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12/04/2022

Dépendance des cultures aux insectes pollinisateurs en Amérique latine

Dans le dernier numéro d'Ecological Economics, des chercheurs ont estimé le degré de dépendance des cultures aux insectes pollinisateurs en Amérique latine, et mis en évidence la vulnérabilité de ces agro-écosystèmes. Cinquante-trois espèces cultivées en Argentine, au Brésil, au Chili, au Mexique et en Uruguay ont été classées selon leur dépendance à la pollinisation entomophile : en cas d'absence d'insecte pollinisateur, les espèces les moins dépendantes subissent une baisse de rendement de moins de 10 %, et les plus vulnérables une perte supérieure à 90 %. Les rendements et prix de vente moyens de ces productions ont permis d'estimer le poids économique direct de cette vulnérabilité à près de 78 milliards de dollars par an, pour les cinq pays étudiés. En parallèle, le service rendu par les abeilles domestiques a été évalué à près de 23 milliards de dollars. Compte tenu du déclin des populations d'insectes sauvages, les auteurs insistent sur la fragilité des systèmes actuels.

Source : Ecological Economics

11/05/2020

Territoires, culture et classes sociales, Jean-Claude Chamboredon

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Jean-Claude Chamboredon, sociologue érudit et rusé, est décédé le 30 mars. Ses dernières publications remontaient aux années 1990 mais il était resté une figure incontournable des sciences sociales françaises. Depuis 2015, l’École normale supérieure et les éditions Rue d’Ulm avaient entrepris de faire revivre son œuvre en republiant ses principaux écrits en versions papier et électronique. Le présent livre vient clore ce projet éditorial. Il rassemble douze articles traitant tous des liens entre classes sociales, ancrages territoriaux et expressions culturelles, avec de nombreux développements sur les mutations de l'agriculture et du monde rural.

Un texte très intéressant retrace l'invention de « l'éternel paysan » à travers l'œuvre de Jean-François Millet. Chamboredon décrit les fondements sociaux, politiques et esthétiques de cette imagerie pittoresque et révèle l'opposition, chez ce peintre, de deux figures idéal-typiques : celle des prolétaires agricoles et manouvriers dépendants des grandes exploitations, et celle des paysans indépendants du bocage et des régions de foncier parcellaire. Ses toiles, tout en esthétisant la campagne, façonnent une nouvelle représentation de la paysannerie et célèbrent la force muette du peuple : dos courbés, réalisme rustique, petite vie des simples et des humbles.

Deux autres articles, novateurs au moment de leur publication (1980 et 1982), sont consacrés à la chasse. Pour Chamboredon, cette dernière ne relève pas seulement des pratiques viriles et des traditions populaires. Elle est aussi et surtout une activité sociale complexe, objet de lutte entre des groupes pour le contrôle de l'usage des espaces campagnards. Dans les années 1960 et 1970, elle permettait à des ex-ruraux « dépaysannés », partis habiter en ville, de garder des liens avec leurs commune et famille d'origine, ce qui explique la croissance significative de l'effectif national de chasseurs alors même que la population rurale baissait rapidement : la diffusion de la chasse était l'envers du processus d'urbanisation.

Plusieurs autres textes importants, publiés dans les années 1980, traitent du rural et de ses évolutions. Se démarquant des approches marxiste, fonctionnaliste et structuraliste alors dominantes, Chamboredon propose une lecture plus complexe en termes de groupes sociaux, de rapports de pouvoir et d'identité culturelle. Avec la déprise agricole, le rural était de moins en moins un espace de travail, de production, et de plus en plus un espace d'habitation (principale ou secondaire), de loisir, de repos, de folklore, de consommation d'environnement et de zones protégées. Ce passage de la campagne-agriculture à la campagne-paysage marquait l'emprise des habitants des villes sur les terroirs paysans, et la condamnation du rural à n'être plus, selon lui, qu'une « sorte d'équipement urbain ».

Bruno Hérault, Centre d'études et de prospective

Lien : Éditions Rue d'Ulm

10:11 Publié dans Agriculteurs, Société, Territoires | Lien permanent | Tags : chamboredon, histoire, rural, paysans, classes sociales, culture |  Imprimer | | | | |  Facebook

05/04/2018

La Poule. Pratiques d’élevage et histoire culturelle, Danièle Alexandre-Bidon, Perrine Mane et Mickaël Wilmart (dirs.)

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Poule : oiseau de basse-cour à ailes arrondies, queue courte et crête dentelée, occupant une place de choix dans notre régime alimentaire. Ethnoécologie : étude des relations entre les sociétés humaines et leur environnement naturel, dans des perspectives historiques et géographiques, adoptant une approche interculturelle et comparative. Revue : publication périodique qui contient des articles répondant à une ligne éditoriale. Cette série de onze textes, très divers et toujours intéressants, issus d'une journée d’études organisée à Paris en mai 2015, fait donc des gallinacés un sujet privilégié d’histoire et de géographie, saisi à la fois à travers les modes de consommation, les représentations artistiques, les traditions culturelles, les techniques d’élevage et l'évolution du rapport Homme-Animal.

La poule ainsi mise à l'honneur du dernier numéro de la Revue d'ethnoécologie (semestrielle, en ligne et gratuite) est celle qui est élevée, tuée, plumée et mangée, de l’Antiquité à nos jours (dans le monde occidental essentiellement). N. Blanc montre qu'à l'époque gréco-romaine, elle s'efface derrière le jeune poulet (qui participe de la vie religieuse et politique), et surtout le coq, dont le caractère belliqueux domine l’imaginaire. P. Mane se concentre elle sur les poules et poulaillers médiévaux, sur les modes d'élevage et de gardiennage, pendant que M. Wilmart décrit l'économie volaillère sur la période XIIIe-XVIe siècles. B. Denis retrace le classement des races de poules et revient sur les enseignements de la littérature zootechnique à cet égard. V. Boudier s'intéresse aux représentations des volailles dans la peinture italienne du Cinquecento. Plus près de nous, D. Alexandre-Bidon traite de la place de la poule dans la bande dessinée. Rien ne va plus pour gallina quand F. Graber décrit la naissance puis l'avènement du poulet industriel, au XXe siècle aux États-Unis, royaume des nuggets. Mais tout s'arrange quand Y. Chanoir analyse les images et fonctions de la poule dans le cinéma occidental (« La poule crève l’écran »). Très instructives aussi sont les nombreuses pages et photos consacrées par P. Rameau, D. Brabant et S. Bahuchet aux objets concernant cet oiseau dans les collections du Musée de l’Homme : œillères, paniers, pondoirs, fouets à œufs, plumeaux, boucles d'oreilles, parures de plumes, harnachements de coqs de combat, offrandes rituelles, amulettes, estampes, etc.

Ce riche dossier, consacré à un animal jugé secondaire, vient combler une lacune éditoriale alors que d'autres bêtes, à l'instar du porc ou du cheval, ont depuis longtemps leurs chercheurs et leurs recherches. Les poules aussi ont une histoire !

Bruno Hérault, Centre d'études et de prospective

Lien : Revue d'ethnoécologie

09:16 Publié dans Enseignement et recherche, Société | Lien permanent | Tags : ethnoécologie, poule, élevage, histoire, culture |  Imprimer | | | | |  Facebook

06/10/2016

Quand agriculture rime avec culture

Que recouvre le terme « culture » pour les Français ? Le ministère de la Culture publie les résultats d'une enquête conjointe avec le CREDOC, qui met en lumière la place importante qu'occupent l'agriculture, la gastronomie et le patrimoine naturel dans ce qui fait culture pour nos concitoyens. Ainsi, à la question « qu'est ce que vous évoque le mot culture ? », une fois sur huit la réponse fait référence au sens premier de ce terme : l'agriculture et l'élevage, mais également toutes les productions liées.

Deuxième enseignement de cette enquête, lorsqu'on les interroge plus précisément sur le fait que telle ou telle activité relève ou pas du champ culturel, on recueille – entre autres – les résultats suivants : la cuisine est une activité plutôt culturelle pour 93 % des personnes, le jardinage pour 65 % et la chasse et la pêche pour 52 %. Notons que, pour les deux derniers points, les réponses varient nettement en fonction du niveau d'études : les diplômés de l'enseignement supérieur ont une vision plus restrictive du champ culturel.

Appartenance des activités au périmètre de la culture

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Source : ministère de la Culture et de la Communication

Source : ministère de la Culture et de la Communication

10:54 Publié dans Société | Lien permanent | Tags : culture, cuisine, jardinage, pêche, chasse |  Imprimer | | | | |  Facebook