04/09/2020
Perspectives de développement de petites économies insulaires
Une note de l’Institut d’émission d’outre-mer (IEOM), en date de juillet 2020, analyse les trajectoires de croissance de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française. Ces territoires partagent un modèle économique caractérisé par l’importance des transferts publics (notamment sous la forme de dépenses fiscales) et des spécialisations sectorielles, le tourisme en Polynésie française et la production du nickel dans l’archipel calédonien. Le développement d'activités telles que la pêche, la pisciculture ou la production de la vanille, ainsi que l’arrivée de nouveaux entrants sur des marchés intérieurs fréquemment oligopolistiques pourraient favoriser un développement plus endogène.
Source : Institut d’émission d’outre-mer
14:29 Publié dans Développement, Pêche et aquaculture, Territoires | Lien permanent | Tags : outre-mer, développement, insulaire | Imprimer | |
Urbanisation et « villes-actionnaires » en Inde
Paru en août 2020 sur La vie des idées, un article rend compte de l'ouvrage de l'urbaniste S. Balakrishnan consacré aux « villes-actionnaires » indiennes. « Avatar » des projets de corridors économiques destinés à accélérer l'industrialisation du pays et nécessitant de très nombreuses terres agricoles, la « ville-actionnaire » a été pensée comme un moyen de résoudre les conflits entre investisseurs et propriétaires ruraux. Ceux-ci deviennent actionnaires de l'entreprise immobilière (dividendes à percevoir sur les transactions), contre l'abandon de leurs activités agricoles (ex. : canne à sucre). Ce travail de terrain met en évidence les spécificités locales : positions dominantes de certaines castes, difficultés pour les communautés de travailleurs agricoles sans terre de faire valoir leurs intérêts, rôle variable des institutions rurales traditionnelles. Il soulève aussi diverses questions sur ce modèle de développement urbain.
Source : La vie des idées
14:08 Publié dans Mondialisation et international, Territoires | Lien permanent | Tags : inde, ville, urbanité, urbanisation | Imprimer | |
06/07/2020
Rôle de la géographie française dans l'approche territoriale de l'INTA (Argentine)
Un article publié en juin 2020 dans la revue Economía, Sociedad y Territorio aborde la genèse et la consolidation de l'approche territoriale à l'Instituto Nacional de Tecnología Agropecuaria (INTA), en mettant en évidence les apports de la géographie française à partir des années 1960. Créé en 1956 en Argentine (voir à ce sujet un portrait sur ce blog), l'INTA avait comme objectifs la recherche fondamentale et la diffusion des savoirs agricoles, dont le contenu et les orientations évoluèrent depuis, selon les contextes politiques.
À partir des années 1960, des programmes d'échange entre l'université de Bordeaux et la Universidad Nacional de Cuyo ont été développés, avec l'arrivée en Argentine d'enseignants et d'étudiants français : leurs contributions ont nourri la pratique locale de la géographie et laissé leur empreinte à l'INTA, en mettant l'accent sur l'approche territoriale et le développement régional. La coopération se poursuit de nos jours, notamment au sein du laboratoire Agriterris qui réunit des institutions françaises, argentines et brésiliennes.
L'approche territoriale s'est traduite, dans l'action publique argentine, par la mise en place des Proyectos regionales con enfoque territorial (PRET), qui déclinent à l’échelle locale le Plan Estratégico Institucional 2005-2015. Son objectif était d'impliquer davantage les organismes publics de recherche dans la prise en compte des problématiques socio-économiques et spatiales des territoires. Les stations expérimentales couvrant l'ensemble du pays ont permis la prise en compte des réalités régionales à partir des années 2000.
La mise en place des 122 PRET a entraîné une redistribution des rôles et une réallocation des ressources entre les deux piliers de l'institut que sont la recherche fondamentale et la vulgarisation des résultats. Celle-ci y est devenue de plus en plus centrale, en dépit du scepticisme des acteurs de la recherche fondamentale quant aux caractéristiques et finalités des PRET. En effet, selon l'auteur, ils favorisent la transmission des connaissances produites par les centres régionaux vers les systèmes productifs, contrastant avec l'orientation traditionnelle de l'INTA centrée sur les filières. Ces évolutions ont pu conduire à des conflits quant au choix des sujets de recherche au sein de l'institution.
Répartition géographique des centres régionaux de l'INTA en charge des PRET
Source : INTA
Hugo Berman, Centre d'études et de prospective
Source : Economía, Sociedad y Territorio
15:14 Publié dans Développement, Enseignement et recherche, Territoires | Lien permanent | Tags : géographie, argentine, inta | Imprimer | |
Le développement de filières locales est-il le gage d'une écologisation des pratiques agricoles ?
La relocalisation des systèmes alimentaires contribue-t-elle à l’écologisation des pratiques agricoles ? Pour répondre à cette question, les auteurs d’un article publié en mai 2020, dans la revue Développement durable et territoires, adaptent les cadres d'analyse communément mobilisés pour étudier des démarches agro-écologiques en circuit court, faites de relations entre producteurs, intermédiaires et consommateurs (cf. tableau). L'article compare ainsi l'émergence de deux filières en région Auvergne - Rhône-Alpes :
- la filière du steak haché surgelé « 100 % charolais du Roannais », portée par Roanne agglomération et un groupe d'éleveurs de bovins charolais à l'herbe, associant 17 producteurs et 16 enseignes de distribution, pour 6,5 tonnes de viande en 2017 ;
- une filière de soja en Isère et dans les deux Savoies, mise en place par une coopérative agricole, qui propose un tourteau de soja non OGM aux producteurs de fromages savoyards sous signe de qualité (60 éleveurs engagés, 500 ha de soja soit 1 500 t/an en 2017).
Grille d'analyse du développement de filières productives locales (en grisé, critères agro-écologiques)
Source : Développement durable et territoires
L’analyse établit que, dans un premier temps, la relocalisation des systèmes alimentaires valorise plus les pratiques agricoles existantes considérées comme écologiques qu'elle n'induit une véritable remise en question des pratiques conventionnelles. Dans l'ensemble, ces démarches de transition socio-économique des systèmes alimentaires n'intègrent pas le consommateur dans leur gouvernance. Le tourteau de soja non OGM, issu d'une trituration mécanique, questionne les pratiques des producteurs (préservation de la qualité du sol, fertilisation, rotations) mais également des polyculteurs-éleveurs qui l'utilisent pour l’alimentation de leurs troupeaux. Quant à la gouvernance multi-partenariale de la filière steak haché « 100 % charolais du Roannais », qui associe acteurs des filières et des territoires, elle est considérée par les auteurs comme le prototype d'une gouvernance adaptative, ouverte à la controverse sur l'écologisation des pratiques d'élevage, ce qui consolide sur le temps long les processus d'apprentissage.
Claire Bernard-Mongin, Centre d'études et de prospective
Source : Développement durable et territoires
15:12 Publié dans Agriculteurs, Alimentation et consommation, Environnement, Territoires | Lien permanent | Tags : local, pratiques agricoles, écologisation | Imprimer | |
12/06/2020
Fields of Gold. Financing the Global Land Rush, Madeleine Fairbairn
Les réflexions sur les rapports entre capital et agriculture sont anciennes mais elles connaissent un renouveau depuis une quinzaine d'années, en raison de l'intérêt croissant de certains investisseurs financiers en faveur du foncier agricole. Ce phénomène, composante de ce que l'on qualifie parfois de « financiarisation » de l'agriculture, est source de vives controverses. Dans cet ouvrage clair et synthétique, Madeleine Fairbairn, figure incontournable du courant anglo-saxon des études agraires critiques (Agrarian Studies), analyse cette « ruée vers la terre » de manière originale : elle se place du point de vue des investisseurs, alors que les recherches sont habituellement focalisées sur les conséquences de leurs décisions pour les agricultures familiales des pays ciblés.
Le premier chapitre montre qu'aux États-Unis, la finance a commencé à acquérir des terres dès 1990. Les débuts sont toutefois balbutiants, l'agriculture peinant à atteindre les rentabilités à deux chiffres auxquelles Wall Street est habituée. La crise de 2008 et la hausse des prix agricoles changent néanmoins la donne. Rapidement, le marché foncier étasunien ne suffit plus à absorber la masse de capitaux disponibles, conduisant ainsi à l'internationalisation du phénomène.
Le deuxième chapitre se penche sur la rationalité économique des investisseurs. L'auteure montre que ces derniers considèrent d'abord le foncier comme un actif financier rare, tel l'or, dont la valeur tend à s’accroître au cours du temps, et non comme un facteur permettant de produire des denrées agricoles. En d'autres termes, ils misent davantage sur l'augmentation de la valeur des terres, pour rentabiliser leur investissement, que sur les revenus tirés de la production.
Cette approche se heurte toutefois aux spécificités du foncier agricole, qui en font un actif financier à part. Ces particularités (hétérogénéité, illiquidité, etc.) et les outils mis en place par la finance pour les contourner, sont passés en revue dans le troisième chapitre. Enfin, la dernière partie montre la difficulté que rencontrent les États pour limiter l'ampleur de ces investissements. Portant un regard critique sur ce phénomène de financiarisation, l'auteur suggère en conclusion de s'inspirer des théories de l'économiste du XIXe siècle Henry Georges, qui proposait de taxer lourdement les gains liés à l'accroissement de la valeur des terres.
Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective
Lien : Cornell University Press
11:54 Publié dans Agriculteurs, Mondialisation et international, Territoires | Lien permanent | Tags : foncier, fairbairn, financiarisation | Imprimer | |
09/06/2020
Gouvernance et enjeux du foncier rural au Mali
Un séminaire sur le Mali, organisé en 2019, auquel participèrent des experts du CTFD et de l'AFD, ainsi que des fonctionnaires et membres d'organisations paysannes et civiles du Mali, a donné lieu à la publication d’une note de synthèse en mars 2020. Celle-ci aborde trois enjeux : la Loi foncière agricole (LFA) adoptée en 2017, les terres irriguées gérées par l'Office du Niger et les conflits violents provoqués par la gouvernance du foncier agropastoral. Les débats ont mis en avant des avancées telles que la méthodologie « ascendante » d’élaboration de la LFA, mais son application reste incertaine compte tenu de la faible présence de l’État sur l'ensemble du territoire. Par ailleurs, la pression foncière, la micro-parcellisation et la précarité de nombreux exploitants sont autant d'obstacles à une gestion plus juste (mieux distribuée entre les différentes parties) au sein de l'Office du Niger. Enfin, les conflits autour du foncier agricole et pastoral sont davantage expliqués par des aspects économiques, politiques, territoriaux, identitaires et religieux que par le mode de gestion des terres.
Source : CTFD
11:20 Publié dans Développement, Mondialisation et international, Territoires | Lien permanent | Tags : mali, foncier | Imprimer | |
11/05/2020
Territoires, culture et classes sociales, Jean-Claude Chamboredon
Jean-Claude Chamboredon, sociologue érudit et rusé, est décédé le 30 mars. Ses dernières publications remontaient aux années 1990 mais il était resté une figure incontournable des sciences sociales françaises. Depuis 2015, l’École normale supérieure et les éditions Rue d’Ulm avaient entrepris de faire revivre son œuvre en republiant ses principaux écrits en versions papier et électronique. Le présent livre vient clore ce projet éditorial. Il rassemble douze articles traitant tous des liens entre classes sociales, ancrages territoriaux et expressions culturelles, avec de nombreux développements sur les mutations de l'agriculture et du monde rural.
Un texte très intéressant retrace l'invention de « l'éternel paysan » à travers l'œuvre de Jean-François Millet. Chamboredon décrit les fondements sociaux, politiques et esthétiques de cette imagerie pittoresque et révèle l'opposition, chez ce peintre, de deux figures idéal-typiques : celle des prolétaires agricoles et manouvriers dépendants des grandes exploitations, et celle des paysans indépendants du bocage et des régions de foncier parcellaire. Ses toiles, tout en esthétisant la campagne, façonnent une nouvelle représentation de la paysannerie et célèbrent la force muette du peuple : dos courbés, réalisme rustique, petite vie des simples et des humbles.
Deux autres articles, novateurs au moment de leur publication (1980 et 1982), sont consacrés à la chasse. Pour Chamboredon, cette dernière ne relève pas seulement des pratiques viriles et des traditions populaires. Elle est aussi et surtout une activité sociale complexe, objet de lutte entre des groupes pour le contrôle de l'usage des espaces campagnards. Dans les années 1960 et 1970, elle permettait à des ex-ruraux « dépaysannés », partis habiter en ville, de garder des liens avec leurs commune et famille d'origine, ce qui explique la croissance significative de l'effectif national de chasseurs alors même que la population rurale baissait rapidement : la diffusion de la chasse était l'envers du processus d'urbanisation.
Plusieurs autres textes importants, publiés dans les années 1980, traitent du rural et de ses évolutions. Se démarquant des approches marxiste, fonctionnaliste et structuraliste alors dominantes, Chamboredon propose une lecture plus complexe en termes de groupes sociaux, de rapports de pouvoir et d'identité culturelle. Avec la déprise agricole, le rural était de moins en moins un espace de travail, de production, et de plus en plus un espace d'habitation (principale ou secondaire), de loisir, de repos, de folklore, de consommation d'environnement et de zones protégées. Ce passage de la campagne-agriculture à la campagne-paysage marquait l'emprise des habitants des villes sur les terroirs paysans, et la condamnation du rural à n'être plus, selon lui, qu'une « sorte d'équipement urbain ».
Bruno Hérault, Centre d'études et de prospective
Lien : Éditions Rue d'Ulm
10:11 Publié dans Agriculteurs, Société, Territoires | Lien permanent | Tags : chamboredon, histoire, rural, paysans, classes sociales, culture | Imprimer | |
07/05/2020
Quelle gouvernance démocratique des circuits courts agroalimentaires ?
Un article publié dans la Revue internationale d'économie sociale traite de la question du fonctionnement démocratique des circuits courts et locaux agroalimentaires (CCLA). Il s'agit d'une préoccupation commune et récurrente dans les 17 collectifs (figure ci-dessous) accompagnés par le laboratoire Géolab de l'université de Limoges, lors d'une collaboration avec le réseau agriculture durable du Limousin (InPACT Limousin) de 2015 à 2019. Les auteurs ont cherché à évaluer la gouvernance effective de ces collectifs, au-delà des intentions démocratiques exprimées par les membres (discours), de la structure organisationnelle (statut juridique) ou des dispositifs techniques (règles formelles de réunion, outils d'animation et de communication, etc.). Ils renouent avec des recherches déjà anciennes sur les enjeux de pouvoir, dans les coopératives agricoles, entre membres salariés et non-salariés. Il s'agit aussi de prolonger la réflexion plus récente, dans le sillage de l'économie sociale et solidaire (ESS), sur les relations entre membres de structures au sein desquelles la participation n'est pas liée au capital détenu.
Description des 17 dispositifs de circuits courts et locaux agroalimentaires étudiés en Limousin
Source : revue Recma
Faisant des sources informelles de pouvoir le cœur de leur étude, les auteurs en identifient trois grands types : liés au travail (qualité ou quantité de travail réalisé) ; liés aux dimensions économiques (qualité ou quantité des produits fournis) ; relevant de la sphère socio-politique (ancienneté dans le collectif, réseaux commerciaux ou sociaux). Dans l'ensemble des collectifs, une gouvernance polyarchique est observable, plus qu'une concentration par cumul des sources de pouvoir informel. Toutefois, l'article conclut sur la nécessité d'approfondir ce type d'analyse (psychologie sociale, monographies approfondies sur les formes de participation).
Claire Bernard-Mongin, Centre d'études et de prospective
Source : Revue RECMA
09:59 Publié dans Société, Territoires | Lien permanent | Tags : circuits courts, gouvernance, limousin | Imprimer | |
La déterritorialisation rurale : approche théorique et étude de cas dans les Andes équatoriennes
Un article du dernier numéro de la revue Economía, Sociedad y Territorio reprend le concept de « déterritorialisation » pour analyser les évolutions de l'agriculture communautaire dans plusieurs pays d'Amérique latine : disparition de la paysannerie, déstructuration des formes traditionnelles d'organisation et déracinement des populations rurales, dans un contexte favorable à l’implantation des agro-industries. L'auteur applique ce concept à l’étude d’un territoire situé en Équateur, où une politique de promotion du contract farming et de développement rural a été mise en place à partir de 2007.
L'enquête menée auprès de 50 familles de la comunidad de La Chimba a permis d'étudier l'impact de la progression de la filière laitière industrielle sur les systèmes polyvalents traditionnels : des exploitations capables de se spécialiser deviennent, en tant que maillons de la chaîne de valeur, des acteurs fonctionnels de l'agro-industrie. Les transformations du territoire ont été quantifiées à partir de deux indices. Le premier est « l’indice de déterritorialisation », qui inclut la surface en monoculture, la consommation industrielle, la fréquence des pratiques traditionnelles, de solidarité et de réciprocité (participation à des activités communautaires), et la migration des jeunes. Le second est un « indice d'articulation au marché », incluant les ventes à l'agro-industrie, les crédits et revenus de l'activité laitière, les volumes et surfaces de production, et la commercialisation locale. Ces indices ont permis d'identifier, au sein de l'échantillon, 3 catégories de structures familiales :
- « entreprise rurale » (18 %) : exploitations capitalisées consacrées à l'élevage laitier, avec achat de terres, diversification des investissements et absence de pratiques de solidarité et de réciprocité ;
- agriculture « spécialisée » (54 %) : exploitations dont la quasi totalité des parcelles a été convertie en pâturages, avec faible demande de main-d’œuvre poussant à la migration des jeunes ; les pratiques de solidarité et de réciprocité sont occasionnelles voire inexistantes ;
- agriculture « paysanne » (28 %) : cette catégorie, en déclin, met en œuvre des pratiques de polyculture, d'autoconsommation, de solidarité et de réciprocité.
Selon l'auteur, cette méthode aide à mieux comprendre les évolutions des structures agricoles, en faisant le lien entre déterritorialisation et articulation au marché.
Corrélation des indices de déterritorialisation et d'articulation au marché
Source : Economia, Sociedad y Territorio
Lecture : en ordonnée, indice d'articulation au marché, en abscisse, indice de déterritorialisation. Type 1 : entreprise familiale rurale ; type 2 : agriculture familiale « spécialisée » ; type 3 : agriculture familiale « paysanne ».
Hugo Berman, Centre d'études et de prospective
Source : Economía, Sociedad y Territorio
09:55 Publié dans Agriculteurs, Mondialisation et international, Territoires | Lien permanent | Tags : déterritorialisation, equateur, production laitière | Imprimer | |
Droit et relocalisation des systèmes alimentaires
L’Institut de droit rural de l’université de Poitiers a organisé, le 11 mars 2020, un colloque consacré aux défis, pour le droit, du thème de la « relocalisation » des systèmes alimentaires. Des intervenants variés y participaient et les captations vidéos des différentes séquences sont accessibles en ligne. Divers sujets ont été abordés : les collectivités territoriales comme acteurs majeurs, la « démocratie alimentaire » locale comme processus à encourager, le foncier comme support à mobiliser, les moyens d'agir sur l'entreprise agricole, sur l'économie agricole et sur les filières.
Parmi les analyses présentées figure la nécessité de repenser la gouvernance du territoire. Bien que mentionnées dans la définition législative de la politique en faveur de l'agriculture et de l'alimentation, les collectivités locales ont peu de compétences en matière d'alimentation. Elles disposent toutefois de moyens juridiques leur permettant de développer leurs propres politiques : passation de marchés publics (dont restauration collective), urbanisme, foncier, développement économique. Elles doivent cependant tenir compte de la jurisprudence du Conseil d’État (1930), subordonnant cette intervention à deux conditions : la légitimité du besoin à satisfaire et la carence de l’initiative privée. Le foncier constitue un support à mobiliser, notamment pour pérenniser la vocation agricole d'un terrain. Plusieurs outils existent, dont la possibilité pour les départements de créer des périmètres de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels péri-urbains. La collaboration avec les SAFER est ici fondamentale.
Parmi les autres enseignements de ce colloque, on retiendra les échanges relatifs aux moyens juridiques d'action sur les filières agricoles, de la fourche à la fourchette. Bien qu'envisagées dans la loi d’avenir en 2014 et précisées par une résolution du Parlement européen (14/01/2014), les filières territorialisées sont très imparfaitement prises en considération par le droit. Dans ces conditions, une évolution juridique pourrait offrir deux voies complémentaires : d’une part une forme de « laisser agir » de ces filières, en levant les obstacles juridiques (ex. : critères locaux dans les marchés publics) ; d’autre part donner des moyens pour structurer de véritables filières locales (ex. : inclusion dans les obligations des projets territoriaux d'une clause similaire à celle, prévue par le Code rural, d'une part minimale de produits locaux dans les magasins de producteurs).
Franck Bourdy, Centre d’études et de prospective
Source : université de Poitiers
09:54 Publié dans 4. Politiques publiques, Société, Territoires | Lien permanent | Tags : droit, relocalisation, systèmes alimentaires | Imprimer | |
06/05/2020
Une estimation de l'érosion hydrique des sols dans l'Union européenne
Dans un article publié dans la revue Remote sensing, une équipe du Joint Research Center mobilise des données issues de diverses sources européennes (CORINE Land Cover, enquêtes LUCAS, enquêtes sur la structure des exploitations, etc.), afin de mettre à jour l'estimation du niveau d'érosion hydrique des sols au sein de l'Union. Ce travail montre qu'entre 2010 et 2016, dernière année pour laquelle les données sont disponibles, l'érosion a diminué de 0,4 %, alors qu'une réduction de 9 % avait été estimée pour la période allant de 2000 à 2010. D'importantes disparités s'observent entre pays, les États de l'ouest (Allemagne, Danemark, France, Portugal) étant ceux où la baisse est la plus marquée (>5 %), en raison d'une forte progression des pratiques agricoles permettant de limiter l'érosion des sols (non labour, couverture des sols en hiver, etc.).
Source : Remote sensing
09:40 Publié dans Agronomie, Territoires | Lien permanent | Tags : sols, érosion hydrique, ue | Imprimer | |
05/05/2020
L’avenir de la Nouvelle-Calédonie au prisme du foncier coutumier
En Nouvelle-Calédonie, l’accord de Nouméa de 1998 marque la pleine reconnaissance de l’identité kanak et des terres coutumières, définies comme inaliénables, insaisissables, incommutables et incessibles. En avril 2020, un article de Métropolitiques revient sur les caractéristiques et l’aménagement de ce « commun foncier », administré sur décision de la communauté pour servir les intérêts des populations autochtones.
La gestion coutumière des droits d’administration et d’usage
Source : Métropolitiques
Héritage de la colonisation, les terres coutumières sont pour la plupart localisées à l’écart des principaux centres de développement économique, là où dominent par ailleurs les propriétés privées et domaniales. Cette fracture territoriale se traduit par un exode rural vers les pôles urbains de l’ouest et l'intercommunalité du Grand Nouméa. Une valorisation économique (notamment agricole) de ces terres se développe, au moyen d’un outil juridique original, le Groupement de droit particulier local (GDPL), qui permet à un représentant de la communauté de recourir au droit commun tout en retranscrivant la décision coutumière. Ce dispositif peut redessiner les espaces ruraux, comme le montre l’aménagement d’un village mélanésien par la grande chefferie du district de Wetr (Lifou).
Source : Métropolitiques
09:27 Publié dans Territoires | Lien permanent | Tags : nouvelle-calédonie, foncier, coutumier | Imprimer | |
15/04/2020
Covid-19 et autonomie alimentaire
Un numéro de mars 2020 des Analyses et perspectives de l'APCA envisage les principales implications de cette épidémie et des mesures adéquates de gestion du système alimentaire français. Parmi les points clés abordés figure l'« autonomie alimentaire nationale » : couverture globale des consommations par les productions françaises pour les céréales, les pommes de terre, la plupart des productions animales, etc. ; situation plus hétérogène pour les fruits et légumes. Les auteurs soulignent ensuite l'« importance décisive du facteur travail », pour l'agriculture (saisonniers en particulier), les industries agroalimentaires, la distribution et le transport routier de marchandises. L'hétérogénéité de la production alimentaire sur le territoire rend essentielle la logistique des échanges entre régions. Par ailleurs, la fermeture des commerces alimentaires non essentiels et d'une partie des marchés de plein vent est également un problème. La « responsabilité décisive » de la consommation finale dans le maintien des exploitations, en particulier pour les produits de saison et les produits frais, est également soulignée. Pour finir, les auteurs invitent à « remettre sur l'établi l'idée d'autosuffisance alimentaire ».
Source : APCA
19:10 Publié dans Alimentation et consommation, Production et marchés, Territoires | Lien permanent | Tags : covid-19, autonomie alimentaire, système alimentaire | Imprimer | |
09/04/2020
L'ingénierie territoriale au service de la transition agricole et alimentaire
Dans un rapport publié fin février, les Régions de France et l'association RESOLIS présentent 25 mesures régionales emblématiques pour accompagner la transition agricole et alimentaire. Ces mesures, choisies parmi un échantillon de 100 fiches descriptives recensées auprès de ces collectivités territoriales en 2019, sont classées en fonction des cinq axes énoncés dans le Livre blanc des Régions pour une agriculture durable et une alimentation responsable paru en décembre 2018. Plus d'un tiers des dispositifs cherchent à agir sur la structuration de filières et la mise en réseau d'acteurs, et la plupart utilisent l'outil des subventions (42 %), pour des projets dont les budgets varient généralement entre quelques centaines de milliers et plusieurs millions d'euros.
Répartitions des dispositifs selon les cinq axes du Livre Blanc
Source : Régions de France
L'intérêt des Régions est particulièrement marqué pour l'axe « Simplifier l’accès aux soutiens publics et les réorienter vers la transition en partant des projets d’acteurs et des territoires » : il regroupe 41 % des mesures répertoriées. Si 60 % des acteurs soutenus par ces dispositifs viennent du secteur de la production agricole, les projets font aussi appel à une variété d'acteurs publics et privés. Ainsi, le dispositif Alterna (Nouvelle Aquitaine) mobilise des crédits publics régionaux et européens (FEADER, fonds Juncker) pour favoriser l'accès au financement pour les projets risqués ou pour les nouvelles entreprises sans historique de crédit, en allégeant les conditions et exigences en cas de garanties insuffisantes : le dispositif est déployé en partenariat avec trois banques qui proposent et octroient les prêts, et avec des « points relais » variés (chambres d'agriculture, coopératives, associations, fédérations de producteurs, etc.). D'autres mesures font aussi la part belle aux associations d'acteurs (chambres d'agriculture, instituts techniques et de recherche, fermes expérimentales, etc.), à l'expérimentation et au portage des projets par les acteurs locaux. Il s'agit, par exemple, du soutien de collectifs d'agriculteurs rassemblés autour de la réduction de l'impact environnemental (sols, émissions de gaz à effet de serre, etc.) en Bretagne, ou de la recherche d'une autonomie protéique pour les exploitations d'élevage dans les Pays de la Loire. Ces mesures illustrent l'évolution actuelle de l'ingénierie territoriale face aux enjeux de la transition, en particulier pour essayer de déverrouiller les blocages économiques et financiers.
Marie-Hélène Schwoob, Centre d'études et de prospective
Source : Régions de France
18:06 Publié dans 4. Politiques publiques, Territoires | Lien permanent | Tags : ingénierie territoriale, transition, régions | Imprimer | |
08/04/2020
Décryptage de 70 ans d'occupation des sols en Île-de-France
Réalisé à partir de photographies aériennes couvrant l'ensemble du territoire francilien, le Mos (Mode d'occupation du sol) distingue les espaces naturels, agricoles, forestiers (NAF) et urbains. En s'appuyant sur les différentes éditions du Mos, de la première en 1949 à la dernière en 2017, l'Institut Paris Région décrypte, dans une Note rapide de mars 2020, les évolutions de 70 ans d'usage des terres en Île-de-France. Elle montre que, sur cette période, les NAF ont vu leur étendue se réduire de 164 000 ha, alors qu'ils en couvraient plus d'un million et occupaient 91 % de la superficie régionale en 1949. En cause, le développement de l'habitat à la périphérie de Paris, la capitale ne concentrant plus que 18 % de la population francilienne en 2017, contre 40 % en 1949. Le phénomène affiche toutefois une forte inflexion puisque l'artificialisation de NAF est passée, en moyenne, de 3 330 ha/an entre 1949 et 1982, à 590 ha/an entre 2012 et 2017, la majeure partie de la production de logements se faisant désormais en renouvellement urbain.
Source : Institut Paris Région
18:01 Publié dans Territoires | Lien permanent | Tags : ile-de-france, occupation des sols, naf | Imprimer | |