des précipitations, etc.). Il en détaille différents effets : sanitaires (ex. : prolifération de certaines algues), sur la sécurité des biens et des personnes (ex. : modification du régime de risques naturels), sur la ressource en eau (ex. : baisse de la recharge des nappes) et sur les activités économiques. L'agriculture figure au premier rang des secteurs touchés : sécheresses, stagnation ou plus grande variabilité interannuelle des rendements, modification des qualités organoleptiques des produits, problématiques de santé végétale et animale, etc.

La deuxième partie est consacrée aux moyens de « faire face » à ces dérèglements, alors que la mobilisation des acteurs publics (État et collectivités) est jugée encore « trop modeste ». Divers défis sont identifiés, parmi lesquels celui d'une approche systémique dans la conception des politiques d'adaptation : par exemple, une telle politique pour l'agriculture ne peut être menée sans travailler à l'évolution du système et des conduites alimentaires. Les auteurs formulent ainsi un ensemble de recommandations de portée générale.

Enfin, la troisième partie s'intéresse à quatre chantiers d'adaptation sensibles : territoires vulnérables, bâti et urbanisme, politiques de l'eau, agriculture. Dans ce dernier cas, les auteurs recommandent en particulier une meilleure rémunération des services agro-environnementaux (2nd pilier de la PAC), un traitement « responsable » des questions d'irrigation (stockage de surface conditionné à des pratiques plus économes et respectueuses de la biodiversité) et le renforcement des mécanismes de couverture assurantielle (prenant en compte les efforts d'adaptation des exploitants).

Julia Gassie, Centre d'études et de prospective

Source : Sénat