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12/05/2021

Les espèces de poissons les plus étudiées ne sont pas celles les plus en danger

Un article de Scientific Reports analyse la littérature scientifique, entre 1964 et 2018, sur 460 espèces de poissons en danger critique d'extinction (liste rouge de l'Union internationale pour la conservation de la nature), 297 espèces pêchées (International Game Fish Association) et 35 espèces communes aux deux listes. Grâce aux InCites Journal Citation Reports (outil proposé par Clarivate Analytics), les auteurs ont identifié 31 980 publications dont les titres font référence à l'une de ces espèces. 87 % des articles concernent les espèces visées par la pêche, 3 % celles en danger critique et 10 % celles qui sont à la fois pêchées et en danger. Pour les auteurs, ce résultat montre une inadéquation entre les besoins de connaissances, nécessaires à la préservation des espèces, et l'effort de recherche réel. Ils proposent que le World Council of Fisheries Societies joue un rôle de coordinateur entre scientifiques et organisations de protection de la nature, pour inciter au financement des études sur les espèces menacées. Créer une revue scientifique spécifique pourrait également favoriser la documentation de ces espèces.

Nombre d'articles publiés en fonction des années et selon la catégorie étudiée (bleu : pêchée ; rouge : en danger critique ; vert : en danger et visée par la pêche)

ressources pêche.jpg

Source : Scientific Reports

Source : Scientific Reports

10/02/2021

Le bien-être des poissons d'élevage : études de cas en Chine et aux Philippines

La Fish Welfare Initiative est une start-up caritative, créée en 2019, œuvrant à une meilleure prise en compte du bien-être des poissons dans les élevages aquacoles, au moyen de collaborations avec les entreprises, les organisations non gouvernementales et les gouvernements. Après avoir publié fin 2020 un rapport proposant des actions pour y parvenir, les résultats de deux enquêtes en Chine et aux Philippines viennent de paraître.

La qualité de l'eau et de l'alimentation, ainsi que les conditions de transport et d'abattage, sont les principaux paramètres impactant le bien-être des poissons d'élevage. Les améliorer participe à l'approche « Une seule santé » puisque de meilleures conditions d'élevage permettent i) une diminution de la présence de polluants dans les chairs des poissons, ii) une baisse des maladies et donc aussi du recours aux antibiotiques et antimicrobiens (lutte contre le développement de résistances), iii) une réduction de la mortalité (limitation des pertes économiques) et iv) une limitation du stress lors du transport et de l'abattage, et donc une meilleure qualité du produit final.

Aux Philippines (illustration ci-dessous), les éleveurs accèdent difficilement aux formations sur l'amélioration des conditions d'élevage des poissons, alors qu'ils manifestent de l’intérêt pour celles-ci. Faire appel à la médecine vétérinaire n'est pas non plus une pratique courante. Quant à la qualité de l'eau, elle est peu surveillée. Les poissons sont généralement tués par asphyxie ou dans un bain de glace. Le recours à l'étourdissement par percussion ou électrique est inexistant, les éleveurs s'interrogeant quant à son coût et sa facilité d'utilisation. Enfin, les petits élevages qui approvisionnent les marchés locaux n'ont pas recours à la certification (durabilité) de leurs produits, du fait de son coût et du manque d'intérêt des consommateurs ciblés.

Élevage de tilapias dans des réservoirs en ciment, aux Philippinefish welfare .jpg

Source : Fish Welfare Initiative

En Chine, la modernisation des pratiques et la formation des éleveurs, pour une meilleure prise en compte du bien-être des poissons, sont encouragées par plusieurs facteurs : l'augmentation de la demande en produits aquacoles durables, tirée en interne par les classes moyennes et, à l'exportation, par les marchés des pays développés ; l'occurrence d'incidents environnementaux ou touchant à la sécurité sanitaire des aliments ; etc.

Aurore Payen, Centre d'études et de prospective

Source : Fish Welfare Initiative, Fish Welfare Initiative

15/10/2019

Ressources halieutiques et changement climatique : rapport du GIEC

Le Groupement d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) a publié, en septembre 2019, un rapport sur les impacts environnementaux, économiques et sociaux du changement climatique sur les océans et la cryosphère. Chaque grand type d'écosystème (régions polaires, îles de faible altitude, etc.) est étudié, selon divers scénarios considérant plusieurs niveaux d'émissions de gaz à effet de serre, d'utilisation des sols, de mobilisation internationale, etc., menant à différentes hausses de températures.

Les écosystèmes marins sont des pourvoyeurs essentiels de ressources alimentaires et d'emplois pour de nombreuses populations. Le réchauffement climatique, en favorisant notamment la hausse des températures de l'eau et son acidification, aura certainement un fort impact sur les ressources aquatiques. Le potentiel maximum de captures de poissons s'est dégradé ces dernières années et cette tendance devrait se poursuivre : d'après le GIEC, il chuterait de 20 à 24 % d'ici 2100 par rapport à la période 1986-2005. Les volumes pêchés devraient donc diminuer au cours du temps, d'autant que la surexploitation de certains stocks s'ajoutera aux effets climatiques. Ainsi, la sécurité alimentaire et les modes de vie des populations dépendant le plus des ressources marines (en particulier en zones tropicales) seraient menacés et des conflits entre pêcheries, autorités et communautés locales pourraient surgir pour l'accès à la ressource.

L'élévation des températures de l'eau pousserait les espèces à migrer, toutefois sans survie assurée : si des pertes de biomasse dans les eaux tropicales sont à craindre, il n'est pas certain que les eaux polaires accueillent de nouveaux stocks de poissons. Cette migration soulèverait également des défis en matière de gouvernance : les mesures de protection en place perdraient de leur efficacité et de nouveaux problèmes de gestion et de partage de la ressource émergeraient. Par ailleurs, le changement climatique favoriserait la bio-accumulation de polluants organiques et de mercure dans les plantes et animaux marins. La santé des populations les plus dépendantes de ces ressources pour leur alimentation serait alors impactée.

Pour faire face à ces enjeux, le GIEC encourage la collecte et le partage de données pour mieux coordonner la gestion des stocks et la protection des écosystèmes marins. Les auteurs soulignent toutefois que la perte de certaines espèces de haute valeur économique semble difficilement évitable si la hausse des températures se poursuit.

Impacts directs des principaux facteurs associés au changement climatique sur les écosystèmes marins de l'océan austral

GIEC.jpg

Source : GIEC

Lecture : les facteurs marqués d'une étoile sont documentés à partir des résultats des scénarios d'émissions de gaz à effet de serre élevées.

Aurore Payen, Centre d'études et de prospective

Source : GIEC

11:41 Publié dans Climat, Pêche et aquaculture | Lien permanent | Tags : giec, océans, pêche, poissons, ressources halieutiques |  Imprimer | | | | |  Facebook

09/10/2019

Pêche et bien-traitance animale : des expériences scientifiques d'étourdissement des poissons

En plus de poser la question de la bien-traitance animale, la mise à mort longue et douloureuse des poissons détériore la qualité de leur chair. Pour y remédier, les auteurs d'un article de septembre 2019, publié dans Plos One, ont comparé deux protocoles d'étourdissement : un lot de maquereaux a subi une première électrocution de 0,5 s, puis une deuxième de 4,5 s avant d'être immergés dans un bain de glace ; un autre lot a été soumis à un unique choc électrique de 5 s avant immersion. Pendant six minutes, la réponse musculaire des individus a été observée, toutes les minutes, pour tester l'efficacité de ces procédés.

Les protocoles testés provoquent tous deux une perte de conscience, effective à partir d'une électrocution de 0,5 s et sans interruption jusqu'à la mort des individus. Aucune trace de dommage interne (de la moelle épinière par exemple) et donc de détérioration de la qualité des poissons n'a été constatée suite à l'électrocution. Néanmoins, obtenir un procédé commercial d'étourdissement nécessiterait des travaux complémentaires pour généraliser le dispositif à l'ensemble des espèces capturées, en particulier celles de grande taille ne pouvant être facilement manipulées.

Schéma du dispositif d'électrocution

Poissons.jpg

Source : Plos One

Source : Plos One

08/07/2019

Effets conjoints du changement climatique et du taux de pêche sur la biomasse des océans

Dans un article de juin 2019, 35 chercheurs ont publié les résultats de leur modélisation des impacts du changement climatique et de la pêche sur la biomasse des océans. Quatre scénarios d'émissions de gaz à effet de serre (GES) ont été testés sur la période 1970-2100, avec deux déclinaisons : une première sans prise en compte de l'impact de la pêche, une seconde intégrant aux projections le taux de pêche actuel.

Tous les scénarios d'émissions testés entraîneraient une perte de biomasse dans les océans. Dans le cas d'un prolongement des tendances actuelles, aboutissant à l'augmentation des GES dans l'atmosphère, le déclin moyen des stocks de poissons atteindrait 17,2 % sur la période 2090-2099 par rapport à 1990-1999, sans prise en compte des impacts de la pêche. Dans le scénario de forte atténuation des émissions, le déclin moyen se limiterait à 4,8 %. Les effets seraient d'autant plus importants pour les espèces que leur niveau trophique est élevé.

Derrière ces valeurs moyennes se cachent des disparités régionales. La biomasse croîtrait fortement aux pôles, ce qui pourrait engendrer des conflits pour son exploitation. À l'inverse, elle diminuerait dans les zones tropicales à tempérées, alors que ces régions, de grande importance pour la sécurité alimentaire, sont déjà menacées par les activités humaines. L'impact de la pêche, si elle est maintenue aux taux de capture actuels, serait limité par rapport à celui du changement climatique. La hausse des températures favoriserait la prédation, alors que la pêche réduirait le nombre de gros poissons et de prédateurs : cela aboutirait à une biomasse totale légèrement plus élevée dans le cas des scénarios avec pêche, de l'ordre de 2 à 3 % (voir figure).

Les chercheurs notent que les scénarios sont relativement similaires jusqu'en 2030, horizon fixé par les Nations unies pour l'atteinte par les pays signataires des Objectifs de développement durable. Les scénarios divergent ensuite, à partir du milieu du siècle, d'où l'importance de mettre en œuvre des mesures d'atténuation.

Différences entre les scénarios excluant (en bleu) et incluant (en rouge) la pêche dans la projection des évolutions de la biomasse des océans à horizon 2100

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Source : Proceedings of the National Academy of Sciences

Aurore Payen, Centre d'études et de prospective

Source : Proceedings of the National Academy of Sciences

16:47 Publié dans Climat, Environnement, Production et marchés | Lien permanent | Tags : pêche, biomasse, poissons |  Imprimer | | | | |  Facebook