18/11/2021
Durabilité et résilience du secteur agricole, à différentes échelles
La durabilité et la résilience du secteur agricole sont au cœur de plusieurs travaux de recherche récents. Des chercheurs lituaniens ont ainsi repris, dans Land Use Policy, les définitions respectives de ces deux concepts, et développé des indicateurs dédiés, à partir d'une riche revue de littérature.
Si la « durabilité » comporte classiquement trois dimensions (économique, sociale, environnementale), la « résilience » est vue, selon les approches théoriques, comme un prérequis ou un fondement de la durabilité, parfois comme une de ses composantes, ou encore comme une notion parallèle, dynamique plutôt que statique. Repartant de définitions empiriques, les auteurs ont compilé de multiples indicateurs pour caractériser les trois dimensions de la durabilité et la résilience économique du secteur agricole des pays baltes et scandinaves. Cette dernière est notamment approchée par le taux de marge du secteur, la volatilité du chiffre d'affaires et la diversification des exportations (pays partenaires, produits). La dimension sociale de la durabilité repose, quant à elle, sur la place de la main-d’œuvre familiale, le niveau relatif des salaires agricoles, la situation des femmes, la démographie des exploitants, etc. Les différents indicateurs sont calculés sur une quinzaine d'années, pour faire ressortir les différences et évolutions nationales (figures ci-dessous).
Indicateurs de durabilité (en haut) et de résilience économique (en bas) des secteurs agricoles de 2004 à 2017
Source : Land Use Policy
Il ressort de ces comparaisons empiriques que les deux concepts sont bel et bien indépendants : les indicateurs sont peu corrélés, avec des dynamiques (la résilience étant beaucoup plus sensible au contexte économique) et des performances relatives des pays très différentes. La résilience mérite donc d'être étudiée en tant que telle. Si les auteurs synthétisent la littérature et les indicateurs existants, leur approche de la résilience reste macro-économique et peut donc cacher des évolutions fines plus complexes.
Dans un autre article, également récent, des chercheurs néerlandais ont analysé la résilience à l'échelle des exploitations agricoles, grâce aux données du Farm accountancy data network (FADN, Réseau d’information comptable agricole-Rica en France). Ils la définissent selon trois dimensions des exploitations : robustesse (en réponse à des chocs), adaptabilité (évolution de la composition du résultat économique) et transformation profonde (introduction ou suppression d'ateliers d'élevage, agritourisme, conversion à l'agriculture biologique). La résilience est cette fois analysée pour différents types d'exploitations, dans neuf pays européens, dont la France. Les auteurs déclinent les indicateurs au niveau régional et montrent que les aides découplées affectent négativement la robustesse des exploitations, alors que les aides au développement rural ont un effet positif.
Ces deux approches complémentaires, macro et micro-économiques, devraient contribuer, grâce à des définitions claires et des indicateurs reproductibles, à clarifier et objectiver la notion de résilience, trop souvent invoquée de façon approximative.
Jean-Noël Depeyrot, Centre d'études et de prospective
Sources : Land Use Policy ; European Review of Agricultural Economics
07:27 Publié dans 4. Politiques publiques, Exploitations agricoles, Production et marchés | Lien permanent | Tags : résilience, durabilités, marchés, exploitations agricoles | Imprimer | |
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