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06/07/2021

Une analyse des conditions du bon fonctionnement des collectifs d’agriculteurs

Les collectifs d’agriculteurs sont mis en avant, notamment par les pouvoirs publics nationaux et européens, en tant qu'instruments phares de la transition agro-écologique. Ils visent, par l’apprentissage entre pairs, à écologiser les pratiques. Pourtant, seule une minorité d’agriculteurs y participe, et leur généralisation s’avère difficile. Dans un article publié dans la revue Développement durable & territoires, deux chercheuses du Centre d'économie et de sociologie appliquées à l'agriculture et aux espaces ruraux (Cesaer) identifient les conditions du succès de ces démarches. Pour ce faire, elles analysent les trajectoires de deux collectifs, l’un ayant bien fonctionné, l’autre s’étant soldé par un échec. Elles montrent que ces groupes atteignent d’autant plus leurs objectifs qu’ils s’appuient sur des agriculteurs ayant l’habitude de travailler ensemble, et qui partagent une vision commune sur les manières de faire évoluer leurs pratiques. En revanche, lorsque le groupe est constitué ex nihilo, par exemple par un institut technique ou un organisme de développement agricole, il est plus difficile de le pérenniser et de le rendre performant.

Source : Développement durable & territoires

12/05/2021

Marine de Francqueville, Celle qui nous colle aux bottes, 2021, Éditions Rue de l’échiquier, 200 pages

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Dans cette bande-dessinée, Marine de Francqueville, étudiante à l’École nationale supérieure des Arts Décoratifs, rejoint la ferme familiale qu’elle a choisi comme support de son projet de fin d’étude. En montant dans la voiture de Monsieur de Francqueville, le père de l'auteure, le lecteur suit la conversation qu'il entame avec sa fille au sujet de l’exode rural, de l’étalement urbain, de la baisse de la population active agricole et de l’agrandissement des exploitations. En écho aux travaux d’A. Blondel et de L. Sully-Jaulmes, le passager observe la recomposition des paysages de banlieue. Arrivé à la ferme, il découvre le parcours personnel de Monsieur de Francqueville et la trajectoire de son exploitation, avant un « tour de plaine » qui lui enseignera ou lui rappellera le rôle agronomique des rotations, de la fumure, de l’entretien des sols. Puis il apprendra la fonction et l'impact des remembrements, tandis qu'un problème mécanique sera l’occasion d’aborder certaines des difficultés auxquelles l’agriculture est confrontée : conditions climatiques, volatilité des prix.

Au cours de cette aventure qui va la mener jusqu’en Angleterre, Marine de Francqueville, en jeune urbaine sensibilisée à l’écologie, s’interroge sur ce qui empêche son père, et d’autres agriculteurs, d’adopter des modèles plus vertueux à ses yeux. Elle questionne sa dépendance aux fournisseurs d’intrants, évoque l’incompréhension qu’elle observe parfois entre agriculteurs conventionnels et citoyens. À son retour de voyage, la tournée des fermes voisines réalisée avec son père la conduit à interroger les pratiques de ce dernier, et celles des professionnels rencontrés : agriculture biologique, agriculture de conservation, agroforesterie. L’accès à l’alimentation et la transmission des exploitations sont également évoqués, dans cette confrontation entre père et fille, qui lie les grandes controverses actuelles à l’histoire familiale et aux convictions personnelles. L’ouvrage, très documenté, s’appuie sur des données statistiques et de nombreuses publications.

Amandine Hourt, Centre d'études et de prospective

Lien : Éditions Rue de l’échiquier

L'assurance revenu : un filet de sécurité coût-efficace pour l'agriculture européenne ?

Comment offrir un filet de sécurité coût-efficace pour le revenu des agriculteurs européens, dans un contexte d'augmentation de la fréquence et de l'intensité des risques climatiques ? Un document de travail du Geary Institute for Public Policy du University College Dublin analyse trois solutions inspirées de la politique de gestion des risques des États-Unis : assurance revenu, assurance chiffre d'affaires et assurance prix minimum. Les auteurs simulent la mise en œuvre de ces instruments dans les pays de l'Union européenne, sur 50 années climatiques (1961-2011), à l'aide d'une version adaptée du modèle GTAP. Il en ressort une hiérarchie assez claire : l'assurance revenu couvre les chocs climatiques plus efficacement et à moindre coût que les deux autres dispositifs (tableau ci-dessous). Néanmoins, elle souffrirait de coûts de mise en œuvre plus élevés, qui restent à intégrer dans l'analyse. Cet article pose en tout cas des bases quantitatives intéressantes sur l'efficacité comparée d'instruments de mutualisation des risques agricoles fondés sur une logique de solidarité européenne.

Pourcentage simulé du budget de la PAC dépensé pour le filet de sécurité et trois mesures de risque, en moyenne, sur l'ensemble des années

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Source : UCD Geary Institute for Public Policy

Lecture : CAP : Politique agricole commune ; BPS : Basic Payment Scheme ; IST : Income Stabilisation Tool ; ARC : Agricultural Risk Coverage programme ; PLC : Price Loss Coverage programme.

Source : UCD Geary Institute for Public Policy

16:13 Publié dans Agriculteurs, Environnement, Travail et emploi | Lien permanent | Tags : agriculteurs, gestion des risques, revenu, europe |  Imprimer | | | | |  Facebook

10/05/2021

Un portail pour accéder aux principales statistiques sur les métiers

Utilisant différentes enquêtes sur l'emploi et la population, la Dares (ministère du Travail) propose un portrait statistique des 225 métiers de la nomenclature des familles professionnelles (FAP). Il propose des cartes, graphiques, tableaux et analyses (exemple ci-dessous). Plusieurs de ces analyses relèvent du périmètre du ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation. À chaque fois, le portail documente la situation récente (2019) et les changements observés depuis 2004. Différents indicateurs sont mobilisés, notamment l'évolution de l’emploi, sa qualité, le salaire moyen, le niveau de diplôme, la répartition géographique, etc.

Comparaison des horaires de travail « atypiques » de la catégorie « Agriculteurs, éleveurs, sylviculteurs, bûcherons » avec l'ensemble des 225 métiers

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Source : Dares

Source : Dares

 

15:54 Publié dans 4. Politiques publiques, Agriculteurs, IAA, Travail et emploi | Lien permanent | Tags : dares, métiers, emploi, agriculteurs, iaa |  Imprimer | | | | |  Facebook

20/04/2021

Recours au conseil payant en agriculture en Australie

Un article de Land Use Policy analyse le recours au conseil agricole rémunéré, en Australie, à partir d'une enquête menée auprès d'un échantillon de plus de 1 000 agriculteurs. Les auteurs suggèrent que les résultats sont transposables au cas européen. En effet, si les agriculteurs australiens peuvent disposer de conseil privé, progressivement déployé depuis quarante ans, leurs homologues européens se voient de plus en plus souvent proposer de telles prestations.

Les travaux publiés s'inscrivent dans une recherche plus large, visant à mieux identifier les conditions d'accès au conseil en Australie et son impact sur les exploitations selon différentes modalités d'accès : payant ou non, direct ou via les entreprises d'amont et d'aval, ou encore par le biais de collectifs d'agriculteurs. L'analyse dépasse le cadre du calcul du consentement à payer pour s'intéresser aux motivations et aux freins du recours à un conseiller, en faisant appel à la « théorie du comportement planifié », et en situant le conseil dans son contexte général.

Les principales variables agissant sur la décision de recourir à un conseiller rémunéré à l'acte, selon la théorie du comportement planifié

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Source : Land Use Policy

Le questionnaire a été mis au point par des groupes de travail associant agriculteurs (de profils variés) et des représentants des acteurs du conseil australien (entreprises amont/aval, syndicats, administrations, etc.). Partant d'un échantillon stratifié des exploitations agricoles, la moitié des réponses a été collectée par internet, l'autre par téléphone. Un premier tiers des répondants n'a pas recours aux conseillers rémunérés à l'acte, le deuxième tiers y recourt parmi d'autres types de conseils alors que pour le troisième c'est son principal moyen d'accéder au conseil.

En estimant le poids des différents facteurs explicatifs, les auteurs montrent que la propension à utiliser les services payants est plus importante pour les agriculteurs à la tête d'exploitations en phase de développement, ayant au moins un diplôme du 1er cycle d'enseignement supérieur et dont les revenus sont plus élevés que la moyenne. Ce sont aussi ceux qui pensent le plus souvent qu'un paiement est un gage d'efficacité. Cependant, les opinions de leurs pairs ou des membres de leur famille ont une influence notable sur leur choix. Enfin, pour la plupart d'entre eux, le paiement n'est pas un facteur limitatif alors que l'accès géographique au conseil, lié aux distances à parcourir, constitue un réel obstacle. Pour les auteurs, ces résultats doivent permettre de mieux cibler les politiques publiques en identifiant les réticences et les freins du recours au conseil.

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : Land Use Policy

18/01/2021

Quels agriculteurs en 2040 dans l'Union européenne ?

Dans le cadre de sa conférence annuelle sur les perspectives agricoles de l'Union européenne, la direction générale de l'agriculture de la Commission a présenté, en décembre 2020, les résultats d'une étude prospective sur les agriculteurs européens à l'horizon 2040 (support de présentation, visioconférence en replay)

Menée avec le Joint Research Centre (JRC), elle repose sur une méthode originale, combinant des outils de la prospective (exploration des possibles, tendances structurantes) et du design (prototypes, profils). Une démarche participative (interviews, ateliers organisés dans plusieurs pays, discussions thématiques à distance) a permis d'impliquer des agriculteurs, des chercheurs, des représentants d'organisations non gouvernementales, des institutions et des organisations professionnelles agricoles, etc.

L'exercice prospectif s'est déroulé en plusieurs phases. Après avoir caractérisé douze profils types d'agriculteurs en 2020 (six actuellement dominants, et six autres plus marginaux), les auteurs ont identifié les variables motrices (sociales, technologiques, environnementales, économiques, politiques) intervenant dans l'évolution du métier. Ils ont ensuite croisé ces éléments avec quatorze tendances structurantes générales, documentées et mises à disposition par le JRC pour alimenter les analyses prospectives au niveau européen.

Le résultat est présenté dans des portraits fictifs illustrant les douze profils projetés en 2040 (figure ci-dessous). À cette échéance, l'analyse conclut à une diversité accrue des types d'agriculteurs et des modèles agricoles : certains profils, émergents en 2020, seraient nettement plus présents en 2040, comme par exemple les agriculteurs « urbain », « cellulaire » ou l’« amateur passionné » pour lequel le revenu tiré de l’agriculture n'est pas une préoccupation. À l'inverse, les agriculteurs « intégré », « intensif » ou « patrimonial » (prisonnier d'investissements passés et, dans une situation précaire, reproduisant le modèle antérieur) sont déjà bien établis en 2020 et occuperont toujours une place notable en 2040.

Cette multiplication des modèles agricoles constitue un défi pour les politiques publiques, rendant plus difficile le ciblage des instruments et des financements.

Les douze profils d'agriculteurs en 2040 identifiés par l’étude

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Source : Commission européenne, JRC

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : Commission européenne, Joint Research Centre

12:40 Publié dans 1. Prospective, Agriculteurs, Exploitations agricoles, Travail et emploi | Lien permanent | Tags : prospective, agriculteurs |  Imprimer | | | | |  Facebook

12/01/2021

29 actions pour mieux prévenir le suicide en agriculture

En décembre, le député Olivier Damaisin a rendu son rapport sur l'identification et l'accompagnement des agriculteurs en difficulté et sur la prévention du suicide en agriculture. Il propose 7 axes de recommandations, déclinés en 29 actions, dont plusieurs visent à sensibiliser et intégrer les acteurs du monde agricole (salariés des organisations professionnelles et du conseil, agents publics, chambres d'agriculture, SAFER, organismes de formation professionnelle, établissements scolaires et universitaires). L'auteur propose aussi la création d’un observatoire national des exploitations agricoles en difficulté, piloté par le ministère chargé de l’Agriculture, une meilleure coordination des acteurs et un soutien financier accru des associations locales travaillant sur ce sujet.

Source : site personnel du député O. Damaisin

15/12/2020

#esaconnect 2020 : réseaux sociaux, outils d’intermédiation et apprentissages

Cette année, les Rendez-vous de l'agriculture connectée, organisés par la chaire Mutations agricoles de l’École supérieure d’agricultures (ESA) d'Angers, étaient consacrés à la façon dont internet et les réseaux sociaux transforment les modalités de débat sur et dans l’agriculture. Qui intervient dans ces espaces en ligne et assiste-t-on à une diversification des profils ? Comment le numérique renouvelle-t-il les formes d'expression, tant personnelles que politiques ? Leur dynamique permet-elle un décloisonnement des savoirs, ou ces espaces contribuent-ils, au contraire, à l'éclatement des référentiels techniques, à la formation de « bulles » et de nouveaux entre-soi professionnels ? Que sait-on de la réception et de la portée de ces débats sur l'image des agriculteurs ? Ces questions ont été discutées dans quatre conférences et deux tables rondes.

Dans la conférence introductive, B. Thareau (ESA d'Angers) rappelle que l'agriculture française, principalement organisée dans le cadre de la famille, s'est dotée de nombreux collectifs pour « produire des connaissances » (groupes de développement), « coopérer » (organisations de producteurs) et « représenter » (syndicats). Les réseaux sociaux ont contribué à réorganiser, mais aussi à conforter, ces trois « fonctions sociales », en créant de nouvelles intermédiations : espaces de dialogue en groupes sur Whatsapp ou Facebook, pour la production de connaissances et l'échange d'informations entre pairs ; blogs et micro-blogging (comme sur Twitter) s'agissant de la (re)présentation du métier ; plates-formes et sites spécifiques de mise en relation, pour la « coopération physique hors média ».

En complément de trois présentations s'intéressant aux évolutions générales (communication politique en ligne, mesures d'opinion, transformations du travail), deux riches discussions abordent ces nouvelles pratiques. L'une porte sur les chaînes vidéo d'« agriyoutubeurs » comme celle d'Étienne Fourmont. L'autre s'intéresse à la circulation des connaissances au sein du monde agricole, et souligne le rôle des vidéos pédagogiques et des « tutos » en ligne, pour la formation initiale et pendant la phase d'installation, comme celles de Ver de Terre productions.

Florent Bidaud, Centre d'études et de prospective

Source : Chaire Mutations agricoles - ESA d'Angers

14/12/2020

Les motivations des agriculteurs britanniques lors du vote sur le Brexit

Dans un article récemment publié dans le Journal of Rural Studies, des chercheurs britanniques ont analysé les raisons pour lesquelles des agriculteurs ont voté en faveur du Brexit : la peur de perdre le contrôle de son exploitation, compte tenu des réglementations européennes, en est la principale motivation.

Les auteurs se sont appuyés sur la théorie des comportements planifiés, selon laquelle la majorité des décisions seraient influencées, en amont, par la perception individuelle de la désirabilité du comportement et de ses conséquences, de l'opinion des proches (normes sociales) et de la capacité à mettre en œuvre le comportement en question. Afin de quantifier le poids de chacun de ces facteurs dans la prise de décision finale, les auteurs ont administré un questionnaire fermé mesurant, sur des échelles de Likert, le positionnement des agriculteurs par rapport à différentes assertions. Grâce à la méthode dite de la « boule de neige », comptant sur une diffusion du questionnaire de proche en proche pour toucher de façon homogène l'ensemble du territoire, ils ont recueilli 523 réponses.

Ils ont ensuite estimé le poids de chacun des ensembles de facteurs dans le vote final, pour faire apparaître les corrélations, en ayant au préalable regroupé les agriculteurs par types. Il apparaît que les agriculteurs gérant les plus grandes exploitations, les hommes et les individus ayant le plus faible niveau d'études ont eu une plus grande propension à voter en faveur du Brexit.

Les estimations du modèle ont permis de mesurer l'importance des perceptions, par les agriculteurs, de la réglementation européenne, de leurs attitudes envers l'UE et de leur capacité à contrôler les facteurs ayant un impact sur les performances de l'exploitation. Les auteurs ont aussi identifié l'image que les exploitants ont d'eux-mêmes et de leur rôle social. L'idée d'autonomie, qui se rattache au statut d'indépendant, y est centrale, alors même que les politiques agricole et alimentaire, très normatives, apparaissent comme une contrainte. Ainsi, ceux qui ont voté en faveur du Brexit avaient avant tout le sentiment de pouvoir retrouver des marges de manœuvre dans la conduite de leur exploitation.

Modèle comportemental de la décision de vote des agriculteurs en faveur du Brexit

brexit.jpgSource : Journal of Rural Studies

Lecture : les coefficients issus des estimations indiquent l'importance et le sens de la relation.

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : Journal of Rural Studies

07/12/2020

Criminalité agricole : un impact qui dépasse les aspects économiques

Connue surtout par les éléments rapportés dans les médias, la criminalité qui s'exerce à l'encontre des entreprises agricoles (vols de bétail et de matériel, dégradations, etc.) a des impacts lourds sur la santé psychique des agriculteurs victimes. C'est la principale conclusion d'une étude récemment publiée dans le Journal of Rural Studies, à partir d'une enquête exploratoire menée au Royaume-Uni, qui invite à approfondir les recherches sur ce sujet méconnu.

Source : Journal of Rural Studies

 

08:55 Publié dans Agriculteurs, Exploitations agricoles, Société, Travail et emploi | Lien permanent | Tags : risques, agriculteurs, dégradation |  Imprimer | | | | |  Facebook

16/11/2020

Réformes de la Politique agricole commune et aversion au risque des agriculteurs : enseignements d'une étude empirique en Italie

Un article publié en septembre 2020 dans la European Review of Agricultural Economics propose une estimation empirique de l'évolution temporelle de l'aversion au risque des agriculteurs italiens. Il analyse l'influence sur celle-ci des réformes successives de la Politique agricole commune (PAC) et des chocs climatiques. Comme le soulignent les auteurs, jusqu'ici peu d'études se sont intéressées aux facteurs pouvant modifier l'aversion au risque, en dépit du rôle important de ce paramètre dans les choix de production et d'investissement.

L'étude porte sur 36 600 exploitations agricoles italiennes spécialisées en grandes cultures, sur la période 1989-2009. Elle mobilise les données issues du réseau d'information comptable agricole national. Les auteurs utilisent la méthode d'estimation économétrique de Antle, qui consiste à inférer l'aversion au risque des agriculteurs à partir des choix de production qu'ils effectuent, via leur influence sur la distribution de probabilités de leurs profits. L'hypothèse de stabilité de l'aversion au risque sur différentes sous-périodes est aussi envisagée grâce à des tests de Wald.

L'analyse montre d'abord que cette aversion des agriculteurs italiens, en grandes cultures, a été positive sur l'ensemble de la période 1989-2009, confirmant les travaux antérieurs. Mais elle n'a pas été constante dans le temps : elle a augmenté entre 1993 et 1995, lors de la phase de transition liée à la réforme Mac Sharry de la PAC (baisse des prix garantis, aides découplées). Elle a légèrement baissé ensuite, lors de la mise en œuvre de ladite réforme (1996-1999), tout en restant supérieure à son niveau d'avant 1992. Selon les auteurs, c'est l'incertitude quant au devenir des dispositifs de soutien public qui expliquerait cette hausse, en dépit d'un effet stabilisateur des aides directes sur le revenu. Autre résultat intéressant, les sécheresses de 2003 et 2007 ont eu peu d'effet sur l'aversion au risque et ont même paradoxalement coïncidé avec une légère baisse, pouvant être due à d'autres facteurs.

En définitive, cette étude montre qu'il est judicieux de s'intéresser aux effets des changements de politique agricole sur l’aversion au risque des agriculteurs, afin de mieux anticiper leurs impacts, possiblement indésirables dans les périodes de réforme.

Coefficients d'aversion au risque estimés et test de Wald d'égalité des coefficients

Risques.jpgSource : European Review of Agricultural Economics

Julien Hardelin, Centre d'études et de prospective

Source : European Review of Agricultural Economics

18:24 Publié dans 4. Politiques publiques, Agriculteurs, PAC | Lien permanent | Tags : risques, agriculteurs, politiques agricoles |  Imprimer | | | | |  Facebook

11/11/2020

Robots de traite et bien-être au travail des éleveurs

Selon une étude norvégienne récemment publiée dans le Journal of Rural Studies, l'utilisation de robots de traite peut être un facteur de stress pour les éleveurs. Grâce à une enquête par internet auprès d'exploitants équipés (739 réponses), le bien-être de ces éleveurs a été mesuré, en matière de revenus, de satisfaction professionnelle, de santé psychique et de conciliation des vies familiale et professionnelle. Ils ont ensuite identifié les facteurs de dégradation de ce bien-être, particulièrement ceux liés directement à l'utilisation des robots de traite.

Ils mettent ainsi en évidence la fragilité des éleveurs lors de la phase d'appropriation du fonctionnement des robots, évaluée à 4 années à la suite de l'investissement : maîtrise imparfaite, organisation non stabilisée, occupation supérieure en temps, revenu en retrait, etc. De plus, ils sont nombreux à ne pas utiliser les données produites par le système, par manque de compétences, générant un surcroît de stress qui pourrait être réduit par de la formation et un accompagnement mieux ciblé.

Source : Journal of Rural Studies

16:55 Publié dans Agriculteurs, Exploitations agricoles | Lien permanent | Tags : stress, agriculteurs, robotisation, apprentissage |  Imprimer | | | | |  Facebook

15/10/2020

Améliorer l'efficacité des politiques publiques de réduction des risques liés aux pesticides

Dans un article paru dans Nature Food, neuf auteurs partent du constat, en Europe, que les politiques publiques visant à limiter les risques liés à l'usage des pesticides n'atteignent pas leur objectif. Ils recommandent dix leviers par lesquels améliorer l'efficacité de ces politiques, regroupés selon trois problématiques principales : définir des objectifs et des indicateurs simples, judicieux et mesurables ; prendre en compte les comportements des agriculteurs et des consommateurs ; assurer l'accès à des systèmes efficaces de protection des plantes, sur les plans technique et politique.

Par exemple, les auteurs jugent nécessaire de dépasser les difficultés actuelles à légiférer pour aboutir à une réglementation des technologies de génie variétal s'appuyant sur des considérations scientifiques et pragmatiques. Ils recommandent d'améliorer le processus d'homologation des nouveaux pesticides, pour ne pas le fonder sur des tests de l'industrie mais sur des travaux de laboratoires indépendants accrédités, et pour favoriser une approche globale du risque et non uniquement par pesticide et par culture. Ils font valoir la nécessité de garantir la bonne cohérence des objectifs des politiques publiques sur l'agriculture, pour éviter des messages et actions contradictoires (réduction des pesticides, évitement de l'apparition de résistances, maintien de la productivité, etc.). Les auteurs appellent aussi à favoriser des politiques combinant des mesures de tous niveaux, en entrée de système (ex : taxation des produits) et en sortie (ex : traitement des eaux). Dans ce cadre, ils soulignent la nécessité d'avoir des marges de manœuvre pour faire évoluer ou remplacer les instruments contradictoires ou inefficaces.

Ils recommandent enfin d'adopter une démarche intégrée pour construire des actions publiques de réduction des pesticides efficaces, régulièrement adaptables, incluant tous les acteurs de la chaîne de valeur, et composantes dans une politique générale de l'alimentation. Ils concluent en signalant que la stratégie Farm to fork et les réformes en cours de la PAC sont de réelles opportunités pour faire un pas en avant dans la construction de politiques publiques de réduction des risques liés aux pesticides.

Une approche holistique des politiques sur les pesticides

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Source : Nature Food

Vincent Hébrail-Muet, Centre d'études et de prospective

Source : Nature Food

15/09/2020

Le recensement agricole 2020 en Espagne

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Le numéro de juillet 2020 de la revue Índice est consacré aux nouveautés de la version 2020 du recensement agricole espagnol, notamment en matière de consolidation, de standardisation et de gestion des bases de données utilisées. L'innovation principale est le recours massif aux données administratives fournies, entre autres, par le Registro de Solicitud Única (RSU) et le Fondo Europeo Agricola de Desarrollo Rural (FEADER), lesquels sont gérés par le Fondo Español de Garantía Agrícola (FEGA), le Registro de Explotaciones ganaderas (REGA), etc. Lesdites sources vont renseigner environ 70 % de l'univers à enquêter (700 000 exploitations), tandis que les 30 % restants seront destinataires de questionnaires transmis par voie postale ou interviewés en présentiel ou à distance. La publication des résultats est prévue pour mars 2022.

Source : Índice

 

 

16:16 Publié dans Agriculteurs, Travail et emploi | Lien permanent | Tags : recensement, espagne, agriculteurs |  Imprimer | | | | |  Facebook

05/06/2020

Une approche sociologique des suicides d'agriculteurs

Deux articles récents de N. Deffontaines (sociologue, université du Havre), tirés de sa thèse sur les suicides d'agriculteurs, apportent un éclairage sur les « configurations suicidogènes » et les données disponibles pour en rendre compte (voir à ce sujet un précédent billet sur ce blog). La méthodologie, détaillée dans l'article de Genèses, consiste à interroger non pas des parents du défunt, mais des « proches éloignés » (voisins agriculteurs, travailleurs sociaux) qui ont croisé sa trajectoire, sans pour autant être des intimes. Cette perspective permet de mettre en lumière deux traits peu visibles dans les données administratives : « le poids normatif de la régulation familiale de l'activité agricole » et les « disqualifications » par lesquelles le suicidé s'est « retrouvé progressivement exclu des diverses scènes sociales auxquelles il participait ». Le deuxième article, paru dans Sociologie, approfondit l'analyse du suicide dit « fataliste » (selon la terminologie très ancienne de Durkheim), un des quatre types de passage à l’acte (voir à ce sujet un entretien récent avec l'auteur).

Sources : Sociologie, Genèses

11:02 Publié dans Agriculteurs, Société | Lien permanent | Tags : suicide, agriculteurs |  Imprimer | | | | |  Facebook