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15/10/2021

Alain Baraton, Dictionnaire amoureux des arbres, Éditions Plon, mai 2021, 438 pages

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Jardinier en chef du domaine national de Trianon et du parc du château de Versailles, Alain Baraton est bien connu pour ses nombreux ouvrages sur les plantes, arbres et jardins, mais aussi pour ses chroniques hebdomadaires sur France Inter ou France 5. Après un premier Dictionnaire amoureux des jardins (Plon, 2012), il récidive aujourd'hui avec ce Dictionnaire amoureux des arbres.

Il ne s'agit pas là d'un traité savant de botanique ou d'horticulture, ni d'une histoire ou d'une géographie raisonnée des arbres et de leurs origines. L'auteur nous invite plutôt, au gré de 165 courts articles, à un voyage sentimental, à une libre balade au travers de ses expériences et préférences. Il nous décrit ses choix personnels, ses coups de cœur pour ses végétaux, et fait tout pour nous communiquer ses passions.

Tenant ses promesses, le livre nous en apprend d'abord beaucoup sur les arbres eux-mêmes. Depuis l'entrée « abricotier » jusqu'à l'entrée « zamana », défilent de nombreuses espèces dont les origines, histoires, aires de peuplement, spécificités et écosystèmes sont présentés. Il peut s'agir d'essences communes (chêne, marronier, prunier, magnolia, poirier, etc.) ou plus exotiques (upas, parrotia, nono, kolatier, cédratier, azerolier, etc.).

Chemin faisant, le lecteur fera des découvertes plus ou moins inédites. Par exemple, le baobab peut stocker jusqu'à cent mille litres d'eau. Le Ficus elastica (caoutchouc) a besoin d'une guêpe précise pour assurer sa reproduction. Rien ou presque ne pousse sous un noyer car le juglon, sur le sol, bloque la germination des autres plantes. Le mancenillier est considéré comme « l'arbre le plus dangereux du monde ». On découvrira aussi que le vrai mimosa fleurit bleu...

Les arbres expriment des valeurs, imprègnent la vie sociale et sont à l'origine de véritables institutions. L'auteur revient par exemple sur les origines de la tradition du sapin de Noël, il rappelle aussi que l'olivier est si présent dans toutes les religions que sa feuille a été choisie comme emblème de l'ONU. Quant à Louis XIV, il aimait tant la senteur de ses orangers que la « fleur d'oranger » deviendra pendant près d'un siècle le parfum préféré des dames de la cour.

Il serait facile de mettre en lumière d'autres qualités de ce livre, mais un tel ouvrage n'est pas fait pour être raconté : il est fait pour être lu et utilisé. Rédigé d'un style alerte, il est tout sauf ennuyeux et Baraton a pris soin de ponctuer ses notices d'anecdotes, de traits d'humour, de rapprochements inattendus et de considérations personnelles. La rigueur supposée du « dictionnaire », amollie par sa passion des végétaux, rend son livre délectable.

Bruno Hérault, Chef du Centre d'études et de prospective

Lien : Éditions Plon

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14/10/2021

Premier état des lieux mondial de la santé des arbres

Lancée en 2015 par un réseau d'environ 60 institutions et menée par plus de 500 experts, l'évaluation mondiale de la santé des arbres a récemment débouché sur la publication d'un rapport et la création d'un portail permettant d'accéder à la base de données ainsi constituée. Ce recensement sans précédent a été piloté par le Botanic Gardens Conservation International, une organisation non gouvernementale qui représente plus de 100 jardins botaniques dans le monde. Plus de 58 000 espèces ont été répertoriées, ainsi que leur état de conservation. La diversité la plus importante est observée dans les régions tropicales, principalement en Amérique du Sud (figure ci-dessous). Au-delà du constat sur les espèces d'arbres menacées (30 %) ou ayant disparu à l'état sauvage (140), le rapport met en avant diverses mesures ou projets visant à protéger ou restaurer certaines espèces en danger, comme par exemple le magnolia géant du Vietnam.

Richesse des grandes zones biogéographiques, en espèces d'arbres

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Source : Botanic Gardens Conservation International

Source : Botanic Gardens Conservation International

17/09/2021

De nombreux dispositifs de lutte contre la déforestation, mais une efficacité questionnée

Dans un rapport récemment publié par l'Institut français des relations internationales (Ifri), Alain Karsenty (Cirad) dresse un état des lieux des politiques et instruments internationaux de lutte contre la déforestation dans les régions tropicales, avant de proposer des pistes d'amélioration. L'estimation des impacts, sur les forêts tropicales, de la production de matières premières destinées au marché mondial fait consensus (figure ci-dessous). Il n'en va pas de même pour d'autres facteurs dont le lien avec la déforestation est plus ambivalent. C'est le cas de la pauvreté et de l'insécurité foncière, qui sont au cœur de controverses.

26 % de la surface déforestée entre 2001 et 2015 sont imputables à sept matières premières agricoles (en million d'hectares)

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Source : Ifri

Les acteurs privés sont eux-aussi largement concernés. Si, au XXe siècle, les entreprises d'exploitation forestière ont été motrices, des entreprises agroalimentaires (voire certains conglomérats regroupant activités agricoles, forestières et minières) sont désormais impliquées directement ou indirectement dans la déforestation en zone tropicale. Elles font de plus en plus souvent appel à des sous-traitants ou contractualisent avec des producteurs agricoles locaux, ce qui conduit à une dilution de la responsabilité.

Par ailleurs, la Chine tient un rôle croissant dans les évolutions du couvert forestier tropical. Tout en protégeant ses forêts naturelles et en plantant massivement, elle a multiplié par cinq ses importations de bois en 20 ans (figure ci-dessous). Elle a aussi fortement accru son approvisionnement en matières premières agricoles, externalisant ainsi la déforestation. De plus, elle utilise son influence au sein d'organisations internationales, dont la FAO, pour ralentir la mise en œuvre de certains accords visant à lutter contre la déforestation.

Principaux flux d'exportation de sciages tropicaux en 2020

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Source : Ifri

Le rapport détaille aussi l'empilement des réglementations et initiatives privées mises en œuvre depuis le milieu du XXe siècle : certification de gestion forestière durable, protocole de Kyoto puis dispositifs REDD et REDD+ (Réduction des émissions dues à la déforestation et à la dégradation forestière), lutte contre le commerce illégal (initiative Forest Law Enforcement, Governance and Trade, FLEGT) et plus récemment contre la déforestation importée, accords bilatéraux de paiement aux résultats, etc.

En conclusion, l'auteur recommande de combiner différents instruments internationaux, accords bilatéraux et politiques nationales (agriculture, alimentation, éducation, foncier, fiscalité, etc.) pour améliorer leur efficacité.

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : Ifri

14/09/2021

Du cultivateur au monde de la parfumerie : les pérégrinations des matières végétales naturelles

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L’émission 7 milliards de voisins (RFI) du 1er septembre dernier était consacrée à la production, la transformation et la commercialisation des matières végétales utilisées dans la parfumerie. Les avancées de la chimie, au XIXe siècle, ont révolutionné la fabrication du parfum en substituant aux composants naturels des molécules de synthèse aux coûts de production inférieurs. Les premiers conservent néanmoins un intérêt pour la parfumerie haut de gamme, qui y voit un facteur d’innovation et de distinction. Le cas de la vanille de Madagascar, où la succession d'événements climatiques extrêmes et de mauvaises floraisons a entraîné de fortes variations de prix (de 60 à 600 dollars le kilo pour la gousse), illustre toutefois la difficulté des planteurs à accéder à un revenu jugé « décent ». À l’opposé se trouve le vétiver haïtien, l’une des seules productions locales transformées sur place et exportées au bénéfice de 50 000 producteurs, mais aussi le benjoin laotien, produit de « l’agroforesterie aromatique ». Enfin, du niveau de revenu dépend la conservation des savoir-faire traditionnels (extraction, gemmage, pressage, etc.), garants de la production.

Source : Radio France internationale

09/07/2021

L'analyse des discours pour comprendre les controverses écologiques : l'exemple des accrus forestiers

Dans les aires protégées, plusieurs conceptions écologiques s'affrontent quant à la contribution à la biodiversité des accrus forestiers (accroissement de la surface forestière par colonisation spontanée) sur les terres agricoles délaissées. Dans un article récent publié dans Environmental Science & Policy, une équipe européenne de chercheurs s'est basée sur l'analyse des discours pour étudier la diversité des points de vue.

Pour ce faire, elle s'est appuyée sur des entretiens semi-directifs menés (directement ou en puisant dans des travaux antérieurs) dans des parcs en France (parcs nationaux des Pyrénées et des Cévennes), en Espagne (parc naturel du Montseny) et en Écosse (parc national des Cairngorms). Ces sites naturels anthropisés, mêlant en proportion variable forêts, landes et pâturages, sont justement reconnus, au titre de la conservation, par l'interaction ancienne entre l'homme et la nature.

Au sein de ces espaces, les discours sur les accrus forestiers divergent. Pour certains, ils sont synonymes de recul de l'agriculture et des modes de vie traditionnels, responsables de la perte de biodiversité liée à la fermeture des milieux. Pour d'autres, au contraire, ils symbolisent le retour à la nature antérieure de ces espaces. La comparaison des discours est alors intéressante. Pour cela, les auteurs ont utilisé un cadre d'analyse (figure ci-dessous) inspiré des travaux de Hajer, mobilisant les concepts de « lignes narratives » et de « coalitions discursives » pour expliciter les différentes positions et stratégies. De façon originale, ils donnent une importance particulière au contexte écologique réel (état des habitats, modes d'utilisation des terres et dynamique de la biodiversité).

Cadre d'analyse permettant d'identifier les facteurs sociaux et écologiques sous-tendant les discours

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Source : Environmental Science & Policy

Afin de comprendre les mécanismes à l’œuvre dans l'élaboration des différents discours, les auteurs ont cherché à expliciter les rôles i) des intérêts des protagonistes, ii) des représentations dominantes et iii) des discours institutionnels. Ils se sont notamment attachés à décoder les discours des gestionnaires des parcs, mettant en évidence la prééminence des alliances (avec les agriculteurs ou les forestiers, l'opinion publique, les politiques, etc.) sur les arguments écologiques. Leurs positions évoluent d'ailleurs constamment en fonction de débats extérieurs, comme par exemple celui sur le ré-ensauvagement ou sur le changement climatique. Les auteurs concluent à l'importance de mettre en place des modes de gouvernance collaboratifs prenant appui sur des processus délibératifs continus.

Prévalence des différents discours en fonction du type de partie prenante, selon les sites

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Source : Environmental Science & Policy

Lecture : les signes + indiquent l'adoption d'un type de discours par le groupe considéré. Les +++ signifient qu'un grand nombre d'entre eux a adopté cette modalité, alors qu'un seul + indique que si ce discours est bien présent, il n'est pas majoritaire.

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : Environmental Science & Policy

19:52 Publié dans Environnement, Forêts Bois, Territoires | Lien permanent | Tags : forêt-bois, accrus, controverses |  Imprimer | | | | |  Facebook

07/07/2021

Le sketchnote pour rendre des travaux de recherche plus accessibles : l'exemple de la télédétection aéroportée

Pour la première fois, la revue Sciences Eaux & Territoires a recours à cette technique graphique, souvent utilisée dans le cadre d'ateliers où elle accompagne la réflexion par une prise de notes sous forme de dessins. De façon originale il s'est agi, pour le duo formé d'un graphiste et d'un scientifique, de proposer une relecture d'un article publié précédemment sur l'apport de la télédétection aéroportée à la gestion des forêts de montagne. En trois planches graphiques, l'essentiel des éléments est synthétisé de façon claire et rapidement assimilable, y compris par des lecteurs non experts de ces questions. La première planche rappelle les enjeux d'une gestion forestière durable dans les massifs forestiers, la deuxième présente l'approche combinant télédétection et observations sur le terrain pour cartographier des massifs peu accessibles, et la troisième conclut sur l'intérêt de la démarche pour l'exploitation du bois en montagne.

Exemple de planche sketchnote

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Source : Sciences Eaux & Territoires

Source : Sciences Eaux & Territoires

19:36 Publié dans Forêts Bois, Production et marchés, Territoires | Lien permanent | Tags : télédétection, forêts |  Imprimer | | | | |  Facebook

09/06/2021

Quels risques à l'avenir pour la santé et la sécurité au travail dans les secteurs agricole et forestier ?

À la demande de l'Agence européenne de santé et sécurité au travail, des chercheurs ont réalisé une étude prospective sur les risques pour les travailleurs liés aux activités agricoles et forestières. À partir d'un état des lieux statistique, ils ont mené une large revue de littérature, complétée par la consultation d'experts dans de multiples domaines. Les principales conclusions de leur rapport ont été récemment publiées dans un Policy Brief.

Avec 24,5 morts par an pour 100 000 travailleurs en 2018, d'après Eurostat, le secteur forestier a le taux de mortalité le plus élevé des activités économiques et occupe le deuxième rang en matière de sinistralité (2 813 accidents non mortels pour 100 000 travailleurs). L'agriculture arrive en quatrième position (2 019 cas). Ces situations sont d'autant plus préoccupantes que plusieurs travaux font état d'une minoration des déclarations, liée à l'hétérogénéité des systèmes d'assurance et des concepts statistiques utilisés selon les pays, mais aussi à la diversité des types de travailleurs concernés. En effet, les accidents impliquant des retraités, des travailleurs occasionnels (membres de la famille) ou encore non déclarés, sont rarement imputés à l'activité. Au-delà, les auteurs identifient les différents risques pour la santé des agriculteurs et forestiers : usages de pesticides et produits chimiques, troubles musculo-squelettiques, nuisances sonores, etc.

Ils ont identifié les tendances ayant des impacts (positifs ou négatifs) sur le travail agricole ou forestier, dans divers domaines : technologie, environnement, sécurité alimentaire, économie, marché du travail. Ils ont ensuite examiné leurs possibles répercussions sur la santé et la sécurité des actifs. Une large part est faite aux apports potentiels de la technologie pour réduire les risques d'accidents graves et la pénibilité, comme par exemple par la cobotique, soulageant les travailleurs agricoles âgés. Il en est de même pour les défis posés par nombre d'innovations, qui peuvent augmenter les risques psychosociaux (isolement accru des actifs suite à la réduction des emplois liés à la robotisation, etc.). L'accroissement des sources de stress (voir figure) est d'ailleurs une préoccupation grandissante pour la prévention.

En conclusion, les auteurs formulent de nombreuses propositions pour les politiques agricoles et forestières, de santé et de sécurité au travail, de santé générale, ou de recherche et développement agricoles. Il s'agit, par exemple, d'intégrer la préoccupation de la santé et de la sécurité dans la réflexion sur l'amélioration du conseil agricole, ou de conditionner les aides de la PAC au respect des normes en matière de travail.

Les différentes sources de stress des agriculteurs

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Source : Agence européenne pour la santé et la sécurité au travail

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : Agence européenne pour la santé et la sécurité au travail

14/05/2021

Émissions de CO2 de l'Union européenne et importations de produits engendrant de la déforestation

Dans le prolongement de son rapport de 2018 (voir à ce sujet un précédent billet), le WWF propose une nouvelle publication sur la déforestation engendrée par la consommation de certains produits agricoles (ex. soja). L'analyse a été menée par le Stockholm Environment Institute, à partir des données commerciales de la plate-forme TRASE et des travaux sur la déforestation de Pendrill et al. De ce fait, la méthode est différente de celle de 2018 : elle ne se base plus sur le calcul d'un indicateur composite i) de risque de déforestation, ii) de respect des droits humains et iii) de corruption, mais sur l'attribution d'hectares déforestés aux différentes productions agricoles selon l'évolution de leur surface. La « déforestation » est entendue ici comme la perte de « couvert arboré », et non pas seulement de « forêts » au sens de la Food and Agriculture Organization (FAO). Par ailleurs, les auteurs considèrent que les causes non agricoles (ex. urbanisation) sont négligeables.

L'UE apparaît comme le premier acteur responsable de la déforestation associée aux denrées agricoles entrant dans le commerce international entre 2005 et 2013, avant de passer en deuxième position derrière la Chine. En 2017, 16 % lui sont attribués, contre 24 % pour la Chine, 9 % pour l'Inde et 7 % pour les États-Unis. 42 % de la déforestation importée en UE sont dus à l'huile de palme, 17 % au soja, 9 % aux produits dérivés du bois, 8 % au cacao et 5 % à la viande de bœuf. Les pays qui réalisent la majeure partie de cette déforestation sont l'Indonésie (39 %) et le Brésil (25 %). Pour ce dernier, la région du Cerrado est plus particulièrement concernée par le soja et la viande bovine.

Les auteurs étudient les certifications environnementales volontaires, considérées comme un levier de lutte contre la déforestation. Ils montrent qu'elles représentent une part limitée du marché et qu'elles ne garantissent pas toujours l'absence de déforestation, tout au long de la chaîne d'approvisionnement.

Enfin, le WWF propose 8 axes de recommandations. À titre d'exemple, les produits entrant sur le marché de l'UE devraient respecter les critères environnementaux de production au sein de l'Union, et des obligations de traçabilité et de transparence devraient être introduites dans la législation européenne.

Comparaison de la déforestation causée par l'importation en UE de soja du Cerrado (ha/1000 t), en 2016, par des entreprises ayant un engagement zéro déforestation (vert) ou non (marron)

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Source : WWF

Lecture : l'impact de la certification sur la déforestation relative (ha/1 000 tonnes) est faible en moyenne.

Aurore Payen, Centre d'études et de prospective

Source : WWF

11/05/2021

Les conséquences à long terme des programmes d'afforestation à grande échelle

Dans un article se penchant sur les conséquences à long terme de deux projets d'afforestation d'envergure, menés dans le nord-est de la Chine, des chercheurs chinois, australiens et nord-américains révèlent la complexité de la gestion durable des terres dans les programmes de restauration écologique de grande échelle. Mis en œuvre dans le but de lutter contre les tempêtes de sable et l'érosion des sols, ces projets ont entraîné une réduction des eaux de surface et une moindre teneur en eau des sols en aval (voir figure). Cette dernière est visible seulement deux décennies après leur lancement, lorsque les forêts artificielles arrivent à un stade de maturité suffisamment avancé. Les auteurs recommandent la sélection d'espèces et la planification des programmes d'afforestation prenant en considération les conditions hydrographiques et climatiques locales.

Évolution des aires forestières et des ressources en eau des sols

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Source : Science Advances

Source : Science Advances

08/04/2021

La « méthode des Personas » pour mieux mobiliser le bois des forêts privées

Alors que les mesures mises en œuvre en France pour inciter à la gestion durable et à la récolte de bois dans les petites forêts privées se révèlent peu efficaces, des chercheurs ont eu recours à la méthode des personas (groupes cible) pour mieux cibler les propriétaires. Les premiers éléments, essentiellement méthodologiques, sont publiés dans Forest Policy and Economics.

Centrée sur l'usager et utilisée dans le design des outils numériques, cette méthode s'appuie sur l'élaboration de profils fictifs, représentatifs des catégories de la population ciblées. Son expérimentation dans les Vosges s'est appuyée sur des ateliers de co-création et des entretiens directs avec un large échantillon de parties prenantes.

Finalement, huit personas ont été élaborées, accompagnées, pour chacune, de l'identification de moyens de communiquer avec les groupes-cible auxquels elles renvoient et de types de situations dans lesquelles les placer. C'est en effet par la confrontation de ces personnes fictives à des situations spécifiques que les enseignements pourront être tirés pour améliorer les instruments de politique publique.

Source : Forest Policy and Economics

10/03/2021

Entente sur le marché du bois en Finlande : quels impacts réels sur les prix ?

Un article récent traite du conflit ayant opposé trois des plus grands producteurs mondiaux de pâte à papier, opérant en Finlande, aux services publics forestiers, à des propriétaires privés et à des municipalités. Il s'est soldé, au milieu des années 2010, par l'absence d'indemnisation : si le cartel était bien confirmé et actif durant la période 1997-2004, les expertises à l'appui de la décision de justice n'avaient pu mettre en évidence l'effet de cette entente sur les prix payés aux propriétaires.

Pour mesurer cet impact, les auteurs traitent des séries de prix de produits issus de résineux (grumes et bois d'industrie de pin et d'épicéa), avec une analyse économétrique basée sur l'approche dite « variable indicateur ». Régulièrement employée pour mettre en évidence les conséquences des pratiques anticoncurrentielles, cette méthode compare l'évolution réelle des prix avec ce qu'elle aurait été en situation de concurrence normale. Il apparaît ainsi que seul le prix du bois d'industrie de pin a été réduit de façon significative : la baisse moyenne induite serait de l'ordre de 10 % sur l'ensemble de la période. Pour les autres produits, aux débouchés plus larges que la seule production de pâte à papier, les auteurs concluent à l'absence d'impact sur les prix.

Source : Forest Policy and Economics

11:08 Publié dans Forêts Bois | Lien permanent | Tags : concurrence, cartel, prix, forêt-bois, bois, finlande |  Imprimer | | | | |  Facebook

08/02/2021

Un inventaire des émissions de gaz à effet de serre liées aux usages des terres

Le dernier numéro de la revue Nature présente un recensement des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES), liées à l'usage des sols, entre 1961 et 2017. Si les émissions issues de combustibles fossiles sont déjà largement analysées, la compilation de celles liées à l'utilisation des terres, à leur changement d'usage et à l'exploitation de la forêt (rassemblés comme « usage des sols »), est inédite par son ampleur et la période considérée. Sur un pas de temps annuel, à partir des statistiques de la FAO, les émissions et le stockage de GES sont ainsi modélisés par pays, production, type de gaz et processus impliqué (ex. fermentation entérique, récolte de bois). Les émissions de GES sont attribuées aux pays producteurs, et non aux consommateurs des produits finaux puisque l'approche est centrée sur l'usage des sols. De même, dans la base de données constituée, les émissions liées aux cultures ne sont réallouées aux élevages, via l'alimentation animale, que dans un traitement complémentaire.

Il apparaît en particulier (figure ci-dessous), après 40 ans de relative stabilité, que les émissions nettes ont fortement augmenté à partir de 2001, en raison des changements d'usage de sols mis en culture pour la production de céréales et d'oléagineux.

Émissions et stockage mondial de GES liés à l'usage des sols, selon le processus impliqué (à gauche) et le groupe de produits (à droite)

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Source : Nature

Lecture : pour les processus représentés à gauche, de bas en haut, abandon de terres agricoles, mise en culture de sols pour la production de céréales et d'oléagineux (Land Use Change to croplands, LUC_Crops), fermentation entérique, récolte de bois, conversions de terres en pâturage, rizières, tourbières, différentes formes de fertilisation.

Les émissions de GES sont décomposées en fonction de facteurs techniques et socio-économiques, faisant ressortir différents leviers d'amélioration selon les zones. Ainsi, en Afrique et en Asie centrale, l'amélioration des rendements, pour réduire les surfaces nécessaires aux productions, est prioritaire. Le principal levier d'action concerne néanmoins les pays où les émissions ont le plus progressé à cause du changement d'usage des terres, notamment en Amérique latine et en Asie du Sud. Le défrichement de forêts denses pour la production de soja, riz, maïs et huile de palme est en effet responsable de la forte augmentation des émissions.

Si l'approche par pays producteurs permet de bien identifier les problèmes majeurs, à ce stade, une approche complémentaire rapportant les émissions de GES aux consommateurs ferait ressortir d'autres leviers d'action, notamment pour les pays européens. Enfin, le bilan des GES rappelle les enjeux de stockage du carbone dans les sols agricoles : si, sur la période analysée, l'essentiel des « émissions négatives » est dû à l'abandon de terres agricoles, la prise en compte du potentiel de stockage de carbone dans des terres productives est primordiale (voir à ce sujet un autre billet).

Jean-Noël Depeyrot, Centre d'études et de prospective

Source : Nature

15/01/2021

Le changement climatique impacte le potentiel d'atténuation des forêts françaises

Des chercheurs d'INRAE, de la Chaire d'économie du climat et de l'Institut national de l’information géographique et forestière (IGN) ont publié les résultats d'une étude évaluant le potentiel des forêts françaises pour atténuer le changement climatique et approvisionner l'industrie du bois. Elle s'inscrit dans la continuité de travaux menés dans d'autres pays européens, et combine plusieurs modèles : ceux-ci permettent de considérer à la fois les impacts biophysiques et économiques des évolutions climatiques sur les ressources forestières, et les effets des dynamiques d'usage des sols et des décisions en matière de gestion des peuplements. Ces dernières dépendent de la croissance et de la mortalité attendues des arbres, mais aussi du prix des produits bois. Pour évaluer ces impacts, les chercheurs se sont appuyés sur une modélisation spatialisée du secteur forestier, intégrant des décisions endogènes de gestion des ressources, couplée à un modèle d'approvisionnement agricole et à un modèle économétrique d'usage des sols. Ils ont également utilisé un modèle statistique évaluant les effets du changement climatique, calibré sur les données de l'inventaire national des forêts.

Les résultats de l'étude sont de plusieurs ordres. En termes biophysiques, ils montrent l'impact important du changement climatique sur la mortalité des arbres, multipliée par 1,83 en moyenne, et par 2,38 d'ici à 2060-2080. Cet impact s'ajoute à l'effet sur les variations de croissance, négatives dans la plupart des régions françaises (figure ci-dessous) : le temps de passage des arbres d'un diamètre au diamètre supérieur est multiplié par 1,07 en moyenne sur l'ensemble de la période. Combinés aux décisions de coupes et de ventes de bois des gestionnaires visant à maximiser leurs profits sous ces nouvelles conditions, ces effets feraient perdre aux forêts 30 % de leur potentiel d'atténuation entre 2015 et 2100. Au plan économique, l'impact d'un contexte international favorable sur les prix serait positif, compensant, au moins dans un premier temps, les pertes pour le secteur liées à la surmortalité.

Impacts du changement climatique sur la mortalité et la croissance des arbres en France

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Source : Journal of Forest Economics

Lecture : la première ligne de cartes concerne les feuillus, la deuxième les conifères. La couleur des régions reflète l'évolution des taux de croissance (une couleur rouge signifiant une diminution de la croissance des arbres). La couleur des cercles représente l'évolution de la mortalité des arbres (une couleur rouge indiquant une augmentation de la mortalité). La taille des cercles indique la probabilité de présence des feuillus et des conifères en fonction de l'évolution du climat.

Si les volumes forestiers totaux devraient continuer à augmenter au cours des prochaines décennies, les conséquences du changement climatique sur la mortalité et la croissance des arbres, ainsi que les effets liés à l'augmentation de la concurrence avec le secteur agricole pour les terres, devraient amener ces volumes à un pic à la fin du siècle, puis à un déclin au cours du siècle prochain.

Évolution des volumes forestiers (a) et de l'équilibre de carbone généré par les forêts, les produits bois et l'effet de substitution (b)

Forets2-bis.jpg

Source : Journal of Forest Economics

Lecture : à gauche, les courbes représentent les volumes forestiers totaux (courbe pleine), de feuillus et de conifères (courbes en pointillés). À droite, l'aire verte correspond au stock de carbone des peuplements de forêts, l'aire violette à celui des produits bois, et l'aire bleue à l'effet de substitution (par exemple la substitution des produits issus de la biomasse forestière aux énergies fossiles).

Marie-Hélène Schwoob, Centre d'études et de prospective

Source : Journal of Forest Economics

12:32 Publié dans Environnement, Forêts Bois | Lien permanent | Tags : changement climatique, atténuation, bois |  Imprimer | | | | |  Facebook

13/01/2021

La valeur récréative de la forêt métropolitaine largement supérieure aux ventes de bois

Selon un rapport récemment publié par le Commissariat général au développement durable (CGDD), dans le cadre de l'Évaluation française des écosystèmes et des services écosystémiques (EFESE), la valeur récréative de la forêt française (hors territoires d’outre-mer) est estimée entre 13 et 45 milliards d'euros, contre 3 milliards tirés de la commercialisation des bois.

L'estimation de cette valeur récréative s'appuie sur des données d'enquêtes qui concernent plus de 3 000 personnes, et sur des travaux de modélisation visant à calculer, d'une part, le consentement à payer des visiteurs pour accéder aux services récréatifs et, d'autre part, la valeur d'échange simulée (le marché du loisir récréatif forestier n'existant pas). C'est cette dernière qui peut être comparée à la valeur marchande des bois, issue de la comptabilité nationale. Le rapport préconise d'ailleurs de l'intégrer aux comptes de la forêt afin d'avoir une représentation plus large de la valeur de ces écosystèmes.

Utilisant des données issues du système d'information géographique pour avoir une description des forêts visitées, les auteurs ont également documenté les principales raisons des visites en forêt (promenade, cueillette, chasse, etc.) et les déterminants de l'attractivité des forêts pour un usage récréatif. Les forêts avec des arbres d'essences et d'âges variés, dont une partie d'arbres de grande taille, sont préférées par les visiteurs.

Répartition de l’offre et de la demande récréatives dans les forêts françaises

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Source : CGDD

Note de lecture : du rouge au vert l’offre augmente, du transparent à l’opaque la demande augmente.

Source : CGDD

12:50 Publié dans 2. Evaluation, Forêts Bois, Société | Lien permanent | Tags : services écosystémiques, bois, cgdd |  Imprimer | | | | |  Facebook

07/12/2020

Les terres cultivées et les pâturages, au cœur des engagements pour la restauration des écosystèmes ?

À l'approche du lancement, l'an prochain, de la décennie des Nations unies pour la restauration des écosystèmes, l'agence d'évaluation environnementale du gouvernement néerlandais PBL a publié une note recensant les engagements des différents pays du monde en matière de restauration. Au total, 115 pays ont pris de tels engagements dans le cadre des Conventions de Rio ou d'accords internationaux. Sur les près d'un milliard d'hectares concernés, la plupart concernent des terres forestières (42 %), mais 37 % touchent les terres agricoles, cultivées et pâturées (figure). Des études, comme celle de Strassburg et al. (2020), font état de l'utilité de restaurer des terres converties (i.e. d'un écosystème naturel à des terres cultivées ou à des pâturages). Un ciblage de seulement 15 % de celles-ci dans des aires prioritaires permettrait d'éviter 60 % des extinctions d'espèces et de séquestrer 20 % du total de l'augmentation de concentration de CO2 dans l'atmosphère depuis le début de la Révolution Industrielle.

Engagements de restauration au niveau mondial, par catégories de mesure de restauration (2020)

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Source : PBL

Source : PBL

08:57 Publié dans Agronomie, Environnement, Forêts Bois | Lien permanent | Tags : pâturage, restauration, écosystèmes |  Imprimer | | | | |  Facebook