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08/02/2021

Q Open, une nouvelle revue en accès libre de l'Association européenne des économistes agricoles

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L'Association européenne des économistes agricoles (EAAE) publiait déjà l'European Review of Agricultural Economics et Eurochoices. En partenariat avec Oxford University Press, elle vient de faire paraître le premier numéro d'une nouvelle revue, Q Open. En accès libre, elle a pour ambition de devenir une publication de référence en économie, dans les domaines de l'agriculture, de l'environnement, des ressources naturelles et du climat, de l'alimentation et du développement agricole et rural. Les articles sont évalués par les pairs avec une relecture en « double aveugle » (les auteurs ne connaissent pas l'identité des évaluateurs, et vice-versa).

Dans ce numéro inaugural, une série d'articles est consacrée à la prospective et à l'analyse des arbitrages entre critères d'impacts (trade-off analysis), appliquées aux systèmes alimentaires, sous l'angle de leur utilisation pour orienter les choix en matière de recherche et d'innovation. Ces articles présentent les résultats d'un projet de recherche mené pour le Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (CGIAR), en vue d'appuyer sa réforme « One CGIAR » entamée en 2019. Cette réforme vise à redéfinir ses missions, sa gouvernance, ses partenariats, etc., pour augmenter ses impacts et son alignement sur les Objectifs de développement durable (ODD).

Parmi les travaux présentés, figurent deux revues de littérature : l'une analyse 11 prospectives récentes menées par diverses organisations (World Resources Institute, Food and Land Use Coalition, EAT-Lancet, etc.), sur le thème « système alimentaire, environnement et changement climatique » ; l'autre s'intéresse à la prise en compte du genre, de la pauvreté et de la nutrition dans les études prospectives. Si les tendances lourdes sont communes à la plupart des prospectives (démographie, changement climatique, etc.), les auteurs soulignent des aspects insuffisamment considérés, malgré leur rôle souvent déterminant : inégalités alimentaires et d'accès aux technologies, gouvernance, évolution des rapports de pouvoir, risques de ruptures systémiques, etc. En complément, un article propose une revue très complète des outils et méthodes développés depuis plusieurs années en matière d'arbitrages entre impacts multiples (économie, santé, environnement, etc.). Allant des modèles de simulation au projet AgMIP, ils permettent de plus en plus d'enrichir la prospective par des analyses quantitatives.

Julien Hardelin, Centre d'études et de prospective

Source : Q Open

18/01/2021

Bouleversement. Les nations face aux crises et au changement, Jared Diamond

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Voici une quinzaine d'années, le biologiste américain Jared Diamond publia un livre sur l'effondrement des sociétés (Collapse: How Societies Choose to Fail or Succeed, 2006), qui rencontra un large public à défaut de séduire les historiens professionnels, peu convaincus par sa lecture monofactorielle de l'évolution humaine. Il en ira certainement de même pour sa dernière publication (Upheaval: Turning Points for Nations in Crisis), à l'ambition totalisante affirmée, mais qui repose essentiellement sur les expériences vécues par l'auteur et sur l'idée que les crises sociétales sont similaires aux crises psychiques individuelles. Malgré ces défauts, l'ouvrage intéressera tous ceux qui se préoccupent du devenir des institutions, des changements culturels, de la survenue des crises et des capacités de résistance des systèmes sociaux.

L'analyse embrasse les deux derniers siècles et sept pays sont plus spécifiquement étudiés : Allemagne, Australie, Chili, États-Unis, Finlande, Indonésie et Japon. De ce large panorama historique et géographique, Diamond conclut à l'existence de douze facteurs qui, selon lui, influent directement sur le contenu et la forme des crises nationales. Il peut s'agir du « degré de consensus sur l'existence de la crise », du « niveau de reconnaissance de la nécessité d'agir » ou de l'acceptation plus ou moins franche « d'une aide venant d'un autre pays ». Il peut aussi s'agir de la nature de « l'identité nationale », de « l'expérience acquise lors de crises antérieures », des valeurs culturelles fondamentales ou de la prégnance des « contraintes géostratégiques ». Selon l'auteur, cette grille de lecture peut s'appliquer à toutes les crises (politiques, économiques, environnementales, énergétiques, sanitaires, etc.) et à tous les secteurs (production agricole, eau, alimentation, pêche, exploitation forestière, qualité des sols, etc.).

Les quatre derniers chapitres sont particulièrement intéressants, car prospectifs et synthétiques, Diamond utilisant sa grille de lecture pour décrypter l'avenir du Japon et des États-Unis, et plus généralement celui du monde. Ses conclusions sont peu optimistes car il considère que la majorité des « douze facteurs de crise » se retrouvent à l'échelle planétaire : l'humanité manque d'une identité partagée, elle est confrontée à des défis globaux inédits et ne peut s'appuyer sur l'expérience passée. Il n'y a pas non plus d'acceptation mondiale de notre responsabilité, et nos choix sont limités par de sévères contraintes (épuisement des énergies fossiles, changement climatique, baisse de la biodiversité). Bref, toutes les conditions sont réunies pour qu'advienne non pas un effondrement du monde, mais un bouleversement des nations qui le composent.

Bruno Hérault, Centre d'études et de prospective

Lien : Éditions Gallimard

Quels agriculteurs en 2040 dans l'Union européenne ?

Dans le cadre de sa conférence annuelle sur les perspectives agricoles de l'Union européenne, la direction générale de l'agriculture de la Commission a présenté, en décembre 2020, les résultats d'une étude prospective sur les agriculteurs européens à l'horizon 2040 (support de présentation, visioconférence en replay)

Menée avec le Joint Research Centre (JRC), elle repose sur une méthode originale, combinant des outils de la prospective (exploration des possibles, tendances structurantes) et du design (prototypes, profils). Une démarche participative (interviews, ateliers organisés dans plusieurs pays, discussions thématiques à distance) a permis d'impliquer des agriculteurs, des chercheurs, des représentants d'organisations non gouvernementales, des institutions et des organisations professionnelles agricoles, etc.

L'exercice prospectif s'est déroulé en plusieurs phases. Après avoir caractérisé douze profils types d'agriculteurs en 2020 (six actuellement dominants, et six autres plus marginaux), les auteurs ont identifié les variables motrices (sociales, technologiques, environnementales, économiques, politiques) intervenant dans l'évolution du métier. Ils ont ensuite croisé ces éléments avec quatorze tendances structurantes générales, documentées et mises à disposition par le JRC pour alimenter les analyses prospectives au niveau européen.

Le résultat est présenté dans des portraits fictifs illustrant les douze profils projetés en 2040 (figure ci-dessous). À cette échéance, l'analyse conclut à une diversité accrue des types d'agriculteurs et des modèles agricoles : certains profils, émergents en 2020, seraient nettement plus présents en 2040, comme par exemple les agriculteurs « urbain », « cellulaire » ou l’« amateur passionné » pour lequel le revenu tiré de l’agriculture n'est pas une préoccupation. À l'inverse, les agriculteurs « intégré », « intensif » ou « patrimonial » (prisonnier d'investissements passés et, dans une situation précaire, reproduisant le modèle antérieur) sont déjà bien établis en 2020 et occuperont toujours une place notable en 2040.

Cette multiplication des modèles agricoles constitue un défi pour les politiques publiques, rendant plus difficile le ciblage des instruments et des financements.

Les douze profils d'agriculteurs en 2040 identifiés par l’étude

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Source : Commission européenne, JRC

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : Commission européenne, Joint Research Centre

12:40 Publié dans 1. Prospective, Agriculteurs, Exploitations agricoles, Travail et emploi | Lien permanent | Tags : prospective, agriculteurs |  Imprimer | | | | |  Facebook

11/12/2020

L'avenir de l'élevage européen et sa contribution à un secteur agricole durable

Une étude parue en octobre 2020 s'intéresse à l'avenir de l'élevage européen. La première partie présente la situation actuelle et les tendances à l’œuvre : place de l'élevage dans l'économie de l'Union européenne (UE), impacts sur l'environnement, bien-être animal, relation à la santé humaine. La deuxième partie analyse les facteurs de changement pour les années à venir. La troisième propose des solutions pour assurer un élevage durable.

L'élevage occupe une place importante dans l'économie agroalimentaire européenne, avec 70 milliards d'€ de produits animaux ou d'origine animale en 2017 (UE-28, 40 % de la production totale agricole) et des exportations qui augmentent depuis 2000. Il joue un rôle notable dans certains territoires en matière d'emploi et de culture (paysages, gastronomie). La nécessité de réduire les impacts environnementaux (gaz à effet de serre, pollution de l'eau, etc., cf. figure) et la baisse de la consommation de viande seront deux variables déterminantes de l'avenir de l'élevage européen. Les auteurs soulignent aussi ses contributions positives à l'environnement, notamment pour le stockage du carbone et la biodiversité grâce aux prairies permanentes : « 50 % des espèces d'oiseaux dépendent des prairies pour leur alimentation et leur reproduction ».

Intensités d'émissions moyennes de gaz à effet de serre liées à la consommation de 100 g ou de 100 kcal d'aliments

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Source : Commission européenne

Selon les auteurs, les substituts aux produits carnés (végétal, viande artificielle) ne devraient pas atteindre une masse critique à même de concurrencer significativement l'élevage à moyen terme (2030), car ils présentent des limites : produits encore en phase pré-commerciale, impacts incertains sur la santé (produits très transformés) et l'environnement, acceptation par les consommateurs, etc. Il conviendrait d'améliorer conjointement l'efficience environnementale et la compétitivité de l'élevage européen, plutôt que d'importer des produits animaux aux empreintes environnementales potentiellement plus fortes.

Le rapport propose à cet égard des pistes prometteuses : bioéconomie et bouclage des cycles, génétique et écologie microbienne, bien-être animal, etc. Il souligne l'importance de la diversité des systèmes d'élevage et de l'approche systémique : « les animaux sont essentiels parce qu'ils sont par nature des recycleurs, ce qui leur permet de contribuer à une agriculture plus efficace en utilisant la biomasse non comestible et en fournissant des engrais organiques ».

Julien Hardelin, Centre d'études et de prospective

Source : Commission européenne

09:28 Publié dans 1. Prospective, Filières agricoles, IAA, Production et marchés | Lien permanent | Tags : elevage, filière, prospective, europe |  Imprimer | | | | |  Facebook

15/09/2020

Relocalisation des chaînes globales de valeur et propagation des risques économiques : premiers enseignements du modèle d'équilibre général METRO de l'OCDE

La pandémie de Covid-19 a été marquée par une certaine désorganisation des chaînes globales de valeur (CGV) et a relancé le débat sur l'opportunité d'une relocalisation de la production, hypothèse étudiée dans une publication récente de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Selon certains acteurs, la fragmentation des CGV serait intrinsèquement source de vulnérabilité, car elle crée des interdépendances susceptibles d'amplifier la propagation de chocs d'offre ou de demande entre les pays. Une relocalisation permettrait alors de réduire l'exposition aux risques et d'assurer une plus grande stabilité économique. Pour d'autres, en revanche, la fragmentation des CGV est, dans le cadre d'un commerce fluide, un gage de stabilité permettant la diversification géographique des sources d'approvisionnement.

Pour fournir de nouveaux éléments de réponse, les auteurs ont utilisé le modèle d'équilibre général METRO, qui intègre les interdépendances produites par les CGV. Deux régimes contrastés ont été simulés : un régime « interconnecté », correspondant à la structure actuelle des chaînes de valeur ; un régime « relocalisé », basé sur une augmentation générale de 25 % des droits de douane au niveau mondial et sur une subvention publique équivalant à 1 % du PIB pour les secteurs domestiques (hors services), dont l'agriculture et l'alimentation. Dans les deux cas, un ensemble de chocs positifs et négatifs ont été simulés, sous forme de réductions et d'augmentations de 10 % des coûts des échanges commerciaux, entre chaque région du monde subissant le choc et ses partenaires extérieurs.

Baisse de la production dans les secteurs clefs en régime relocalisé

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Source : OCDE

L'étude montre qu'en l'absence de chocs, une relocalisation mondiale généralisée aurait un coût significatif par rapport au régime interconnecté, avec des baisses substantielles du PIB : -5,1 % en France, -4,2 % pour l'Union européenne en général, -10,8 % en Asie du Sud-Est, etc. Si la relocalisation conduirait, pour certains produits et pays, à une hausse de la production, ce ne serait pas le cas pour la production alimentaire, qui baisserait partout : -10 voire -20 % selon les cas (figure ci-dessus). Enfin, pour les auteurs, un régime globalement relocalisé ne réduirait pas la variabilité de la production et de la consommation résultant des chocs, car les importations qui permettraient de les absorber seraient plus coûteuses et plus volatiles (figure ci-dessous). Ces résultats des simulations varient néanmoins fortement selon les pays et les secteurs.

Ces premiers résultats sur deux scénarios très contrastés devraient donc donner lieu à des approfondissements, par exemple en considérant des relocalisations stratégiques et ciblées (secteurs, filières, produits, pays, territoires), les impacts sur l'innovation, l'environnement, le marché de l'emploi, etc.

Pour tous les secteurs stratégiques, la production est plus instable en régime relocalisé

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Source : OCDE

Lecture : tous les changements de variables sont relatifs au niveau du scénario de base correspondant au régime interconnecté, lequel est égal à 1. Les points bleus indiquent la base dans le régime donné par rapport à la base interconnectée, et les moustaches montrent les écarts moyens, pour les chocs négatifs et positifs, sur le coût des échanges commerciaux.

Julien Hardelin, Centre d'études et de prospective

Sources : OCDE, Blog Ecoscope

08/07/2020

Des transformations importantes des chaînes de valeur mondiales, accélérées par l'épidémie de Covid

Si la pandémie n'en est pas à l'origine, elle accélère les tendances lourdes à l’œuvre en matière d'investissements internationaux et, par là même, la transformation des chaînes de valeur mondiales : telle est la conclusion de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED), dans son rapport publié en juin 2020.

L'organisme y conduit une analyse approfondie des évolutions, au cours des trente dernières années, de la « production internationale », à savoir celle des multinationales à l'origine des chaînes de valeur globales et des échanges qu'elles génèrent. Il propose notamment une classification des secteurs d'activité en fonction du type de chaîne de valeur, utilisant des critères liés à leur longueur et leur fragmentation, à la distribution géographique de la valeur ajoutée, au mode de gouvernance et au degré d'internalisation. L'agriculture (incluse dans l'ensemble I de la figure ci-dessous), apparaît comme l'archétype du secteur primaire peu intensif en capital, alors que l'agroalimentaire (ensemble III) est représentatif des chaînes de valeur régionalisées.

Répartition de la production internationale en fonction de la longueur et de la dispersion géographique des chaînes de valeur mondiales et identification des configurations archétypales

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Source : CNUCED

Lecture :

- I : industries primaires avec a. celles intensives en capital et b. celles peu intensives en capital ;

- II : chaînes de valeur intensives avec a. les faiblement technologiques et b. les technologiques ;

- III : répartition géographique avec a. une distribution en étoile et b. une distribution régionalisée :

- IV : industries des services connectés aux chaînes de valeur mondiales avec a. celles à forte valeur ajoutée, et b. celles à faible valeur ajoutée.

Les auteurs identifient trois ensembles de tendances qui ont transformé les chaînes de valeur au cours des trois dernières décennies et qui auraient été renforcées par la pandémie : la nouvelle révolution industrielle (robotisation et intelligence artificielle, digitalisation, fabrication additive), les évolutions en matière de politiques économiques (interventionnisme national, protectionnisme en matière d'investissement et de commerce, régionalisme et bilatéralisme), affirmation des enjeux de durabilité (réglementations, transformation des process et des produits, impacts sur les approvisionnements).

En combinant ces évolutions, quatre trajectoires des chaînes de valeur mondiales sont envisagées pour la prochaine décennie : relocalisation, diversification, régionalisation et reproduction. Dans ce dernier scénario, les multinationales se concentrent sur le design des produits et le pilotage des chaînes de valeur, délégant la production en série à des sous-traitants localisés au plus près des consommateurs, notamment grâce à l'impression 3D. Pour l'agriculture, la régionalisation et, dans une moindre mesure, la diversification et la relocalisation sont les trajectoires les plus probables. Dans le cas des industries agroalimentaires, la régionalisation et la diversification seraient les voies principales d'évolution.

Pertinence des différentes trajectoires selon les secteurs

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Source : CNUCED

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : CNUCED

08/06/2020

Prospective sur l'élevage australien

Accompagnant son plan stratégique 2020-2025, l'Association australienne pour l'élevage a diffusé un rapport sur les facteurs pouvant influencer l’activité du secteur dans la prochaine décennie. Les auteurs détaillent en particulier les effets potentiels du changement climatique sur la répartition géographique des maladies animales et végétales, des vecteurs et des réservoirs animaux des agents infectieux. D'autres facteurs pris en compte sont l’augmentation de la demande de viande et de ses alternatives, ainsi que le développement de techniques électroniques de surveillance et de diagnostic en élevage, pour la prévention des accidents sanitaires et zootechniques. Quatre scénarios sont également présentés. Enfin sont soulignés des défis majeurs pour le secteur : la lutte contre la survenue d’épizooties majeures (fièvre aphteuse, peste porcine africaine, grippe aviaire) ; la « révolution numérique » pour améliorer la gestion des exploitations et élever le niveau de biosécurité ; l'influence sur les pratiques agricoles des demandes sociétales et des politiques publiques commerciales et environnementales ; les conséquences probables du changement climatique sur les services écosystémiques.

Source : Animal Health Australia

11:04 Publié dans 1. Prospective | Lien permanent | Tags : élevage, australie |  Imprimer | | | | |  Facebook

18/03/2020

The making of a blue revolution in Bangladesh: Enablers, impacts, and the path ahead for aquaculture, Rashid Shahidur, Xiaobo Zhang

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À l'instar des tendances mondiales, l'aquaculture au Bangladesh a vu sa productivité croître fortement au cours des trois dernières décennies : contribuant à moins de 20 % de la production nationale de poissons en 1990, elle a atteint 50 % en 2012. Un ouvrage, publié en 2019 par l'International food policy research institute (IFPRI), décrit cette filière et l'organisation de sa chaîne de valeur, évalue son impact sur la pauvreté et envisage ses évolutions à l'horizon 2030.

À la différence de l'élevage bangladais de crevettes, détenu par de riches propriétaires et orienté vers l'exportation, celui de poissons est fait principalement de manière artisanale, dans des étangs, et destiné à 90 % au marché intérieur. En utilisant des données collectées auprès de 12 240 foyers, les auteurs montrent que les gains de productivité de l'aquaculture (hors crevettes), entre 2000 et 2010, ont permis une augmentation totale des revenus des ménages d'environ 2 %. 2 millions de personnes sont ainsi sorties de la pauvreté, ce qui représente 10 % de la réduction de la pauvreté sur cette période. Ce progrès a néanmoins principalement bénéficié au troisième quintile des ménages, en matière de revenus, et peu aux plus pauvres.

Les rendements des fermes aquacoles du Bangladesh étant inférieurs à ceux du Vietnam et de la Thaïlande, des gains de productivité pourraient encore s'observer dans le futur. Différents scénarios d'évolution, à l'horizon 2030, montrent une production de poissons d'élevage en hausse, de 3,65 à 6,35 % par an selon les hypothèses, accompagnée d'une réduction des prix de 0,02 à 0,73 % par an. En conséquence, la consommation bangladaise de poissons d'élevage pourrait s'accroître de 42 à 109 % entre 2015 et 2030. Alors que les préconisations de la FAO sont de 18 kg annuels, les populations rurales et pauvres mangent à l'heure actuelle 14 kg par an de poissons, sauvages ou d'élevage : les progrès de l'aquaculture leur permettraient d'augmenter cette quantité de 7 à 21 kg. Ces projections supposent toutefois une amélioration de l'accès à ces produits, notamment via le transport et le stockage. Enfin, la capture de poissons sauvages pourrait être ralentie du fait de contraintes environnementales croissantes, contrebalançant le développement de l'aquaculture et les gains pour les populations fragiles.

Résultats de trois scénarios de simulation sur la production de poissons, en tonnes, aux horizons 2020 et 2030

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Source : IFPRI

Lecture : base : poursuite des tendances actuelles ; simulation 3 : forte productivité et forte demande ; simulation 5 : très forte productivité et forte demande. Origine des poissons : en bleu, aquaculture ; en orange, pêche en eau douce ; en gris, indéterminée ; en jaune, pêche en mer.

Aurore Payen, Centre d'études et de prospective

Lien : IFPRI

17/03/2020

Agricultures européennes à l’horizon 2050 : entre enjeux climatiques et défis de la sécurité alimentaire mondiale

INRAE a présenté, le 14 février 2020, une étude prospective sur les agricultures européennes à l'horizon 2050 (captation vidéo disponible en ligne). L'objectif était d'analyser l'évolution de l'offre et de la demande en productions agricoles, en considérant un scénario « intermédiaire » de changement climatique (RCP 6.0 du GIEC) dans 21 régions du monde, dont huit européennes (cf. carte ci-dessous pour le découpage hors Europe).

Découpage régional adopté dans l'étude, hors Europe

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Source : INRAE

Un collectif d'une vingtaine d'experts a délimité des fourchettes de variations, en 2050, de l'offre agricole, considérant des hypothèses hautes ou basses de rendements, variant entre les régions étudiées selon les conditions de température, précipitations et évolutions techniques. Ils ont aussi exprimé des fourchettes sur la demande en produits agricoles, selon des hypothèses d'évolutions tendancielles (ex. : hausse de la consommation de produits animaux en Asie) ou vers des régimes considérés comme plus sains. Dans ce deuxième cas, l'apport calorique est limité et les parts consommées de produits animaux, légumineuses, fruits et légumes, produits sucriers et huiles végétales sont fixées, elles aussi variant selon les situations régionales initiales.

Répartition des apports caloriques totaux selon les différents groupes de produits agricoles (en kcal/hab/j) en 2010 et 2050, selon les deux hypothèses d’évolution des régimes alimentaires

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Source : INRAE

Il apparaît qu'en hypothèse de rendements bas, avec une évolution tendancielle des régimes alimentaires, le besoin supplémentaire de terres cultivées serait de 223 millions d'hectares (+ 15 % par rapport à 2010). À l'opposé, en hypothèse de rendements hauts et de régimes « sains », 51 millions d’hectares de terres cultivées pourraient être libérés.

L'étude analyse plus particulièrement la place de l'Europe dans ce contexte. Dans les cas où des terres cultivées pourraient être libérées dans cette zone, le développement de cultures d'oléoprotéagineux pourrait réduire les importations européennes et ainsi préserver entre 1 et 10 millions d'hectares au Brésil et en Argentine. Pour rappel, 47 millions d'ha y étaient consacrés au soja en 2010. Une autre stratégie, en cas de libération de terres, serait d'évoluer vers des systèmes agricoles européens moins intensifs en intrants de synthèse.

Bien que des incertitudes pèsent sur les hypothèses de rendements futurs, ce travail met en évidence les disparités entre régions, tant pour les hypothèses d'évolution de l'offre et de la demande que pour les résultats en matière d'utilisation des terres. L’analyse révèle des évolutions contrastées entre zones à forte tension sur les surfaces (particulièrement en Afrique subsaharienne, mais aussi en Afrique du Nord, au Proche et Moyen-Orient ou encore en Inde) et zones à surplus potentiel de terres (ex-URSS et certaines régions d'Europe).

Marie-Hélène Schwoob, Centre d'études et de prospective

Source : INRAE

16/03/2020

Prospective et cycle de l'azote au niveau mondial

Un article publié dans Global Environmental Change s'intéresse à l'intégration de l'azote dans les exercices de prospective. L'azote est un élément nutritif essentiel pour la croissance des plantes. Cependant, en excès, ses différentes formes moléculaires (nitrate, ammoniac, oxyde nitreux, etc.) sont à l'origine de pollutions de différentes natures et à plusieurs échelles : acidification des sols, dégradation de la qualité des eaux de surface et souterraines, impacts sur la biodiversité, contribution au réchauffement global, etc. La pollution azotée ne cesse d'augmenter, en raison notamment de l'utilisation croissante des engrais minéraux, tirée par une demande alimentaire qui se poursuivra dans les décennies à venir (+60 % en 2050 par rapport à 2005). Son coût global est aujourd'hui estimé entre 0,2 et 2 % du PIB.

Les différentes formes de l'azote réactif se succèdent de façon dynamique, constituant le cycle de l'azote. Réduire une forme de pollution azotée en un lieu donné a donc des conséquences en cascade, qui sont autant de défis pour la cohérence et l'efficacité des politiques environnementales. Partant de ce constat, les auteurs plaident pour une prise en compte systémique du cycle de l'azote dans les exercices de prospective, en particulier dans les Shared Socioeconomic Pathways (SSP), un ensemble de 5 scénarios développés par la communauté scientifique pour servir de référence aux grands exercices internationaux de modélisations environnementales et climatiques.

L'intégration de nouvelles actions de réduction de l'azote dans le cadre des Shared Socioeconomic Pathways / Representative Concentration Pathways (RCP)

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Source : Global Environmental Change

Sur la base d'une revue de littérature, ils proposent un ensemble cohérent d'indicateurs de l'azote et leurs hypothèses d'évolution aux horizons 2030 et 2050, intégrables dans les SSP. Le scénario le plus ambitieux ramènerait le surplus azoté à l'intérieur des limites planétaires (planet boundaries) à l'horizon 2050 : il combine une amélioration continue de l'efficience de son utilisation, une réduction de 30 % des excrétions par tête de bétail, un recyclage de 90 % des effluents, un déploiement généralisé des techniques de réduction de la pollution de l'air et un traitement de la quasi-totalité (99 %) des eaux usées. Le scénario le moins ambitieux suit, quant à lui, les tendances actuelles. Ce travail s'inscrit dans le cadre du projet Towards an International Nitrogen Management System (INMS) lancé par l'UNEP en 2017, qui devrait aboutir à la publication, en 2022, du premier International Nitrogen Assessment.

Julien Hardelin, Centre d'études et de prospective

Source : Global Environmental Change

17:11 Publié dans 1. Prospective, Agronomie | Lien permanent | Tags : azote, prospective, scénarios |  Imprimer | | | | |  Facebook

De nouvelles opportunités pour l'extension de l'agriculture vers le Nord, mais à quel prix pour l'environnement ?

D'après un récent article publié dans PLOS One par une équipe de chercheurs anglo-saxons, le changement climatique pourrait lever les contraintes bioclimatiques à la production de grandes cultures, dans les régions les plus septentrionales jusqu'ici peu favorables. Les auteurs ont simulé l'impact potentiel, après 2050, de cette extension des aires de production sur l'environnement.

Dans un premier temps, ils ont identifié les « frontières agricoles », définies comme les zones actuellement inadaptées aux grandes cultures, mais susceptibles de le devenir en raison du changement climatique. Pour ce faire, ils ont considéré des hypothèses portant sur les températures et les précipitations, tirées de 17 modèles climatiques globaux, pour deux niveaux de forçage radiatif (RCP 4.5 et RCP 8.5 du GIEC). Ces hypothèses ont ensuite été utilisées à l'échelle locale, dans trois modèles agronomiques différents dont les auteurs ont croisé les résultats. L'opération a été conduite sur l'ensemble des terres du globe. Il apparaît que le changement climatique pourrait accroître les surfaces actuellement cultivables, de 0,8 à 2,4 milliards d'hectares en 2060-2080. Les nouvelles aires de production, situées principalement au nord du Canada et de la Russie, seraient dans un premier temps (2040-2060) adaptées à la culture de la pomme de terre, du blé, du maïs et du soja.

Extension des zones de production possibles en grandes cultures en 2040-2060

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Source : PLOS One

Lecture : en bleu, les aires dans lesquelles on passe de 0 à au moins une culture possible ; en rouge, celles passant d'une culture possible à deux ou plus (zone d'intensification) ; en gris, celles pour lesquelles la situation reste inchangée. L'intensité de la couleur (bleue ou rouge) varie selon le scénario climatique, dans le cadre d'un forçage radiatif RCP 8.5.

Les auteurs ont ensuite évalué les impacts d'une mise en production sur la biodiversité, la qualité de l'eau et le carbone stocké dans les sols. Si toutes les zones potentielles étaient cultivées, le travail des sols conduirait à relâcher dans l'atmosphère, dans les cinq années suivant la mise en culture, un maximum de 177 Gt de carbone (soit 119 fois les émissions annuelles actuelles des États-Unis). D'importants hotspots de biodiversité seraient également touchés, dans les régions nordiques et dans les zones de montagne (Himalaya, Andes notamment). Enfin, les effets de l'agriculture sur la qualité de l'eau pourraient affecter beaucoup d'habitants de ces régions.

En conclusion, ils invitent à ce que les initiatives menées pour étendre les aires de production, par exemple au Canada ou en Russie, tiennent compte des risques environnementaux encourus. Ils notent d'ailleurs que beaucoup de ces terres, jusqu'ici non cultivées, se situent sur les territoires de peuples autochtones, qui devraient être associés à leur exploitation.

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : PLOS One

13/03/2020

Le Déméter 2020, Sébastien Abis, Matthieu Brun (dir.)

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Consacré à la place de l'Europe dans la mondialisation et aux transformations du commerce et des politiques agricoles, le Déméter 2020 propose dix analyses de fond (partie « Agrosphères »), esquisse huit réflexions prospectives (partie « Regards d'avenir ») et rassemble les grands chiffres de l'alimentation mondiale (partie « Repères »). En ouverture, S. Abis et M. Brun (Déméter) décrivent les enjeux moteurs pour la prochaine décennie : probable retrait des États-Unis des affaires globales mais mondialisation des corridors d'approvisionnement d'une Chine soucieuse de sa sécurité alimentaire ; raréfaction de certaines ressources (eau, phosphates) poussant les coûts de production à la hausse, mais prix internationaux toujours fluctuants ; renforcement des réglementations environnementales ; nouvelles solutions technologiques ; etc. Plusieurs contributions privilégient l'histoire longue. B. Daviron (Cirad) étudie le couplage entre hégémonie dans les relations internationales et échanges de biomasse. Le leadership américain au XXe siècle fait figure d'exception historique, avec une « énergie abondante et bon marché ». La montée de la Chine ces dernières décennies marque un « retour à la normale », avec un candidat à l'hégémonie qui « se mobilise pour gérer un fort déficit en biomasse », notamment avec les nouvelles routes de la soie. P. Blanc (Sciences Po Bordeaux) s'intéresse, lui, aux « affinités électives » entre nationalisme et agriculture, et montre que dans le cycle populiste actuel (Afrique du Sud, États-Unis, Inde, Brésil, etc.), ce lien s'étiole à mesure que le monde s'urbanise.

S'agissant de l'Europe, T. Voituriez (Iddri) examine les accords agricoles de libre-échange de l'Union européenne (37 en vigueur en septembre 2019, signés avec des pays extérieurs à l'espace économique européen), et T. Pouch (APCA) s'intéresse à l'évolution de sa « puissance agricole », montrant notamment que les réformes successives de la PAC ont contribué à l'éroder. Tous deux peignent des politiques « au milieu du gué » et « une puissance agricole mal assumée ». Sont également étudiés le Brexit et ses conséquences, et les transformations de l'agriculture en Roumanie. Signalons enfin, dans la partie prospective de l'ouvrage, des sujets originaux tels que le cannabis, « business agricole en devenir », les productions végétales hors sol, et les recherches sur le microbiote.

Florent Bidaud, Centre d'études et de prospective

Lien : lris

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14/02/2020

Sécurité alimentaire et disponibilité de la ressource en eau : une analyse des tendances mondiales

L'augmentation de la population mondiale et des revenus nécessitera une hausse considérable de la production agricole, pour faire face à la croissance de la demande alimentaire, de 70 à 100 % à l'horizon 2050 selon les projections. Face à un tel défi, aggravé par le changement climatique, la disponibilité en terres cultivées et en eau pour l'irrigation constitue un sujet de préoccupation majeur. Afin de clarifier les termes du débat, un article publié dans Global Food Security propose une analyse de tendances, basée sur les données de la FAO et une revue de la littérature scientifique.

Il montre que dans un contexte de croissance exponentielle de la population (à l'exception de l'Europe), les terres cultivées et la disponibilité en eau par habitant ont constamment baissé depuis les années 1960, bien qu'elles se stabilisent désormais dans certaines régions (cf. figures). Cela n'a pas empêché la production agricole, sur la même période, d'augmenter plus rapidement que la population grâce aux progrès techniques et organisationnels, soulignés par d'autres travaux sur la productivité agricole (voir à ce sujet un précédent billet sur ce blog). L'évolution des surfaces équipées pour l'irrigation par habitant est plus contrastée (figure ci-dessous) : baisse continue en Afrique, augmentation significative en Amérique du Sud, relative stabilité en Asie, etc. Cependant, en nombre d'hectares, elles augmentent dans la plupart des régions (sauf en Europe), ce qui témoigne d'investissements qui se poursuivent.

Terres cultivées (à gauche) et terres équipées (à droite) pour l'irrigation par habitant (Monde, 1961-2013)

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Source : Global Food Security

Ces tendances révèlent une capacité importante de l'agriculture à produire plus avec moins de terres et d'eau, mais rien n'indique, selon les auteurs, que cette capacité se développera à un rythme suffisant d'ici 2050. Le changement climatique, en aggravant les risques liés à l'eau (sécheresses, inondations, maladies, etc.) pourrait réduire des dotations déjà inégales, d'autant que les progrès techniques sont par nature incertains. Quelques pistes sont néanmoins prometteuses : se rapprocher des rendements potentiels des cultures (refermer le yield gap) permettrait selon certains auteurs de nourrir 2 milliards de personnes supplémentaires ; d'autres insistent sur les gains d'efficience liés à des modes d'allocation de l'eau plus souples et renégociables (ex. : quotas transférables).

Estimation et projection des ressources en eaux renouvelables disponibles par habitant, 1960-2080

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Source : Global Food Security

Lecture : eaux de surface à gauche, eaux souterraines au centre, eaux de surface et eaux souterraines à droite.

Julien Hardelin, Centre d'études et de prospective

Source : Global Food Security

09:51 Publié dans 1. Prospective, Climat, Environnement, Sécurité alimentaire | Lien permanent | Tags : eau, irrigation, terres cultivées |  Imprimer | | | | |  Facebook

12/02/2020

Quelle consommation de bois et de matériaux biosourcés dans les bâtiments en 2050 ?

Dans deux études prospectives publiées en décembre, l'ADEME a évalué les volumes de matériaux nécessaires pour la construction neuve, d'une part, et la rénovation thermique des bâtiments d'autre part, aux horizons 2035 et 2050. Dans chacun de ces secteurs, un scénario d'augmentation du recours aux matériaux biosourcés, et en particulier aux bois ou produits bois (à base de cellulose par exemple), est envisagé, en contrepoint d'un scénario tendanciel.

Pour la construction neuve, à vocation résidentielle ou tertiaire, les auteurs ont modélisé la consommation des différents matériaux pour chaque macro-composant des bâtiments (planchers bas et intermédiaires, murs, etc.), selon les types de bâtis (résidentiel ou tertiaire, individuel ou collectif, etc.) et les modes constructifs employés (bâtiment bois, mixte béton/acier, etc.). Prenant appui sur le scénario tendanciel « Avec Mesures Existantes » (AME) de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC), ils calculent les volumes de matériaux nécessaires selon deux scénarios technologiques : maintien des proportions actuelles des différents matériaux (scénario BAU) ou augmentation de la part du bois et des matériaux biosourcés (scénario BB).

Du fait de la baisse tendancielle de l'activité de construction, quel que soit le scénario, la consommation de bois devrait reculer à l'horizon 2050, même si sa part de marché est en hausse. En revanche, les isolants bois ou biosourcés progresseraient nettement dans le scénario BB.

Consommation cumulée de matériaux sur les périodes 2015-2035 et 2035-2050, en construction neuve pour les secteurs résidentiel et tertiaire (grande distribution, bureaux, enseignement, hôtels)

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Source : ADEME

Un travail similaire a été mené dans le domaine de la rénovation thermique des bâtiments, en modulant le rythme de rénovation du parc actuel de logements et en adoptant différentes solutions techniques. Les auteurs ont quantifié les volumes de matériaux consommés et ceux des déchets générés lors, notamment, des opérations de remplacement. Ainsi, sur la période 2015-2050, la consommation totale de produits isolants biosourcés varierait de 2,4 à 7 millions de tonnes (Mt) et celle du bois de 1,5 à 3,5 Mt, selon les scénarios.

En croisant les deux analyses, l'ADEME précise que la construction neuve consomme 40 fois plus de matériaux que la rénovation, et 80 fois plus en logement collectif : cela apporte des arguments supplémentaires en faveur de la rénovation, par ailleurs plus économe en utilisation de terres et moins émettrice de gaz à effet de serre.

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : ADEME

09:42 Publié dans 1. Prospective, Forêts Bois | Lien permanent | Tags : ademe, bois, construction, bâtiments, rénovation |  Imprimer | | | | |  Facebook

17/01/2020

Quelles protéines végétales pourra-t-on produire en Europe en 2050 ?

Le dernier numéro de l'European Journal of Agronomy présente une modélisation de l'aptitude des territoires agricoles européens à la production de cultures riches en protéines : légumineuses adaptées aux climats tempérés (fèves, lentilles, différents lupins, pois et pois-chiches) et chauds (soja, niébé), mais aussi amarante, quinoa et sarrasin. Cette aptitude a été modélisée, à une échelle spatiale fine, en fonction du climat et du pH des sols. Cette modélisation de l'adéquation d'un territoire aux besoins des plantes a été calibrée sur le climat de la période 1970-2000 et menée sur les prévisions climatiques à l'horizon 2050 (scénario RCP 4.5 du GIEC), à l'aide du modèle EcoCrop.

Le travail sur les données climatiques des dernières décennies permet de vérifier la cohérence du modèle, les cultures riches en protéines n'étant, de fait, cultivées que dans les zones d'adéquation optimale. Les conditions pédoclimatiques constituent bien un facteur limitant du développement des cultures, mais l'analyse fait aussi ressortir un important potentiel de production non utilisé jusqu'à présent, du fait de la concurrence dans l'usage des sols avec les autres espèces cultivées. La comparaison, sur les territoires, des scores d'aptitudes calculés pour chacune des cultures permet de faire ressortir celle qui serait la plus adaptée aux conditions locales.

Dans un deuxième temps, la modélisation sur la base des projections climatiques à 2050 fait ressortir quelles seraient les futures opportunités de production de protéines végétales. Les légumineuses de climat tempéré seraient ainsi largement impactées par les stress climatiques. En revanche, apparaît un important potentiel de production européen pour le quinoa, certaines variétés de lupin et, en France, pour le pois.

Aptitude pédoclimatique à la culture de quinoa (haut) et de pois (bas) en 2050

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Source : European Journal of Agronomy

Lecture : l'aptitude est mesurée par un score allant de 0 (inadaptation) en rouge à 1 (aptitude optimale) en bleu.

Alors que la production de protéines végétales redevient un objectif stratégique, cette étude fait ressortir un important potentiel en Europe, notamment en quinoa. Par ailleurs, les auteurs notent que la sélection variétale offre des possibilités importantes, à moyen terme, pour ces espèces. Le type de projections présenté ici pourrait aider à cibler les critères de cette sélection.

Jean-Noël Depeyrot, Centre d'études et de prospective

Source : European Journal of Agronomy