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16/09/2021

Quelle influence des bilans mensuels de l’USDA sur les prix du maïs ?

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Les chercheurs de l’Economic Research Service (ERS) du ministère américain de l’agriculture (USDA) ont étudié l’effet sur le prix à terme du maïs de leurs bilans mensuels sur les grandes cultures (World Agricultural Supply and Demand Estimates, WASDE). Ces bilans participent, par leurs estimations, à l’information des opérateurs sur les saisons en cours, et donc potentiellement à la formation des prix. Les prévisions de production du maïs sont d’autant plus sensibles que les États-Unis sont, de loin, les premiers producteurs mondiaux. La publication du WASDE repose sur un dispositif public de collecte et de traitement de données couvrant l’ensemble des zones de production américaines. Récemment, l’ERS a développé une nouvelle approche des effets du WASDE sur le prix à terme du maïs à Chicago, pour voir comment les marchés intègrent ces informations, y compris en variations intrajournalières.

Ils ont ainsi analysé différents indicateurs quotidiens du marché à terme, pour les années 1992 à 2017 et par mois de publication : prix à l’ouverture, à la fermeture, minima et maxima atteints sur la journée, selon le jour de publication du WASDE, évolution des prévisions de récolte, prix antérieurs constatés. Théoriquement, sur un marché parfaitement efficient, ces prix devraient rassembler l’ensemble des informations et anticipations, et la publication des bilans mensuels être sans effet.

Leur analyse révèle que cette publication a un impact faible mais significatif sur les prix, car elle délivre des informations inédites et pertinentes, en rapprochant le prix à terme du prix final constaté lors de la récolte. Les premières estimations de la saison ont tendance à accroître la volatilité intrajournalière, reflétant les incertitudes sur les rendements, alors qu’elles la réduisent à l’approche des récoltes, où l’information est consolidée.

Ce travail très détaillé confirme l’intérêt de ce type de publications ministérielles. Alors même que les informations circulent aujourd’hui largement, elles contribuent toujours à un ajustement progressif des marchés. Des analyses complémentaires, impliquant les prix et prévisions sur d’autres produits agricoles, permettraient de mieux prendre en compte les effets croisés et corrélations entre marchés.

Jean-Noël Depeyrot, Centre d’études et de prospective

Source : USDA ERS

 

 

12:48 Publié dans 3. Prévision, Mondialisation et international, Production et marchés | Lien permanent | Tags : usda, maïs, prix, impact, etats-unis |  Imprimer | | | | |  Facebook

Mieux encadrer l'utilisation des indications géographiques dans des produits transformés

L'Association des régions européennes des produits d'origine (AREPO) a mené une étude sur l'utilisation d'indications géographiques (IG) de l'Union comme ingrédients dans des produits transformés. Pour cela, elle a d'abord analysé les législations et principes directeurs aux niveaux européen et nationaux (figure ci-dessous). Elle observe que l'UE n'a pas adopté de législation contraignante en matière d'étiquetage des ingrédients issus de produits sous IG, mais a fourni des lignes directrices volontaires, induisant des pratiques diverses. Le rapport détaille le cas de l'Italie, seul État membre à avoir mis en place, dès 2004, une réglementation nationale sur l'étiquetage des produits transformés contenant une IG.

Lignes directrices de l'UE sur l'étiquetage des denrées alimentaires utilisant des Appellations d’origine protégée (AOP) ou des Indications d'origine protégée (IGP) comme ingrédients

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Source : AREPO, Commission européenne

L'AREPO a ensuite analysé les retours d'enquête de cent groupements de producteurs d'IG, dont 44 de France et 34 d'Italie. Ce travail a permis d'identifier les bonnes pratiques, les problèmes, les avantages et inconvénients liés à l'utilisation d'un ingrédient issu d'une IG dans un produit transformé. L'enquête a mis en évidence, chez les groupements de producteurs, l'existence i) de lignes directrices qui prévoient l’utilisation de l’IG (31 % des cas), ii) de procédures d'autorisation (35 %) et iii) de contrôles (33 %). 22 % des répondants ont déclaré avoir déjà rencontré un problème avec une utilisation illicite de leur IG dans un produit transformé (ex. : utilisation et mention incorrectes du nom de l'indication). Enfin, pour 69 %, l'utilisation de leur IG dans un produit transformé présente des avantages (promotion des IG, diversification des débouchés, valorisation des produits transformés par la différenciation et par une meilleure traçabilité), tandis que seuls 3 % considèrent qu'il n'y a pas d'avantage voire qu'il y aurait un risque (ex. dommages à la réputation si le produit final n'est pas de bonne qualité, confusion entre le produit transformé et le produit sous IG). À l'occasion de cette enquête, les groupements de producteurs français ont signalé le manque de réglementation, qui empêche de mettre en place des contrôles et une surveillance efficaces.

Sur ces bases, les auteurs recommandent d'adopter une réglementation contraignante au niveau européen (exigence de haute qualité du produit final, mise en place d'un système de contrôle), et d'habiliter les groupements de producteurs d'IG à encadrer les conditions dans lesquelles leur indication peut être utilisée et mentionnée sur l'étiquette du produit transformé final.

Vincent Hébrail-Muet, Centre d'études et de prospective

Source : Association des régions européennes des produits d'origine

Antoine Bernard de Raymond, Delphine Thivet (dir.), Un monde sans faim, Presses de Sciences Po, 2021, 304 pages

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Cet ouvrage étudie, en neuf chapitres, les transformations de la gouvernance alimentaire mondiale après les « émeutes de la faim » de 2007-2008. Largement inattendus, ces épisodes avaient replacé l’agriculture et les enjeux de production au premier plan de l’agenda international, relançant la réflexion sur l’avenir des systèmes alimentaires et enclenchant un ensemble de réajustements institutionnels.

Leurs effets de long terme sont considérables, mais paradoxaux. Comme le soulignent E. Fouilleux, N. Bricas et A. Alpha dans leur contribution, il est apparu en effet assez vite que l’envolée des prix « n’avait pas pour origine une crise de la production », mais bien d’autres causes : pauvreté et inégalités, modèles de consommation, etc. Des visions alternatives s’affirmaient, qui mettaient l’accent sur la transformation des régimes alimentaires, ou sur la nutrition. Pourtant, rapidement, différents acteurs (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, Banque mondiale, firmes multinationales, etc.) réitérèrent le « mantra » des « révolutions vertes » et de la « Global Food Security » : il faut produire plus pour nourrir 9 milliards de personnes en 2050.

Les outils de mesure de l’insécurité alimentaire, centrés sur la disponibilité et les quantités produites, ont contribué à refermer le débat. À partir de l’exemple de la réception de la prospective Agrimonde, V. Cardon et G. Tétart montrent ainsi que les modèles économiques au service des institutions internationales, comme le modèle Impact de l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires, tendent à écarter l’hypothèse d’une transformation des régimes alimentaires. Le chapitre consacré par A. Bernard de Raymond à la stratégie de compétitivité du Royaume-Uni permet également de souligner la contribution de la recherche scientifique à « la relance d’une vision productiviste (…) tentant néanmoins d’intégrer les enjeux sanitaires et environnementaux ».

Enfin, sur le plan institutionnel, le livre consacre des chapitres instructifs à la réforme du Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA), à l’alignement des « plateformes multi-acteurs » sur les engagements de responsabilité sociale et environnementale (RSE) des firmes multinationales, et à la problématique des « accaparements » fonciers. Sont aussi envisagées la constitutionnalisation du droit à l’alimentation en Inde et les stratégies de coordination de l’aide alimentaire.

Florent Bidaud, Centre d'études et de prospective

Lien : Presses de Sciences Po

Effets des engagements et pratiques des entreprises agroalimentaires belges en matière nutritionnelle

Publiée en août 2021, une étude évalue les engagements et pratiques des entreprises agroalimentaires belges en faveur de la prévention de l'obésité et de l'amélioration de la nutrition de la population. Elle a été conduite dans le cadre du projet BIA-Obesity (Business Impact Assessment on Obesity and Population Nutrition), développé par un réseau de chercheurs travaillant sur les environnements alimentaires dans une quarantaine de pays (INFORMAS).

Pour cette première application en Belgique, 31 entreprises ont été retenues, représentant 44 % de parts de marché pour les denrées pré-emballées, 50 % pour les boissons non alcoolisées, 49 % pour la grande distribution et 52 % pour la restauration rapide. Dans six domaines clés (figure ci-dessous), la transparence, l'exhaustivité et la spécificité des pratiques et engagements (recensés au 31/10/2020) ont été évaluées, en utilisant divers indicateurs et sources de données permettant le calcul d'un score sur 100. Par exemple, des photographies des produits présentant un Nutri-Score en face avant, prises en 2019, ont été utilisées pour le volet relatif à l'étiquetage nutritionnel.

Les six domaines évalués et leur pondération pour chaque secteur

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Source : Sciensano

Les résultats sont déclinés par entreprise, secteur et domaine. De manière générale, les meilleures performances concernent la stratégie alimentaire de la structure et les plus mauvaises l'accessibilité des produits. Si le score médian est de 35 %, il varie de 15 % pour la restauration rapide à 45 % pour les producteurs de denrées pré-emballées et de boissons non alcoolisées, et à 46 % pour les supermarchés. La figure ci-dessous présente le classement des entreprises.

Scores (totaux et par domaine) obtenus pour les entreprises étudiées à partir du BIA-Obesity

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Source : Sciensano

Lecture : en 1, la restauration rapide ; en 2, la grande distribution ; en 3, les producteurs de denrées pré-emballées et de boissons non alcoolisées. * : collaboration au processus (N=18) ; # : participation refusée (N=8) ; § : participation acceptée, mais contributions non reçues à temps (N=5) ; pour # et § : évaluation basée sur des informations disponibles publiquement.

Enfin, diverses pistes d'amélioration sont identifiées : mentionner le contenu énergétique (aliments, repas) sur les menus pour les fast-foods, élaborer une politique marketing détaillée applicable aux enfants, etc. Selon les auteures, dans un pays où un adulte sur deux et un adolescent sur 7 sont en surpoids ou obèses, et où un tiers des apports énergétiques provient de produits ultra-transformés, le rôle des entreprises et de l'évolution de leurs pratiques est déterminant. Cette étude a ainsi vocation à être régulièrement répliquée.

Julia Gassie, Centre d'études et de prospective

Source : Sciensano

15/09/2021

Restructuration du foncier agricole au Canada : perception par les agriculteurs et impacts sur les territoires ruraux

Au Canada, la structure des exploitations connaît deux tendances d'évolution : d'une part elles sont de plus en plus grandes et de moins en moins nombreuses ; d'autre part, une proportion croissante des terres agricoles est désormais détenue par des investisseurs institutionnels (fonds de pension et d'investissement), à qui les agriculteurs louent leurs parcelles. Dans le cadre d'une thèse en sociologie publiée récemment, une étudiante de l'université de Regina, M. Davidson, a analysé la façon dont les agriculteurs perçoivent ces tendances. Sa recherche porte sur l'État du Saskatchewan, où sont concentrés 40 % des terres cultivées du pays. Elle combine analyses statistiques et entretiens réalisés avec des exploitants.

La tendance à l'agrandissement, amorcée au début du XXe siècle, s'accélère depuis les années 1990. Elle s'avère plus complexe que le simple accroissement de la superficie moyenne des exploitations : disparition des structures de taille intermédiaire (100 à 1 000 ha) et augmentation de celles de grande et de petite dimensions ; extension par acquisition d'exploitations distantes et non plus adjonction de terres mitoyennes ; etc. Si les agriculteurs en déplorent les conséquences (dépopulation d'espaces ruraux déjà très faiblement peuplés, homogénéisation du paysage, disparition des haies et de la biodiversité associée, etc.), ils sont les premiers responsables de ce phénomène qu'ils considèrent comme inéluctable et nécessaire à la poursuite de leur activité.

L'acquisition de foncier par des investisseurs est une tendance plus récente (années 2000), mais qui connaît une accélération importante. Elle s'inscrit en partie dans le prolongement de la première : pour poursuivre leur agrandissement sans immobiliser trop de capitaux dans l'acquisition du foncier, nombre d'agriculteurs préfèrent désormais louer leurs terres à des investisseurs plutôt que de les acheter. Pour autant, là encore, les agriculteurs interrogés considèrent que cette évolution a des conséquences néfastes : augmentation des prix du foncier, loyers des terres élevés et qui sortent du territoire car versés à des agents économiques extérieurs à celui-ci, etc.

En conclusion, l'auteure considère que si ces deux tendances ont permis le développement de l'activité agricole, cela s'est fait au détriment de la vitalité, de la qualité de vie et de l'environnement des territoires concernés, si bien que ceux-ci tendent aujourd'hui à être réduits à leur fonction productive.

Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective

Source : université de Regina

L’Alimentarium

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Né en 1981, l’Alimentarium est une création de la Fondation Nestlé. Il comprend un musée localisé à Vevey (Suisse) et une plate-forme digitale, interconnectés et tous deux consacrés aux systèmes alimentaires. L'entité regroupe 25 équivalents temps plein et accueille 55 000 visiteurs par an en moyenne ; le site internet cumulait en 2020 deux millions de consultations.

Le musée offre une scénographie originale qui expose des pièces de la collection (outils agricoles, affiches, emballages, etc.) et des installations relayant des résultats de la recherche scientifique sur la production agricole, la transformation, la distribution, la consommation des denrées et la nutrition, dans une perspective historique. En matière d’élevage, les bornes interactives rappellent la naissance de l’assolement triennal et de la polyculture au Moyen-Âge ainsi que la recherche tous azimuts d’amélioration de la production au XVIIIe siècle, dont témoigne la systématisation de la sélection artificielle des espèces. Les contenus du musée reviennent aussi sur les débats que provoquent, au XXe siècle, le développement de l’ingénierie génétique, la spécialisation poussée des races choisies et la traçabilité des produits carnés.

Sur l’industrie agroalimentaire, on retiendra particulièrement les contenus sur la conservation et l’emballage des produits. Protecteur des denrées, celui-ci est aussi une interface entre le producteur et le consommateur, à une époque où les relations entre l’un et l’autre se distendent : « la boîte d’emballage, sa forme, ses couleurs et typographie, ont toujours raconté une histoire ». Sont enfin documentés les différents types de denrées et leur composition chimique, les processus métaboliques, la diversification de la demande alimentaire dans les pays très développés, sous l’effet des préoccupations environnementales et du soutien à la production locale qu’expriment certains consommateurs (les Appellations d’origine contrôlée sont décrites comme « garantes de qualité et d’authenticité »).

Le site web offre quant à lui des dossiers pédagogiques, podcasts et webséries dont certains sont destinés aux jeunes publics sur des sujets diversifiés : sécurité alimentaire ; histoire des régimes alimentaires ; définition, bénéfices et risques des OGM.

Tube digestif et neurones pour expliquer la nutrition au musée

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Source : Alimentarium

En 2020 et 2021, l’Alimentarium propose une exposition et des conférences sur le véganisme (voir une précédente brève). Mentionnant les débats sur les « faux fromages à la noix de cajou », qui agitent la Confédération depuis 2018, le musée relève que les fabricants ont associé leur préparation à l’image du « vrai fromage », dans un pays réputé pour son herbage, tout en se distanciant des exploitations animales.

Nathalie Kakpo, Centre d’études et de prospective

Lien : Alimentarium

Pastoralisme : parution d'un atlas mondial des parcours

Constitués de sept biomes parmi lesquels on trouve les « déserts », « prairies », « forêts », etc., sous différents climats, les parcours pastoraux couvrent, selon les auteurs, 54 % de la surface terrestre. En juillet 2021, un consortium de sept organisations, soutenu par le CGIAR et une entreprise privée espagnole (gmv), a publié un atlas (disponible dans des formats adaptés à la lecture en ligne et à l’impression) présentant leurs caractéristiques. Seize cartes permettent au lecteur de prendre connaissance de la couverture forestière, du type d’élevage pratiqué, du nombre de vertébrés menacés et de la productivité des terres dans les zones étudiées. Elles sont accompagnées de statistiques et de brèves descriptions des enjeux et de pistes de conservation de ces milieux, afin de sensibiliser le lecteur à la fragilité des parcours ainsi qu’à leur valeur économique et culturelle.

Répartition mondiale des zones de parcours (en couleurs)

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Source : Rangelands Atlas

Lecture : les parcours du Sahara servent à l'élevage de dromadaires et de petits ruminants (caprins ou ovins). Les couleurs sur le pourtour du Groenland correspondent à des parcours utilisés pour l'élevage de rennes.

Source : Rangelands Atlas

12:22 Publié dans Mondialisation et international, Production et marchés | Lien permanent | Tags : pastoralisme, parcours, atlas |  Imprimer | | | | |  Facebook

14/09/2021

L'Union européenne, acteur de premier plan des échanges mondiaux en micronutriments

Une équipe allemande de chercheurs a analysé les flux commerciaux liés à l'alimentation humaine et animale de l'Union européenne en fonction de leurs contenus en fer, zinc et vitamine A. Les premiers résultats ont été publiés récemment dans Ecological Economics. Pour ce faire, ils ont retracé, à partir des données sur le commerce international (FAO, 2018), les liens entre pays consommateurs et pays producteurs de matières premières, y compris pour les produits ayant subi des transformations. Les matrices offre/demande de matières premières agricoles ont ensuite été traduites en balance en micronutriments, en fonction de la teneur de chacune (figure ci-dessous).

Principaux flux d'échanges en fer, zinc et vitamine A portés par l'alimentation humaine et animale

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Source : Ecological Economics

En raison de sa dépendance aux échanges internationaux pour l'alimentation du bétail, l'UE est importatrice nette de fer et de zinc. Elle s'approvisionne, pour plus des trois quarts de ses besoins nets, auprès de pays à fort taux de malnutrition. À l'inverse, elle est exportatrice nette de vitamine A, en particulier au travers des denrées destinées aux pays en insécurité alimentaire. Ces résultats montrent le poids important de l'Union en matière de sécurité alimentaire globale.

Source : Ecological Economics

Du cultivateur au monde de la parfumerie : les pérégrinations des matières végétales naturelles

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L’émission 7 milliards de voisins (RFI) du 1er septembre dernier était consacrée à la production, la transformation et la commercialisation des matières végétales utilisées dans la parfumerie. Les avancées de la chimie, au XIXe siècle, ont révolutionné la fabrication du parfum en substituant aux composants naturels des molécules de synthèse aux coûts de production inférieurs. Les premiers conservent néanmoins un intérêt pour la parfumerie haut de gamme, qui y voit un facteur d’innovation et de distinction. Le cas de la vanille de Madagascar, où la succession d'événements climatiques extrêmes et de mauvaises floraisons a entraîné de fortes variations de prix (de 60 à 600 dollars le kilo pour la gousse), illustre toutefois la difficulté des planteurs à accéder à un revenu jugé « décent ». À l’opposé se trouve le vétiver haïtien, l’une des seules productions locales transformées sur place et exportées au bénéfice de 50 000 producteurs, mais aussi le benjoin laotien, produit de « l’agroforesterie aromatique ». Enfin, du niveau de revenu dépend la conservation des savoir-faire traditionnels (extraction, gemmage, pressage, etc.), garants de la production.

Source : Radio France internationale

Viande in vitro et impression 3-D de bœuf wagyu par une équipe japonaise

Paru dans Nature communications, un article relate l’assemblage sous forme de « steak », par une équipe de chercheurs de l’université d’Osaka, de différents types de cellules cultivées in vitro de bœuf wagyu (myocites, adipocytes, capillaires). Le procédé recourt à une impression 3-D intégrant un « bain » de gel tendineux (tendon-gel integrated bioprinting), mais les fibres obtenues ont ensuite été assemblées manuellement. Reproduire la structure persillée du bœuf japonais constitue en soi une performance. L’article livre à ce sujet d’intéressants aperçus sur les méthodes et les échelles de réalisation aujourd’hui accessibles : l'obtention d'un « steak » de 5 mm de diamètre et de 10 mm de long a nécessité la construction « de 72 fibres comprenant 42 muscles, 28 tissus adipeux et 2 capillaires sanguins ».

Vue d’ensemble du procédé

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Source : Nature communications

Lecture : a) structure d’une tranche de bœuf wagyu (« steak ») ; b) schéma de construction du prototype à partir de cultures de cellules in vitro. Sigles : FACS - fluorescence activated cell sorting ; SVF - stromal vascular fraction ; bSCs - bovine satellite cells ; bADSCs - bovine adipose-derived stem cells.

Source : Nature Communications

13/09/2021

Un outil de prévention des menaces agroterroristes liées à l'élevage

Un article publié dans One Health Outlook s'intéresse aux menaces agroterroristes liées à l'élevage. L'introduction intentionnelle de maladies animales peut permettre à un groupe terroriste de s'en prendre à un pays, de façon plus simple qu'avec des armes biologiques à destination humaine, tout en ayant des effets importants sur la santé humaine (zoonoses) ou l'économie (épizooties à forte morbidité). C'est pourquoi l'Organisation internationale pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE) et INTERPOL ont souhaité élaborer un outil de surveillance de cette forme d'action criminelle.

L'outil d'évaluation de la surveillance des maladies animales SET (Surveillance Evaluation Tool), développé en 2017 par la FAO, permettait déjà d'évaluer, à partir de 90 indicateurs, la capacité du service de surveillance d'un pays à faire face à une crise sanitaire animale. À partir du SET, les trois organisations ont développé un outil plus spécifique (finalisé courant 2021), permettant d'évaluer, en association avec des juristes (accès à certaines données, réglementation sur les libertés publiques, etc.), la capacité d'un pays à détecter une menace d'agroterrorisme liée à l'élevage. Il comporte 32 indicateurs, répartis en sept catégories, telles que « l'organisation nationale de l'épidémiosurveillance » et la « présence de laboratoires compétents ». Ce module permet au pays d'évaluer ses capacités et suggère, le cas échéant, un plan de mise à niveau à court, moyen et long termes sous forme d'un diagramme-radar (figure).

Exemple de résultat graphique de l'évaluation des capacités d'un pays fictif à détecter une menace

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Source : One Health Outlook

Lecture : le radar montre les capacités du pays à faire face à un cas d'agroterrorisme à partir de 32 indicateurs regroupés en sept catégories (organisation institutionnelle, laboratoires, épidémiosurveillance, gestion du risque, traitement des données, ressources humaines, évaluation). Plus le point est proche de la périphérie, meilleure est la capacité du pays dans le domaine concerné.

Source : One Health Outlook

État des lieux et défis pour la recherche sur la canne à sucre

En juin 2021 s'est tenue en Inde (Coimbatore) une conférence internationale consacrée à la recherche sur la canne à sucre, organisée par le Sugarcane Breeding Institute. Réunissant de nombreuses contributions, les actes qui viennent de sortir brossent un panorama des connaissances actuelles et des défis : amélioration des plantes, techniques de production, gestion des maladies et des ravageurs, mécanisation des systèmes de production, etc. Cultivée dans 103 pays, avec le Brésil, l'Inde et la Chine en tête, la canne à sucre occupe environ 25,3 millions d'hectares, pour une production annuelle d'environ 1,9 milliard de tonnes. Parmi les défis partagés au niveau mondial, figure l'amélioration des rendements : selon l'une des contributions, en 80 ans, la forte progression de la production a été liée à l'accroissement des surfaces, alors que les rendements ont dorénavant atteint un plateau. Dans ce cas, comme dans d'autres, les technologies génétiques présentent, pour les intervenants, des opportunités intéressantes. La diversification des valorisations (bioénergie, biocarburants) est un autre défi important, en particulier pour les entreprises de transformation.

Source : Sugarcane Breeding Institute

12/07/2021

Contribution des indications géographiques au maintien de l’activité agricole : une évaluation à partir d'une expérience naturelle

Parce qu’elles permettent aux agriculteurs de mieux valoriser leurs productions, les Indications géographiques (IG) sont un outil de maintien de l’agriculture dans les zones concernées. Dans un article publié dans la revue Food Policy, des chercheurs japonais ont voulu vérifier cette hypothèse. Pour cela, ils ont évalué l’impact de l’IG « Riz d’Uonoma » sur l’évolution du nombre d’exploitations et de la surface agricole utile (SAU) dans la zone d’appellation.

Pour isoler l’effet propre de l’IG, les chercheurs ont comparé la dynamique des variables étudiées (nombre d’exploitations et SAU) dans deux communes mitoyennes, l’une étant entrée dans le périmètre de l’IG en 2005 à la suite d'une réorganisation administrative (fusion avec une commune faisant partie du territoire de l'IG), l’autre ayant toujours été en dehors de celui-ci. Cette situation d’expérimentation naturelle a permis d’effectuer des comparaisons toutes choses égales par ailleurs, en contrôlant les facteurs dits « confondants » car susceptibles d’influer eux aussi sur les variables observées (conditions pédo-climatiques et historiques par exemple).

L’analyse en double différence montre que depuis 2005, le nombre d’exploitations et la SAU diminuent significativement moins vite dans la commune faisant partie du territoire de l’IG. Ceci démontre un effet propre positif de l’IG sur ces variables.

Évolution de la SAU et du nombre d’exploitations dans les deux municipalités

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Source : Food Policy

Pour les auteurs, cette moindre diminution s’explique surtout par le fait que, dans le territoire de l’IG, les agriculteurs restent en activité plus longtemps, y compris alors qu’ils pourraient partir en retraite, du fait de la meilleure valorisation économique de leur production. En revanche, aucun effet significatif sur l’installation de nouveaux exploitants n’a pu être mis en évidence. Il en résulte un vieillissement de la population agricole, qui pourrait à plus long terme compromettre le maintien de l’agriculture dans la zone d’appellation.

Au-delà de ces éléments relatifs aux IG, l’intérêt de ce travail tient notamment à la méthode employée, qui pourrait être utilisée pour l’évaluation d’autres dispositifs publics.

Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective

Source : Food Policy

09/07/2021

Analyse de la répartition de la dépense alimentaire des consommateurs

Dans un article paru au mois de juin dans Nature Food, un consortium de chercheurs issus de l’université Cornell, de l’université de Copenhague et du ministère de l’Agriculture des États-Unis (USDA) présente des travaux sur la dépense alimentaire des consommateurs. Sont calculées la part de recette revenant à l’agriculture et celle rétribuant l’ensemble des autres secteurs (transport, stockage, transformation, vente en gros et au détail, etc.), toutes deux destinées à couvrir les charges et à constituer le résultat des entreprises. Les travaux s’inspirent du food dollar présenté chaque année aux États-Unis par l’USDA, comme exigé par l’Agricultural Marketing Act de 1946.

Le travail couvre 61 pays, à revenu intermédiaire ou élevé, qui regroupent environ 70 % de la population mondiale et génèrent 90 % du revenu national brut mondial en 2017. Les tableaux entrées-sorties nationaux, publiés par l’OCDE pour la période 2005-2015, sont mobilisés. Les intra-consommations directes et indirectes ne sont pas prises en compte dans l’analyse (ex. : semences de blé pour produire du blé, maïs dans l’alimentation animale).

Les auteurs en tirent de nombreux constats dont celui, déjà partagé, de la faible part de la dépense revenant à l’agriculture (moins d’un quart en moyenne). Néanmoins, ils précisent que la diminution de cette portion s’inscrit, le plus souvent, dans un contexte de hausse de la production et des revenus agricoles. Ils prouvent statistiquement que sa baisse est liée à la hausse des revenus des consommateurs. Ils supposent alors que l’élévation de leur budget augmenterait leur consentement à payer pour des attributs non agricoles des produits alimentaires (apparence, sécurité, conservation, temps de préparation limité, etc.). Ils suggèrent que cette acceptation serait encore renforcée par la concentration des consommateurs dans des zones d’habitation éloignées des bassins de production. Dans ce contexte de revenus élevés, la demande alimentaire étant relativement peu élastique au prix, les gains de productivité de l’agriculture tendent à entraîner des baisses de prix. Les auteurs évoquent également des réflexions engagées pour le déploiement de cette méthode dans des analyses plus larges, traitant d'aspects économiques (emploi notamment) et environnementaux.

Amandine Hourt, Centre d'études et de prospective

Source : Nature Food

08/07/2021

Florent Quellier (dir.), Histoire de l’alimentation. De la préhistoire à nos jours, Paris, Belin, 2020, 800 p.

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Une histoire complète de l'alimentation est toujours une aventure éditoriale : les éditions Belin ont publié récemment dans la collection Références un ouvrage sur ce thème. Sous la direction de Florent Quellier, professeur d'histoire moderne et spécialiste du sujet, une dizaine d'auteurs contribuent à ce livre qui reprend le cahier des charges de la collection : pouvoir être lu par un large public sans concession à la qualité scientifique. Il comprend de nombreuses illustrations rendant la lecture agréable, une rubrique « Clio aux fourneaux » avec des recettes d'époque qui remplace les « Ateliers de l’historien » des autres ouvrages de la collection.

La table des matières révèle deux entorses à l'universalisme du propos. L'une est d'ordre géographique : comme souvent, cette histoire est celle de notre espace occidental, le reste du monde étant seulement convoqué lorsqu'il est traité d'importations exotiques comme lors des Grandes découvertes du XVIe siècle. L’autre, totalement assumée par le coordinateur, est d'ordre chronologique : part belle est faite aux époques les plus anciennes, le dernier chapitre se terminant en 1980, l'histoire récente étant brièvement esquissée dans les 5 pages de conclusion. Le livre se divise en trois parties chronologiques de longueurs inégales : la préhistoire et l'Antiquité occupent la moitié de l'ouvrage, tandis que 200 pages sont consacrées à l'époque médiévale et que les mondes moderne et contemporain figurent dans les 200 dernières.

Le prisme choisi montre en quoi les habitudes alimentaires reflètent des questions de civilisation, de culture, voire de modes de vie. Ainsi, les banquets de la civilisation mésopotamienne plaçaient les convives dans la pièce et leur destinaient des mets différenciés selon leur position sociale (voir sur ce même sujet l'exposition en cours au Louvre Lens et une précédente brève). Bien avant notre époque, les philosophes grecs se posaient beaucoup de questions sur le carnisme et certains recommandaient même un régime végétarien comme hygiène de vie. À l'opposé, les entraîneurs grecs ont préconisé, les premiers, une diététique athlétique hyperprotéique. L'approvisionnement alimentaire de la ville de Rome et des métropoles où les Romains étaient installés (Alexandrie, Byzance, Carthage, etc.) reposait sur le concept très moderne d'association de circuits courts et d'une logistique mondialisée (à l'échelle de la mare nostrum). Ce livre est donc un bon moyen de redécouvrir comment nos ancêtres ont (ou pas) répondu à des questions très actuelles.

Franck Bourdy, Centre d'études et de prospective

Lien : Belin Éditeur