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12/02/2018

Consommateurs américains : une étude sur leur degré d'acceptation du lait de vaches clonées

Ce travail, publié dans Food Policy en janvier 2018, s'inscrit dans le contexte du moratoire actuel sur la commercialisation de ce produit par le ministère américain de l'Agriculture (USDA). Ce moratoire a suivi, en 2008, l'avis de la Food and Drug Administration (FDA), considérant que la viande et le lait des vaches clonées étaient aussi sains que ceux des vaches élevées de façon conventionnelle, et ne justifiaient donc pas d'étiquetage particulier.

Pour caractériser le degré d'acceptation des consommateurs en la matière, une expérimentation a été menée en octobre 2012 sur un échantillon de 148 adultes, dans quatre sites de l’État du Delaware : un parc public, un magasin d'alimentation « naturelle », un marché fermier urbain et l'université du Delaware. Le texte de la FDA, sur l'innocuité du lait de vaches clonées, a été lu aux participants et des récipients de lait (issu ou non d'animaux clonés) leur ont été présentés. Chaque participant devait choisir la compensation minimale (entre 0 et 5 $) qu'il estimait juste pour échanger une tasse de lait « conventionnel » contre une tasse de lait issu de vaches clonées. Une compensation nulle signifiait une indifférence vis-à-vis du mode de production, une compensation de 5 $ signifiait une faible probabilité de consommer le deuxième type de lait.

La compensation moyenne demandée par les individus était de 2,65 $, avec des différences selon les sites : la plus élevée dans le magasin d'alimentation « naturelle » (3,18 $), la plus basse à l'université (1,44 $). Un quart de l'échantillon ne demandait pas de compensation, alors qu'un tiers demandait la compensation maximale de 5 $. Cette hétérogénéité des préférences pourrait conduire, lors d'une éventuelle mise sur le marché, à des étiquetages volontaires du lait garanti « conventionnel », comme cela s'est déjà produit avec le lait garanti sans Bst (somatotropine bovine, hormone augmentant la production laitière). Les consommateurs veulent pouvoir identifier ces produits pour faire leurs achats en connaissance de cause. L'article analyse aussi les possibles facteurs explicatifs de cette hétérogénéité, parmi lesquels les sensibilités et connaissances des répondants en matière d'éthique, de santé des animaux clonés, d'impacts environnementaux et de sécurité sanitaire des produits.

Madeleine Lesage, Centre d'études et de prospective

Source : Food Policy

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08/02/2018

Des mots à la bouche. Le journalisme gastronomique en France, Sidonie Naulin

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La télévision, la presse, l'édition, Internet, l'événementiel, les cours pour particuliers sont autant de secteurs qui illustrent l'engouement pour la cuisine, son omniprésence ressentie dans les médias depuis les années 2000, et l'apparition d'une nouvelle forme d'amateurisme gastronomique. Des mots à la bouche a pour objet de « comprendre comment sont fabriqués les dispositifs médiatiques, et notamment journalistiques » qui soutiennent et encouragent cet engouement. Ce sont ainsi les médias comme « dispositifs d'intermédiation marchande » qui sont étudiés, et en particulier leurs fonctions de mise en visibilité des biens, de réduction de l'offre pour faciliter les choix des consommateurs et de valorisation des biens exposés.

Pour cette riche et dense enquête sur le journalisme gastronomique, S. Naulin a mobilisé des méthodes variées : analyse de productions médiatiques, entretiens biographiques ou organisationnels, observations, production et exploitation de données quantitatives. Elle s'intéresse aux individus (échelle microsociologique), aux entreprises et professions (échelle mésociologique), et aux évolutions culturelles et économiques (échelle macrosociologique). Six chapitres rendent comptent de ces travaux. Les dispositifs médiatiques et leur évolution historique sont abordés dans les trois premiers : variations du positionnement du magazine Cuisine et Vins de France de 1947 à 2010 (chapitre 1), marché de la presse culinaire depuis les années 1980, et en particulier le lien entre stratégies des éditeurs, organisation du travail et qualité du produit (chapitre 2), blogs culinaires, tenus par des amateurs se positionnant aux frontières du journalisme gastronomique (chapitre 3).

Les trois chapitres suivants traitent des journalistes gastronomiques. Un portrait de ce groupe (modes d'accès au métier, types de « professionnalité », constitution des identités professionnelles) est dressé dans le quatrième chapitre. Le cinquième, quant à lui, s'intéresse à la construction de l'information en matière de restaurants et met en évidence son caractère collectif, avec un accord global sur le choix des sujets et leur angle de traitement. Enfin, le dernier chapitre est consacré à la construction de la notoriété des évaluateurs, à travers les trajectoires de singularisation d'Henri Gault et Christian Millau (années 1970), de François Simon (années 1990), et d'Alexandre Cammas et Luc Dubanchet (années 2000).

Julia Gassie, Centre d'études et de prospective

Lien : Presses Universitaires de Rennes

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Les métamorphoses du gras. Histoire de l'obésité du Moyen Âge au XXe siècle, Georges Vigarello

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Enfermés dans le présent de nos existences et dans l'actualité immédiate des États qui nous gouvernent, nous en oublions le temps long de l'histoire et la parenté des siècles passés avec les problèmes publics d'aujourd'hui. Cette cécité concerne tout particulièrement les questions alimentaires, que nous croyons nouvelles, modernes, presque nées de la dernière pluie, alors qu'elles sont immuables et consubstantielles à toute vie en société. C'est ce que montre cet ouvrage de G. Vigarello, réédité dans une version de poche accessible à un large public. Il y fait une analyse chronologique fine de l'évolution des regards et des jugements portés sur l'obésité.

Ces regards ont changé au gré des époques, des rapports sociaux, des sensibilités et des découvertes scientifiques. Le gras n'a pas toujours été dénoncé. Fut un temps, au Moyen Âge, où il symbolisait la puissance, l'ascendance, la réussite et le prestige. Puis ce « glouton médiéval », progressivement stigmatisé, devint un « balourd » à la Renaissance, mou, maladroit, incapable. Plus tard, le XVIIIe siècle insista sur l'irritabilité, l'impuissance et la perte de sensibilité des obèses ; il préconisa divers régimes inédits et, surtout, différencia un profil masculin (aux rondeurs acceptées) et un profil féminin (à qui cette tolérance était refusée). Face au « ventre bourgeois », le XIXe siècle positiviste se préoccupa d'ausculter, peser et comparer les gros, sur fond de nouvelle « théorie énergétique » de la nutrition. Au siècle dernier, l'avènement des loisirs, les avancées médicales, un rapport différent à l'intime et à la nudité, de nouvelles modes vestimentaires, l'individualisme et l'introspection psychique, etc., contribuèrent à un déplacement des valeurs et des inquiétudes. Les années 1920 et 1930 glorifièrent l'allure athlétique, la décennie 1970 vanta la souplesse et la minceur, puis commença le grand règne de l'entretien de soi et de la diététique, et même de la médicalisation de l'alimentation, avec son cortège de nouveaux « maux », « pathologies », « maladies » et « médicaments ». Dorénavant, l'obèse parle, détaille son malheur, confie ses souffrances aux médias, et est pris en charge par des professions et des politiques publiques voulant son bonheur privé au nom de l'intérêt général.

Comme Vigarello le rappelle en conclusion, la condamnation du gros domine fortement l'histoire de l'obésité. Les ressorts de cette condamnation changent avec le temps, ce qui justifie pleinement le recours à une approche historique. Culte des apparences, surveillance des contours, refus des laideurs n'ont pas cessé de se renforcer, pour aboutir à la condition corporelle contemporaine, qui à son tour demain sera dépassée...

Bruno Hérault, Centre d'études et de prospective

Lien : Éditions du Seuil

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06/02/2018

Consommation alimentaire responsable : quelles contributions du web social au changement et au renforcement des pratiques ?

Un article publié fin 2017 dans la Revue de l'organisation responsable s'intéresse à l'engagement des individus dans des communautés en ligne, et à son influence sur les changements de comportements vers une consommation alimentaire responsable. Ces aspects sont peu traités dans les publications scientifiques, sachant que si de nombreux consommateurs se disent sensibles à ces questions, un certain décalage est constaté entre discours, intentions et pratiques effectives. Une première analyse de 2 440 posts, extraits de 1 000 blogs et forums, a permis aux auteurs d'identifier cinq thèmes d'échanges : « la santé et le bien-être », « l'entreprise et la marque responsable », « la responsabilité individuelle », « une agriculture responsable et l'origine des produits », « le fait maison ». Dans un second temps, s'intéressant plus particulièrement à six communautés en ligne (données collectées entre janvier et mars 2016), ils distinguent quatre profils d'internautes et mettent au jour l'influence que ces derniers exercent sur les perceptions et comportements des autres membres, par exemple au moment-clé de la prise de conscience ou encore de l'accompagnement du changement. Se détachent en particulier des leaders d'opinion qui s'informent, partagent des éléments jugés fiables, créent du contenu, forment des communautés et les animent, partagent leurs expériences et contribuent par là-même à lever des freins budgétaires, organisationnels, psychologiques.

Source : Revue de l'organisation responsable

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17/01/2018

Une méta-analyse s'intéresse aux effets des nudges promouvant une alimentation plus saine

Dans un document de travail publié en décembre 2017, R. Cadario (IESEG) et P. Chandon (INSEAD) présentent une méta-analyse des résultats d'interventions visant à promouvoir, avec des nudges, une consommation alimentaire plus saine. Ces dispositifs, peu onéreux, connaissent un engouement croissant et une multiplication des publications scientifiques à leur sujet. Les auteurs apportent une contribution intéressante en étudiant une large gamme de nudges, en en proposant une catégorisation et en fournissant des premiers résultats permettant de prédire leur efficacité en fonction de différents paramètres. Sept types de nudges sont identifiés et classés en trois catégories, selon qu'ils cherchent à influencer ce que les consommateurs savent (cognitive nudges, par exemple l'étiquetage nutritionnel), ce qu'ils ressentent (affectives nudges), ou ce qu'ils font (behavioral nudges, par exemple le jeu sur la taille des portions ou des assiettes).

Cadre conceptuel proposé par les auteurs

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Source : INSEAD

Pour la méta-analyse, 81 articles ont été retenus, publiés avant fin 2016 et répondant à des caractéristiques précises : expériences de terrain, et non uniquement en laboratoire ou en ligne, testant uniquement des nudges, mesurant des actes, et non uniquement des intentions, de sélection de produits ou de consommation. Sur cette base, les auteurs évaluent que les outils étudiés conduisent à une baisse moyenne de 117 kcal consommées par jour et par individu ; l'effet des behavioral nudges est plus important (-186 kcal/jour) que celui des cognitive (-45) et des affective (-121). Par ailleurs, parmi les résultats, il apparaît qu'il est plus facile, pour les individus, de réduire leur consommation de produits peu sains que d'augmenter celle de produits sains ; que les interventions en épicerie ont des effets moins importants (-60 % en moyenne) que celles en restaurant ou cafétéria ; que les études conduites aux États-Unis sont plus efficaces que celles dans autres pays ; etc.

Les auteurs identifient également des pistes de recherche : sur les nudges, sur leur combinaison avec d'autres types d'interventions (incitations économiques par exemple), sur les caractéristiques socio-économiques des individus, etc. Enfin, pour avoir une méta-analyse « vivante », ils proposent à leurs confrères un outil en ligne pour corriger et enrichir les données.

Julia Gassie, Centre d'études et de prospective

Source : INSEAD

12/01/2018

Que manger ? Normes et pratiques alimentaires, François Dubet (dir.)

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L'alimentation n'a que peu intéressé les pères fondateurs des sciences sociales, qui y voyaient un objet trivial et secondaire. Depuis une trentaine d'années, elle bénéficie au contraire d'une attention soutenue de la part des jeunes chercheurs. Cet engouement s'explique par les crises sanitaires et les enjeux de santé publique, par l'ouverture des marchés et la mondialisation des cultures alimentaires, mais aussi par la place croissante des pratiques culinaires dans la construction des identités sociales. Les approches et les sujets évoluent, les méthodes et les terrains se diversifient. Le présent ouvrage témoigne de ce renouvellement et montre la progression du front de la recherche, à travers une douzaine d'articles des lauréats de l'appel à projets 2015-2016 de la Fondation pour les sciences sociales, dont le thème était : « Que manger ? Pratiques, normes et conflits alimentaires ». L'objectif de cette fondation est de faire connaître à un large public des travaux académiques innovants ancrés dans une solide démarche empirique.

La première partie traite des normes, coutumes, conventions et régulations alimentaires. Si les mangeurs ont toujours été encadrés et surveillés par les États, les religions ou les corporations, ces modalités de contrôle ne cessent d'évoluer et de se déplacer. Ainsi, S. Brimo montre que l'on passe de plus en plus de règles juridiques homogènes, édictées unilatéralement, contraignantes et sanctionnables, à des règles administratives molles, composites, facultatives, qui sont de l'ordre de la recommandation et du conseil. R. Schweizer souligne, lui, comment l'utilisation commerciale de l'origine « Suisse » a progressivement gagné en légitimité, entre intérêts économiques, expressions identitaires et compromis politiques. De son côté, S. Naulin explique pourquoi les critiques de restaurants dans les médias sont toujours convergentes et positives : manque de temps pour découvrir de nouveaux établissements, manque d'argent obligeant à se faire inviter, formatage des jugements par les attachés de presse, crainte des sanctions.

La seconde partie est consacrée aux comportements et modèles alimentaires. Y. Lohéac démontre, expérimentations à l'appui, que la faim est mauvaise conseillère : elle nous conduit à acheter plus d'aliments et à les payer plus cher que lorsque nous sommes rassasiés. Quant à A. Dupuy, son analyse de la division sexuelle du travail alimentaire à destination des enfants révèle que la réduction (timide) des inégalités homme-femme n'abolit pas les barrières de genre : la cuisine des pères diffère de celle des mères en de nombreux points (ingrédients, recettes, rapports au goût et à la santé, etc.). Citons enfin l'article de G. Comoretto qui, ayant observé la vie de cantines scolaires du point de vue des enfants, y décrit les processus de socialisation, de ségrégation et de domination.

Bruno Hérault, Centre d'études et de prospective

Lien : Éditions La Découverte

Le Déméter 2018, Huiles végétales : enjeux, marchés et controverses

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Dans un dossier d'une douzaine d'articles, le rapport Déméter 2018 dresse un tableau détaillé des défis et des controverses associés à la forte croissance des huiles végétales au plan mondial. Dans le premier article, A. Rival (Cirad) dessine une géopolitique des huiles végétales, d'où il ressort que 85 % de la production mondiale reposent sur quatre sources : Amérique pour le soja, Europe pour le colza, mer Noire pour le tournesol et Asie du Sud-Est pour le palme. Cependant le barycentre de la consommation se déplace vers l'Asie, tandis que l'Afrique attire les investisseurs comme front pionnier, selon J.-M. Roda (Cirad). En résultent des rivalités entre le Nord et le Sud (par exemple, en Afrique, entre investisseurs occidentaux – Archer, Bunge, Cargill et Dreyfus – et malaisiens), mais aussi entre modèles de production, intensifs en intrants au Nord, en main-d’œuvre au Sud.

La forte croissance du marché mondial des huiles s'explique principalement par la transition alimentaire dans les pays émergents. Cependant, pour P. Dusser (Groupe Avril), c'est la consommation de protéines qui devrait tirer le marché dans la prochaine décennie, sachant que les cultures étudiées ici permettent de produire, dans des proportions variables, à la fois de l'huile et des protéines. Les usages non alimentaires auraient, d'après D. Pioch (Cirad), un avenir prometteur dans le domaine de la chimie, mais plus incertain en matière énergétique.

Les préférences des consommateurs évoluent : J.-M. Lecerf (Institut Pasteur) rappelle que si les lipides ont été les premières cibles des recommandations nutritionnelles, il n'existe pas sur le plan diététique d'huile parfaite. La tendance est aujourd'hui à la diversification des huiles pour des motivations éthiques ou de santé. De plus, la perception des consommateurs est au cœur d'enjeux stratégiques pour le secteur. Les allégations « sans huile de palme » sont ainsi jugées trompeuses par plusieurs auteurs, car injustifiées sur le plan nutritionnel et contre-productives en matière de durabilité. En parallèle, l'huile de palme est devenue un laboratoire d'innovations en matière de certification environnementale, associant l'industrie et les ONG. Les tensions internes à ces dispositifs, que décrit E. Cheyns (Cirad), en soulignent les limites, et la question de la durabilité des modes de production apparaît clairement comme l'un des enjeux pour l'avenir.

Alexandre Martin, Centre d'études et de prospective

Lien : Le Déméter

10/01/2018

La chaîne Marks & Spencer publie des données sur l'utilisation d'antibiotiques chez les animaux d'élevage

Dans un article du 20 décembre, le Guardian fait état de l'initiative de la chaîne de supermarchés britannique Marks & Spencer qui publie, sur son site Internet, des données sur les quantités d'antibiotiques utilisées chez les animaux ayant fourni les denrées proposées à la vente. Selon l'auteur, ces quantités sont inférieures à l'objectif fixé par le programme britannique « Responsible use of medecine in agriculture alliance ». Cette décision, qui fait suite à un rapport sur l'usage des antibiotiques en production animale, traduit l'engagement des distributeurs pour lutter contre les antibiorésistances, encourageant par leur approvisionnement les pratiques économes des éleveurs.

Source : The Guardian

Utiliser les instruments de marché pour mieux distribuer l'aide entre banques alimentaires : l'expérience Feeding America

Dans le Journal of Economic Perspectives, C. Prendergast, professeur d'économie à l'université de Chicago, retrace et analyse la mise en place d'un système d'enchères original pour distribuer l'aide alimentaire entre les entités locales du réseau de Feeding America. Effectif depuis 2005, Choice System repose sur des enchères quotidiennes via Internet et une monnaie dédiée, le share. Il permet d'allouer les denrées du niveau central aux banques alimentaires locales en reflétant au mieux les besoins réels. Choice System a été conçu par un comité associant membres de l'association et universitaires. Malgré des réticences initiales sur le principe d'utiliser un instrument de marché, le système a permis, selon l'auteur et chiffres à l'appui, un meilleur ciblage des volumes et denrées attribuées par rapport au système précédent, fondé sur la file d'attente. Pour lui, le point crucial a résidé dans une conception fine du système, afin de se prémunir d'éventuels dérives ou effets pervers.

Source : Journal of Economic Perspectives

09/01/2018

Un rapport de l'OMS Europe prône la réduction de la teneur en sucre dans les produits alimentaires transformés

À l'occasion du récent colloque consacré aux systèmes alimentaires durables au service d'une alimentation saine, l'OMS Europe a présenté une étude, basée sur les données de son plan de nutrition 2015-2020, et réalisée en collaboration avec le centre pour la politique alimentaire de l'université de Londres. Ce rapport traite de l'utilisation du sucre libre par les industriels de l'agroalimentaire, pratique fréquente pour améliorer, à faible coût, le goût, la texture ou la conservation des produits. Sur ce sujet, les auteurs jugent nécessaire une action résolue pour faire baisser la teneur en sucre des produits industriels. L'étude identifie des mesures qui pourraient contribuer à diminuer ce taux : outre les actions gouvernementales (taxation des boissons sucrées, restriction du marketing et des publicités auprès des enfants, mises en garde nutritionnelles), les auteurs mentionnent l’intérêt d'une plus grande disponibilité en alternatives naturelles au sucre, de type stévia ou fruit monk. Sur cette base, l'OMS invite les États européens à proposer leurs commentaires et suggestions.

Source : Organisation mondiale de la santé, office régional pour l'Europe

14/12/2017

Atténuation des émissions de gaz à effet de serre et sécurité alimentaire

Dans une publication d'Environmental Research Letters, un collectif d'une douzaine de chercheurs explore, à 2050, les arbitrages entre sécurité alimentaire et stratégie d'atténuation. Pour ce faire, ils mobilisent le modèle économique d'équilibre partiel GLOBIOM, qui englobe les secteurs agricole et forestier. Cette approche prend en compte, de façon endogène, trois mécanismes d'atténuation : i) des leviers techniques visant le CH4, le N20 ainsi que le carbone séquestré dans les sols, ii) des changements structurels comme les types de systèmes de production (animal et végétal) ou dans les échanges commerciaux, iii) les rétroactions de la demande alimentaire suite aux variations de prix des denrées. La sécurité alimentaire est, quant à elle, considérée via le calcul des calories disponibles par habitant et par jour, la méthode FAO permettant d'estimer le nombre de personnes sous-nutries.

Les auteurs ont construit un ensemble de scénarios, en plus de celui de référence sans changement climatique, qui croisent différentes modalités parmi lesquelles :

- 5 seuils d'augmentation de température, auxquels sont associés une demande en biomasse destinée à l'énergie, et un prix de la tonne CO2 éq ;

- 8 applications différentes du prix carbone variant selon les zones géographiques (ex : pays de l'Annexe-I du protocole de Kyoto seulement, ou avec la Chine).

Pour un scénario avec une cible de + 1,5°C, le secteur des terres (agriculture, forêt et changement d'usage des terres), contribuerait à l'atténuation à hauteur de 7,9 GtCO2 éq par an en 2050. Par rapport au scénario de référence, la disponibilité alimentaire (calories par habitant et par jour) chuterait de 285 unités (110 si la demande est plus inélastique), ce qui signifierait 300 (80 dans le second cas) millions de personnes sous-nutries en plus. Dans un autre scénario, le prix carbone est appliqué à tous les pays pour les émissions de CO2, et seulement pour les pays de l'Annexe-I pour le CH4 et le N20. Il permet d'atténuer de 4,8 GtCO2 éq par an avec un moindre impact sur les calories disponibles (-140 calories). L'introduction de la séquestration de carbone par les sols, sans effet sur les rendements, permet encore d'augmenter ce potentiel à 11,4 GtCO2 éq et de limiter l'impact sur la sécurité alimentaire.

Élise Delgoulet, Centre d'études et de prospective

Source : Environmental Research Letters

13/12/2017

Terra Nova s'intéresse aux enjeux et opportunités d'une alimentation moins carnée

Dans un rapport publié en novembre, le think tank Terra Nova s'intéresse aux enjeux liés à la consommation de viande et envisage les arguments en faveur d'une « transition alimentaire », formulant in fine onze propositions ouvertes. La première partie revient sur les facteurs économiques, sociaux, techniques et culturels ayant conduit à la forte augmentation de la consommation de viande au XXe siècle. La seconde traite, quant à elle, de la « triple crise de la viande » : crise économique, crise de confiance, crise de légitimité autour des questions d'empreinte écologique et de montée de la sensibilité à la souffrance animale. On rappellera notamment que la consommation française de viande, en baisse, est revenue en 2013 au niveau de la fin des années 1980. Les « promesses de la révolution végétale », venant en appui à la nécessaire transition alimentaire, font l'objet de la troisième partie. Cette transition reposerait, dans les prochaines décennies, sur une division par deux de la consommation de « chair animale » par habitant, et sur l'inversion du rapport entre protéines végétales et protéines animales. Au chapitre des solutions, le rapport met particulièrement en avant la « FoodTech » (voir une autre brève sur ce blog) et les innovations autour des protéines végétales. Il s'intéresse également aux consommateurs : goût, lien aux terroirs, restauration scolaire, prix, campagnes d'information en nutrition.

La consommation individuelle de viande en France (en kgec par habitant)

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Source : Terra Nova

La quatrième partie présente les onze propositions, insistant sur l'évolution progressive et lente des régimes alimentaires, liée aux habitudes, normes sociales et préférences culturelles, mais également à la nécessité d'une stratégie de long terme « pour organiser et accélérer la transition de notre modèle agricole et de ses modes de production ». Parmi ces propositions, on peut retenir, par exemple, la généralisation de l'option du « repas alternatif végétarien » et l'imposition d'un jour végétarien par semaine dans la restauration scolaire du secondaire, la promotion, sur les produits à la vente, de la mention visible du mode d'élevage et d'abattage, ou encore une meilleure valorisation des végétaux grâce aux signes officiels de la qualité et de l'origine (SIQO).

Si certains points mériteraient d'être précisés ou développés, ce rapport s'appuie sur une palette large d'analyses, de la production à la consommation, des questions médicales aux problématiques environnementales, etc. Il contribue ainsi au débat sur l'évolution des régimes alimentaires.

Julia Gassie, Centre d'études et de prospective

Source : Terra Nova

17:19 Publié dans Alimentation et consommation, Société | Lien permanent | Tags : terra nova, viande, consommation, protéines |  Imprimer | | | | |  Facebook

Agir sur les comportements nutritionnels : une expertise collective de l'Inserm

Depuis le mois de novembre, l'intégralité de l'expertise collective conduite par l'Inserm, Agir sur les comportements nutritionnels. Réglementation, marketing et influence des communications de santé, est accessible en ligne. Une synthèse de cet important et riche travail avait déjà été diffusée en avril. Dans le cadre de la révision des repères nutritionnels, cette expertise répond à la préoccupation de Santé Publique France concernant l'efficacité des messages nutritionnels inclus dans les publicités alimentaires depuis 2007, et aborde plus généralement leur impact en matière de santé publique. Le groupe d'experts s'est appuyé sur une revue de littérature scientifique (environ 700 publications), des communications d'intervenants extérieurs et une étude exploratoire sur l'attention portée aux messages sanitaires (utilisation d'un système d'eye tracking). Le dispositif d'information étudié étant spécifiquement français, peu d'évaluations en sont disponibles et d'autres travaux ont donc été mobilisés, notamment en économie, marketing, psychologie, sciences du comportement et sciences de l'information et de la communication.

Le rapport comporte trois parties traitant i) de la réglementation et du marketing alimentaire, ii) des effets des messages nutritionnels et iii) des processus de réception et traitements des messages sanitaires par les individus. Parmi les principaux enseignements mis en avant dans la synthèse, on retiendra notamment que le dispositif étudié repose sur le « paradigme du consommateur responsable ». D'autre part, les mesures adoptées par certaines États pour limiter l'exposition des enfants au marketing alimentaire ont un faible impact. Des critères d'efficacité de l'information nutritionnelle sont identifiés : en particulier, les « recommandations alimentaires doivent être simples, compréhensibles, spécifiques et faciles à mettre en application », avec un « format court, coloré et illustré ». L'importance du niveau d'attention du récepteur, les représentations du risque, la résistance au changement ou encore le recours aux émotions positives sont autant de points clés soulignés pour la conception des messages nutritionnels. À la fin de cette expertise, les experts proposent un ensemble de recommandations pour l'action publique et identifient des pistes de recherche, par exemple sur la connaissance des populations cibles.

Julia Gassie, Centre d'études et de prospective

Sources : Inserm, La Documentation française

08/12/2017

Journée scientifique de Météo et Climat sur la place de la forêt et de l'agriculture françaises face aux changements climatiques

La Société française de la météorologie et du climat, Météo et Climat, a organisé sa 10e Journée scientifique sur le thème « Changements climatiques : quelle place pour notre forêt et notre agriculture demain ? ». Elle a réuni neuf intervenants qui ont présenté les modifications attendues, et d'ores et déjà perceptibles, du changement climatique sur les productions végétales, animales et forestières, ainsi que les réponses agronomiques, technologiques et politiques pouvant y être apportées.

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Source : Météo et Climat

Thierry Caquet (directeur scientifique pour l'environnement de l'Inra) a dressé un panorama des problématiques alimentaires, nutritionnelles et climatiques existantes, des types d'adaptations envisageables et de certaines voies explorées pour y répondre. Ensuite, les présentations (disponibles en ligne) ont couvert des échelles, objets et disciplines variés. Parmi les messages transversaux, la question de la ressource en eau est revenue comme un enjeu majeur et insuffisamment appréhendé. La nécessité de développer une recherche expérimentale, appliquée, dédiée à l'adaptation face au changement climatique a également été rappelée.

À cet égard, l'exemple de la vigne, développé par Hans Reiner Schultz, président de l’université de Geisenheim (Allemagne), était particulièrement frappant. Une réduction mondiale du rendement de la vigne est déjà observée et a été attribuée par plusieurs travaux académiques au réchauffement climatique. L'augmentation de la température est par exemple perceptible jusqu'à 12 mètres de profondeur. Face à la variabilité de la pluviométrie, la question de l'érosion des sols apparaît majeure pour une culture souvent basée sur des parcelles en pente, tout comme la question de la sécheresse. L'ampleur de la réduction de la production à attendre demeure néanmoins très incertaine, tant nos connaissances sur la capacité d'adaptation des cépages en conditions réelles et diversifiées sont limitées, appelant ainsi à des recherches à l'échelle des parcelles. Il est en revanche certain que les ressources génétiques mondiales de la vigne ont été à ce jour peu exploitées et que la diversité génétique des porte-greffes serait à étendre.

Vanina Forget, Centre d'études et de prospective

Source : Météo et Climat

07/12/2017

Les coûts cachés de l'alimentation au Royaume-Uni

Sustainable Food Trust a publié en novembre les résultats de ses travaux sur les coûts cachés de l'alimentation au Royaume-Uni. S'appuyant sur la littérature existante, les auteurs ont cherché à quantifier ces externalités négatives selon plusieurs entrées, elles-mêmes déclinées en diverses thématiques : dégradation des ressources naturelles (ex : pollution de l'air), pertes de biodiversité, coûts de santé liés à l'alimentation (ex : maladies cardiovasculaires) et à la production (ex : antibiorésistance), subventions au secteur agricole et régulation, importations et leurs propres coûts cachés.

Il apparaît ainsi que, pour chaque livre « alimentaire » dépensée par un consommateur, les coûts additionnels s'élèvent également à une livre. Ces coûts ne sont pas pris en compte dans le prix de vente des produits et sont couverts par d'autres mécanismes (impôts, traitement de l'eau, etc.). L'objectif de cette publication est d'attirer l'attention, de donner des éléments de discussion et d'action pour les pouvoirs publics et les acteurs des systèmes alimentaires, auxquels des recommandations sont destinées en fin de rapport.

Répartition des coûts des externalités négatives du système alimentaire britannique en 2015

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Source : Sustainable Food Trust

Source : Sustainable Food Trust