14/03/2022
La « vie chère » dans les Outre-mer
Dans la dernière livraison de la revue Géographie, économie, société, mise en ligne en février 2022, l'article de J.-F. Hoarau (université de La Réunion), identifie les facteurs et mécanismes qui participent aux différentiels de prix entre la métropole et les départements et régions d’Outre-mer (DROM), principalement tirés par les prix alimentaires. De plus, la vulnérabilité au changement climatique et la dépendance externe de ces territoires pourraient accroître prochainement les coûts d'accès à l'alimentation humaine (mais aussi animale).
Pour l’auteur, les forts handicaps structurels des économies ultra-marines sont à l'origine des écarts de prix. Ils les conduisent à une plus grande exposition aux chocs et à une situation de fragilité économique. Ces handicaps entraînent des surcoûts qui se traduisent par un surenchérissement des prix à la consommation et un défaut de compétitivité. L’auteur rappelle aussi que la localisation dans l’espace est un facteur crucial du développement économique. La distance importante entre les territoires et les grands marchés internationaux (figure ci-dessous) s’accompagne de coûts d’approche élevés (frais supplémentaires liés au conditionnement, au transport, etc.). De plus, leur insularité empêche les entreprises locales de bénéficier d’effets d’agglomération tels que la densité d’emplois, la présence d’une main-d’œuvre spécialisée ou l’existence d’infrastructures modernes. Cette limite est par exemple visible dans la quasi-absence d’effort de recherche des entreprises ultramarines.
Le système de transport global (terrestre, maritime et aérien)
Source : Géographie, économie, société
Lecture : en vert, le transport routier ; en bleu, les routes maritimes ; en rouge, les réseaux aériens.
De plus, pour J.-F. Hoarau, en économie, « l’histoire compte ». Les structures sociales issues des institutions coloniales traversent les âges et se manifestent dans la prévalence d’une logique « exportations de produits agricoles tropicaux contre importations de produits manufacturés » (figure ci-dessous).
Décomposition (en %) du commerce extérieur des DROM, en 2018
Source : Géographie, économie, société
Enfin, un troisième ensemble de facteurs touche à l’étroitesse économique des marchés et au défaut de concurrence associé. La faiblesse de la demande limite le nombre d’entreprises capables de desservir de manière efficace le marché local, favorisant des situations de monopole et d’oligopole qui concernent les industries de transformation locale comme la grande distribution. D'après l'auteur, l’intensité concurrentielle pourrait être renforcée et la recherche de compétitivité des entreprises resserrée sur le commerce extérieur à l’échelle régionale, par exemple au moyen du développement d’une industrie agroalimentaire de haute qualité, tournée vers les petits marchés touristiques « de luxe » avoisinants.
Nathalie Kakpo, Centre d’études et de prospective
Source : Géographie, économie, société
10:40 Publié dans 4. Politiques publiques, Alimentation et consommation, Mondialisation et international, Production et marchés, Territoires | Lien permanent | Tags : vie chère, outre-mer, consommation | Imprimer | |