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08/06/2021

Grande distribution française et protection des poissons sauvages utilisés comme aliments de l'aquaculture

La fondation Changing Markets se donne pour mission de soutenir la transition vers une économie durable, en révélant les pratiques peu responsables de grands groupes. Elle a publié un rapport sur les impacts de l'utilisation de poissons sauvages comme aliments de l'industrie aquacole. En effet, un cinquième des débarquements mondiaux des bateaux de pêche est utilisé pour produire de la farine et de l'huile de poisson qui alimentent l'élevage industriel et l'aquaculture. Cette filière est présentée comme un débouché durable pour les produits de la mer, couvrant plus de la moitié des consommations mondiales. La plupart des achats de poisson par les ménages français se faisant en grandes et moyennes surfaces, les auteurs notent la responsabilité de la grande distribution dans la protection des espèces sauvages. Ils jugent les enseignes françaises insuffisamment mobilisées sur le sujet et émettent des recommandations à l'attention de la grande distribution, des consommateurs, des systèmes de certification et des décideurs politiques.

Classement des enseignes françaises quant à leur niveau de protection des océans et de soutien des filières de production durable

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Source : Changing Markets Foundation

Lecture : la fondation a créé un ensemble de 13 critères portant sur les pratiques et politiques d'entreprise, la transparence et la chaîne d'approvisionnement, et les pratiques en magasin. Seuls Auchan, Carrefour, Système U et Intermarché ont répondu à l'enquête, les autres enseignes étant donc notées sur la base de recherches de la fondation sur leurs sites Internet et en magasins. Les auteurs relèvent que, en comparaison, la grande majorité des enseignes au Royaume-Uni dépasse 20 %, et que Carrefour obtient 27,1 % en France mais seulement 8,5 % en Espagne.

Source : Changing Markets Foundation

07/06/2021

Exposition sur les repas de prestige

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Le musée du Louvre-Lens présente jusqu'au 26 juillet une exposition intitulée « Les tables du pouvoir, une histoire des repas de prestige ». Elle explore ce lien social que constitue le repas à la table des puissants. Au fil des salles sont évoquées les tables des souverains en Mésopotamie, en Grèce ou à Rome, puis chez les rois européens et jusqu'aux dîners d’État à l’Élysée. Un colloque organisé par l'université de Lille et consultable en replay se focalise sur l'Antiquité.

Source : Louvre-Lens

15:34 Publié dans Alimentation et consommation, Société | Lien permanent | Tags : rapports sociaux, repas, pouvoir, exposition |  Imprimer | | | | |  Facebook

14/05/2021

Émissions de CO2 de l'Union européenne et importations de produits engendrant de la déforestation

Dans le prolongement de son rapport de 2018 (voir à ce sujet un précédent billet), le WWF propose une nouvelle publication sur la déforestation engendrée par la consommation de certains produits agricoles (ex. soja). L'analyse a été menée par le Stockholm Environment Institute, à partir des données commerciales de la plate-forme TRASE et des travaux sur la déforestation de Pendrill et al. De ce fait, la méthode est différente de celle de 2018 : elle ne se base plus sur le calcul d'un indicateur composite i) de risque de déforestation, ii) de respect des droits humains et iii) de corruption, mais sur l'attribution d'hectares déforestés aux différentes productions agricoles selon l'évolution de leur surface. La « déforestation » est entendue ici comme la perte de « couvert arboré », et non pas seulement de « forêts » au sens de la Food and Agriculture Organization (FAO). Par ailleurs, les auteurs considèrent que les causes non agricoles (ex. urbanisation) sont négligeables.

L'UE apparaît comme le premier acteur responsable de la déforestation associée aux denrées agricoles entrant dans le commerce international entre 2005 et 2013, avant de passer en deuxième position derrière la Chine. En 2017, 16 % lui sont attribués, contre 24 % pour la Chine, 9 % pour l'Inde et 7 % pour les États-Unis. 42 % de la déforestation importée en UE sont dus à l'huile de palme, 17 % au soja, 9 % aux produits dérivés du bois, 8 % au cacao et 5 % à la viande de bœuf. Les pays qui réalisent la majeure partie de cette déforestation sont l'Indonésie (39 %) et le Brésil (25 %). Pour ce dernier, la région du Cerrado est plus particulièrement concernée par le soja et la viande bovine.

Les auteurs étudient les certifications environnementales volontaires, considérées comme un levier de lutte contre la déforestation. Ils montrent qu'elles représentent une part limitée du marché et qu'elles ne garantissent pas toujours l'absence de déforestation, tout au long de la chaîne d'approvisionnement.

Enfin, le WWF propose 8 axes de recommandations. À titre d'exemple, les produits entrant sur le marché de l'UE devraient respecter les critères environnementaux de production au sein de l'Union, et des obligations de traçabilité et de transparence devraient être introduites dans la législation européenne.

Comparaison de la déforestation causée par l'importation en UE de soja du Cerrado (ha/1000 t), en 2016, par des entreprises ayant un engagement zéro déforestation (vert) ou non (marron)

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Source : WWF

Lecture : l'impact de la certification sur la déforestation relative (ha/1 000 tonnes) est faible en moyenne.

Aurore Payen, Centre d'études et de prospective

Source : WWF

13/05/2021

Pandémie et sécurité alimentaire : échos de la Caraïbe

La Banque centrale des États de la Caraïbe orientale et ses partenaires ont organisé, le 15 avril dernier, un colloque sur la sécurité alimentaire dans cette même région. Après avoir été mésestimés au profit du tourisme, l’ensemble des segments de la chaîne de valeur agroalimentaire constituent désormais une priorité des États de la région, après que la pandémie eut un effet de loupe sur la double vulnérabilité de leurs 25 millions d’habitants.

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Source : Organization of Eastern Caribbean States

Les intervenants ont tout d’abord souligné la dépendance aux importations alimentaires : elles représentent 80 % de la consommation régionale (95 % dans certains pays) et près de 8 % du PIB, en 2020, pour un montant total de 1,4 milliard de dollars des Caraïbes (430 millions d’euros environ). Dans la zone, seuls le Guyana et Trinidad-et-Tobago exportent des produits en direction de leurs voisins.

Les importations alimentaires des États de la Caraïbe

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Source : World Food Programme, Organisation des Nations unies

À cette exposition aux risques globaux, particulièrement mise en évidence par la crise sanitaire de la Covid-19, s’ajoutent, selon l’universitaire L. Phillip (université McGill, Québec), des régimes alimentaires dans lesquels la part d’aliments et de boissons ultra-transformés importés s’est accrue. La Caraïbe et l’Amérique latine détiennent le record mondial de la hausse de la consommation de boissons sucrées entre 2002 et 2016 ( + 30 kg/personne en termes de ventes), avec des conséquences sur l'incidence des maladies chroniques, facteurs de co-morbidité.

Pour réduire de 25 % la valeur globale des importations alimentaires, dans les trois prochaines années, au sein de la Caraïbe, plusieurs recommandations ont été avancées. B. Clarke, de l’Institut caribéen de recherche et de développement agricoles, a défendu l’idée d’une intégration régionale renforcée de la production agricole et agroalimentaire, en partant de l’exemple de la noix de coco : production du coprah au Guyana, transformation à Trinidad-et-Tobago tirant partie du faible prix de l’énergie qui y prévaut, commercialisation à la Jamaïque, principal débouché. La production et la transformation des avocats, fruits à pain, mangues, grenades et poivrons rouges ont été notamment mentionnées. Par ailleurs, selon K. Caroo, de l’ONG Helen’s Daughters, les femmes sont des acteurs de premier plan en matière de consommation et de préparation alimentaires, et elles devraient à ce titre être au cœur des dispositifs en faveur de régimes sains. Enfin, le développement d’une agriculture prenant pleinement en compte les enjeux nutritionnels (« agriculture nutritionnellement adaptée ») a été préconisé par les intervenantes de la Banque mondiale.

Nathalie Kakpo, Centre d’études et de prospective

Source : Banque centrale des États de la Caraïbe orientale

Les futurs londoniens proposés par Chatham House

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À l'occasion de son 100e anniversaire, le think tank britannique Chatham House propose d'explorer les futurs lointains des centre-villes et, ainsi, de stimuler les débats sur ce sujet. Développé par l'agence Platform Group et la School of International Futures, le modèle digital en 3-D Futurescape London permet de parcourir le siècle à venir, avec quatre arrêts à Piccadilly Circus en 2035, 2060, 2090 et 2121. L'agriculture urbaine, l'alimentation et la nature occupent une place importante dans ces projections, dont nous retiendrons quelques traits.

En 2035, Piccadilly Circus est l'épicentre de l'innovation alimentaire : l'offre diversifiée et renouvelée de nombreux stands répond aux limites du système des livraisons, « expérience stérile et impersonnelle ». La place accrue de la nature et des espaces ouverts contribue à une amélioration du bien-être et de la santé physique. Des colonnes de biodiversité (70 m de haut), des jardins sur les toits et des façades végétalisées constituent des réseaux de micro-corridors verts, favorisant la biodiversité (végétaux, insectes) et absorbant le CO2. La semaine de travail normale est de quatre jours, et une crypto-monnaie dédiée au care (crypto-care pound) a été créée.

En 2060, un nouveau réseau de canaux, axes privilégiés de transport et de communication, répond à la montée des eaux et aux inondations plus fréquentes. L'alimentation est produite localement, les « nouvelles » formes de protéines sont devenues courantes. Piccadilly est un lieu d'expérimentation alimentaire et l'Insect Food Hall la dernière attraction touristique à la mode.

En 2090, de nombreux systèmes d'aquaponie et d'aéroponie fournissent des produits frais, abordables et sains, ce qui a permis d'éradiquer la pauvreté alimentaire de la ville. Un dispositif de réfraction de la lumière du soleil, vers des milliers de panneaux solaires, approvisionne en continu des micro-fermes et des colonnes de biodiversité, ce qui prolonge la période de production végétale et climatise la ville. L'Earthism, nouvelle religion, se développant depuis l'apogée de la crise climatique, en 2040, prône la connexion avec toutes les formes de nature ; Piccadilly devient un site de pèlerinage.

Enfin, en 2121, la Lune est devenue une destination touristique populaire, ainsi qu'un centre industriel important (développement de l'extraction minière depuis 2030). L'intelligence artificielle est au cœur de la vie sociale : vêtements (London AI Jacket), spectacles, culture (Piccadily Poligon), etc.

Julia Gassie, Centre d'études et de prospective

Source : Chatham House

11/05/2021

Gains de productivité des cultures vivrières et malnutrition dans les pays en développement à l'horizon 2030

Un article, récemment publié dans la revue Plos One, montre que l'augmentation des gains de productivité des cultures vivrières ne suffirait pas à réduire la malnutrition dans les « pays en développement » en 2030. Ces résultats ont été obtenus par le service économique de l'USDA (ministère de l'agriculture américain) et l'IFPRI (International Food Policy Research Institute) en testant plusieurs scénarios à l'aide de deux modèles mondiaux combinés. Ces simulations ont été réalisées à la demande du Consultative group on international agricultural research (CGIAR), dans le cadre de l'initiative Crops to end hunger.

Une hausse annuelle plus rapide (+ 25 % par rapport au taux de croissance de référence) des rendements permettrait de diminuer le nombre de personnes souffrant de malnutrition : de 11 millions dans le cas de la production de riz, de 6 millions dans celui du blé et 2 millions pour la banane plantain ou le manioc. Les besoins glucidiques seraient certes mieux couverts, mais ce ne serait pas le cas pour toutes les vitamines ou sels minéraux (figure ci-dessous). Cependant, les résultats varient sensiblement selon les pays et les productions. Les auteurs recommandent de tenir compte de cette hétérogénéité pour cibler les politiques de soutien à l'innovation et au développement.

Taux de couverture pour différents nutriments en 2030

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Source : Plos One

Lecture : le taux de couverture est égal à 1 lorsque les disponibilités journalières moyennes sont égales aux apports nutritionnels recommandés.

Source : Plos One

10/05/2021

Une vue d'ensemble du végétarisme sous l'angle de la qualité de vie

Une revue des effets potentiels du régime végétarien sur la qualité de vie, et inversement, a été publiée le 12 avril dans l'International Journal of Environmental Research and Public Health. Le graphique ci-dessous présente toutes les variables étudiées ainsi que leurs impacts positifs ou négatifs sur cette qualité de vie.

Relations entre les aspects du végétarisme et les différentes dimensions de la qualité de vie (physique, psychologique, sociale, environnementale)

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Source : International Journal of Environmental Research and Public Health

Lecture : les flèches indiquent la direction de l'influence, c'est-à-dire si un domaine influence ou est influencé par certains aspects du végétarisme. Les symboles plus (+) et moins (-) indiquent des influences positives ou négatives. NCD : maladies non transmissibles ; VD : régime végétarien.

Sur le plan de la santé physique, les auteurs relèvent un impact positif, de meilleurs résultats de santé et des taux plus faibles de maladies non transmissibles, bien qu’un régime végétarien non équilibré puisse entraîner des carences nutritionnelles. Des sentiments positifs, liés à l’adoption d’une attitude en accord avec ses convictions, jouent sur l’état psychologique, même si certaines études montrent un risque accru de dépression chez les végétariens. Sur l’aspect social en revanche, le risque de rejet ou de stigmatisation de la part des non-végétariens pourrait impacter défavorablement la vie des sujets, ce qui pourrait être compensé par un sentiment d’appartenance à une communauté végétarienne.

Source : International Journal of Environmental Research and Public Health

20/04/2021

Un rapport sur le commerce en ligne et le développement durable

Le Conseil général de l'environnement et du développement durable, France Stratégie et l'Inspection générale des finances ont publié en février un rapport visant à orienter le commerce en ligne vers une durabilité accrue. En effet, la logistique du e-commerce a des conséquences environnementales et sociales que les auteurs analysent et recommandent d'atténuer grâce à une série de propositions.

La première partie fait un bilan du développement du e-commerce et de ses conséquences pour le commerce en général. Ce canal de commercialisation est en très forte hausse, passant de 31 à 112 milliards d'euros de chiffre d'affaires entre 2010 et 2020, soit une croissance moyenne annuelle de 14 % contre seulement 1,4 % pour le commerce en magasin sur la même période. Les acheteurs s'en disent satisfaits à 94 %. Par ailleurs, le commerce alimentaire est beaucoup moins concerné que celui d'autres secteurs : la vente en ligne représente 4,4 % des transactions en 2019, avec cependant un doublement en 5 ans.

Évolution de la part de marché des produits alimentaires (en %) par forme de vente sur la période 2014-2019

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Source : Insee

La deuxième partie du rapport détaille les conséquences environnementales et sociales du e-commerce. La logistique reste très pénalisante, avec des transports encore peu décarbonés et des entrepôts pouvant, dans une moindre mesure, participer à l'artificialisation des terres. Ces entrepôts représentent en moyenne moins de 1 % des 23 000 ha de surfaces artificialisés annuellement sur la période 2006-2016. Par ailleurs, les emplois créés par le e-commerce s'exercent souvent dans des conditions difficiles, en entrepôt ou dans le transport du dernier kilomètre,avec des risques sur leur pérennité du fait de l'automatisation et de la robotisation. Cependant, dans le secteur alimentaire (figure ci-dessous), les magasins spécialisés et petites surfaces ont connu des hausses d'emploi sur la période 2010-2018 (respectivement + 18 et + 47 %), contrairement aux grandes surfaces (emploi stable) et aux magasins non alimentaires non spécialisés (- 2 à -13 % selon le secteur). Dans le cas des grandes surfaces, précisons que, après une hausse de 2010 à 2012, l'emploi a ensuite diminué de 5 % entre 2012 et 2018.

Évolution du nombre d’entreprises et de salariés entre 2010 et 2018

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Source : CGEDD - France Stratégie - IGF (données FARE – extraits CEP)

Lecture : le commerce « hors magasin » inclut les activités alimentaires et non alimentaires.

La dernière partie présente une stratégie globale, à destination des pouvoirs publics, avec 15 propositions à mettre en œuvre aux niveaux européen, national et local. L'intégration de la logistique dans les Schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), ainsi que la création de « conférences annuelles régionales de la logistique », sont ainsi préconisées.

Franck Bourdy, Centre d'études et de prospective

Source : CGEDD

Premier rapport mondial sur le gaspillage alimentaire par le programme des Nations unies pour l'environnement

En tant qu'agence des Nations unies, visant la réduction par deux du gaspillage alimentaire aux niveaux de la distribution, des services alimentaires et des ménages (Objectif de développement durable 12, cible 3), le programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) publie son premier rapport mondial sur le sujet.

Ce document s'appuie sur de nombreuses données provenant d'une variété de sources, en majorité des études scientifiques ad hoc, 7 pays seulement collectant des statistiques nationales compatibles avec l'indice du gaspillage alimentaire. Ces données sont intégrées dans une modélisation qui permet d'estimer le gaspillage au niveau mondial, par pays, par région et par secteur. Les estimations portant sur les ménages sont les plus robustes, avec des données issues de près de 100 études, réparties dans une variété de pays représentant 75 % de la population mondiale. Les données sur le gaspillage dans les services et la distribution sont au contraire relativement difficiles à trouver hors des pays à hauts revenus.

Selon les auteurs, 17,5 % de la production alimentaire mondiale sont gaspillés – 931 millions de tonnes, soit deux fois plus que les estimations précédentes de la FAO (2011). 10,7 % le sont par les ménages, 4,6 % au niveau des services alimentaires et 2,2 % à celui de la distribution. Le gaspillage des ménages français (85 kg par personne et par an) se situerait à un niveau intermédiaire pour l'Europe (34 kg en Slovénie, 142 en Grèce), mais plus élevé que la moyenne mondiale (74 kg).

Estimations du gaspillage alimentaire des ménages en Europe, sources utilisées et niveaux de confiance

gaspillage,consommation,politiques publiques

Source : PNUE

L'autre résultat clé du rapport est que le gaspillage alimentaire, contrairement à une idée reçue, est similaire d'un groupe de revenus à un autre. Est donc remise en cause l'idée selon laquelle il serait l'apanage des « pays développés », tandis que les « pays en développement » souffriraient essentiellement de pertes aux stades de la production, du stockage et du transport.

Enfin, le rapport propose une méthodologie pour les pays désireux d'effectuer un suivi du gaspillage. En avril, le PNUE devrait lancer des groupes de travail sur le sujet, en Afrique, en Asie-Pacifique, en Amérique latine et en Asie de l'Ouest, afin de faciliter l'établissement de données et la mise en œuvre de stratégies de réduction.

Marie-Hélène Schwoob, Centre d'études et de prospective

Source : Programme des Nations unies pour l'environnement

19/04/2021

Chaînes de valeur des oléoprotéagineux en agriculture biologique en France et en Europe

Deux articles parus dans la revue Oilseeds and fats, Crops and Lipids (OCL) s'intéressent aux chaînes de valeur des oléoprotéagineux en agriculture biologique (AB), en France et en Europe. Le premier (Canale et al.) présente les résultats d'un diagnostic des principales filières, conduit en 2016-2017 par Terres Univia, fondé sur des données statistiques et sur une enquête auprès de 37 opérateurs (collecteurs, triturateurs, fabricants d'aliments du bétail), dans plusieurs régions françaises. Le second (Smadja, Muel) expose les résultats d'une analyse multicritères dressant une typologie des chaînes de valeur oléoprotéagineuses en Europe, dans le cadre du projet de recherche H2020 LegValue.

La consommation de produits issus de l'AB connaît une croissance importante depuis plusieurs années en France et en Europe, tirant à la hausse les volumes produits. Entre 2013 et 2018, les surfaces françaises cultivées en AB ont été multipliées par trois pour les oléagineux (soja et tournesol surtout, mais aussi colza et lin), par deux pour les protéagineux (pois, féverole, lupin) et par quatre pour les légumes secs (lentilles, pois chiches).

Évolution des surfaces en oléoprotéagineux en agriculture biologique en France, 2002-2018 : soja, tournesol, colza et lin en haut ; féverole, pois, lupin, lentille et pois chiche en bas

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Source : Oilseeds and fats, Crops and Lipids

Outre la consommation humaine d'huiles et de légumes secs, cette croissance répond à la demande de tourteaux pour les filières animales en AB, en particulier la volaille. Les prix payés aux producteurs sont plus élevés que pour l'agriculture conventionnelle (ex : 370 €/t en AB contre 180 €/t pour le pois). Cependant, la production française ne suffit pas à satisfaire la demande des transformateurs, qui importent des pays européens « un tiers de graines de tournesol et les trois quarts des graines de colza » pour la trituration. Des défis logistiques se posent : dispersion géographique des producteurs augmentant le coût de transport, utilisation de mélanges d'espèces nécessitant des équipements adaptés pour la collecte, variabilité nutritionnelle des tourteaux issus de pression à froid, etc. Ces défis nécessitent selon Canale des efforts de structuration des filières, pour lesquels l'article de Smadja et Muel fournit des clefs, en identifiant des grandes familles de chaînes de valeur à travers leurs caractéristiques (récentes ou non, initiées par l'amont ou par l'aval, pratiques contractuelles, cf. figure ci-dessous) et en conduisant une réflexion sur les conditions de leur succès.

Caractéristiques des chaînes de valeur oléoprotéagineuses en agriculture biologique en Europe selon les axes issus de l'analyse en correspondance multiple

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Source : Oilseeds and fats, Crops and Lipids

Julien Hardelin, Centre d'études et de prospective

Source : Oilseeds and fats Crops and Lipids, Oilseeds and fats Crops and Lipids

15/04/2021

Géraldine Aïdan, Danièle Bourcier (dir.), Humain Non-Humain. Repenser l’intériorité du sujet de droit, Éditions LGDJ, 2021, 224 pages

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Comment expliquer la multiplication, ces dernières années, de décisions juridiques attribuant le statut de sujet de droit à des animaux, fleuves et rivières ? À quelles caractéristiques cette qualité est-elle associée dans le droit positif et dans la science du droit ? À ces questions qui bousculent les systèmes agricole, sylvicole et halieutique, ce livre apporte des réponses issues d’un heureux rapprochement entre droit, sciences du vivant et intelligence artificielle.

G. Aïdan expose la thèse à l’origine de l’ouvrage : c’est parce que les systèmes juridiques lui attribuent une « intériorité », ensemble de phénomènes se rapportant au psychisme, que le non-humain devient un sujet de droits. Cette introduction s’appuie sur le « mécanisme de la représentation », selon lequel une entité non humaine, qui ne peut être destinataire de normes juridiques faute de capacités cognitives, se voit conférer des droits par le truchement d’un humain qui devient alors le sujet d’imputation.

La première partie interroge les attributs décisionnels dont sont dotées certaines machines et dans quelle mesure ces attributs, qui les rapprochent de l’humain, pourraient permettre de les qualifier de sujet de droit. À partir de travaux mobilisant des « réseaux de neurones artificiels » pour simuler la décision du juge, la juriste D. Bourcier met en évidence la création, par la machine, d’une catégorie de règles ininterprétables qui s’apparenteraient au for intérieur, entendu comme un espace d’interaction avec soi, inaccessible de l’extérieur.

Dans la seconde partie, qui nous intéresse plus directement ici, sont mis en exergue les résultats de travaux récents qui bousculent les énoncés normatifs actuels et sont susceptibles d’élargir davantage l’éventail des entités sujets de droit. M. Giurfa (neuroethologue) montre à partir de travaux visualisant l’activité du cerveau de l’abeille in vivo que celle-ci dispose de capacités cognitives et d’une forme de conscience. Selon B. Moulia, biologiste et physicien, la plante est capable de percevoir divers signaux émis par l’environnement et de se mouvoir en conséquence, ne se contentant pas d’une réponse réflexe associée à un stimuli unique. Cette sensorimotricité, encore considérée il y a peu comme une frontière intangible distinguant l’animal mobile de la plante passive, pourrait signifier une « remontée des végétaux sur l’échelle du vivant » et une appréhension nouvelle par le droit.

Nathalie Kakpo, Centre d’études et de prospective

Lien : Éditions LGDJ

Sébastien Dalgalarrondo, Tristan Fournier, L’utopie sauvage. Enquête sur notre irrépressible besoin de nature, Éditions Les Arènes, septembre 2020, 180 pages

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Ce livre rend compte d’un « besoin d’ensauvagement », présent dans les sociétés occidentales, de façon cyclique, depuis plus de deux siècles. La multiplication des robinsonnades après la publication de l'ouvrage de Defoe (1719), l’épisode de vie dans les bois de Thoreau à Walden (1845), et le mouvement de retour à la terre après mai 1968, constituent des jalons importants. Mais les auteurs (sociologues, CNRS) s'intéressent principalement à la période actuelle. Ils mobilisent des matériaux variés : enquêtes sur site (foires et salons, stages de développement personnel en milieu rural, formations à la cueillette de plantes sauvages en région parisienne), aperçus parfois rapides (livres à succès et analyse de contenu d’émissions de télé-réalité), et réflexions sur leurs propres pratiques (aménagement d’une grange en Ariège).

L'ouvrage saisit particulièrement bien trois aspects importants de ce « besoin d'ensauvagement ». Tout d’abord, la « promesse » du retour à la nature a un caractère fédérateur. Dans une « atmosphère d'apocalypse diffuse », le mythe du chasseur-cueilleur fascine, à droite comme à gauche de l'échiquier politique, des fractions de la population inquiètes pour leur autonomie en cas d'effondrement. Inquiètes aussi, plus généralement, pour leur position dans les rapports sociaux et leur crainte de dépendre de l’État et du « système ». Ensuite, cette promesse fait l’objet d’une « marchandisation » croissante, ce que les auteurs illustrent de façon convaincante à partir des expériences, sous forme de stages payants, de jeûnes dits « de bien-être ». Enfin, ces pratiques, dont l’étendue mériterait d'être mieux établie statistiquement (l'ouvrage livrant peu de chiffres), ont des effets « transformateurs » sur les personnes et les groupes sociaux, voire sur les politiques publiques. Les auteurs donnent en exemple la politique éducative danoise, avec des écoles primaires installées en pleine forêt. Pour les individus, les régimes clés en main sont souvent une première étape amenant à prendre ses distances avec « la modernité alimentaire », « faire une pause » dans le quotidien et, en s'inscrivant dans un plus long terme, à « renouer avec sa nature ».

Signalons par ailleurs, sur le crudivorisme, une thèse récente de S. Thircuir (EHESS) et, sur les risques de dérives sectaires liés à ce souhait de réensauvagement, plusieurs articles de presse (Libération, Society).

Florent Bidaud, Centre d'études et de prospective

Lien : Éditions Les Arènes

14:11 Publié dans Alimentation et consommation, Société, Territoires | Lien permanent | Tags : nature, marchandisation, régime alimentaire |  Imprimer | | | | |  Facebook

14/04/2021

Colloque « Être ensemble. L'alimentation comme lien social »

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Pour son dixième anniversaire, la Chaire Unesco Alimentations du monde organisait en virtuel, début février 2021, son colloque annuel sur le thème « Être ensemble. L'alimentation comme lien social ». Cet événement visait à ré-interroger le rôle social de l'alimentation, à travers les espaces du « manger ensemble », et à envisager les conséquences du confinement lié à la crise sanitaire du Covid-19. Les différents temps (vidéos disponibles en ligne) ont permis de rassembler une diversité de disciplines, de parties prenantes, d'aires géographiques et de publics.

Dans sa conférence inaugurale, J. Coveney (Flinders University, Adelaïde, Australie) a rappelé les ancrages historiques de la commensalité et son importance dans diverses cultures. Si le partage des repas reste important pour les familles australiennes, il se fait aujourd'hui aux dépens d'une charge accrue pesant sur les femmes. J. Coveney s'est également interrogé sur un remplacement, à l'avenir, de la commensalité par la convivialité.

A. Dasgupta (Taylor's University, Malaisie) et A. P. Egnankou (université Félix Houphouët-Boigny, Côte-d'Ivoire) ont ensuite présenté deux espaces de sociabilité alimentaire. Les food-courts malais proposent une nourriture diversifiée (malaise, chinoise, indienne, mamak) à un coût réduit, et jouent un rôle important dans la culture alimentaire du pays. À Abidjan, les garbadrômes sont associés à une créativité et à une transgression des codes gastronomiques, le garba étant un plat préparé par des hommes, contrairement à l'attiéké traditionnel préparé lui par les femmes. Les garbadrômes permettent un renforcement des liens entre pairs et une cohésion sociale.

La table ronde suivante traitait des conséquences du confinement sur la commensalité alimentaire, dont un repli sur la sphère domestique, le développement de nouvelles pratiques et celui de précarités. Deux enquêtes qualitatives, l'une en France (O. Lepiller, Cirad), l'autre en Italie (E. Ceccaldi, université de Gênes), ont ainsi apporté des éclairages intéressants. Par la suite, N. Bourriaud (Mo.Co. - Montpellier contemporain) s'est interrogé sur les liens entre art et cuisine. Il a notamment identifié des points communs dans les pratiques contemporaines comme, par exemple, l'importance attachée au in situ, à la récupération et au recyclage, à la prise en compte des chaînes de production, aussi signifiantes que la production finale.

Enfin, C. Steel (auteure de Hungry City et de Sitopia) a conclu le colloque, invitant à « voir le monde au travers des lunettes de l'alimentation » pour penser de nouvelles façons de vivre.

Julia Gassie, Centre d'études et de prospective

Source : Chaire Unesco Alimentations du monde

 

13/04/2021

Les pistes de la CNUCED pour un nouvel agenda du commerce mondial

Les conclusions du rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l'alimentation, présentées en juillet 2020, mettent en cause l'accord sur l'agriculture de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), et soulignent que ce dernier constitue une barrière à la pleine mise en œuvre du droit à l'alimentation. En réponse, la conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED, voir un portrait de cet organisme), en prévision de la tenue à l'automne 2021 de sa 15e session et de la 12e conférence ministérielle de l'OMC, argue qu'une meilleure mise en œuvre de cet accord, et notamment de ses mécanismes de traitement spécial et différencié, favoriserait la contribution du commerce international à l'effectivité du droit à l'alimentation. Les auteurs enjoignent notamment les pays membres de l'OMC à mettre en œuvre les soutiens techniques et financiers prévus par l'accord pour la production agricole. Ils proposent aussi des pistes d'amélioration : abolition des restrictions à l'exportation pour les biens essentiels à destination des pays en développement importateurs nets de produits alimentaires, ou pour l'aide en situation d'urgence ; adaptation du plafond des aides, afin d'améliorer le soutien aux producteurs agricoles vulnérables ; instauration d'une solution pérenne pour un stockage public renforçant la sécurité alimentaire.

Source : Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement

12/04/2021

Gwenaël Vourc'h, François Moutou, Serge Morand, Elsa Jourdain, Les zoonoses. Ces maladies qui nous lient aux animaux, Éditions Quæ, 2021, 172 pages

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Ce livre, écrit par quatre chercheurs d'institutions différentes, vient à point nommé en ces temps de pandémie de Covid-19, exemple emblématique de zoonose. Une de ses qualités est de répondre simplement à des questions clefs : qu'est-ce qu'une zoonose ? Qui nous transmet quoi et comment ? Comment s'en prémunir, vivre avec et que faire maintenant ? Le rôle de l'humain dans leur développement récent, en lien avec ce qu'il est convenu d'appeler « l'Anthropocène », est mis en évidence. En effet, les risques d'émergence (ou de ré-émergence) des zoonoses ont partie liée avec les relations entre humains et écosystèmes malmenés. Le rapprochement de la faune sauvage et des hommes, du fait de la déforestation, facilite par exemple la transmission de maladies. Par ailleurs, dans les cas de transmission secondaire entre humains, une pandémie peut ensuite se développer, favorisée par la mondialisation et le développement des mobilités qui l’accompagne. Pour autant, loin d'un pessimisme collapsologique, les auteurs estiment que les capacités qui ont rendu l'humain « maître de la nature » peuvent aussi lui permettre de ralentir cette émergence ou tout au moins d'y faire face.

Source : Éditions Quæ