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11/03/2021

Hommes des tempêtes, Frédéric Brunnquell

Brunnquell.jpg

Réalisateur de films documentaires largement diffusés et souvent primés, Frédéric Brunnquell embarque en janvier 2018 sur le plus grand chalutier-usine français (Joseph Roty II, 90 mètres de long), pour faire un reportage en Atlantique nord sur la pêche au merlan bleu. Son livre sensible et juste, quasi-romanesque, raconte deux mois d'imprévus et d'aventures, entre incertitudes de la nature et huis-clos du bateau à près de mille kilomètres des côtes irlandaises.

Tout commença par trois semaines de gros vent et de houle, de dépressions qui roulent et s'enchaînent. Dans ces conditions, point de poisson, mais des bourrasques à 140 km/h, des vagues de 15 mètres, les coups de gîte, la peur du naufrage si le moteur ou le pilote automatique lâche, l'équipage cloîtré dans les cabines, diverses blessures et, surtout, l'angoisse de revenir bredouilles. Pour s'aider à prendre les bonnes décisions, le capitaine se dope au café et à la nicotine, prompt à s'énerver et à donner ses ordres, un l'œil sur le barographe et les pieds dans ses charentaises, chaussons emblématiques des grands capitaines terre-neuvas.

Avec le retour au calme vint le temps de la pêche miraculeuse : le grand chalut d'un kilomètre tamise l'eau, par 600 mètres de profondeur, et ramène à chaque trait 150 tonnes de poissons, vite envoyés en cale par un énorme aspirateur. Ils sont alors étêtés, éviscérés et dépiautés, puis mixés, pressés et partiellement déshydratés, et enfin transformés en plaques de pâte de surimi de 20 kilos. La cadence du travail à la chaîne commande les gestes mécaniques et répétitifs. Le sol est recouvert d'un « magma sanguinolent et merdeux » et l'air saturé de microparticules qui s'échappent des mixeurs. Pourtant, l'ambiance est bonne, les semaines perdues vont pouvoir être rattrapées et les cuves se remplir.

Mais un coup du sort, comme aiment à en raconter les gens de mer, vint doucher ces espérances : un chalut abandonné, qui flottait à la dérive, s'est pris dans l'hélice et a stoppé net le moteur. Les déferlantes et les lames de fond emportent le navire, qui vacille et est proche du chavirage. Il faut se résoudre à appeler l'armateur, qui contacte lui-même son assureur, et un remorqueur irlandais envoyé sur zone ramène le Joseph Roty II à Killybegs. Après trois jours de travail, les plongeurs le délivrent de son « étreinte de nylon » et il peut repartir affronter l'océan. Ce sera sans Frédéric Brunnquell, qui a décidé de ne pas prolonger l'aventure. S'il est heureux de retrouver la terre et les siens, son amertume pointe à l'idée de « sortir de l'illusion d'être devenu un des membres de l'équipage ».

Bruno Hérault, Centre d'études et de prospective

Lien : Éditions Grasset

11:26 Publié dans Pêche et aquaculture, Travail et emploi | Lien permanent | Tags : pêche, témoignage, documentaire, chalutier, océans, brunnquell |  Imprimer | | | | |  Facebook

Variabilité océanique et stratégies de diversification des zones de pêche et des espèces ciblées au Mexique

Un article d'Environmental Science & Policy analyse les stratégies de diversification des lieux de capture et de choix des espèces-cibles adoptées par les pêcheurs artisanaux mexicains de l'État de Basse-Californie du Sud, en réponse aux variabilités océaniques. Les auteurs utilisent les données de la Commission nationale des pêches (CONAPESCA) pour identifier les espèces capturées et leurs sites de débarquement, entre 2008 et 2016. Les sites sont regroupés en fonction de leur distance euclidienne selon l'algorithme BDSCAN, afin de former des régions de débarquement. Les espèces qui y sont débarquées leur sont associées afin de former au total 208 appariements région-espèce. Lorsqu'un pêcheur exerce son activité annuelle sur deux couples, ceux-ci sont reliés par un « lien » représentant sa stratégie de pêche. En procédant de cette façon pour l'ensemble des pêcheurs, on obtient un réseau représentant les choix effectués par la profession, au cours d'une année, en réponse à un contexte climatique et océanique. La comparaison de ces réseaux, sur un pas de temps annuel, permet d'observer les relations entre contextes et stratégies de diversification.

Les auteurs montrent que les pêcheurs préfèrent diversifier leurs espèces cibles plutôt que leurs zones de capture. Lorsqu'ils ont lieu, les changements spatiaux sont très corrélés à la température de l'eau, liée aux phénomènes El Niño et La Niña. Les acteurs détenant des droits de pêche pour les espèces à plus forte valeur commerciale (ex. carangues, vivaneaux, balistes) ont une tendance accrue à diversifier leurs lieux d'activité. La réglementation a également un impact sur eux : certaines licences autorisent en effet la pêche d'un plus grand nombre d'espèces dans des zones plus étendues, alors que d'autres restreignent les activités d'un pêcheur à une zone donnée.

Bien que les restrictions réglementaires permettent, selon les auteurs, une meilleure gestion des ressources, la diversification des zones de capture favorise la résilience des pêcheurs artisanaux en leur permettant de s'adapter aux variations océaniques. Ils soulignent donc l'importance de cet aspect lors de la conception des politiques publiques dédiées.

Évolution du choix des stratégies de diversification au cours du temps (à gauche), et mise en perspective avec l'ampleur du phénomène El Niño (à droite)

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Source : Environmental Science & Policy

Lecture : en bleu clair, nombre de liens « internes » (i.e. entre couples où la région est identique et les espèces différentes) ; en bleu foncé, nombre de liens « externes » (i.e. entre couples où les régions sont différentes mais l'espèce pêchée identique) ; en noir, la différence entre le nombre de liens externes et internes, divisée par le nombre total de liens ; en rouge, les moyennes annuelles de l'Oceanic Niño Index (ONI), mesurant les anomalies de températures de surface dans le Pacifique équatorial et permettant de détecter et jauger les épisodes El Niño.

Aurore Payen, Centre d'études et de prospective

Source : Environmental Science & Policy

08/03/2021

Renforcer la place des femmes dans les pêcheries artisanales des îles Salomon, Fidji et au Vanuatu

Un article de Marine Policy explore le niveau d'inclusion des femmes dans les pêcheries artisanales des îles Salomon, Fidji et au Vanuatu, territoires où elles contribuent à hauteur de 80 % à la subsistance de leurs communautés. 12 experts ainsi que 39 femmes et 29 hommes (représentants locaux, nationaux, internationaux, du monde associatif, etc.) ont été interviewés dans ce but.

La majorité des dispositifs d'inclusion vise à augmenter la participation des femmes aux activités et projets. Les auteurs notent que ce type de dispositifs ne leur garantit cependant pas une présence plus importante aux différents niveaux de la décision, ni que s'améliorent leur accès aux ressources et leur indépendance. Le manque d'implication des hommes, qui ne se sentent pas concernés par la recherche de solutions, est souvent souligné. Un engagement politique et institutionnel explicite, en matière d'égalité des sexes, et une meilleure intégration de cet enjeu dans l’ensemble des politiques publiques sont des pistes d'amélioration citées par les auteurs.

Source : Marine Policy

10:56 Publié dans 4. Politiques publiques, Pêche et aquaculture, Société | Lien permanent | Tags : genre, rapports sociaux, pêche, pacifique |  Imprimer | | | | |  Facebook

10/02/2021

Le bien-être des poissons d'élevage : études de cas en Chine et aux Philippines

La Fish Welfare Initiative est une start-up caritative, créée en 2019, œuvrant à une meilleure prise en compte du bien-être des poissons dans les élevages aquacoles, au moyen de collaborations avec les entreprises, les organisations non gouvernementales et les gouvernements. Après avoir publié fin 2020 un rapport proposant des actions pour y parvenir, les résultats de deux enquêtes en Chine et aux Philippines viennent de paraître.

La qualité de l'eau et de l'alimentation, ainsi que les conditions de transport et d'abattage, sont les principaux paramètres impactant le bien-être des poissons d'élevage. Les améliorer participe à l'approche « Une seule santé » puisque de meilleures conditions d'élevage permettent i) une diminution de la présence de polluants dans les chairs des poissons, ii) une baisse des maladies et donc aussi du recours aux antibiotiques et antimicrobiens (lutte contre le développement de résistances), iii) une réduction de la mortalité (limitation des pertes économiques) et iv) une limitation du stress lors du transport et de l'abattage, et donc une meilleure qualité du produit final.

Aux Philippines (illustration ci-dessous), les éleveurs accèdent difficilement aux formations sur l'amélioration des conditions d'élevage des poissons, alors qu'ils manifestent de l’intérêt pour celles-ci. Faire appel à la médecine vétérinaire n'est pas non plus une pratique courante. Quant à la qualité de l'eau, elle est peu surveillée. Les poissons sont généralement tués par asphyxie ou dans un bain de glace. Le recours à l'étourdissement par percussion ou électrique est inexistant, les éleveurs s'interrogeant quant à son coût et sa facilité d'utilisation. Enfin, les petits élevages qui approvisionnent les marchés locaux n'ont pas recours à la certification (durabilité) de leurs produits, du fait de son coût et du manque d'intérêt des consommateurs ciblés.

Élevage de tilapias dans des réservoirs en ciment, aux Philippinefish welfare .jpg

Source : Fish Welfare Initiative

En Chine, la modernisation des pratiques et la formation des éleveurs, pour une meilleure prise en compte du bien-être des poissons, sont encouragées par plusieurs facteurs : l'augmentation de la demande en produits aquacoles durables, tirée en interne par les classes moyennes et, à l'exportation, par les marchés des pays développés ; l'occurrence d'incidents environnementaux ou touchant à la sécurité sanitaire des aliments ; etc.

Aurore Payen, Centre d'études et de prospective

Source : Fish Welfare Initiative, Fish Welfare Initiative

18/01/2021

Prospective sur l'utilisation des antimicrobiens en aquaculture à horizon 2030

96 % des antimicrobiens les plus utilisés en aquaculture sont classés par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) comme très importants ou d'importance critique pour la médecine humaine. Leur usage pouvant entraîner l'apparition de résistances et leur remplacement par d'autres molécules étant très limité, un article de décembre 2020 publié dans Nature projette l'évolution de leurs emplois à horizon 2030. Pour ce faire, les auteurs partent des taux d'utilisation mis en évidence dans la littérature et des perspectives de croissance de la production aquacole élaborées par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et par l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO).

L'aquaculture ne représentait en 2017 que 6 % des consommations d'antimicrobiens, contre 21 % en médecine humaine et 74 % pour l'élevage d'animaux terrestres. Ces proportions devraient rester stables en 2030, malgré une potentielle augmentation de 33 % des volumes d'antimicrobiens utilisés en aquaculture. En équivalent biomasse (mg/kg), l'aquaculture utiliserait toutefois à cette échéance 80 % d'antimicrobiens de plus que la médecine humaine et 18 % de plus que pour l'élevage.

Projection de la consommation annuelle d'antimicrobiens (tonnes) selon sa destination

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Source : Nature

Lecture : en gris la médecine humaine, en vert le bétail, en orange la volaille, en rose les porcins, en bleu foncé l'aquaculture. Les pointillés représentent l'intervalle de confiance pour l'aquaculture.

Consommant en 2017 près de 94 % du volume mondial d'antimicrobiens en aquaculture (58 % pour la Chine et 11 % pour l'Inde), l'Asie et le Pacifique devraient conserver cette part en 2030, alors que celle de l'Afrique augmenterait (de 2,3 à 2,6 % du volume total) et celle de l'Europe diminuerait légèrement (de 1,8 à 1,7 %). Les plus fortes croissances s'observeraient au Brésil (94 % d'augmentation), en Arabie Saoudite (77 %), en Australie (61 %), en Russie (59 %) et en Indonésie (55 %), ces pays étant susceptibles de représenter alors 11,5 % des volumes employés en 2030.

Par ailleurs, la vaccination préventive et la sélection des espèces ont montré leur efficacité pour réduire l'utilisation d'antimicrobiens dans les élevages. Dans les pays en voie de développement, acteurs majeurs de ce secteur, l'accessibilité financière des solutions est un objectif fort. Selon les auteurs, la création de structures chargées du suivi des usages permettrait de mieux identifier les risques dans un pays donné et de mettre en œuvre des mesures d'interventions ciblées.

Aurore Payen, Centre d'études et de prospective

Source : Nature

16/12/2020

Audit de la Cour des comptes européenne sur la protection du milieu marin

En écho à l'engagement de l'Union européenne en faveur de la protection des espèces et milieux marins (ex. Objectifs de développement durable des Nations unies), figurant dans plusieurs accords internationaux, la Cour des comptes européenne a publié en novembre 2020 un rapport sur les politiques de l’Union dédiées, en y incluant la Politique commune de la pêche (PCP). L'audit a examiné la construction du cadre réglementaire et sa bonne application dans les États membres. La Cour a aussi vérifié si l'état des stocks méditerranéens et atlantiques s'était amélioré et si les fonds européens avaient été mobilisés pour atteindre les objectifs de conservation, sur la période 2008-2020 et sur une zone géographique précise (Espagne, France, Italie et Portugal ; carte ci-dessous).

Zone maritime concernée par l'audit de la Cour des comptes européenne sur les politiques de protection des milieux marins

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Source : Cour des comptes européenne

L'audit montre que les zones marines instaurées par les États membres n'atteignent globalement pas leurs objectifs de protection. Une des raisons de cet échec est que la plupart d'entre elles restreignent peu la pêche : sur les 21 zones contrôlées, 9 imposent peu voire aucune restriction, 9 en imposent certaines (autorisation de pêche, interdiction de certains engins, pêche interdite dans quelques endroits) et 3 interdisent la pêche sur la plus grande partie du périmètre.

Malgré des progrès observés dans l'océan Atlantique, les objectifs de durabilité concernant l'état biologique des stocks ne sont pas atteints en 2020, année-cible. En Méditerranée, l'activité de pêche était encore deux fois supérieure aux niveaux jugés comme durables en 2019. Le rapport souligne, de plus, le manque des données nécessaires au suivi des stocks européens, pour plus de la moitié d'entre eux. Par ailleurs, un frein à la protection des stocks est la difficulté, pour un État membre, d’imposer des restrictions de pêche aux flottes étrangères, européennes ou non.

Les auditeurs conseillent de renforcer les mesures de protection en Méditerranée, de développer l'utilisation des fonds européens dans un objectif de conservation des milieux marins (figure ci-dessous), et de recenser les modifications réglementaires et administratives qui permettraient d'améliorer l'atteinte des objectifs fixés. Il s'agirait de faciliter une application plus rapide des mesures de conservation de la PCP et d'étendre la protection à davantage d'habitats et d'espèces.

Ventilation du Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP) par objectifs : 6 % sont dédiés aux mesures de conservation des espèces marines et de leurs milieux

PCP2.jpg

Source : Cour des comptes européenne

Aurore Payen, Centre d'études et de prospective

Source : Cour des comptes européenne

09/12/2020

Les outils génétiques à l'appui de l'aquaculture

Un reportage de novembre 2020 de la revue Science revient sur les avancées des outils génétiques et leur intérêt pour l'aquaculture, et ce sur plusieurs plans : sanitaire (ex. résistance aux maladies et parasites), productif (ex. taux de croissance) et consumériste (ex. qualité des filets et couleur de la chair).

Les techniques d’identification de marqueurs génétiques, dans une population, ont permis d'améliorer de 25 % les performances des méthodes de sélection traditionnelles, en facilitant la détection des individus porteurs des caractéristiques souhaitées. En plus de la recherche continue d'innovations techniques, les objectifs sont de développer leur utilisation sur une plus grande variété d'espèces d'intérêt, de poursuivre la diminution des coûts (déjà observée, pour une appropriation plus large) et de mieux informer le consommateur de ces techniques.

Valeur (en milliards de dollars), tonnage produit (en milliers de tonnes) et date de la première publication scientifique connue au sujet de la sélection d'un caractère spécifique,  pour cinq espèces couramment élevées dans le monde

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Source : Science

Lecture : de gauche à droite, carpe amour, tilapia du Nil, saumon Atlantique, crevette à pattes blanches, huître creuse du Pacifique.

Source : Science

09:13 Publié dans Alimentation et consommation, Pêche et aquaculture | Lien permanent | Tags : aquaculture, génétique, innovation |  Imprimer | | | | |  Facebook

Une analyse en cycle de vie des impacts environnementaux de l'aquaculture

L'aquaculture est parfois présentée comme une solution pour répondre à la demande croissante en produits de la mer. Toutefois, cette activité est source d'impacts environnementaux importants. Pour les évaluer, des chercheurs ont procédé à l'analyse du cycle de vie de la production aquacole en système fermé de deux espèces (Tilapia et Clarias). Leurs travaux ont été publiés dans la revue Environmental Science and Technology. Ils ont quantifié quatre impacts : contribution à l'eutrophisation, émissions de gaz à effet de serre, usage de terres et consommation d'énergie. Au-delà des chiffres, il est intéressant de constater que, pour les trois premiers indicateurs, la quasi totalité de l'impact est imputable à la production de l'alimentation servant à nourrir les poissons.

Décomposition des impacts environnementaux de la production aquacole de Tilapia et Clarias en système fermé

analyse ACV.jpg

Source : Environmental Science and Technology

Lecture : le graphique montre la contribution de quatre facteurs (alimentation, engraissement, infrastructure et production d'alevins) aux impacts environnementaux étudiés (eutrophisation, émission de gaz à effet de serre, usage de terres, consommation d'énergie).

Pour réduire cette empreinte environnementale, les auteurs proposent de végétaliser davantage l'alimentation des poissons élevés, ce qui permettrait en particulier, selon eux, de réduire de 28 % les émissions de gaz à effet de serre.

Source : Environmental Science and Technology

10/11/2020

Conséquences de la pêche récréative sur les requins à pointes noires

Dans un article publié dans le Fishery bulletin d'octobre 2020, des auteurs estiment le niveau de stress et le taux de survie des requins à pointes noires, après leur capture puis leur relâche par des pêcheurs sportifs aux États-Unis (Caroline du Sud et Floride). Cette estimation repose sur des prélèvements sanguins et la pose de transmetteurs acoustiques. Deux types de pêche à la ligne sont comparés, depuis une plage (41 requins capturés) ou d'un bateau (40).

17 % et 20 % des requins capturés respectivement depuis une plage ou un bateau ont péri dans les 10 jours qui ont suivi. Un temps plus élevé écoulé entre l'hameçonnage et la sortie de l'eau entraîne une acidose du sang plus marquée, sans que ce stress métabolique ait pu être relié à une plus grande mortalité. Les blessures et traumatismes (ex. : hameçon planté dans la queue) en seraient plus probablement responsables, bien que 18,4 % des requins jugés en très bon état au moment de leur libération aient ensuite péri.

Pourcentage de mortalité (en noir) et de survie (en gris), selon l'état du requin pointe noire au moment de sa relâche

Requins.jpg

Source : Fishery bulletin

Lecture : de gauche à droite, état de l'animal : excellent (38 individus), bon (24), correct (10), mauvais (9).

Source : Fishery bulletin

 

 

16:35 Publié dans Environnement, Pêche et aquaculture | Lien permanent | Tags : durabilité, pêche, requin, etats-unis |  Imprimer | | | | |  Facebook

15/10/2020

Au Canada, étiquetage environnemental des produits de la mer et information des consommateurs

Le groupe d'influence canadien SeaChoice a publié, en septembre 2020, une étude sur les allégations environnementales présentes sur les étiquettes de produits de la mer. L'échantillon est constitué des produits frais, en conserve et congelés vendus dans 18 supermarchés de 14 enseignes différentes, choisis aléatoirement dans 5 villes de différentes provinces (Vancouver, Toronto, Saskatoon, Montréal et Halifax). En excluant les doublons, les étiquetages de 181 références proposées par 49 marques ont été examinés.

Les auteurs ont jugé la qualité d'une étiquette selon plusieurs critères : sa précision (mention du nom latin de l'espèce, de son nom commun, de son caractère sauvage ou d'élevage, de la zone de pêche, du lieu de transformation et de la technique de pêche) ; le type d'allégation (certification à caractère contraignant, respect de critères définis par des organisations de protection des espèces marines, auto-déclaration) ; le caractère vérifiable des allégations, les critères sur lesquels elles se basent et leur comparabilité avec les standards internationaux.

Concernant la précision des étiquettes, seulement 6 % des produits rassemblent au moins 5 des éléments demandés. 42 % n'indiquent que 3 éléments et 32 % qu'un ou deux. Ces précisions sont pourtant indispensables pour juger de la durabilité environnementale du produit (ex. : sélectivité de la technique de pêche). Contrairement à ce qui pourrait être attendu, la précision des étiquettes n'est pas corrélée avec le type d'allégation (voir figure).

Nombre d'étiquettes selon leur niveau de précision et le type d'allégation du produit (à gauche les produits certifiés ; au centre les étiquetages comprenant des critères définis par des organisations de protection des espèces marines ; à droite les allégations auto-déclarées)

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Source : SeaChoice

Lecture : en rouge, le nombre d'étiquettes imprécises (1 à 2 des éléments affichés permettant de juger la durabilité d'un produit de la mer) ; en orange, les étiquettes insatisfaisantes (3 éléments précisés) ; en bleu, les étiquettes correctes (4 éléments) et en vert, celles de bonne qualité (plus de 5 éléments).

234 allégations environnementales ont été trouvées sur les 181 produits, soit 1,3 par produit en moyenne. 44 % d'entre elles sont des auto-déclarations contre 23 % de certifications et 33 % de mentions de critères définis par des organisations de protection. Or, après avoir contacté les marques et comparé les informations transmises, lorsqu'elles le sont, avec les standards internationaux, les auteurs montrent que 42 % des allégations ne peuvent pas être vérifiées. Cela pose donc des difficultés en matière d'information du consommateur.

Nombre d'allégations environnementales permettant de juger de la durabilité des produits

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Source : SeaChoice

Lecture : produits durables (en vert), non durables (gris foncé), à la durabilité non vérifiable (gris moyen) ou indéfinie (gris clair), selon le type d'allégation (à gauche, les produits certifiés ; au centre, les mentions de groupes ; à droite les allégations auto-déclarées).

En complément, soulignons qu'en France, une publication récente de l'association UFC-Que Choisir montre de mauvaises pratiques, malgré la réglementation en vigueur, évaluant à 25 % la part d'étiquettes sans mention de la technique de pêche.

Aurore Payen, Centre d'études et de prospective

Sources : SeaChoiceUFC Que Choisir

09:56 Publié dans Alimentation et consommation, Environnement, Pêche et aquaculture | Lien permanent | Tags : produits, pêche, durabilité |  Imprimer | | | | |  Facebook

13/10/2020

Quels impacts environnementaux de la consommation de produits issus de la pêche et de l'aquaculture en France ?

Dans un document de travail publié récemment, des chercheurs d'Inrae ont voulu évaluer les impacts environnementaux de la consommation de produits de la mer en France. Pour ce faire, ils ont construit une base de données combinant informations commerciales et de production, qu'ils ont couplée à des indicateurs environnementaux (empreinte carbone, potentiel d'eutrophisation, consommation énergétique). Les auteurs montrent notamment que les émissions de gaz à effet de serre générées par la consommation de produits de la mer s'élèvent à 2,6 teqCO2/t en moyenne, ce qui est très en deçà des 8,2 à 21,7 teqCO2/t associées à la consommation de viande bovine. Au-delà de cette moyenne, d'importantes variations s'observent selon les espèces considérées. Ainsi, l'empreinte carbone des poissons pélagiques s'établit aux alentours de 1 teqCO2/t, contre plus de 10 teqCO2/t pour les crevettes et crustacés.

Source : Inrae

 

 

12/10/2020

Des récifs artificiels dans le port de Toulon pour protéger les poissons

Un article publié en septembre 2020 sur le site de l'Ifremer fait part de l'installation d'herbiers et de rochers artificiels, fabriqués par impression 3D, dans la rade de Toulon. L'objectif est de recréer des abris pour les poissons, notamment les juvéniles, et ainsi de favoriser leur développement. Le suivi des impacts de ce dispositif permettra de formuler des préconisations pour le lancement de projets similaires sur d'autres sites.

Source : Ifremer

 

15/09/2020

L'évolution des activités agricole, sylvicole, aquacole et halieutique est-elle soutenable en matière énergétique ?

Analyser l'agriculture, l'aquaculture, la pêche et la forêt (AAPF) comme un système énergétique, obéissant aux lois de la thermodynamique, est un moyen intéressant d'étudier la durabilité des évolutions globales. C'est le parti pris d'un article récent de Biophysical economics and sustainability.

En 2017, le système AAPF fournissait plus du quart de l'énergie totale produite au niveau mondial, utilisée pour couvrir les besoins humains via l'alimentation ou sous forme de bioénergie. Les denrées alimentaires contribuent à elles seules à un cinquième de la production.

Les auteurs s'appuient sur des données de la période 1971-2017 de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) et de l'Organisation des Nations unies pour l'agriculture et l'alimentation (FAO), ainsi que sur des travaux récents portant sur le contenu en énergie de différents produits agricoles ou chimiques. Pour déterminer un « retour sur investissement énergétique », ils ont calculé l'énergie nette produite par le système AAPF, déterminée à partir de l'énergie fournie par les productions alimentaires et bioénergétiques, déduction faite des consommations internes (alimentation des travailleurs par exemple). Ce résultat est ensuite rapporté au total de l'énergie fournie au système, soit pour dégager de la puissance de travail (hommes, animaux), soit pour être transformée dans le process de production (intrants). Les auteurs font la distinction entre sources d'énergie renouvelables et fossiles.

Sur la période 1971-2017, le ratio s'est amélioré, passant de 2,87 pour 1 à 4,05 pour 1. Les auteurs attribuent cette évolution positive à la baisse du recours au travail humain (et animal) en agriculture, à son remplacement par du travail mécanique (de plus en plus efficient), et à l'amélioration de l'efficacité énergétique de la production des intrants. De plus, l'agriculture a bénéficié d'un accroissement des quantités produites, à volume énergétique d'intrants constant, notamment en raison de la sélection variétale végétale et animale. Cette évolution présente cependant des limites : elle se produit au prix d'une dépendance accrue aux énergies fossiles (passée de 44 % à 62 % sur la période), d'un recul de la circularité des flux au sein du système et d'une décapitalisation de l'énergie stockée par la nature, avec corrélativement une dégradation des écosystèmes.

Principaux résultats de l'analyse énergétique du système AAPF

Energie2.jpg

Source : Biophysical economics and sustainability

Lecture : l'énergie exosomatique est métabolisée à l'extérieur du corps humain, à travers la combustion d'énergie fossile ou de bioénergie, pour délivrer de la chaleur, générer du mouvement mécanique, de l'électricité ou participer à des process de transformation ; l'énergie endosomatique est, à l'inverse, métabolisée par le corps humain, à partir de l'énergie ingérée dans l'alimentation.

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : Biophisycal economics and sustainability

 

 

17:18 Publié dans Energie, Forêts Bois, Pêche et aquaculture | Lien permanent | Tags : énergie |  Imprimer | | | | |  Facebook

Comment améliorer la durabilité des élevages aquacoles ?

Au niveau mondial, l'aquaculture produit de nos jours plus de biomasse que l'élevage bovin, mais cette production a des effets négatifs pour l’environnement. En juin 2020, des chercheurs ont publié, dans la revue World Aquaculture Society, un article sur les leviers d'amélioration de sa durabilité. Pour eux, l'atteinte de cet objectif passerait par une intensification des systèmes visant à optimiser l'utilisation des intrants et à en limiter les pertes. Outre les questions de traçabilité des produits et de transparence des process de production, l'article se concentre sur les volets environnemental (intrants et infrastructures) et économique de la durabilité.

L'alimentation est un levier de première importance. Les efforts pour diminuer la quantité de poissons sauvages entrant dans la composition des aliments pour espèces carnivores devraient être amplifiés, afin de limiter la compétition avec l'alimentation humaine. Pour améliorer l'acceptation de protéines de substitution (ex. : végétales) par les animaux, la sélection génétique s'avère également une piste intéressante. Peu d'espèces sont en effet domestiquées, comme l'est le saumon, avec un cycle de vie entièrement maîtrisé et une reproduction ne dépendant plus de l'introduction d'individus sauvages. La sélection permettrait pourtant une meilleure adaptation aux conditions d'élevage : résistance accrue à certaines maladies, potentiel de croissance plus élevé, etc. En outre, les additifs alimentaires (probiotiques, enzymes, etc.) jouent un rôle essentiel pour améliorer l'efficacité et la durabilité des systèmes aquacoles, en renforçant le métabolisme des individus et la digestibilité des aliments.

Par ailleurs, les systèmes de production intégrés, qui combinent des espèces de différents niveaux trophiques, de régimes alimentaires variés, ou dont les déchets de l'une favorisent l'élevage de l'autre, sont, pour les auteurs, un outil puissant pour atteindre la durabilité de l'aquaculture. Enfin, la qualité de l'eau, sa réutilisation et l'aquaculture marine offshore sont d'autres leviers mobilisables, analysés également dans l'article.

Aurore Payen, Centre d'études et de prospective

Source : World Aquaculture Society

 

L'agriculture et l'aquaculture, premières causes de déforestation des mangroves dans le monde

Dans un article de juin 2020 publié dans Global Change Biology, le traitement d'images satellitaires par des méthodes d'apprentissage automatique (machine learning) montre que les activités humaines sont responsables, au niveau mondial, de 62 % de la déforestation des mangroves entre 2000 et 2016. 47 % de ces pertes sont dues à une conversion pour des productions agricoles ou aquacoles.

La Birmanie, l'Indonésie, la Malaisie, les Philippines, la Thaïlande et le Vietnam concourent à eux seuls à 80 % de la déforestation anthropique des mangroves. La conversion des surfaces pour l'agriculture et l'aquaculture y est la principale cause, bien que sa part de responsabilité diminue fortement au cours du temps. Les politiques nationales encourageant l'intensification de l'aquaculture expliqueraient en partie ce phénomène. Par ailleurs, dans les autres pays, l'ensemble des activités humaines sont, en moyenne, à l'origine de 33 % des pertes de mangroves.

Perte annuelle de surface (km²) de mangroves entre 2000 et 2016, selon la cause

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Source : Global Change Biology

Lecture : orange : conversion de surfaces ; vert foncé : érosion ; vert clair : événements climatiques extrêmes ; rouge : urbanisation et autres types d'occupation des terres.

Source : Global Change Biology

 

 

15:46 Publié dans Forêts Bois, Pêche et aquaculture | Lien permanent | Tags : machine learning, déforestation, mangroves |  Imprimer | | | | |  Facebook