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17/05/2022

Des jachères environnementales peuvent induire une intensification inattendue

Début 2022, la revue Environmental Modeling & Assessment a publié une évaluation des impacts environnementaux indirects des politiques de mise en jachère de terres arables. Les jachères font partie des politiques agricoles européennes et américaines depuis la fin des années 1980. Visant initialement à limiter une offre devenue abondante et à résorber les stocks publics, la Politique agricole commune (PAC) leur a conféré un caractère obligatoire à partir de 1992. L'introduction du paiement vert, avec la prise en compte des surfaces d'intérêt écologique, en 2013, peut être lue comme une évolution vers une jachère facultative, à visée environnementale, favorable en particulier à la biodiversité.

La mise en jachère d'une partie des terres d'une exploitation pourrait toutefois encourager l'intensification de l'usage des terres restantes, afin de maintenir les revenus. Pour le vérifier, les auteurs de l'article ont estimé la réponse de la demande en intrants (engrais et pesticides) aux variations du montant des aides dévolues aux jachères. Ils ont développé un modèle économétrique original d'allocation des surfaces et des ressources, par exploitation, à partir de la comptabilité de plus de 500 exploitations de grandes cultures de la Meuse, entre 2006 et 2010.

En estimant les élasticités, ils confirment que les surfaces mises en jachères sont sensibles à l'importance des aides qui leur sont dédiées, comme l'est la demande des exploitations en engrais et pesticides, et les quantités utilisées par hectare cultivé. Il semble ainsi, toutes choses égales par ailleurs, que les exploitants soient paradoxalement incités à intensifier leur production sur les surfaces restantes. Pour augmenter les surfaces en jachères non obligatoires de 5 %, il ressort de la simulation qu'il faudrait une augmentation des aides de près de 34 %, pour compenser les pertes en grandes cultures. Elle induirait une intensification et une demande accrue de 2 % en engrais et de 1 % pour les pesticides, à moins d'appliquer simultanément une augmentation des taxes sur ces intrants.

Sans qu'il s'agisse d'une évaluation environnementale complète, les auteurs mettent en évidence les risques d'effets induits, en contradiction avec les objectifs environnementaux affichés. Ils plaident ainsi pour des évaluations ex ante afin de coordonner et mettre en cohérence les différentes politiques publiques.

Jean-Noël Depeyrot, Centre d'études et de prospective

Source : Environmental Modeling & Assessment

12:20 Publié dans 2. Evaluation, Agronomie, Environnement, PAC | Lien permanent | Tags : jachère, intrants, évaluation, biodiversité |  Imprimer | | | | |  Facebook

16/05/2022

Une évaluation des impacts du programme Leader

S'il ne représente qu'une faible part de l'enveloppe du second pilier de la Politique agricole commune (PAC), le programme de soutien au développement rural Leader n'en demeure pas moins un dispositif emblématique, en raison de son fonctionnement particulier : approche ascendante et transversale, mise en œuvre par des groupes d'action locale (GAL) réunissant l'ensemble des acteurs d'un territoire, etc. La programmation pour la période 2014-2020 a été évaluée par un consortium réunissant organismes de recherche et bureaux d'études (ADE, université de Goulcestershire, Institut autrichien d'études régionales). Le rapport final a été publié en mars 2022.

Le document, très volumineux, est structuré en cinq parties. La troisième, en particulier, présente les résultats d'une revue de la littérature concernant le développement local des zones rurales européennes, la mise en œuvre de Leader et ses évaluations précédentes. Elle est complétée par l'analyse des résultats d'un questionnaire administré auprès des GAL et autorités de gestion du programme. Elle montre que la plupart des GAL considèrent que le programme mis en œuvre entre 2014 et 2020 a été très efficace pour soutenir la création d'entreprises et d'emplois, mais les projets financés n'ont que peu bénéficié aux catégories sociales les plus défavorisées. L'efficience du dispositif est, elle, amoindrie par sa lourdeur administrative et les coûts qu'elle engendre. La charge administrative est toutefois différemment perçue d'une autorité de gestion à l'autre : très forte au Danemark, en Slovaquie et en France, mais beaucoup plus faible au Royaume-Uni, en Finlande et en Estonie.

La quatrième partie du rapport présente les résultats d'études de cas conduites dans dix pays de l'Union européenne. Il s'agissait d'identifier les facteurs susceptibles d'accroître l'efficacité du programme (implication de l'ensemble des acteurs, animation, démarche participative, etc.), et, à rebours, ceux risquant de la limiter (manque de ressources, rigidité du cadre réglementaire, etc.). Enfin, dans la dernière partie, les auteurs présentent leurs réponses aux quatorze questions évaluatives posées et ils formulent diverses recommandations : renforcement des réseaux nationaux et européens du programme, simplification du cadre réglementaire, etc.

Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective

Source : Commission européenne

12:20 Publié dans 2. Evaluation, 4. Politiques publiques, PAC, Territoires | Lien permanent | Tags : développement rural, leader, pac, évaluation |  Imprimer | | | | |  Facebook

20/09/2021

Les stratégies européennes « biodiversité » et « de la ferme à la fourchette » : quels impacts économiques et environnementaux ?

Deux stratégies européennes fixent des cibles à atteindre dans les domaines de l'agriculture et de l'environnement d'ici à 2030 : les stratégies biodiversité (Biodiversity Strategy, BDS) et « de la ferme à la fourchette » (Farm to Fork, F2F). Le Centre commun de recherche de l'Union européenne a publié en juillet un rapport sur les effets environnementaux et économiques potentiels de l'atteinte de certaines de ces cibles. Les auteurs se concentrent sur celles relatives à la réduction de l'usage de pesticides et des pertes de nutriments dues à l’utilisation de fertilisants (- 50 % d'ici 2030). Ils s'intéressent aussi à la part de terres cultivées en agriculture biologique (+ 25 % d'ici 2030) et à la part de « particularités topographiques à haute diversité » (ex. : haies) dans l'assolement (+ 10 % d'ici à 2030).

Le travail est conduit avec CAPRI (Common Agricultural Policy Regionalised Impact Analysis), un modèle macro-économique de statistiques comparatives en équilibre partiel des secteurs agricoles et du premier niveau de transformation. Trois scénarios permettant d'atteindre les cibles choisies sont étudiés et comparés à un scénario de référence sans cible. Dans le premier, la Politique agricole commune (PAC) reste similaire à celle de 2014-2020. Dans le deuxième, elle évolue selon les propositions législatives de la Commission (juin 2018). Dans le troisième, un plan de relance européen est de plus mis en œuvre, avec des aides supplémentaires à l'investissement.

Les résultats montrent une baisse de la production européenne : dans le scénario 1, elle est de - 15 % pour les céréales et oléagineux, - 12 % pour les légumes et les cultures permanentes, - 14 % pour la viande et - 10 % pour le lait. Cela impacterait les importations et les exportations, et générerait des variations de prix et donc de revenu pour les producteurs.

Effets environnementaux de l'atteinte des cibles dans le scénario 1 ( % par rapport au scénario de référence sans cibles, en 2030)

strategies 1.jpg

Source : Centre commun de recherche de l'Union européenne

Lecture : la colonne « F2F and BDS targets & CAP 2014-2020 scenario » présente les résultats du premier scénario. Sont estimées les émissions d'azote (nitrogen), d'ammoniac (ammonia), de méthane (CH4), de protoxyde d'azote (N2O), ainsi que la part des réductions d'émissions de GES non-CO2 qui fuit (ligne Leakage). Les émissions nettes sont précisées dans la dernière ligne.

En parallèle, l'atteinte des quatre cibles sélectionnées aurait des impacts environnementaux positifs sur le surplus azoté et les pertes d'azote, les émissions d'ammoniac, de méthane, de protoxyde d'azote et de CO2. La baisse des émissions autres que de CO2 serait de 14,8 %, mais les deux tiers de cette baisse « fuiteraient » hors de l'UE, par l'augmentation des importations de certains produits. Ce taux de fuite ne serait plus que de 51 % si le projet de nouvelle PAC était mis en œuvre (figure ci-dessus pour le scénario 1, ci-dessous pour les scénarios 2 et 3). Les émissions de gaz à effet de serre (GES) du secteur agricole européen diminueraient alors de 28,4 % d'ici à 2030.

Effets environnementaux de l'atteinte des cibles dans les scénarios 2 et 3 ( % par rapport au scénario de référence sans cible, en 2030)

strategies 2.jpg

Source : Centre commun de recherche de l'Union européenne

Lecture : la colonne « F2F and BDS targets & CAP LP » présente les résultats pour le deuxième scénario. La colonne « F2F and BDS targets & CAP LP + NGEU » présente les résultats pour le troisième scénario.

Estelle Midler, Centre d'études et de prospective

Source : Centre commun de recherche de l'Union européenne

13:11 Publié dans 4. Politiques publiques, Agronomie, Environnement, PAC | Lien permanent | Tags : ue, strategie biodiversite, f2f, pesticides |  Imprimer | | | | |  Facebook

15/09/2021

« Cultiver l’emploi », un dossier consacré à la PAC

La revue Projet consacre un dossier à la réforme de la Politique agricole commune (PAC), abordée sous l'angle de l’emploi. De nombreux experts contribuent à ce numéro, constatant que ce sujet est un absent majeur de la PAC depuis son origine. Parmi ces contributeurs, Jean-Marie Séronie rappelle combien les objectifs européens ont évolué depuis les années 1960, laissant toutefois la question de l’emploi dans un « angle mort ». Gilles Bazin explique comment ces choix européens et nationaux ont favorisé l’agrandissement des exploitations au détriment du renouvellement des agriculteurs. Partant de ce constat qui touche tous les pays d’Europe, Cécile Détang-Dessendre et Laurent Piet s’interrogent sur une conditionnalité sociale des aides, alors que Dacian Ciolos, ancien commissaire à l'Agriculture et au Développement rural, appelle de ses vœux une PAC rebâtie sur des critères d’utilité sociale et environnementale.

Source : Revue Projet

11/05/2021

Évaluation des effets de la PAC sur le renouvellement des générations d'agriculteurs

Face au problème du vieillissement des agriculteurs de l'Union européenne, la Commission a commandé une évaluation pour savoir si la PAC favorisait le renouvellement des générations, le développement local et l'emploi dans les zones rurales. Il en ressort que les instruments de cette politique publique produisent globalement les effets attendus, mais de façon variable selon les territoires et le contexte socio-économique des pays, et qu'ils sont plus adaptés aux transferts des exploitations au sein du cadre familial qu'à une cession de celles-ci à des tiers. Par ailleurs, l'accès à la terre reste le principal obstacle à l'installation, dans un contexte de marché du foncier atone. La Commission souligne également l'importance des réglementations nationales pour traiter les questions de renouvellement générationnel. Il s'agit par exemple du rôle des régimes de retraite dans la préférence des agriculteurs à rester actifs et continuer à percevoir les aides au revenu (premier pilier de la PAC) plutôt que leur retraite.

Proportion des agriculteurs de moins de 35 ans (en haut) et de plus de 65 ans (en bas)

renouvellement.jpg

Source : Commission européenne (Direction générale de l’agriculture, Eurostat)

Source : Commission européenne

10/05/2021

Les paiements des mesures agro-environnementales : stables, croissants ou décroissants dans le temps ?

Les mesures agro-environnementales (MAE) offrent aux agriculteurs des paiements annuels, dont les montants sont stables sur une période déterminée (ex. 100 €/an/ha pendant 5 ans). Dans le même temps, elles sont un fort levier de transition agro-écologique des exploitations. Dans ce cadre, des séquences de paiements croissants ou décroissants pourraient s'avérer plus efficaces, pour accompagner le changement de pratiques, et être préférées par les exploitants.

Des chercheurs et chercheuses d'Inrae ont donc conduit une expérience (voir figure) pour tester différentes séquences de paiements. 123 agriculteurs de Charente-Maritime y ont participé, chacun devant choisir entre plusieurs MAE ciblant la couverture des sols, les diverses options étant présentées sur des cartes de choix. Les résultats, publiés dans le numéro de mai de la revue Ecological Economics, montrent que les agriculteurs sont satisfaits des paiements stables dans le temps, et que certains exploitants (les plus patients et les moins averses au risque) semblent défavorables aux paiements décroissants. Ces résultats suggèrent qu'il n'y aurait donc pas lieu d'introduire une progressivité ou une dégressivité des aides des MAE pendant la durée d'engagement de l'agriculteur.

Exemple de carte de choix

mae.jpg

Source : Ecological Economics

Lecture : l'agriculteur doit choisir entre le contrat A, le contrat B et le statu quo. Par exemple, dans le cas du contrat A, la technique de semis du couvert est imposée, le couvert doit être mis en place pour 3 mois, le paiement annuel moyen est de 160 €/ha et le paiement est décroissant de la première à la cinquième année.

Source : Ecological Economics

20/04/2021

Évaluation des Programmes de développement rural 2014-2020 sur le transfert de connaissances, le conseil et l'innovation

Alors que la prochaine programmation de la Politique agricole commune (PAC) est en cours de négociation, la Commission européenne a récemment mis en ligne une évaluation des Programmes de développement rural (PDR) sur l'échange de connaissances, le conseil et l'innovation dans les secteurs agricole et forestier, et dans les zones rurales. Ce travail comportait seize questions évaluatives portant sur la logique d'action, l'efficacité, l'efficience, la pertinence et la cohérence des mesures déployées. Il a mobilisé une grande diversité de méthodes qualitatives (revue de littérature, entretiens avec les parties prenantes, enquêtes auprès de bénéficiaires, études de cas) et quantitatives (analyse de données).

L'évaluation montre que la part des budgets des PDR consacrée au transfert de connaissances, au conseil et à l'innovation, bien qu'en augmentation par rapport à la précédente programmation, demeure faible (en moyenne 3,68 % du budget total). De plus, les ressources allouées sont peu mobilisées, en raison de lourdeurs administratives. Pour autant, ces actions semblent avoir des résultats prometteurs : le nombre d'heures de formation dispensées et celui d'agriculteurs formés par euro dépensé sont en augmentation au niveau européen. Plus spécifiquement, l'évaluation met en exergue le succès du Partenariat européen pour l'innovation (PEI), qui vise notamment à réunir chercheurs, conseillers et agriculteurs au sein de groupes opérationnels : l'objectif de 3 200 groupes devrait être atteint d'ici la fin de la programmation. Les impacts de ces dispositifs sont toutefois difficiles à apprécier et ils demeurent vraisemblablement faibles : les études de cas montrent qu'ils ne touchent qu'une petite partie des professionnels.

En conclusion, les auteurs formulent douze recommandations. Plusieurs d'entre elles visent à élargir le périmètre des agriculteurs touchés par ces mesures afin d'en renforcer les effets, par exemple : garantir l'accès de tous à un service de conseil, en mobilisant pour cela les ressources financières nécessaires ; concevoir des dispositifs spécifiquement dédiés aux publics éloignés des dispositifs classiques.

Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective

Source : Commission européenne

13/01/2021

En Bavière, 30 à 50 % des aides du 1er pilier de la PAC sont capitalisés dans les fermages

Des chercheurs autrichiens ont récemment publié des résultats sur la proportion des paiements liés à la PAC capitalisée dans la valeur des fermages. Cette analyse empirique a été menée sur un échantillon de 3 000 exploitations bavaroises, pour la période 2006-2011. Réalisée sur une seule région, la Bavière, pour garantir un même système de soutien, l'étude a tout d'abord permis de différencier les impacts selon le type d'aide. Ainsi, chaque euro versé contribue à une augmentation des loyers agricoles de 30 centimes pour les aides du premier pilier, et de 40 à 50 centimes pour celles liées aux zones défavorisées. À l'inverse, les paiements du second pilier n'ont pas d'impact significatif.

Ces constats varient fortement au sein d'une même région, en fonction de la qualité des terres, de la taille des exploitations ou de la proportion de terres en fermage : plus celles-ci sont importantes, plus la capitalisation est élevée. Près de la moitié des terres exploitées en Bavière est louée. Dans ce contexte, les auteurs s'interrogent sur l'efficience des aides directes en matière de soutien au revenu des agriculteurs, puisqu’entre 30 et 50 % rémunèrent in fine les propriétaires fonciers.

Source : European Review of Agricultural Economics

12:55 Publié dans Exploitations agricoles, PAC | Lien permanent | Tags : pac, premier pilier, fermage, exploitations agricoles |  Imprimer | | | | |  Facebook

16/11/2020

Réformes de la Politique agricole commune et aversion au risque des agriculteurs : enseignements d'une étude empirique en Italie

Un article publié en septembre 2020 dans la European Review of Agricultural Economics propose une estimation empirique de l'évolution temporelle de l'aversion au risque des agriculteurs italiens. Il analyse l'influence sur celle-ci des réformes successives de la Politique agricole commune (PAC) et des chocs climatiques. Comme le soulignent les auteurs, jusqu'ici peu d'études se sont intéressées aux facteurs pouvant modifier l'aversion au risque, en dépit du rôle important de ce paramètre dans les choix de production et d'investissement.

L'étude porte sur 36 600 exploitations agricoles italiennes spécialisées en grandes cultures, sur la période 1989-2009. Elle mobilise les données issues du réseau d'information comptable agricole national. Les auteurs utilisent la méthode d'estimation économétrique de Antle, qui consiste à inférer l'aversion au risque des agriculteurs à partir des choix de production qu'ils effectuent, via leur influence sur la distribution de probabilités de leurs profits. L'hypothèse de stabilité de l'aversion au risque sur différentes sous-périodes est aussi envisagée grâce à des tests de Wald.

L'analyse montre d'abord que cette aversion des agriculteurs italiens, en grandes cultures, a été positive sur l'ensemble de la période 1989-2009, confirmant les travaux antérieurs. Mais elle n'a pas été constante dans le temps : elle a augmenté entre 1993 et 1995, lors de la phase de transition liée à la réforme Mac Sharry de la PAC (baisse des prix garantis, aides découplées). Elle a légèrement baissé ensuite, lors de la mise en œuvre de ladite réforme (1996-1999), tout en restant supérieure à son niveau d'avant 1992. Selon les auteurs, c'est l'incertitude quant au devenir des dispositifs de soutien public qui expliquerait cette hausse, en dépit d'un effet stabilisateur des aides directes sur le revenu. Autre résultat intéressant, les sécheresses de 2003 et 2007 ont eu peu d'effet sur l'aversion au risque et ont même paradoxalement coïncidé avec une légère baisse, pouvant être due à d'autres facteurs.

En définitive, cette étude montre qu'il est judicieux de s'intéresser aux effets des changements de politique agricole sur l’aversion au risque des agriculteurs, afin de mieux anticiper leurs impacts, possiblement indésirables dans les périodes de réforme.

Coefficients d'aversion au risque estimés et test de Wald d'égalité des coefficients

Risques.jpgSource : European Review of Agricultural Economics

Julien Hardelin, Centre d'études et de prospective

Source : European Review of Agricultural Economics

18:24 Publié dans 4. Politiques publiques, Agriculteurs, PAC | Lien permanent | Tags : risques, agriculteurs, politiques agricoles |  Imprimer | | | | |  Facebook

08/07/2020

Une évaluation de l’efficacité et de l'efficience de différents outils de politique agro-environnementale

L'Institute for Climate Economics (I4CE) a publié, en juin 2020, une étude consacrée à la Politique agricole commune (PAC). Si la prochaine réforme de la PAC est toujours en cours de négociation, la Commission européenne a d'ores et déjà annoncé sa volonté de passer d'une logique d'obligation de moyens à une logique d'obligation de résultats. Ce changement d'approche vise notamment à améliorer l'efficacité et l'efficience des aides agro-environnementales. Mais qu'en serait-il vraiment si de telles mesures étaient adoptées ?

Pour répondre à cette question, l'étude analyse six outils de politique agro-environnementale : le paiement vert, les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC), les aides à l'agriculture biologique (conversion et maintien), la certification Haute valeur environnementale (HVE), le label bas carbone (LBC) et un dispositif australien relatif à la séquestration du carbone dans les sols agricoles. Les quatre premiers sont considérés comme des outils à obligation de moyens, visant à promouvoir des pratiques supposées bénéfiques pour l'environnement, alors que les deux derniers relèvent davantage d'une obligation de résultats. Pour chacun de ces outils, les auteurs ont estimé les impacts ainsi que les coûts (conception, fonctionnement, suivi, contrôle) associés à leur mise en œuvre.

Ils tirent plusieurs enseignements de leurs analyses. En premier lieu, les mesures à obligation de résultats n'entraînent pas nécessairement une plus grande efficacité : celle-ci dépend de l'ambition du dispositif et de son niveau d'exigence en matière d'additionnalité. Elles sont en revanche très pertinentes lorsque les liens entre les pratiques agricoles et les impacts sont mal connus au niveau global, car elles laissent à l'agriculteur la responsabilité de choisir les pratiques permettant d'atteindre localement le résultat visé. De plus, les mesures à obligation de résultats peuvent être moins coûteuses à administrer que celles à obligation de moyens, à l’instar des cadres de certification carbone, dont les coûts de gestion sont généralement plus faibles que ceux des MAEC. Enfin, l'approche basée sur une obligation de résultats faciliterait l'évaluation environnementale de la PAC, conduisant les auteurs à souligner, en conclusion, l’opportunité d’un tel dispositif dans la prochaine programmation.

Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective

Source : Institute for Climate Economics

La PAC actuelle ne permet pas d'enrayer le déclin de la biodiversité selon la Cour des comptes européenne

La biodiversité européenne décline depuis de nombreuses années et l'intensification agricole en est une des causes principales. Pour enrayer cette baisse, l'Union européenne s'est engagée en 2010 à respecter les objectifs de la convention des Nations unies sur la diversité biologique (figure ci-dessous). Dans ce but, la Commission a adopté en 2011 une stratégie en faveur de la biodiversité, dont l'un des objectifs est le renforcement de la contribution de l'agriculture au maintien et à l'amélioration de la biodiversité. Dans un rapport publié en juin, la Cour des comptes européenne analyse la contribution de la Politique agricole commune (PAC) à l'atteinte de cet objectif, et confirme certains résultats de l'évaluation de l'impact de cette politique sur la biodiversité, publiée en novembre 2019 par la Commission.

Accords internationaux et actions de l'UE en faveur de la biodiversité

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Source : Cour des comptes européenne

Dans le cadre de son suivi annuel, la Commission estime que, en 2019 et 2020, l'UE pourrait consacrer 8 % de son budget à la biodiversité, soit 13,5 milliards d'euros par an, avec une contribution annuelle de la PAC de 10,3 milliards d'euros. Cependant, selon les auteurs, cette estimation n'est pas fiable : elle repose sur l'utilisation de coefficients grossiers. De plus, la Cour souligne que cette estimation ne tient pas compte des autres dépenses pouvant avoir des impacts négatifs.

Méthode utilisée par la Commission pour calculer le financement de la biodiversité octroyé au titre de la PAC

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Source : Cour des comptes européenne

Les auteurs concluent que la majeure partie des fonds de la PAC n'a eu qu'un impact positif limité sur la biodiversité. Ainsi, la plupart des paiements directs ne contribuent pas à sa préservation ou à son amélioration. L'impact positif de la conditionnalité n'a pas été démontré tandis que le verdissement, étudié plus en détails dans un précédent rapport (voir à ce sujet un billet sur ce blog), est jugé peu ambitieux. Les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC), et celles visant l'agriculture biologique et les zones Natura 2000, sont les plus susceptibles d'avoir un effet positif, mais peu de contrats sont passés avec des agriculteurs pour les plus exigeantes d'entre elles, en particulier celles relatives aux cultures arables. De ce fait, les auteurs préconisent i) une amélioration de la conception et de la mise en œuvre de la stratégie de l'UE en faveur de la biodiversité (notamment coordination entre États membres et suivi des dépenses), ii) une contribution renforcée des paiements directs et du développement rural à la biodiversité des terres agricoles et iii) l'élaboration d'indicateurs permettant d'évaluer les effets de la PAC.

À noter qu'une nouvelle stratégie Biodiversité à horizon 2030 a été présentée par la Commission européenne en mai 2020.

Estelle Midler, Centre d'études et de prospective

Source : Cour des comptes européenne

15:46 Publié dans 4. Politiques publiques, Environnement, PAC | Lien permanent | Tags : cour des comptes européenne, biodiversité, pac, budget |  Imprimer | | | | |  Facebook

12/02/2020

Une évaluation de l'impact des Programmes de développement rural sur le secteur agroalimentaire

Si les Programmes de développement rural (PDR) du second pilier de la PAC bénéficient d'abord aux agriculteurs, ils ont également des effets sur les industries agroalimentaires (IAA). Pourtant, la plupart des évaluations des PDR se focalisent sur le secteur agricole et abordent peu celui de la transformation. Dans un article publié dans la revue Regional Studies, une équipe du Joint Research Centre a cherché à pallier cette lacune, en étudiant le cas polonais.

Les auteurs commencent par rappeler que les PDR touchent directement les industries agroalimentaires, au travers de mesures visant à soutenir leurs investissements, mais aussi de façon indirecte, au moyen de dispositifs cherchant à développer les infrastructures publiques, les services de base dans les territoires ruraux, etc. Ils considèrent dès lors que l'évaluation doit porter non seulement sur l'effet des mesures spécifiquement dédiées aux IAA, mais également sur l'effet global du programme.

Pour ce faire, les auteurs mobilisent des approches économétriques quasi-expérimentales, reposant sur des données agrégées à une échelle cantonale, et non sur des données collectées à l'échelle micro des entreprises. Ces dernières ne sont en effet pas toujours accessibles et elles ne permettent pas de saisir les effets indirects.

Pour estimer l'effet direct des dispositifs dédiés aux IAA, une première analyse compare des cantons ayant bénéficié de telles mesures avec d'autres qui n'en ont pas bénéficié. Elle montre que ces soutiens ont un effet négatif sur l'emploi, en raison des substitutions capital/travail qu'ils favorisent. Une telle comparaison entre cantons bénéficiaires et non-bénéficiaires n'est pas possible pour mesurer l'effet global des PDR, car très peu d'entre eux n'ont bénéficié d'aucun soutien. Aussi, les auteurs ont plutôt regardé si le niveau de soutien reçu dans un canton donné influait sur la structure de son secteur agroalimentaire. Ils mettent en évidence une corrélation positive entre le niveau d'aides reçues et le nombre d'IAA et, partant, sur l'emploi.

Ces résultats illustrent les effets ambivalents et potentiellement contradictoires des programmes de développement rural et interrogent leur cohérence interne.

Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective

Source : Regional Studies

09:40 Publié dans 2. Evaluation, 4. Politiques publiques, IAA, PAC | Lien permanent | Tags : pdr, agroalimentaire, pologne |  Imprimer | | | | |  Facebook

06/02/2020

Concevoir une politique agri-environnementale et climatique efficace pour la prochaine PAC

Le Conseil scientifique consultatif du ministère de l'Alimentation et de l'Agriculture allemand a publié, en décembre, un rapport sur l'architecture environnementale de la future PAC. En effet, la Commission européenne a proposé en 2018 un nouveau modèle de mise en œuvre de la politique agricole, basé sur l'élaboration de plans stratégiques nationaux. Ceux-ci peuvent combiner trois outils pour atteindre les objectifs agro-environnementaux : la conditionnalité, les éco-programmes, les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC).

Les auteurs évaluent cette proposition et formulent 42 recommandations pour les plans stratégiques nationaux. Il s'agit notamment d'augmenter progressivement les budgets alloués aux objectifs agro-environnementaux et, sur le long terme, de supprimer les paiements de base. Ils proposent également de définir le niveau de co-financement national des mesures en fonction de leur valeur ajoutée aux niveaux européen et international : ainsi, celles pour le climat ou la biodiversité seraient financées à 100 % par les fonds européens. Il s'agirait aussi de prendre en compte le bien-être animal dans les éco-programmes, et de tester et développer des instruments incitatifs innovants (ex. : utilisation d'enchères, de paiements à obligation de résultats, etc.). Enfin, différentes structures d'éco-programmes sont discutées en détail.

Différents types d'éco-programmes possibles

PAC.jpg

Source : Scientific Advisory Board on Agricultural Policy, Food and Consumer Health Protection at the Federal Ministry of Food and Agriculture

Source : Scientific Advisory Board on Agricultural Policy, Food and Consumer Health Protection at the Federal Ministry of Food and Agriculture

09:06 Publié dans 4. Politiques publiques, Climat, Environnement, PAC | Lien permanent | Tags : allemagne, conditionnalité, éco-programmes, maec, bmel |  Imprimer | | | | |  Facebook

05/02/2020

Politique agricole commune et « données retardataires »

Dans un article publié par la revue d'anthropologie Techniques & Culture, L. Magnin (université Paris-Est et ENS-Lyon) livre un aperçu de sa thèse en cours sur l'écologisation des politiques agricoles vue à travers le prisme des haies. Il s'intéresse aux retards de paiement des aides PAC suite aux difficultés de refonte du registre parcellaire graphique (RPG) : cette pièce centrale du système intégré de gestion et de contrôle, dont l'unité de référence était l’îlot de culture, a dû intégrer et « numériser des composantes paysagères de plus en plus petites » (ex. : mares, cours d'eau, bosquets, haies).

Son enquête de terrain, menée dans les services chargés de l'instruction des demandes d'aides, de l'alimentation du RPG et du paiement aux agriculteurs (services d'économie agricole des Directions départementales des territoires - DDT, Institut géographique national - IGN, Agence de services et de paiement - ASP), et des entretiens avec des acteurs impliqués dans le chantier de refonte du RPG, lui permettent de proposer deux explications de ces retards. L'une tient, selon lui, à l'organisation et à la gouvernance du chantier, constat qui recoupe des conclusions de la Cour des comptes. L'autre est liée à la complexité de la numérisation, et en particulier à « la sous-estimation, quantitative et qualitative, du travail de mise en données auquel ont œuvré des centaines de ''photo-interprètes'' ».

Capture d’écran du « registre parcellaire graphique » (RPG) sur le site de déclaration Telepac

RPG.jpg

Source : Techniques & Culture

Source : Techniques & Culture

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03/02/2020

Détournements des aides de la PAC dans des pays d'Europe de l'Est : retour sur une enquête du New York Times

The Conversation France revient, dans un récent article, sur une enquête au long cours du New York Times consacrée à la PAC. Les journalistes américains ont mis en évidence un système de détournement des fonds européens agricoles par certains oligarques dans plusieurs pays d'Europe centrale et de l'Est. L'enquête a d'ailleurs conduit à une récente prise de position du nouveau commissaire européen à l'agriculture devant le Parlement. Dans ce contexte, les auteurs s'interrogent sur les évolutions à venir de la PAC et leurs conséquences potentielles sur ces pratiques.

Source : The Conversation

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