11/03/2021
Variabilité océanique et stratégies de diversification des zones de pêche et des espèces ciblées au Mexique
Un article d'Environmental Science & Policy analyse les stratégies de diversification des lieux de capture et de choix des espèces-cibles adoptées par les pêcheurs artisanaux mexicains de l'État de Basse-Californie du Sud, en réponse aux variabilités océaniques. Les auteurs utilisent les données de la Commission nationale des pêches (CONAPESCA) pour identifier les espèces capturées et leurs sites de débarquement, entre 2008 et 2016. Les sites sont regroupés en fonction de leur distance euclidienne selon l'algorithme BDSCAN, afin de former des régions de débarquement. Les espèces qui y sont débarquées leur sont associées afin de former au total 208 appariements région-espèce. Lorsqu'un pêcheur exerce son activité annuelle sur deux couples, ceux-ci sont reliés par un « lien » représentant sa stratégie de pêche. En procédant de cette façon pour l'ensemble des pêcheurs, on obtient un réseau représentant les choix effectués par la profession, au cours d'une année, en réponse à un contexte climatique et océanique. La comparaison de ces réseaux, sur un pas de temps annuel, permet d'observer les relations entre contextes et stratégies de diversification.
Les auteurs montrent que les pêcheurs préfèrent diversifier leurs espèces cibles plutôt que leurs zones de capture. Lorsqu'ils ont lieu, les changements spatiaux sont très corrélés à la température de l'eau, liée aux phénomènes El Niño et La Niña. Les acteurs détenant des droits de pêche pour les espèces à plus forte valeur commerciale (ex. carangues, vivaneaux, balistes) ont une tendance accrue à diversifier leurs lieux d'activité. La réglementation a également un impact sur eux : certaines licences autorisent en effet la pêche d'un plus grand nombre d'espèces dans des zones plus étendues, alors que d'autres restreignent les activités d'un pêcheur à une zone donnée.
Bien que les restrictions réglementaires permettent, selon les auteurs, une meilleure gestion des ressources, la diversification des zones de capture favorise la résilience des pêcheurs artisanaux en leur permettant de s'adapter aux variations océaniques. Ils soulignent donc l'importance de cet aspect lors de la conception des politiques publiques dédiées.
Évolution du choix des stratégies de diversification au cours du temps (à gauche), et mise en perspective avec l'ampleur du phénomène El Niño (à droite)
Source : Environmental Science & Policy
Lecture : en bleu clair, nombre de liens « internes » (i.e. entre couples où la région est identique et les espèces différentes) ; en bleu foncé, nombre de liens « externes » (i.e. entre couples où les régions sont différentes mais l'espèce pêchée identique) ; en noir, la différence entre le nombre de liens externes et internes, divisée par le nombre total de liens ; en rouge, les moyennes annuelles de l'Oceanic Niño Index (ONI), mesurant les anomalies de températures de surface dans le Pacifique équatorial et permettant de détecter et jauger les épisodes El Niño.
Aurore Payen, Centre d'études et de prospective
Source : Environmental Science & Policy
11:23 Publié dans 4. Politiques publiques, Pêche et aquaculture, Production et marchés | Lien permanent | Tags : mexique, zones de pêche, el nino, géographie | Imprimer | |
11/10/2019
Statistiques économiques de la flotte de pêche européenne
Le Comité scientifique, technique et économique pour la pêche (STECF) de l'Union européenne a publié, en août 2019, son rapport annuel. Les données sont détaillées par type de navire, par zone de pêche et par pays membre, et couvrent la période 2008-2017.
Le nombre de navires européens a diminué de 15 % entre 2008 et 2017, tandis que leur puissance (kW) a décru de 14,5 % et leur tonnage de 18 % sur la même période (hors Croatie). 21,3 % des navires ont été inactifs en 2017. 75 % de ceux en activité sont classés en pêche artisanale (bateaux de moins de 12 m utilisant des engins dormants, par exemple des nasses), 24 % sont de grande taille (plus de 12 m, utilisant des engins dormants ou traînants, majoritairement dans les eaux européennes) et moins d'un pourcent appartiennent à la flotte hauturière (plus de 24 m). Si l'Espagne présente la flotte ayant le plus grand tonnage (22 % du total), celle de la France est la plus puissante (16,3 %) et celle de la Grèce la plus nombreuse (18 %).
Évolution du tonnage de la flotte européenne, en fonction de l'activité de pêche (artisanale en bleu, de grande taille en vert, hauturière en orange et inactive en gris), entre 2008 et 2017
Source : Publications Office of the European Union
Le nombre de jours passés en mer, les sorties de pêche et, par suite, l'énergie consommée suivent une tendance à la baisse. Pourtant les captures en valeur (7,6 milliards d'€) et en poids (5,3 millions de tonnes) ont augmenté respectivement de 6 et 14 % par rapport à 2008. Les débarquements en poids et en valeur par jour de pêche suivent ainsi une tendance croissante depuis 2008 (+ 33 % et + 25 % en moyenne). Dans les deux cas, l'Espagne est le plus grand producteur. Le hareng de l'Atlantique est l'espèce la plus pêchée en tonnage, et le maquereau commun en valeur.
Enfin, après neuf ans de croissance continue, les performances économiques de la flotte européenne affichent une baisse de 3 % par rapport à 2016. Quatre pays membres (Allemagne, Finlande, Malte, Lituanie) ont subi des pertes nettes en 2017, et la pêche artisanale est la plus touchée par ce recul. Les résultats économiques sont notamment dépendants des quotas attribués et du coût de l'énergie. Si l'emploi a également diminué de 13 % entre 2008 et 2017, les salaires en équivalent temps plein ont eux augmenté de 38 %. À noter que la France présente les salaires en équivalent temps plein les plus élevés pour les pêches artisanale et hauturière.
Évolution des indicateurs de performance économique par rapport aux niveaux de 2008 : revenu (bleu), valeur ajoutée brute (vert), valeur ajoutée nette (rouge), bénéfice brut (orange)
Source : Publications Office of the European Union
Aurore Payen, Centre d'études et de prospective
11:33 Publié dans Pêche et aquaculture | Lien permanent | Tags : flotte, navires, zones de pêche | Imprimer | |