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14/10/2020

Le rôle des pollutions aux algues vertes dans la formation des prix immobiliers

Une équipe de chercheurs d'Inrae a publié une synthèse de ses travaux sur le consentement des particuliers à payer pour des externalités environnementales. Plus précisément, ils se sont intéressés, pour la région Bretagne, à l'influence de la présence des algues vertes (pollution en grande partie d'origine agricole) sur la formation des prix de l'immobilier résidentiel.

Ces travaux reposent sur l'analyse économétrique des prix hédoniques, où la qualité des biens se traduit dans les prix de transaction, cette approche étant raffinée ici par une analyse spatiale selon la localisation des logements. Les prix de vente de plus de 8 000 habitations ont été ainsi étudiés, et l'analyse concerne les zones rurales du Finistère, du Morbihan et des Côtes d'Armor. Le modèle économétrique visant à isoler et quantifier les différents déterminants de la formation des prix intègre i) des caractéristiques intrinsèques du logement, ii) des variables socio-économiques, agricoles et environnementales pour les communes concernées, iii) la distance par rapport aux sites pollués par des algues vertes. Si, toutes choses égales par ailleurs (caractéristiques du logement, niveau socio-économique de la commune, etc.), une des variables étudiées est corrélée positivement avec le prix des logements, c'est le signe que les résidents sont prêts à payer plus cher pour ce facteur (consciemment ou inconsciemment, directement ou indirectement). Inversement, une corrélation négative signifie que ce facteur implique une dévalorisation des biens.

Les analyses montrent que les pollutions aux algues vertes sont bel et bien corrélées à une dépréciation des logements, et donc à une diminution du bien-être des résidents. Les logements étudiés étant en moyenne à 18 km de la plage polluée la plus proche, s'en éloigner de 10 % supplémentaires (1,8 km) s'accompagne en moyenne d'une augmentation de leur valeur totale de 950 €. Extrapolée à la Bretagne entière, la dépréciation totale des biens par rapport à la situation des zones actuellement les moins polluées serait de plus de 11 milliards d'euros. Les résidents bretons paraissent prêts à payer 200 € par an pour réduire leur exposition aux algues vertes, au niveau minimum actuellement constaté dans la zone, une somme très supérieure au coût des politiques actuelles de lutte contre ces pollutions (7 €/an et par personne). Pour les auteurs, l'impact économique de cette pollution est donc majeur, alors que seul le secteur du logement est ici analysé, et que les conséquences sur l'attractivité touristique et d'autres secteurs alourdiraient ce bilan.

Jean-Noël Depeyrot, Centre d'études et de prospective

Sources : InraeLand Use Policy

 

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13/10/2020

L'Organisation internationale pour les migrations publie un rapport sur la relation entre mobilités et agriculture en Afrique de l'Ouest

Dans un contexte de changement climatique et de dégradation de l'environnement, et alors que l'agriculture est le principal employeur en Afrique de l'Ouest, l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) a publié un rapport sur les bénéfices d'une transition vers l'agro-écologie et les liens avec les décisions de migrer. Bien que celles-ci soient influencées par divers facteurs, les auteurs voient dans la transition agro-écologique un levier d'amélioration et de diversification des moyens de subsistance, afin que la mobilité, notamment au sein des communautés marginalisées, résulte d'un choix plutôt que d'une nécessité. Le rapport décrit également les obstacles à une telle transition, notamment en matière d'accès à la terre, à l'eau et aux soutiens publics, de risques climatiques, mais aussi de comportements des producteurs et des consommateurs.

Source : OIM

 

 

Dans quelle mesure les prix agricoles reflètent-ils le contenu en eau des produits et la rareté de celle-ci ?

Une étude récemment parue dans Environmental Research Letters s'intéresse aux liens entre les prix agricoles, le contenu des produits en eau et la rareté de cette ressource dans les pays producteurs. Son objectif est d'apporter un éclairage empirique sur l'allocation de l'eau au niveau mondial, dont la question de la tarification constitue un point central. Même en l'absence de tarification, il se peut que les contraintes d'accès à l'eau augmentent les coûts de production et se reflètent in fine dans le prix des produits. S'appuyant sur les données de FAOSTAT, d'AQUASTAT, de la Banque mondiale et de WaterToFood, les auteurs utilisent une série de modèles économétriques pour analyser l'influence, sur le prix des denrées agricoles de 162 pays sur la période 1991-2016, du contenu en eau (empreinte) des produits et d'un indicateur de rareté de l'eau dans le pays producteur. Les résultats montrent que ces deux variables ont une influence statistiquement significative sur les prix, surtout dans le cas des matières premières (blé, maïs, soja, pomme de terre), moins dans celui des cultures commerciales (café, cacao, thé, vanille) (cf. figure). Ces premiers éléments à l'échelle mondiale pourront faire l'objet d'approfondissements théoriques et empiriques afin de confirmer, infirmer ou nuancer, à terme, ces hypothèses.

Relation entre le prix des produits agricoles (en ordonnée) et leur empreinte eau (en abscisse), pour 12 produits et catégories de produits

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Source : Environmental Research Letters

Source : Environmental Research Letters

 

 

 

 

 

 

Agribalyse 3.0 : des données sur l'impact environnemental de 2 700 produits agricoles et alimentaires

Le 29 septembre dernier avait lieu le colloque de présentation de la nouvelle version de l’outil Agribalyse, développé conjointement par Inrae et l'ADEME. Cet outil fournit une base de données publique sur les impacts environnementaux de 200 produits agricoles (notamment en production biologique) et, désormais, de 2 500 aliments transformés, consommés en France. Les indicateurs environnementaux mobilisés sont calculés en utilisant la méthode de l'analyse du cycle de vie (ACV), pour des aliments standards (ayant une composition moyenne), et sont rapportés au kilogramme produit (figure ci-dessous). L'ACV prend en compte toutes les phases du cycle de vie et couvre différents enjeux environnementaux. Certains impacts sont toutefois encore mal comptabilisés, comme ceux sur la biodiversité et les sols. Après une présentation générale, les possibilités offertes par un tel outil ont été discutées (aide à la reconfiguration des exploitations agricoles, information aux consommateurs, etc.), les intervenants appelant à des usages prudents.

L'approche Agribalyse appliquée à une pizza margherita

agribalyse.jpg

Source : ADEME

Source : ADEME

 

 

Quels impacts environnementaux de la consommation de produits issus de la pêche et de l'aquaculture en France ?

Dans un document de travail publié récemment, des chercheurs d'Inrae ont voulu évaluer les impacts environnementaux de la consommation de produits de la mer en France. Pour ce faire, ils ont construit une base de données combinant informations commerciales et de production, qu'ils ont couplée à des indicateurs environnementaux (empreinte carbone, potentiel d'eutrophisation, consommation énergétique). Les auteurs montrent notamment que les émissions de gaz à effet de serre générées par la consommation de produits de la mer s'élèvent à 2,6 teqCO2/t en moyenne, ce qui est très en deçà des 8,2 à 21,7 teqCO2/t associées à la consommation de viande bovine. Au-delà de cette moyenne, d'importantes variations s'observent selon les espèces considérées. Ainsi, l'empreinte carbone des poissons pélagiques s'établit aux alentours de 1 teqCO2/t, contre plus de 10 teqCO2/t pour les crevettes et crustacés.

Source : Inrae

 

 

12/10/2020

Quelles politiques sectorielles pour atteindre les objectifs de réduction des émissions ?

Dans un rapport récent, le Fonds monétaire international (FMI) analyse l'évolution des politiques publiques d'atténuation du changement climatique dans l'Union européenne, pour les cinq secteurs les plus contributeurs en CO2, parmi lesquels l'agriculture (10 % des émissions totales). Si ces dernières ont diminué de 20 % dans les années 1990, elles sont stables depuis 2005. Après un inventaire des principales mesures, le rapport formule des préconisations pour les niveaux européen (PAC principalement) et national (politiques fiscales).

Source : FMI

 

09:20 Publié dans Climat, Environnement | Lien permanent | Tags : émissions, changement climatique |  Imprimer | | | | |  Facebook

15/09/2020

Impact négatif de la déforestation sur la culture du maïs dans le Cerrado

Une étude publiée le 29 juin 2020 dans la revue Nature Sustainability met en évidence que la déforestation dans le Cerrado, second biome brésilien le plus important en surface, conduit à une baisse des rendements de la culture de maïs. Pour mémoire, le Cerrado a déjà connu une déforestation de 50 % de ses zones de végétation native, et le code forestier brésilien prévoit notamment que les propriétés rurales doivent conserver 20 à 35 % de végétation native, selon leur emplacement géographique.

Les auteurs ont analysé et comparé les données climatiques avant déforestation, et pour une gamme de situations après déforestation intégrant de la culture de soja ou une double culture soja-maïs. Dans tous les cas, le nombre de jours avec des températures critiques pour les cultures augmente et l’évaporation diminue significativement. La culture du soja, moins sensible à la température, ne connaît pas de baisse de rendement significative, contrairement à celle du maïs qui est affectée par l’augmentation du nombre de nuits lors desquelles la température ne descend pas en dessous de 24°C. La baisse de rendement constatée s’établit entre - 6 à - 8 % selon les situations.

La production de maïs se développe fortement ces dernières années au Brésil, troisième producteur mondial de cette céréale. Les scientifiques indiquent toutefois que le système climatique du Cerrado pourrait être bousculé si l’évapotranspiration pendant la saison sèche devenait trop faible. En effet, ce biome, également appelé « forêt inversée », en raison de la présence de très grandes racines, ne cesse pas son activité d’évapotranspiration pendant la saison sèche, ce qui permettrait le retour de la saison des pluies. L’absence d’une quantité suffisante de végétation native pourrait alors conduire à casser ce cycle des pluies et porter davantage préjudice à l’activité agricole.

Julien Barré, Conseiller régional Agriculture et Alimentation, Service Économique Régional, Ambassade de France au Brésil

Source : Nature Sustainability

Les écosystèmes anthropisés sont plus riches en espèces hôtes de pathogènes que les écosystèmes naturels

Un article paru en août dans la revue Nature s'intéresse à l'anthropisation des écosystèmes et à ses effets potentiels sur les espèces hôtes de pathogènes et sur le risque associé de zoonoses. Les êtres humains ont modifié plus de 50 % des terres habitables. Cette transformation des forêts, prairies et déserts en zones urbaines et en terres agricoles a causé le déclin de nombreuses espèces spécialistes (ex. : rhinocéros). Les espèces généralistes (comme les rats) ont, en revanche, pu prospérer dans ces nouveaux habitats. Des chercheurs des universités de Londres et d'Oxford se sont donc demandé si les espèces les plus à même d'abriter des pathogènes (« espèces hôtes ») faisaient partie de la première ou de la seconde catégorie.

Pour répondre à cette question, les auteurs ont utilisé les données de 6 800 assemblages écologiques issues de la base globale PREDICTS, qui compile les éléments concernant environ 3,2 millions d'espèces observées dans plus de 660 études. Ils ont identifié 376 espèces hôtes, étudiées dans 184 travaux portant sur 6 continents (figure ci-dessous). Ils ont ensuite assigné à chaque site une catégorie d'usage des terres (végétation primaire, secondaire, écosystèmes gérés - plantations forestières, prairies, cultures et aires urbaines) et une intensité de cet usage (minimal ou substantiel). Ils en comparent alors les effets sur les espèces hôtes et non-hôtes.

Localisation des études analysées et distribution taxonomique des espèces hôtes de pathogènes

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Source : Nature

Lecture : les points sur la carte montrent la localisation des assemblages écologiques étudiés, avec ceux ciblant les mammifères en noir et les autres en rouge. Les pays en bleu sont ceux pour lesquels au moins une étude a été conduite. Le graphique représente la distribution taxonomique (invertébrés, oiseaux, mammifères, reptiles/amphibiens) des espèces hôtes de pathogènes.

Leurs résultats montrent que la richesse et l'abondance des espèces hôtes sont supérieures dans les habitats anthropisés par rapport aux écosystèmes primaires. Ces constats s'inversent pour les espèces non-hôtes (figure ci-dessous). En conséquence, les espèces hôtes représentent une proportion plus importante de la diversité spécifique (+ 18 à 72 %) et de l'abondance totale (+ 21 à 144 %) dans ces milieux. L'amplitude de ce résultat, qui varie selon les taxons, est particulièrement forte pour les rongeurs, les chauve-souris et les passereaux hôtes. Enfin, les auteurs montrent que les espèces de mammifères abritant le plus de pathogènes sont plus présentes dans les écosystèmes gérés par l'homme. Ils suggèrent donc que la restauration des habitats dégradés et la protection des zones naturelles pourraient bénéficier à la fois à l'environnement et à la santé publique.

Liens entre l'utilisation des terres, et la richesse et l'abondance des espèces hôtes de pathogènes

Biodiversite2.jpg

Source : Nature

Lecture : a) richesse spécifique (nombre d'espèces), b) abondance totale (nombre d'individus), c) part des espèces hôtes dans la richesse spécifique et d) part des espèces hôtes dans l'abondance totale. Espèces hôtes en rouge, espèces non-hôtes en vert, usage minimal des terres représenté par des points, usage substantiel par des triangles.

Estelle Midler, Centre d'études et de prospective

Source : Nature

Une estimation des conséquences économiques des sécheresses sur le secteur agroalimentaire italien

Sous l'effet du changement climatique, l'Europe connaît des épisodes de sécheresse de plus en plus fréquents, intenses et longs. Dans un article publié dans la revue Land Use Policy, une équipe du Centre commun de recherche (Joint Research Center) propose une modélisation rétrospective visant à estimer les conséquences économiques des sécheresses survenues entre 2001 et 2016 en Italie. Si ce type de travaux fait régulièrement l'objet de publications (voir à ce sujet un précédent billet), l'originalité du travail présenté ici réside dans le fait que l'analyse ne se limite pas au seul secteur agricole, mais inclut également les secteurs de l'aval (transformation, distribution, etc.).

La modélisation combine un modèle statistique estimant la corrélation entre le rendement des principales cultures et l'intensité des sécheresses, et un modèle économétrique d'équilibre général régionalisé appréciant les répercussions économiques de la diminution de production agricole suite au déficit en eau. Il en ressort un impact relativement limité des sécheresses sur l'économie italienne en général : la réduction estimée du PIB varie de 0,03 % en 2011 (sécheresse modérée) à 0,1 % en 2003 (sécheresse extrême). Les impacts sur le secteur agricole sont cependant significatifs puisque, d'après la modélisation, l'épisode de 2003 aurait engendré une diminution de la production de plus de 2 milliards d'euros (- 3,74 %). Le secteur des fruits et légumes aurait été le plus touché (- 8,69 %), et celui des oléagineux, principalement l'olivier, le plus épargné (- 0,43 %). Les pertes subies par le secteur primaire ne représentent toutefois que 60 % des pertes totales de la filière alimentaire, le reste pesant sur les autres secteurs d'activité, en particulier les industries de transformation (20 %). Les auteurs notent que cette répartition des pertes semble être constante et varie peu en fonction de l'intensité de la sécheresse.

Estimation des impacts économiques des sécheresses de 2003 (extrême), 2006 (intermédiaire) et 2001 (modérée)

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Source : Land Use Policy

Sur la base de ces constats, les chercheurs concluent en estimant que la prise en charge, par les politiques publiques, des conséquences économiques des événements climatiques, tels que les sécheresses, ne devrait pas se limiter au seul secteur agricole, mais inclure l'ensemble de la filière agroalimentaire.

Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective

Source : Land Use Policy

18:18 Publié dans Agronomie, Climat, Environnement, IAA, Production et marchés | Lien permanent | Tags : italie, sécheresse |  Imprimer | | | | |  Facebook

07/09/2020

L'UICN publie un standard mondial pour les « Solutions fondées sur la Nature »

Dans un contexte de montée en puissance des « Solutions fondées sur la Nature » (SfN), pour répondre aux crises provoquées par le changement climatique et les pertes de biodiversité, l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) publie, quatre ans après la première proposition de définition internationale, un cadre pour leurs vérification, conception et développement à une plus grande échelle. Il comporte 8 critères (défis sociétaux, gain net de biodiversité, faisabilité économique, gouvernance inclusive, gestion adaptative, etc.), assortis de 28 indicateurs. Ce cadre doit permettre aux utilisateurs (acteurs publics, aménageurs, entreprises, organisations non gouvernementales) de réussir leur transition vers des SfN « bien conçues, exécutables et durables ». Le document présente également une structure de gouvernance destinée à collecter les retours des utilisateurs afin d'améliorer le standard.

Source : UICN

 

14:40 Publié dans Climat, Environnement | Lien permanent | Tags : solutions fondées sur la nature, environnement |  Imprimer | | | | |  Facebook

08/07/2020

Une évaluation de l’efficacité et de l'efficience de différents outils de politique agro-environnementale

L'Institute for Climate Economics (I4CE) a publié, en juin 2020, une étude consacrée à la Politique agricole commune (PAC). Si la prochaine réforme de la PAC est toujours en cours de négociation, la Commission européenne a d'ores et déjà annoncé sa volonté de passer d'une logique d'obligation de moyens à une logique d'obligation de résultats. Ce changement d'approche vise notamment à améliorer l'efficacité et l'efficience des aides agro-environnementales. Mais qu'en serait-il vraiment si de telles mesures étaient adoptées ?

Pour répondre à cette question, l'étude analyse six outils de politique agro-environnementale : le paiement vert, les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC), les aides à l'agriculture biologique (conversion et maintien), la certification Haute valeur environnementale (HVE), le label bas carbone (LBC) et un dispositif australien relatif à la séquestration du carbone dans les sols agricoles. Les quatre premiers sont considérés comme des outils à obligation de moyens, visant à promouvoir des pratiques supposées bénéfiques pour l'environnement, alors que les deux derniers relèvent davantage d'une obligation de résultats. Pour chacun de ces outils, les auteurs ont estimé les impacts ainsi que les coûts (conception, fonctionnement, suivi, contrôle) associés à leur mise en œuvre.

Ils tirent plusieurs enseignements de leurs analyses. En premier lieu, les mesures à obligation de résultats n'entraînent pas nécessairement une plus grande efficacité : celle-ci dépend de l'ambition du dispositif et de son niveau d'exigence en matière d'additionnalité. Elles sont en revanche très pertinentes lorsque les liens entre les pratiques agricoles et les impacts sont mal connus au niveau global, car elles laissent à l'agriculteur la responsabilité de choisir les pratiques permettant d'atteindre localement le résultat visé. De plus, les mesures à obligation de résultats peuvent être moins coûteuses à administrer que celles à obligation de moyens, à l’instar des cadres de certification carbone, dont les coûts de gestion sont généralement plus faibles que ceux des MAEC. Enfin, l'approche basée sur une obligation de résultats faciliterait l'évaluation environnementale de la PAC, conduisant les auteurs à souligner, en conclusion, l’opportunité d’un tel dispositif dans la prochaine programmation.

Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective

Source : Institute for Climate Economics

La PAC actuelle ne permet pas d'enrayer le déclin de la biodiversité selon la Cour des comptes européenne

La biodiversité européenne décline depuis de nombreuses années et l'intensification agricole en est une des causes principales. Pour enrayer cette baisse, l'Union européenne s'est engagée en 2010 à respecter les objectifs de la convention des Nations unies sur la diversité biologique (figure ci-dessous). Dans ce but, la Commission a adopté en 2011 une stratégie en faveur de la biodiversité, dont l'un des objectifs est le renforcement de la contribution de l'agriculture au maintien et à l'amélioration de la biodiversité. Dans un rapport publié en juin, la Cour des comptes européenne analyse la contribution de la Politique agricole commune (PAC) à l'atteinte de cet objectif, et confirme certains résultats de l'évaluation de l'impact de cette politique sur la biodiversité, publiée en novembre 2019 par la Commission.

Accords internationaux et actions de l'UE en faveur de la biodiversité

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Source : Cour des comptes européenne

Dans le cadre de son suivi annuel, la Commission estime que, en 2019 et 2020, l'UE pourrait consacrer 8 % de son budget à la biodiversité, soit 13,5 milliards d'euros par an, avec une contribution annuelle de la PAC de 10,3 milliards d'euros. Cependant, selon les auteurs, cette estimation n'est pas fiable : elle repose sur l'utilisation de coefficients grossiers. De plus, la Cour souligne que cette estimation ne tient pas compte des autres dépenses pouvant avoir des impacts négatifs.

Méthode utilisée par la Commission pour calculer le financement de la biodiversité octroyé au titre de la PAC

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Source : Cour des comptes européenne

Les auteurs concluent que la majeure partie des fonds de la PAC n'a eu qu'un impact positif limité sur la biodiversité. Ainsi, la plupart des paiements directs ne contribuent pas à sa préservation ou à son amélioration. L'impact positif de la conditionnalité n'a pas été démontré tandis que le verdissement, étudié plus en détails dans un précédent rapport (voir à ce sujet un billet sur ce blog), est jugé peu ambitieux. Les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC), et celles visant l'agriculture biologique et les zones Natura 2000, sont les plus susceptibles d'avoir un effet positif, mais peu de contrats sont passés avec des agriculteurs pour les plus exigeantes d'entre elles, en particulier celles relatives aux cultures arables. De ce fait, les auteurs préconisent i) une amélioration de la conception et de la mise en œuvre de la stratégie de l'UE en faveur de la biodiversité (notamment coordination entre États membres et suivi des dépenses), ii) une contribution renforcée des paiements directs et du développement rural à la biodiversité des terres agricoles et iii) l'élaboration d'indicateurs permettant d'évaluer les effets de la PAC.

À noter qu'une nouvelle stratégie Biodiversité à horizon 2030 a été présentée par la Commission européenne en mai 2020.

Estelle Midler, Centre d'études et de prospective

Source : Cour des comptes européenne

15:46 Publié dans 4. Politiques publiques, Environnement, PAC | Lien permanent | Tags : cour des comptes européenne, biodiversité, pac, budget |  Imprimer | | | | |  Facebook

07/07/2020

Impact des facteurs de changement global sur la biodiversité microbienne et les fonctionnalités des sols

Une littérature de plus en plus abondante documente les liens entre les pertes de biodiversité et les facteurs de changement global induits par l'homme (réchauffement climatique, usage des terres, etc.). Trois chercheurs chinois se sont intéressés, eux, aux impacts, moins étudiés, de ces facteurs sur la biodiversité microbienne et les fonctionnalités du sol. Les résultats de leur méta-analyse sont publiés dans Nature Communications.

Les auteurs compilent les résultats de 341 publications, comprenant 1 235 observations de terrain relatives à l'évolution de six facteurs de changement global : réchauffement, augmentation de la teneur en CO2, variation des précipitations, addition de phosphore, addition d'azote, changement d'usage des terres. Les observations ont été réalisées au sein de huit types de biomes : terres agricoles, toundras, forêts tempérées/boréales, forêts tropicales/subtropicales, végétation méditerranéenne, prairies, déserts et zones humides.

Localisation des terrains d'échantillonnage pour les études se penchant sur l'impact (a) du réchauffement et (b) de la concentration de CO2

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Source : Nature Communications

Les auteurs ont étudié l'impact de ces facteurs sur la diversité microbienne, de types « alpha » (estimée en nombre d'espèces coexistant sur un site) et « beta » (mesurée en niveau de similitude dans la composition des espèces de sites différents), et sur la structure des communautés. Ils ont aussi envisagé leurs effets sur la biomasse et les fonctionnalités des écosystèmes : respiration microbienne, processus liés aux cycles du carbone, de l'azote et du phosphore.

Ils concluent que, contrairement à ce que la littérature tend à montrer pour les macro-organismes tels que les animaux et les végétaux, les facteurs de changement globaux n'entraîneraient pas systématiquement une diminution de la biodiversité microbienne – à l'exception des espèces rares, plus sensibles à ceux-ci. Par ailleurs, la réduction de la diversité microbienne ne s’accompagnerait pas systématiquement d’une dégradation des fonctionnalités du sol, davantage impactées par la structure des communautés et la biomasse.

Principaux facteurs influençant la diversité microbienne du sol de type « alpha » dans les écosystèmes terrestres, issus d'études de cas sélectionnées

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Source : Nature Communications

Marie-Hélène Schwoob, Centre d'études et de prospective

Source : Nature Communications

15:27 Publié dans Environnement | Lien permanent | Tags : sols, biodiversité, biodiversité microbienne |  Imprimer | | | | |  Facebook

L'Agence européenne de l'environnement fait le point sur les biodéchets

L'Agence européenne de l'environnement (EEA) a publié, début juin 2020, un état des lieux de la gestion des biodéchets dans l'UE, afin de promouvoir leur valorisation au sein d'une économie circulaire. Il s'agit aussi d'éclairer les modalités par lesquelles l'Union peut atteindre les cibles qu'elle s'est fixées en matière de réduction et de traitement durable des biodéchets (ex. : recycler 65 % des déchets municipaux d'ici à 2035).

Les auteurs soulignent que les biodéchets représentent 34 % des déchets municipaux dans l'UE, dont 60 % issus de l'alimentation et 36 % des espaces verts. Les pertes et gaspillage alimentaires compte pour 88 millions de tonnes chaque année, soit 173 kg/personne, ou encore 20 % de la nourriture produite. Un tel volume a des effets négatifs en termes environnementaux et de consommation, chaque kg de nourriture gaspillée représentant 0,8 à 4,5 kg de CO2 émis, et 3,2 à 6,1 € perdus pour l'acheteur.

Les biodéchets dans une économie circulaire

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Source : Agence européenne de l'environnement

Les auteurs recensent ensuite les possibilités de traitement et de valorisation des biodéchets, au premier rang desquelles le compostage. Celui-ci nécessite un processus qualité pour que le fertilisant qui en est tiré soit pur et utilisable. L'Allemagne, le Danemark et le Royaume-Uni ont par exemple développé des standards de qualité du digestat. Si les données sur le compostage, notamment des particuliers, sont rares, les auteurs estiment que 48 % des Slovènes ont un dispositif domestique dédié. En parallèle, ils mentionnent la digestion anaérobie produisant du biogaz ou du biodiesel, et l'alimentation animale. Cependant, la capacité de traitement des biodéchets varie beaucoup d'un État membre à un autre (de 0 à 356 kg/personne/an).

Enfin, les auteurs identifient des pistes d'actions publiques pour améliorer la prévention et le traitement des biodéchets : normes d'étiquetage responsable (interdire de labelliser « compostable » ou « biodégradable » des produits contenant du plastique, etc.) ; approches politiques combinant des mesures de sensibilisation et d'autres à caractère économique (annulation de la TVA sur les produits alimentaires donnés, etc.) ou réglementaire ; partenariats public-privé ; plates-formes de redistribution de la nourriture.

Hiérarchie des options préférables dans la gestion des biodéchets

Biodechets2bis.jpg

Source : Agence européenne de l'environnement

Vincent Hébrail-Muet, Centre d'études et de prospective

Source : Agence européenne de l'environnement

15:20 Publié dans Biomasse/Biocarburants, Environnement | Lien permanent | Tags : biodéchets, pertes, gaspillage, économie circulaire |  Imprimer | | | | |  Facebook

06/07/2020

Le développement de filières locales est-il le gage d'une écologisation des pratiques agricoles ?

La relocalisation des systèmes alimentaires contribue-t-elle à l’écologisation des pratiques agricoles ? Pour répondre à cette question, les auteurs d’un article publié en mai 2020, dans la revue Développement durable et territoires, adaptent les cadres d'analyse communément mobilisés pour étudier des démarches agro-écologiques en circuit court, faites de relations entre producteurs, intermédiaires et consommateurs (cf. tableau). L'article compare ainsi l'émergence de deux filières en région Auvergne - Rhône-Alpes :

- la filière du steak haché surgelé « 100 % charolais du Roannais », portée par Roanne agglomération et un groupe d'éleveurs de bovins charolais à l'herbe, associant 17 producteurs et 16 enseignes de distribution, pour 6,5 tonnes de viande en 2017 ;

- une filière de soja en Isère et dans les deux Savoies, mise en place par une coopérative agricole, qui propose un tourteau de soja non OGM aux producteurs de fromages savoyards sous signe de qualité (60 éleveurs engagés, 500 ha de soja soit 1 500 t/an en 2017).

Grille d'analyse du développement de filières productives locales (en grisé, critères agro-écologiques)

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Source : Développement durable et territoires

L’analyse établit que, dans un premier temps, la relocalisation des systèmes alimentaires valorise plus les pratiques agricoles existantes considérées comme écologiques qu'elle n'induit une véritable remise en question des pratiques conventionnelles. Dans l'ensemble, ces démarches de transition socio-économique des systèmes alimentaires n'intègrent pas le consommateur dans leur gouvernance. Le tourteau de soja non OGM, issu d'une trituration mécanique, questionne les pratiques des producteurs (préservation de la qualité du sol, fertilisation, rotations) mais également des polyculteurs-éleveurs qui l'utilisent pour l’alimentation de leurs troupeaux. Quant à la gouvernance multi-partenariale de la filière steak haché « 100 % charolais du Roannais », qui associe acteurs des filières et des territoires, elle est considérée par les auteurs comme le prototype d'une gouvernance adaptative, ouverte à la controverse sur l'écologisation des pratiques d'élevage, ce qui consolide sur le temps long les processus d'apprentissage.

Claire Bernard-Mongin, Centre d'études et de prospective

Source : Développement durable et territoires