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15/04/2022

Des dynamiques entrepreneuriales agricoles portées par des installations d'étrangers

Dans le cadre d'un projet de recherche consacré aux campagnes françaises dans les migrations internationales, la Revue européenne de géographie a publié un article sur les présences étrangères dans les territoires ruraux du sud-ouest de la France. Il évalue la contribution de ces migrations à la diversification sociale et économique de ces espaces.

En croisant travaux de terrain et analyses des recensements de la population depuis 1968, les auteurs montrent que si les migrations internationales concernent essentiellement les espaces urbains, elles ne sont pas négligeables dans certains territoires ruraux : zones frontalières de l'Est, lieux de villégiature de l'arrière-pays méditerranéen, grande périphérie de l’Île-de-France, et sud-ouest du pays (voir figure). Ainsi, alors que les habitants de nationalité étrangère ne représentaient que 3 % des populations vivant en milieu rural (contre 6,5 % au niveau national), ce chiffre atteignait 6,7 % dans le Périgord Vert en 2015.

Répartition des habitants de nationalité étrangère dans les espaces ruraux en France métropolitaine

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Source : European Journal of Geography

Dans cette zone, les auteurs montrent que cette population étrangère est porteuse d'une dynamique d'installation de nouveaux agriculteurs. Sur ce territoire peu dense, le choix d'une activité agricole représente souvent un projet de vie en rupture, au moins partielle, avec la vie citadine et leurs activités professionnelles antérieures. Les auteurs identifient deux types différents d'exploitations qui, dans les deux cas, essaiment à partir d'une exploitation-mère.

Dans le premier cas, les porteurs de projet (de nombreux Britanniques) ont créé des exploitations de maraîchage sur des terrains de faibles superficies (2 ou 3 ha), qu'ils ont achetés dans cette région historiquement tournée vers l'élevage. Ces exploitations sont à l'origine d'innovations commerciales (collectifs de producteurs, vente en cagettes, etc.) combinées à un ancrage local (implication dans des marchés paysans historiquement bien implantés). Le second modèle repose sur des Néerlandais, installés en élevage laitier, attirés par un foncier accessible et des opportunités de reprise. Ce sont plutôt des exploitations de grande taille, insérées dans la filière laitière locale, insérées dans un réseau d'échanges et de formations avec les Pays-Bas. Ces néo-paysans étrangers s'installent quasiment tous en agriculture biologique, confortant une dynamique locale majeure.

Jean-Noël Depeyrot, Centre d'études et de prospective

Source : European Journal of Geography

18/11/2021

Durabilité et résilience du secteur agricole, à différentes échelles

La durabilité et la résilience du secteur agricole sont au cœur de plusieurs travaux de recherche récents. Des chercheurs lituaniens ont ainsi repris, dans Land Use Policy, les définitions respectives de ces deux concepts, et développé des indicateurs dédiés, à partir d'une riche revue de littérature.

Si la « durabilité » comporte classiquement trois dimensions (économique, sociale, environnementale), la « résilience » est vue, selon les approches théoriques, comme un prérequis ou un fondement de la durabilité, parfois comme une de ses composantes, ou encore comme une notion parallèle, dynamique plutôt que statique. Repartant de définitions empiriques, les auteurs ont compilé de multiples indicateurs pour caractériser les trois dimensions de la durabilité et la résilience économique du secteur agricole des pays baltes et scandinaves. Cette dernière est notamment approchée par le taux de marge du secteur, la volatilité du chiffre d'affaires et la diversification des exportations (pays partenaires, produits). La dimension sociale de la durabilité repose, quant à elle, sur la place de la main-d’œuvre familiale, le niveau relatif des salaires agricoles, la situation des femmes, la démographie des exploitants, etc. Les différents indicateurs sont calculés sur une quinzaine d'années, pour faire ressortir les différences et évolutions nationales (figures ci-dessous).

Indicateurs de durabilité (en haut) et de résilience économique (en bas) des secteurs agricoles de 2004 à 2017

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Source : Land Use Policy

Il ressort de ces comparaisons empiriques que les deux concepts sont bel et bien indépendants : les indicateurs sont peu corrélés, avec des dynamiques (la résilience étant beaucoup plus sensible au contexte économique) et des performances relatives des pays très différentes. La résilience mérite donc d'être étudiée en tant que telle. Si les auteurs synthétisent la littérature et les indicateurs existants, leur approche de la résilience reste macro-économique et peut donc cacher des évolutions fines plus complexes.

Dans un autre article, également récent, des chercheurs néerlandais ont analysé la résilience à l'échelle des exploitations agricoles, grâce aux données du Farm accountancy data network (FADN, Réseau d’information comptable agricole-Rica en France). Ils la définissent selon trois dimensions des exploitations : robustesse (en réponse à des chocs), adaptabilité (évolution de la composition du résultat économique) et transformation profonde (introduction ou suppression d'ateliers d'élevage, agritourisme, conversion à l'agriculture biologique). La résilience est cette fois analysée pour différents types d'exploitations, dans neuf pays européens, dont la France. Les auteurs déclinent les indicateurs au niveau régional et montrent que les aides découplées affectent négativement la robustesse des exploitations, alors que les aides au développement rural ont un effet positif.

Ces deux approches complémentaires, macro et micro-économiques, devraient contribuer, grâce à des définitions claires et des indicateurs reproductibles, à clarifier et objectiver la notion de résilience, trop souvent invoquée de façon approximative.

Jean-Noël Depeyrot, Centre d'études et de prospective

Sources : Land Use Policy ; European Review of Agricultural Economics

15/09/2021

Restructuration du foncier agricole au Canada : perception par les agriculteurs et impacts sur les territoires ruraux

Au Canada, la structure des exploitations connaît deux tendances d'évolution : d'une part elles sont de plus en plus grandes et de moins en moins nombreuses ; d'autre part, une proportion croissante des terres agricoles est désormais détenue par des investisseurs institutionnels (fonds de pension et d'investissement), à qui les agriculteurs louent leurs parcelles. Dans le cadre d'une thèse en sociologie publiée récemment, une étudiante de l'université de Regina, M. Davidson, a analysé la façon dont les agriculteurs perçoivent ces tendances. Sa recherche porte sur l'État du Saskatchewan, où sont concentrés 40 % des terres cultivées du pays. Elle combine analyses statistiques et entretiens réalisés avec des exploitants.

La tendance à l'agrandissement, amorcée au début du XXe siècle, s'accélère depuis les années 1990. Elle s'avère plus complexe que le simple accroissement de la superficie moyenne des exploitations : disparition des structures de taille intermédiaire (100 à 1 000 ha) et augmentation de celles de grande et de petite dimensions ; extension par acquisition d'exploitations distantes et non plus adjonction de terres mitoyennes ; etc. Si les agriculteurs en déplorent les conséquences (dépopulation d'espaces ruraux déjà très faiblement peuplés, homogénéisation du paysage, disparition des haies et de la biodiversité associée, etc.), ils sont les premiers responsables de ce phénomène qu'ils considèrent comme inéluctable et nécessaire à la poursuite de leur activité.

L'acquisition de foncier par des investisseurs est une tendance plus récente (années 2000), mais qui connaît une accélération importante. Elle s'inscrit en partie dans le prolongement de la première : pour poursuivre leur agrandissement sans immobiliser trop de capitaux dans l'acquisition du foncier, nombre d'agriculteurs préfèrent désormais louer leurs terres à des investisseurs plutôt que de les acheter. Pour autant, là encore, les agriculteurs interrogés considèrent que cette évolution a des conséquences néfastes : augmentation des prix du foncier, loyers des terres élevés et qui sortent du territoire car versés à des agents économiques extérieurs à celui-ci, etc.

En conclusion, l'auteure considère que si ces deux tendances ont permis le développement de l'activité agricole, cela s'est fait au détriment de la vitalité, de la qualité de vie et de l'environnement des territoires concernés, si bien que ceux-ci tendent aujourd'hui à être réduits à leur fonction productive.

Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective

Source : université de Regina

09/07/2021

Simulation de scénarios pour la prochaine PAC et de leurs effets sur les revenus des exploitations agricoles françaises

Une équipe de chercheurs d'INRAE a simulé différents scénarios d'évolution de la Politique agricole commune (PAC), à l'échelle des exploitations, pour analyser les effets directs des changements de la PAC sur les revenus courants avant impôt (RCAI) des structures agricoles françaises. Ce travail, publié dans un working paper très détaillé, vise à alimenter les réflexions et négociations en cours, en proposant une première quantification de plusieurs options portées par le débat public. Le rapport revient, à partir des données du Réseau d'information comptable agricole (Rica), pour la dernière décennie, sur la sensibilité des revenus aux aides de la PAC selon la taille et l'orientation technico-économique (OTEX, voir figure) des exploitations. Il développe ensuite des micro-simulations sur des options redistributives, allant d'une convergence interne intégrale des droits à paiements à une aide spécifique aux petites exploitations. Des options environnementales sont également étudiées : renforcement des mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC) et du soutien à l'agriculture biologique ; mise en place d’un éco-régime redirigeant 25 % du premier pilier vers le soutien aux prairies permanentes et à la réduction des produits phytosanitaires.

Poids des différentes catégories d’aides directes dans les exploitations agricoles françaises, par OTEX en 2019 (en %)

pac 1 2.JPG

Source : INRAE

Lecture : codes des OTEX (abscisses) : 1 500 : céréales et oléo-protéagineux ; 1 600 : grandes cultures ; 3 500 : viticulture ; 4 500 : bovins-lait ; 4 600 : bovins-viande ; 4 700 : mixte bovins-lait/bovins-viande ; 4 813 : ovins-caprins ; 6 184 : polyculture et polyélevage ; total : ensemble des exploitations agricoles (y compris les OTEX non représentées dans la figure).

L'impact direct de chaque scénario sur le RCAI des exploitations est détaillé selon leur taille et leur OTEX, proposant une première quantification des enjeux, à structures de productions et de prix constantes (toutes choses égales par ailleurs). Ainsi, l'achèvement de la convergence interne du paiement de base par hectare, déjà bien avancée, aboutirait à un montant unifié de l'aide à 114 €/ha pour toutes les exploitations. Ceci induirait une redistribution favorable aux exploitations de bovins-viande (+13 % de RCAI) et d’ovins-caprins (+7 %), et quasi-neutre pour les exploitations spécialisées en bovins-lait. Les exploitations céréalières seraient, en moyenne, impactées négativement (-6 %). Parmi les nombreux points mis en évidence, on note aussi que l'incitation financière à contractualiser des MAEC est d'autant plus importante que l'enveloppe budgétaire qui leur est réservée fait l'objet d'un prélèvement important sur l'enveloppe du premier pilier.

Jean-Noël Depeyrot, Centre d'études et de prospective

Source : INRAE – Working Paper SMART-LERECO

05/07/2021

La situation économique et financière des coopératives polyvalentes en 2019/2020 : des difficultés antérieures à la crise de la Covid-19

En mai 2021, l’Observatoire financier des entreprises agroalimentaires du Crédit Agricole consacre son analyse aux coopératives polyvalentes. Exerçant dans de multiples filières, ces entreprises génèrent 40 % de leur chiffre d’affaires « à l’amont » (collecte et commercialisation des productions agricoles, fourniture de produits et de services) et 60 % « à l’aval » (transformation puis commercialisation de produits transformés). La diversité des situations des structures étudiées est grande et dépend de leur taille et secteur d’activité. En 2019/2020, le chiffre d’affaires des entreprises de l’échantillon est de 22,3 milliards d’euros. Leur rentabilité se stabilise, mais elle est inférieure à celle des coopératives spécialisées. Leur résultat net est très dégradé et leurs investissements sont insuffisants et moindres que ceux de l’ensemble du secteur agroalimentaire (3 % du chiffre d’affaires contre 5 %). Pour les auteurs, cela pourrait entraîner à terme des rapprochements ou des fusions. Le Crédit Agricole publie régulièrement des analyses économiques et financières : le numéro de juin 2021 est ainsi dédié aux métiers des grains (meunerie, boulangerie-viennoiserie-pâtisserie, etc.).

Source : Observatoire financier des entreprises agroalimentaires, Crédit Agricole S.A.

08/06/2021

Typologie des exploitations agricoles dans le monde : des disparités géographiques marquées

Afin de suivre l'évolution de l'agriculture dans le monde, un article de World Development propose une analyse des derniers recensements agricoles disponibles à partir des déclarations de 179 pays. Les auteurs rappellent que ceux-ci ne sont pas tenus de suivre les recommandations de l'Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), pour collecter les données, ce qui peut entraîner des biais dans les résultats (ex. recensement des fermes familiales uniquement et non de toutes les exploitations comme préconisé par la FAO).

608 millions d'exploitations agricoles sont recensés dans le monde. 84 % d'entre elles font moins de 2 ha et assurent 35 % de la production en valeur. Ces petites fermes ne doivent pas être confondues avec les exploitations familiales, qui représentent 90 % des structures et 80 % de la production. Pour les auteurs, l'atteinte des Objectifs de développement durable (ODD) passera par un ciblage adéquat des politiques en fonction des types d'exploitations.

Part de la valeur produite par les petites exploitations (moins de 2 ha), en fonction du revenu des pays et de leur localisation géographique

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Source : World Development

Lecture : dans l'ordre, tous pays et régions, pays à faible revenu, pays à revenu moyen inférieur (incluant l'Inde et le Nigeria), pays à revenu moyen supérieur (Brésil et Chine inclus), pays à haut revenu ; Asie de l'Est et Pacifique (hors Chine), Chine, Europe et Asie centrale, Amérique latine et Caraïbes (Brésil exclu), Brésil, Moyen-Orient et Afrique du Nord, Asie du Sud (Inde exclue), Inde, Afrique subsaharienne (Nigeria exclu), Nigeria.

Source : World Development

17/05/2021

Le positionnement toujours spécifique des femmes dans les exploitations agricoles

La revue Travail, genre et sociétés consacre le dossier de son dernier numéro aux agricultrices, ce qui est l'occasion de revenir, à l'aide d'approches ciblées, sur certaines des évolutions récentes intervenues (ou pas) depuis les dernières modifications de statut. Ainsi, en 2015, la transparence des GAEC a été appliquée aux groupements entre conjoints, ces derniers étant permis depuis 2010.

Le dossier s'ouvre par un entretien avec la sociologue Rose-Marie Lagrave, qui a largement participé à l'affirmation d'un courant de recherche sur les femmes en agriculture. Ces dernières étaient en effet, selon elle, « invisibilisées » sur les plans statistique, professionnel et social. Si des progrès ont été accomplis au fil des années, avec des avancées majeures en matière de droits sociaux (retraite, formation, accidents du travail, etc.), au cours des années 2000, les recherches sur l'activité des femmes en agriculture, leur positionnement et leurs trajectoires professionnelles restent encore peu nombreuses. De même, en dépit des combats menés pour une meilleure reconnaissance professionnelle et sociale, elles sont restées en marge des mouvements féministes, pour lesquels elles symbolisaient l'adhésion à un modèle patriarcal inégalitaire.

De son côté, Alexandre Guérillot a mené une enquête auprès de plus de 1 200 femmes, exploitantes agricoles en bio et exerçant sous différents statuts : co-exploitantes, associées, cheffes, salariées sur l'exploitation familiale, etc. Il montre qu'elles sont encore souvent cantonnées à des fonctions « féminines » : administration, soins des animaux, transformation, vente et communication, etc. Pourtant elles sont nombreuses (un quart environ) à souhaiter exercer des fonctions typiquement « agricoles », comme la conduite des engins ou à vouloir peser sur les décisions prises. Plus significatif encore, les trois quarts des répondantes souhaiteraient réduire les tâches qui leur incombent. Dans l'ensemble, les représentations comme les places assignées restent fortement genrées en agriculture.

À partir de l'analyse, en parallèle, des trajectoires parentales et professionnelles d'une cinquantaine de cheffes co-exploitantes en couple, Clémentine Comer met en évidence l'importance de l'investissement dans la maternité et dans les tâches domestiques, comme réponse à un sentiment de déclassement professionnel, pour ces femmes dont la décision de s'installer est plus souvent subie que choisie. Elles cherchent une forme de reconnaissance dans l'engagement en faveur de ce modèle familial autant que professionnel, ce qui les conduit à le défendre.

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : Travail, genre et sociétés

16:36 Publié dans Exploitations agricoles, Société, Travail et emploi | Lien permanent | Tags : genre, métiers, exploitations agricoles, femmes |  Imprimer | | | | |  Facebook

16/04/2021

La diversité des exploitations agricoles abritant des équins

La revue Économie rurale a consacré un numéro spécial à la filière équine française et à sa diversification, depuis les courses hippiques, les haras nationaux et centres équestres, jusqu'aux chevaux de sécurité publique et à la filière asine. Ce numéro présente aussi un riche panorama statistique des exploitations agricoles détenant des équins, permettant de documenter des filières méconnues et particulièrement éclatées. Sur un million d'équidés français, la moitié vit dans des exploitations agricoles, mais cette population restait peu étudiée. Cela s'explique en partie par le fait qu'avec un cheptel moyen de 8 têtes, ces ateliers équins paraissent souvent marginaux dans l'activité économique des exploitations.

Les auteurs ont mobilisé le recensement agricole (RA) de 2010, complété par un appariement avec les données du Système d'information relatif aux équidés (SIRE). Ils ont ensuite élaboré une typologie des exploitations, selon la taille et la composition de leur cheptel équin, distingué selon trois types de race : chevaux de trait, races de sang (regroupant animaux de selle, de course et poneys), et ânes. La proportion de poulinières pour les cheptels équins est également prise en compte. Ce dernier point permet de distinguer les exploitations orientées vers la production de celles ciblant la valorisation du cheptel. À partir de ces indicateurs, les chercheurs ont établi un classement des exploitations, grâce à une classification ascendante hiérarchique. Cette méthode statistique permet de minimiser les variances intra-groupe et de maximiser la variance inter-groupes, faisant ici ressortir neuf catégories d'exploitations (voir tableau).

Groupes d'exploitations avec équins d'après les cheptels détenus en 2010

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Source : Économie rurale

Les trois quarts des exploitations appartiennent finalement au groupe 1, caractérisé par de petits cheptels équins (3 animaux en moyenne), et l'analyse fait ressortir des exploitations détenant des troupeaux d'ânes importants, peu identifiés jusque-là. Le RA 2010 permet alors d'analyser chacun des groupes selon la localisation et les autres ateliers des exploitations, fournissant en cela un panorama inédit. Ces travaux, reposant sur le dernier recensement agricole disponible, ont aussi permis d'actualiser le questionnaire administré en 2020, afin que celui-ci rende mieux compte des évolutions des filières équines et puisse en donner une image actualisée.

Jean-Noël Depeyrot, Centre d'études et de prospective

Source : Économie rurale

10/03/2021

La peste porcine africaine en Chine et ses conséquences

L’Académie d’agriculture de France et l’Académie vétérinaire de France ont organisé une séance, le 3 février 2021, sur l’épizootie de peste porcine africaine (PPA) en Chine et ses conséquences locales comme mondiales. Après un exposé de Marie-Frédérique Le Potier (Anses) sur cette maladie, son épidémiologie et les moyens de lutte, Jean-Christophe Audonnet (Boehringer-Ingelheim), Jean-Marc Chaumet (Idele) et Boris Duflot (Ifip) ont présenté ses conséquences sanitaires et économiques en Chine et dans le monde.

La Chine reconnaît officiellement l’abattage de 1,2 million de porcs depuis le déclenchement de l’épizootie, en 2018, mais la moitié du cheptel national (soit 250 millions de têtes) serait en fait concernée, autrement dit le quart de l’effectif mondial, selon J.-C. Audonnet. En l’absence de vaccin, la Chine prend des mesures prophylactiques. La création de porcs génétiquement résistants à la PPA semblant illusoire, les autorités publiques prônent le remplacement de multiples abattoirs locaux par des abattoirs industriels de grande capacité. De la même façon, elles privilégient la disparition des petits élevages au profit de « mégafermes » dotées de dispositifs de biosécurité de haut niveau : un ensemble de 22 bâtiments avec 1 800 porcs par étage pourrait ainsi produire 2,1 millions de têtes par an. Selon l’intervenant, les animaux comme les personnels seraient isolés dans ces structures quasi-autonomes, avec des conséquences potentielles sur leur bien-être. Existant déjà pour la volaille, un projet de ferme automatique, où le personnel serait remplacé par des robots et de l’intelligence artificielle, est aussi à l’étude.

Sur le plan économique, J.-M. Chaumet montre que la chute de la production interne de viande porcine a entraîné une augmentation de son prix, qui s’est traduite par une hausse des prix des autres viandes (figure ci-dessous) avec, pour conséquence, une inflation croissante. Le gouvernement chinois, pour en prévenir les conséquences sociales, réalise des importations massives de viande porcine (deuxième figure ci-dessous), creusant ainsi son déficit commercial.

Évolution du prix de la viande en Chine

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Source : Abcis

Selon J.-M. Chaumet, la Chine cherche donc à rétablir son autonomie alimentaire en favorisant des élevages sur son sol, quitte à s’affranchir de certaines contraintes environnementales, ou en développant à son profit la production animale à l’étranger.

Importations chinoises de viande en valeur

chine viande 2.jpg

Source : Abcis

Franck Bourdy, Centre d'études et de prospective

Source : Académie d’agriculture de France

13/01/2021

En Bavière, 30 à 50 % des aides du 1er pilier de la PAC sont capitalisés dans les fermages

Des chercheurs autrichiens ont récemment publié des résultats sur la proportion des paiements liés à la PAC capitalisée dans la valeur des fermages. Cette analyse empirique a été menée sur un échantillon de 3 000 exploitations bavaroises, pour la période 2006-2011. Réalisée sur une seule région, la Bavière, pour garantir un même système de soutien, l'étude a tout d'abord permis de différencier les impacts selon le type d'aide. Ainsi, chaque euro versé contribue à une augmentation des loyers agricoles de 30 centimes pour les aides du premier pilier, et de 40 à 50 centimes pour celles liées aux zones défavorisées. À l'inverse, les paiements du second pilier n'ont pas d'impact significatif.

Ces constats varient fortement au sein d'une même région, en fonction de la qualité des terres, de la taille des exploitations ou de la proportion de terres en fermage : plus celles-ci sont importantes, plus la capitalisation est élevée. Près de la moitié des terres exploitées en Bavière est louée. Dans ce contexte, les auteurs s'interrogent sur l'efficience des aides directes en matière de soutien au revenu des agriculteurs, puisqu’entre 30 et 50 % rémunèrent in fine les propriétaires fonciers.

Source : European Review of Agricultural Economics

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07/12/2020

Effets du « management » sur le travail dans une firme agricole française

Les exigences croissantes de la grande distribution, en matière de normalisation et de certification, et la mise en place du management en flux tendus, peuvent se traduire par une pression accrue sur les salariés agricoles. Cet article de L. Mazenc (ENSAT), mis en ligne en novembre 2020, analyse les évolutions de l’organisation du travail dans une entreprise commercialisant des melons. Il met en évidence des résistances individuelles ou collectives, « pour soi » ou « pour les autres », qui peuvent freiner la production ou, au contraire, l’accélérer.

Source : Études rurales

15/09/2020

Une analyse de la financiarisation des firmes agricoles latino-américaines

La financiarisation de l'agriculture soulève de nombreuses questions quant à ses implications (voir à ce sujet un précédent billet). Dans un article publié dans la revue Globalizations, des chercheurs analysent les transformations de deux firmes agricoles sud-américaines, Nuevo Amanecer et La Lozada, afin de montrer comment l'afflux de capitaux financiers, dans les années 2000, a impacté leur fonctionnement. Ces investissements ont notamment permis à ces entreprises d'étendre leurs opérations, mais également de se diversifier, en développant des activités commerciales et financières à côté des activités productives traditionnelles (figure ci-dessous). Cet apport de capitaux s'est aussi accompagné d'une évolution de la stratégie de ces firmes : alors qu'elles se contentaient jusqu'alors de louer le foncier, elles cherchent désormais à en faire l'acquisition afin de profiter d'une éventuelle hausse de sa valeur. Pour les auteurs, ces stratégies sont manifestement plus financières et spéculatives que par le passé.

Organisation des firmes agricoles étudiées dans les années 2000

Financiarisation.jpg

Source : Globalizations

Source : Globalizations

 

21/01/2020

Un chiffrage des conséquences du changement climatique sur la rentabilité des exploitations australiennes

Alors que l'Australie connaît depuis plusieurs mois une sécheresse importante à l'origine d'incendies gigantesques, l'Australian Bureau of Agricultural and Resource Economics and Sciences (ABARES), un organisme de recherche interne au ministère en charge de l'agriculture, a récemment publié les résultats d'une étude visant à apprécier les conséquences du changement climatique sur la profitabilité des exploitations du pays.

L'étude s'appuie sur un modèle économétrique permettant d'estimer leur performance technique et économique à partir de variables relatives à leur structure, au contexte de prix et au climat. Ce modèle a permis aux auteurs de simuler ce qu'aurait été la situation économique des agriculteurs australiens si les conditions climatiques des années 2000 à 2019 avaient été comparables à celles que le pays a connues de 1950 à 2000.

Les résultats de la modélisation montrent que, toutes choses égales par ailleurs, les évolutions du climat en Australie depuis les années 2000 ont induit une diminution de 22 %, en moyenne, du « profit » des exploitations du pays, considéré ici comme le revenu net d'entreprise une fois prises en compte la rémunération du travail familial et la variation de la valeur des stocks. Cette moyenne masque d'importantes disparités selon les productions, les agriculteurs en grandes cultures étant plus impactés que les éleveurs de bétail : -35 % pour les céréaliculteurs, contre -18 % pour les éleveurs ovins et -5 % pour les producteurs de viande bovine. De même, les États de l'Ouest du pays (Western Australia) et surtout de l'Est (New South Wales, Victoria), davantage concernés par les sécheresses récentes et comportant une proportion élevée d'exploitations céréalières, sont sensiblement plus touchés que les autres. La modélisation montre également que les stratégies mises en place par les agriculteurs en réponse à ces conditions climatiques nouvelles, telles que le non-labour, ont permis d'en atténuer les conséquences : en leur absence, la diminution du profit aurait été de 26 % en moyenne et de 49 % pour les céréaliculteurs.

Effet des conditions climatiques sur le profit des exploitations australiennes

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Source : ABARES

En conclusion, les auteurs appellent les pouvoirs publics à renforcer leur soutien aux agriculteurs, en cherchant non pas à les protéger des conséquences du changement climatique, mais à les aider à renforcer leur résilience face à ce phénomène. Les formes concrètes que pourrait prendre ce soutien ne sont toutefois pas explicitées dans l'étude.

Mickaël Hugonnet, Centre d’études et de prospective

Source : ABARES

16/10/2019

Des propositions pour que la statistique américaine rende mieux compte de la complexité de l’activité agricole

Si la production agricole états-unienne a longtemps reposé sur des exploitations familiales, la majorité de la production est aujourd’hui assurée par des structures complexes, que la statistique agricole peine à saisir. Partant de ce constat, l’Académie des sciences américaine a publié un rapport dans lequel elle formule des propositions de réforme du système statistique afin de l’adapter à ce nouveau contexte.

Le rapport comporte trois parties. La première présente les activités de la statistique agricole aux États-Unis. Elles comportent principalement le recensement exhaustif des exploitations tous les cinq ans (Census of Agriculture) et l’enquête sur la gestion des ressources agricoles (Agricultural Resource Management Survey), réalisée par sondages annuels. La deuxième partie du document explore les raisons de la complexification des entreprises agricoles : exploitations multi-sites, emploi de salariés et prestataires, origine variée des capitaux, diversification et pluri-activité, etc.

Dans la dernière partie, les auteurs formulent de nombreuses recommandations pour mieux saisir statistiquement cette complexité. Ils suggèrent d’abord de revoir la définition de l’exploitation et de distinguer l’établissement agricole, unité fonctionnelle de base, de l’entreprise agricole, laquelle peut regrouper plusieurs établissements détenus par une même personne ou société. Ils appellent également à la création d’un registre qui listerait l’ensemble des établissements et ferait apparaître leurs liens éventuels. De plus, dans la mesure où la production agricole implique aujourd’hui fréquemment des entreprises de services, les auteurs jugent nécessaire de s’intéresser de près à ces dernières. Ils suggèrent ainsi de relancer le programme de recensement des services agricoles (Census of Agricultural Services), suspendu en 1978, et d’intégrer ces entreprises dans le registre mentionné plus haut. Pour terminer, constatant que le taux de réponse aux enquêtes est d’autant plus faible que la structure de production est complexe, les auteurs recommandent de limiter autant que faire se peut le recours à des données d’enquêtes, et d'exploiter prioritairement les données administratives et commerciales disponibles.

Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective

Source : The National Academies of Science, Engineering, Medicine

08/11/2018

Dynamique de la structure financière des exploitations agricoles néerlandaises

Une étude récente de l'European Review of Agricultural Economics s'intéresse à la dynamique de l'endettement des exploitations agricoles aux Pays-Bas et à ses déterminants. Les auteurs utilisent pour cela un modèle économétrique, estimé sur un panel de 1 500 exploitations, sur la période 2001-2015. Les résultats indiquent une relation négative entre profits et endettements, confirmant la théorie du financement hiérarchisé (pecking order) selon laquelle, pour financer leurs investissements, les firmes recourent préférentiellement au financement interne (bénéfices réinvestis) puis, en second lieu, à l'endettement. Celui-ci augmente avec la taille des exploitations et la présence d'actifs tangibles servant de garantie (pour les exploitations laitières), et diminue en général avec le risque revenu. Enfin, les auteurs montrent que l'endettement des exploitations étudiées tend vers une certaine valeur cible de façon plus lente que dans d'autres secteurs : cela suggère une inertie significative de leur structure financière, notamment pour les exploitations de plus petite taille.

Source : European Review of Agricultural Economics

08:57 Publié dans Exploitations agricoles | Lien permanent | Tags : structure financière, exploitations agricoles, endettement, pays-bas |  Imprimer | | | | |  Facebook