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07/03/2016

Les effets du changement climatique sur l’alimentation et la santé : premiers résultats d’une étude britannique

Une étude menée par l’université d’Oxford et publiée le 3 mars dans la revue médicale The Lancet propose une modélisation des effets du changement climatique sur l’alimentation et la santé humaine. Si de nombreuses recherches se sont intéressées aux conséquences climatiques sur la production agricole et la sécurité alimentaire quantitative, peu d’entre elles ont traité de l’évaluation de l’impact de ces modifications agricoles sur la santé (facteurs de risque liés à la consommation de fruits et légumes, de viande rouge et au poids corporel).

A l’horizon 2050, le changement climatique pourrait conduire, en moyenne, à une baisse de la disponibilité alimentaire de 3,2 % par personne, avec une réduction de 4 % de la consommation de fruits et légumes et de 0,7 % de celle de viande rouge. Ces modifications seraient à l’origine de 529 000 décès dans le monde, en particulier du fait de carences en vitamines et minéraux. Cette étude, dont les résultats chiffrés sur les risques sont sujets à discussion, apporte une contribution intéressante à la réflexion sur l’impact des dérèglements climatiques sur la santé et sur l’importance de la diversification alimentaire dans la lutte contre la malnutrition.

Source : The Lancet

09:42 Publié dans Alimentation et consommation, Climat | Lien permanent | Tags : nutrition, changement climatique, the lancet |  Imprimer | | | | |  Facebook

15/02/2016

Intégrer la filière forêt-bois dans les bilans carbone européens pourrait amplifier sa contribution à l’atténuation du changement climatique

À l’occasion de la COP 21, l'European Forest Institute a fait le bilan, dans un document publié en décembre 2015, de la contribution de la filière européenne forêt-bois à la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES). Partant d’une analyse systémique, l’étude explore différentes pistes qui s’offrent aujourd’hui à l’Union européenne pour intégrer cette filière dans la comptabilisation carbone et, ainsi, faire levier à la fois sur le puits et le stockage de carbone forestier.

Diagramme simplifié des stocks et des flux de carbone de la filière forêt-bois avec identification des deux leviers d’atténuation du changement climatique

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Source : European Forest Institute

Les protocoles de Kyoto (2008-2012) et Kyoto 2 (2013-2020) ne permettent qu’une prise en compte limitée de la séquestration du carbone par le secteur forêt-bois. Le poids de la déforestation dans les pays en développement, la réversibilité du stockage dans les sols forestiers, les variations de l’intensité des puits dans le temps et en fonction des peuplements, le désaccord sur les méthodes de comptabilisation, sont autant de motifs qui ont incité à une certaine prudence.

La situation semble aujourd’hui plus favorable à une prise en compte intégrale de l’impact de la filière forêt-bois sur les émissions de GES. L’UE en a d’ores et déjà acté le principe pour l’élaboration de son prochain cadre en faveur du climat à l’horizon 2030, mais les modalités doivent encore en être précisées pour amplifier le rôle positif joué à la fois par la forêt (gestion durable) et par le bois (différents usages : matériaux, énergie, chimie).

L’étude montre qu’actuellement la filière européenne forêt-bois compense 13 % du total des émissions de GES, en combinant les effets de séquestration et de substitution. Cette compensation pourrait aller jusqu’à 22 % à l’horizon 2030 en intégrant de façon plus appropriée le secteur dans les différentes politiques européennes (environnement, énergie, air, etc.) et en lui permettant d’accéder directement ou indirectement au marché du carbone.

Au-delà du choix en matière de comptabilisation du bilan carbone des forêts, les auteurs identifient des points d’attention dans l’élaboration des politiques sectorielles de l’UE, notamment l’hétérogénéité de la forêt et de sa propriété, mais également la prise en compte des autres objectifs stratégiques européens, à savoir le développement de la bioéconomie et la préservation de la biodiversité.

Muriel Mahé, Centre d’études et de prospective

Source : European Forest Institute

11/02/2016

La question climatique. Genèse et dépolitisation d’un problème public. Jean-Baptiste Comby

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On explique très souvent l’émergence puis l’affirmation de la "question climatique" par l’accumulation d’aléas, la force des événements, la multiplication des dommages, présentées comme des preuves matérielles, objectives et évidentes d’un nouvel état de nature : la lutte contre le réchauffement découlerait logiquement de la prise de conscience de difficultés croissantes. C’est oublier que d’autres éléments plus subjectifs, culturels et idéologiques ont contribué à la lente construction de ce "problème public". L’objectif de cet ouvrage, centré sur la France, est de décrire ces éléments.

J.-B. Comby insiste sur le rôle des médias et sur le conformisme journalistique : penchant pour l’anecdotique et le sensationnel, faux objectivisme, réduction au seul thème des économies d’énergie. Il décrit aussi le rôle des scientifiques, le mouvement d’internationalisation de la recherche, l’instrumentalisation politique de certaines connaissances et les conflits internes au champ académique. Il analyse également le travail des institutions politiques, de leurs administrations, de leurs experts attitrés, qui façonnent une représentation de la réalité conforme à leurs intérêts et à leurs modes d’intervention. Un autre chapitre traite du positionnement et des discours des associations, des ONG, des réseaux techniques, des personnalités charismatiques et autres "professionnels de la sensibilisation" qui, par leurs actions militantes, ont cristallisé des peurs, promu des fatalités, érigé des causes. Enfin, les groupes sociaux dominants, à travers leurs prises de parole et leurs styles de vie, ont diffusé leur "bonne volonté écologique" et leur rhétorique de la protection de l’environnement à l’ensemble de la société.

Au-delà de sa recension des fabricants et des modalités de fabrication du défi climatique, Comby affirme que, dans le cas français, toutes ces visions et tous ces jeux d’acteurs ont, paradoxalement, eu tendance à dépolitiser le débat, en évitant de nommer les vrais responsables des dérèglements et en insistant, au contraire, sur la culpabilité privée des ménages à travers leurs consommations. Pour lui, au lieu de questionner nos grands choix économiques, nos priorités de politiques publiques et nos modèles de développement, les détenteurs du problème climatique préfèrent stigmatiser certains comportements individuels, promouvoir des normes éco-citoyennes, encourager de nouvelles attitudes jugées plus vertueuses, bref utiliser les registres psychologisants et moralisateurs de la police des familles.

Bruno Hérault, Centre d’études et de prospective

Lien : Éditions Raisons d'agir

09:14 Publié dans Climat | Lien permanent | Tags : comby, climat, problème public |  Imprimer | | | | |  Facebook

09/02/2016

Nouveau rapport de la FAO sur la sécurité alimentaire dans le contexte du changement climatique

Publié en janvier, ce rapport fait le point des connaissances sur les risques alimentaires liés au changement climatique, que ce soit en raison des perturbations apportées sur l’agriculture, la forêt ou les ressources halieutiques, ou du fait des pertes de ressources génétiques. Il compile différentes études publiées récemment sur ces questions, les mettant en regard et les croisant de façon à produire une analyse multifactorielle (écosystèmes, économie, commerce mondial, ravageurs, etc.) des conséquences du changement climatique sur l’équilibre alimentaire mondial.

Dans une seconde partie, il inventorie les pistes visant à accroître la résilience des ménages face à un risque alimentaire accru, prônant à la fois des adaptations des méthodes de production et une protection sociale accrue des plus faibles. Il met en avant la nécessité d’intégrer les populations concernées dans les processus d’adaptation de façon à accélérer la diffusion des techniques et à mettre en place des chaînes d’alerte permettant des réactions rapides face aux accidents climatiques et sanitaires.

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Source : FAO

08:59 Publié dans Climat, Sécurité alimentaire | Lien permanent | Tags : fao, sécurité alimentaire, changement climatique |  Imprimer | | | | |  Facebook

11/01/2016

Impacts d’événements climatiques extrêmes sur la production de céréales

Un récent article de Nature explore les impacts d’événements extrêmes sur la production globale en céréales, avec des estimations portant sur les variations en termes de volumes (millions de tonnes), de rendements et de surfaces cultivées. Pour ce faire, des chercheurs britanniques et canadiens des universités McGill, du Sussex et de Colombie britannique ont mobilisé les bases de données FAOStat et Emergency Events Database (EM-DAT). De cette dernière, ils ont extrait une liste d’environ 2 800 événements extrêmes hydro-météorologiques pour la période étudiée 1964-2007. Les auteurs indiquent quelques limites associées à la base de données EM-DAT : les événements extrêmes n’y sont répertoriés que s’ils touchent la population humaine et les événements récents sont mieux enregistrés.

Les traitements statistiques ont permis de conclure que sécheresse et vagues de chaleur conduisent à une réduction de la production mondiale de céréales d’environ 9-10 % sur la période étudiée. Cependant les résultats n’étaient pas significatifs pour les inondations et les froids extrêmes. Pour expliquer ce résultat, les auteurs font l’hypothèse que ces événements sont survenus à des périodes qui ne correspondent pas à des moments critiques de la croissance des plantes. Une seconde explication résiderait dans le choix de l’échelle nationale : ce niveau d’agrégation serait trop important pour des événements dont les impacts sont de nature locale.

Les rendements déclinent d’environ 5,1 % dans le cas d’une sécheresse et d’environ 7,6 % lors des vagues de chaleur. Si les surfaces cultivées ne semblent pas significativement affectées dans ce dernier cas, elles diminuent d’environ 4,1 % lors de sécheresses. Les auteurs font ici l’hypothèse de la durée de l’événement pour expliquer une telle différence. En effet, un tiers des épisodes de sécheresse répertoriés durent plusieurs années, contrairement aux vagues de chaleur qui sont des événements plus ponctuels. Au niveau de la répartition géographique, les impacts des événements extrêmes sont plus importants pour les systèmes agricoles en Amérique du Nord, Europe et Australie qu’en Asie et en Afrique. Enfin, les épisodes de sécheresse les plus récents (1985-2007) auraient provoqué des dommages plus importants sur la production céréalière globale, en moyenne de 13,7 % contre 6,7 % sur la période précédente.

Élise Delgoulet, Centre d’études et de prospective

Source : Nature

14:01 Publié dans Climat, Production et marchés | Lien permanent | Tags : climat, céréales |  Imprimer | | | | |  Facebook

La culture à grande échelle de micro-algues pour l’alimentation animale suffirait à limiter la hausse de la température planétaire à environ 2,1 degrés à horizon 2100

D’après une étude de l’International Institute for Applied Systems Analysis (IIASA) parue en décembre 2015 dans la revue Carbon Balance and Management, la culture de micro-algues, à grande échelle, pourrait à terme contribuer à la réduction des émissions de CO2. Cette étude est l’une des premières à examiner le potentiel d’utilisation des algues dans l’alimentation animale, en lien avec l’utilisation des terres, la sécurité alimentaire et les émissions de gaz à effet de serre.

De manière générale, les auteurs ont considéré que les systèmes de production de micro-algues seraient implantés sur des terres dégradées ou à faible potentiel agricole, et que leur usage comme alimentation du bétail permettrait de libérer des surfaces consacrées au pâturage et aux cultures fourragères. De plus, le contenu nutritionnel des aliments à base d’algues est comparable à celui du tourteau de soja et de la farine de poisson, et devrait rivaliser avec ces derniers en termes de coûts.

Les chercheurs ont utilisé le modèle feliX et plusieurs scénarios : un scénario tendanciel (scénario BAU) et trois scénarios d’utilisation des micro-algues en alimentation animale (Alg-Feed), pour la production d’électricité (BioEnergy) ou pour la production de biodiesel (BioFuel). Par hypothèse, dans le scénario Alg-Feed, 40 % de la demande en alimentation animale sont couverts par les micro-algues et les surfaces alors « épargnées » (estimées à 1,8 milliard d’ha) sont converties en plantations forestières. Le graphique ci-dessous montre les différentes projections sur les surfaces, selon les scénarios :

Projection des superficies en prairies et cultures fourragères, terres arables et cultures permanentes et plantations forestières

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Source : IIASA

À terme, par la diminution des émissions liées principalement à la production d’alimentation animale, le scénario Alg-Feed permettrait une réduction de 0,7°C de la hausse de la température moyenne mondiale par rapport au scénario tendanciel. Les auteurs pointent néanmoins un certain nombre de défis techniques et organisationnels à relever pour développer les systèmes de production de micro-algues : robustesse des systèmes face à des souches mutantes d’algues et d’autres agents pathogènes par exemple. Malgré cela, ils pensent que la culture de micro-algues à grande échelle pourrait être l’une des solutions les plus prometteuses pour résoudre les problèmes liés à la sécurité alimentaire et au changement climatique, et mériterait d’être plus développée qu’auparavant.

José Ramanantsoa, Centre d’études et de prospective

Sources : IIASA, Carbon Balance and Management

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14/12/2015

Carbone organique dans les sols : une évaluation du potentiel d'atténuation à l’échelle européenne

Un travail collaboratif entre des chercheurs de plusieurs universités a tenté d’estimer le potentiel de séquestration de carbone dans les sols agricoles européens (cultures seulement). D’après leur article, publié dans le journal Global Environmental Change, entre 9 et 38 MtCO2 seraient stockés chaque année, jusqu’en 2050, avec un prix du carbone compris entre 10 et 100 $US par tCO2 (voir la courbe de coûts d’atténuation ci-dessous). Cela représenterait un potentiel maximum de 7 % des émissions agricoles de l’Union européenne. Quant aux émissions liées aux sols agricoles, elles diminueraient de 40 % par rapport à 2010. Dans leur conclusion, les auteurs soulèvent un dernier point : les fuites de carbone hors UE seraient de 20 MtCO2, voire limitées à 9 % du potentiel de 38 Mt, à condition de chercher à les prévenir. Au final, ils concluent sur une contribution peu significative des mesures d’atténuation étudiées.

Courbe de coûts d’atténuation pour le carbone organique des sols en vert (en bleu et en violet : co-bénéfices pour les secteurs des cultures et de l’élevage ; en rouge : les fuites carbone)

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Source : Global Environmental Change

Ce travail repose sur la mobilisation de deux modèles : EPIC, qui simule les systèmes agricoles afin d’en comprendre les impacts sur l’environnement (ici émissions et séquestration du carbone dans les sols), et GLOBIOM-UE, un modèle économique d’équilibre partiel avec une représentation détaillée des 28 États membres, qui permet de regarder les effets sur les usages des terres, le commerce ou les émissions à une échelle globale. D’après les auteurs, le lien entre ces deux modèles fait l’originalité de cette publication, tant dans la méthodologie mobilisée que dans l’intégration des dimensions économiques et d’usage des sols, en particulier pour évaluer les fuites de carbone.

Pour arriver au résultat présenté plus haut, les auteurs ont construit plusieurs scénarios, en plus d’une référence (sans prix de la tCO2). D’une part, ils ont fait varier le niveau du prix de la tonne entre 10 et 100 $US. D’autre part, afin de simuler les effets d’une politique « anti-fuite carbone », les échanges de commodités européennes ont été fixés au niveau de la référence, en ajoutant dans certains cas la demande européenne en produits agricoles. Ils ont pris comme levier le labour, selon trois modalités : conventionnel, réduit ou minimal. Les auteurs soulignent à ce titre le débat qui a lieu autour de cette pratique et ses effets sur la séquestration. D’autres limites, citées par eux, résident dans le traitement du seul gaz à effet de serre CO2, ou dans la représentation des dynamiques du carbone organique des sols non étendues aux forêts et aux prairies, par exemple.

Élise Delgoulet, Centre d’études et de prospective

Source : Global Environmental Change

11:16 Publié dans 2. Evaluation, Climat | Lien permanent | Tags : sols, atténuation, carbone organique |  Imprimer | | | | |  Facebook

13/10/2015

Les liens entre changements environnementaux et transmission des maladies à vecteur

Publié récemment, l’ouvrage Impact of a decade (2004-2015) of research on vector-borne diseases présente les résultats de travaux conduits par 80 équipes scientifiques, issues de 23 pays européens et africains, sur les facteurs en lien avec les changements environnementaux et pouvant influer sur les maladies à contaminations vectorielles. Ces maladies sont transmises par des vecteurs (arthropodes hématophages) qui inoculent l’agent contaminant (virus, bactérie ou parasite) d’un individu (homme ou animal) à l’autre. Les facteurs étudiés sont d’ordres environnemental, climatique, social ou économique. Les données présentées sont issues de deux réseaux de recherche européens, animés par le Cirad : les réseaux EDEN (axés sur la santé humaine et animale) et EDENext (axé sur la biologie des vecteurs et réservoirs).

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Parmi les maladies identifiées dans cet ouvrage figurent les fièvres hémorragiques à hantavirus, pour lesquelles les rongeurs sylvicoles, hôtes intermédiaires asymptomatiques, font office de réservoirs. Le rôle clé des rongeurs dans de nombreux écosystèmes est souligné, notamment en cas d’hivers chauds.

Les maladies transmises par les tiques (par ex. maladie de Lyme) font l’objet d’un développement car il est avéré que le réchauffement climatique a un impact significatif sur la prolifération de ces vecteurs à travers le monde. Certaines de ces maladies sont préoccupantes pour le cheptel bovin, notamment la borreliose ou fièvre Q, qui provoque des baisses de production et des avortements.

Sont également étudiées les maladies transmises par les moustiques de type culicoïdes, les leishmanioses et la fièvre de West Nile, qui atteint les équidés et les humains. Ce document cite par ailleurs les travaux du projet VBORNET, notamment sur les pathologies liées au moustique aèdes albopictus, vecteur du chikungunya et de la dengue.

En conclusion de ce recueil, il est indiqué que ces réseaux sont un bon exemple d’intégration des travaux de recherche pour l’évaluation des risques et pour la mise en place de modèles de prédiction, ce qui est important pour la gestion future des maladies vectorielles.

Madeleine Lesage, Centre d’études et de prospective

Source : Cirad

 

11/09/2015

Biocarburants et changement d’usage des sols : la notion de « greenhouse gas payback time »

Publié avant l’été dans Nature Climate Change, un article, corédigé entre autres par des chercheurs de Radboud University aux Pays-Bas et de l'IIASA, s’intéresse à l’importance de la localisation géographique des productions de biocarburants. L’idée est d’étudier en particulier l’impact de changements d’usage des sols sur les émissions, en prenant en compte la dimension temporelle. Ainsi, les auteurs introduisent le concept de « greenhouse gas payback time » (GPBT) : il s’agit du temps nécessaire aux cultures destinées à la production de biocarburants pour compenser les gaz à effet de serre émis lors du changement d’usage des sols.

Ce travail de modélisation permet aux chercheurs de conclure que le GPBT varie en fonction du type de culture (5 étudiées ici : maïs, colza, soja, canne à sucre et blé d’hiver), des pratiques culturales (avec ou sans intrants) et de l’usage actuel de la surface convertie. La localisation a été identifiée comme le facteur le plus important (expliquant 90 % des variations). Pour l’ensemble de l’exercice, le GPBT varie entre 1 et 162 années (médiane à 19 années), avec la plus longue durée dans les tropiques. Les auteurs déterminent également un GPBT allant de 20 ans pour le colza à 60 ans pour la canne à sucre (en moyenne) en l’absence d’intrants. Cette valeur diminue avec l’application d’intrants pour toutes les cultures, comme l’illustrent par exemple les cartes ci-dessous sur le maïs. Les céréales (maïs et blé d’hiver) ont alors le GPBT le plus faible (moins de 10 années).

Variation du « Greenhouse gas payback time » pour le maïs destiné à la production d’éthanol, en fonction des intrants (irrigation et fertilisants) : avec (en haut) et sans (en bas)

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Source : IIASA

À partir de ces travaux, les auteurs appellent donc à intégrer la dimension spatiale dans les analyses de cycle de vie. Des travaux complémentaires sur le changement d’usage des sols indirects sont actuellement en cours à l'IIASA, pour lesquels une publication est attendue prochainement.

Elise Delgoulet, Centre d’études et de prospective

Sources : IIASA, Nature Climate Change

 

12:05 Publié dans Biomasse/Biocarburants, Climat, Enseignement et recherche | Lien permanent | Tags : biocarburant, usage des sols, gpbt |  Imprimer | | | | |  Facebook

09/09/2015

Émissions de méthane : des pistes d’atténuation dans le monde animal et végétal

Cet été, deux publications scientifiques sur le méthane ont attiré l’attention. La première concerne une variété de riz génétiquement modifiée avec de l’ADN d’orge. Les travaux ont été conduits en laboratoire par des chercheurs en Chine, en Suède et aux États-Unis. Ces plants ont la caractéristique d’être moins émetteurs de méthane tout en ayant une productivité plus importante de grains. Au-delà des questions d’acceptation par le consommateur, cette découverte a aussi conduit à des critiques quant aux impacts possibles sur les sols et leurs écosystèmes. En effet, la plus grande production de grains s’accompagne d’une diminution des apports en matière organique (carbone ou nutriments) libérée par la plante dans les sols. Or ce déficit pourrait nécessiter une application supplémentaire de fertilisants azotés, résultant en des émissions de protoxyde d’azote.

La seconde découverte concerne le secteur animal, avec un additif alimentaire pour diminuer le méthane émis par les vaches laitières. Cet inhibiteur, le 3-nitrooxypropanol, permet une réduction des émissions entériques de l’ordre de 30 % par rapport au contrôle, sans affecter la production ou la composition du lait. Cette diminution a lieu dans les deux premières semaines d’utilisation et persistent même au-delà du traitement. Les résultats montrent également un gain de poids des animaux sous traitement. L’expérience a été réalisée sur 48 vaches en stabulation, avec 3 niveaux de prise de l’inhibiteur (entre 40 et 80 mg/kg de matière sèche destinée à l'alimentation), pendant 12 semaines. Une durée que les auteurs souhaiteraient allonger afin de voir si des effets non désirables sont susceptibles d’apparaître sur le long terme.

Sources : PNAS, Nature, Nature

11:17 Publié dans 5. Fait porteur d'avenir, Agronomie, Climat, Enseignement et recherche | Lien permanent | Tags : méthane, atténuation |  Imprimer | | | | |  Facebook

24/06/2015

Changement climatique : vers une diminution du nombre de jours propices à la croissance des plantes

Un article publié dans PLOS Biology montre, à l’échelle mondiale et en 2100, une baisse du nombre de jours propices à la croissance des plantes (environ – 11 %), et ce malgré une augmentation de nombre de jours au-dessus de 0 °C (+7 %). Cette conclusion correspond à une analyse faite dans le cadre du nouveau scénario RCP 8,5 (le plus pessimiste) du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Ces résultats questionnent ainsi, dans les latitudes les plus hautes, les bénéfices attendus associés à l’augmentation de température.

Trois variables sont au cœur de cette étude : la température, la réserve en eau des sols et les rayonnements solaires. Utilisant comme base des données satellitaires, les auteurs (universités d'Hawaii à Manoa et du Montana) ont établi des seuils critiques pour la production de biomasse (pour la majeure partie des plantes), et ce pour chacun de ces trois paramètres et leurs interactions. Ils ont alors appliqué trois scénarios du GIEC (RCP 8,5, RCP 2,6 et RCP 4,5) afin d’estimer l’évolution du nombre de jours propices à la croissance végétale à l’horizon 2100.

Au chapitre des conclusions, les chercheurs soulignent le rôle limitant du rayonnement solaire dans les hautes latitudes, malgré l’augmentation des températures. Parallèlement, dans les zones tropicales, cette hausse, accompagnée d’épisodes de sécheresse, pourrait être telle que les nouvelles conditions climatiques seraient au-delà des seuils de tolérance des plantes (jusqu’à moins 200 jours propices pour la production primaire nette par an). Cependant, dans certaines régions de Russie, de Chine et du Canada, le changement climatique pourrait avoir des effets bénéfiques via l’augmentation du nombre de ces jours propices. Les auteurs soulignent également des impacts moindres dans les cas de scénarios avec adaptations (RCP 2,6 et 4,5)

Ce travail a aussi tenté d’évaluer la vulnérabilité de 194 pays face à l’évolution du nombre de jours propices à la croissance végétale. Comme le montre la carte ci-dessous, cette vulnérabilité est au croisement de trois variables : exposition (évolution du nombre de jours propices), dépendance (pourcentage du PIB associé à l’agriculture, pourcentage d’actifs dans ce secteur et pourcentage de la production primaire nette utilisée – alimentation, papeterie, bois, viande, fibres et co-produits de l’alimentation animale) et adaptabilité (PIB par habitant).

Vulnérabilité suite à la baisse du nombre de jours propices à la croissance des plantes

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Source : PLOS Biology

Élise Delgoulet, Centre d’études et de prospective

Source : PLOS Biology

 

09:27 Publié dans Climat | Lien permanent | Tags : changement climatique, croissance végétale |  Imprimer | | | | |  Facebook

Biocarburants et modélisation : éclairage sur la prise en compte de l’alimentation humaine dans les émissions de GES associées

Une étude publiée dans Science croise les résultats de différents modèles qui traitent du secteur des biocarburants, et questionne les périmètres de comptabilisation des émissions ou absorptions de gaz à effet serre (GES) associées, en lien avec les arbitrages inhérents à un exercice de modélisation. Les auteurs ont plus précisément regardé trois modèles aux États-Unis et en Europe : GTAP de la Purdue University (travaux de 2009 et de 2014) mobilisé dans le California Air Resources Board, FAPRI-CARD model utilisé par l'Environmental Protection Agency, et IFRPI-MIRAGE mobilisé par la Commission européenne.

Les chercheurs ont conduit une analyse des différents postes de réduction ou d’émission de GES dans ces trois modèles :

– les émissions résultant de la production des cultures et de l’éthanol,

– celles liées à la fermentation de l’éthanol, à sa combustion et au changement d’usage des sols,

– la fixation du carbone par les plantes (via l’augmentation des rendements ou la mobilisation de nouvelles parcelles pour la production d’éthanol).

Ils s’intéressent en particulier aux émissions évitées par la moindre consommation humaine ou animale (respiration et déchets). Ils concluent à une très forte sensibilité des émissions liées aux biocarburants à ce facteur. La réduction de GES associée représente en effet pour les différentes simulations, à partir des trois modèles, entre 20 et 50 % de l’ensemble des postes cités ci-dessus. Ainsi, la conclusion appelle à plus de transparence lors de la publication des travaux de modélisation, et donc à un meilleur éclairage sur l’analyse des principaux facteurs explicatifs des résultats publiés.

Élise Delgoulet, Centre d’études et de prospective

Source : Science

 

09:25 Publié dans Biomasse/Biocarburants, Climat | Lien permanent | Tags : ges |  Imprimer | | | | |  Facebook

18/06/2015

Sols : panorama sur le changement climatique et la sécurité alimentaire à l’échelle du monde

Publié dans Science début mai, un article rédigé par des chercheurs américains offre un panorama de grands enjeux associés aux sols, mettant l’accent sur le changement climatique et la sécurité alimentaire.

Cette publication donne ainsi des ordres de grandeurs issus de la littérature académique sur les capacités de stockage (ex : 2 300 Gt de carbone organique dans les trois premiers mètres) et d’émissions de carbone par les sols au niveau mondial. Elle explique certains points clés, par exemple l’approche non linéaire dans le temps de la séquestration de carbone, ou encore la variation possible du carbone stocké dans le sol (entre -72 et +253 Gt à l’horizon 2100, selon les travaux de modélisation). Elle revient également sur les incertitudes : réponse des sols des latitudes nordiques au réchauffement climatique (estimation des émissions comprises entre 50 et 150 Gt), incertitude sur la taille du stock de carbone dans le sol (de l’ordre de la quantité de carbone présent dans l’atmosphère – 770 Gt), etc.

Sur le volet « sécurité alimentaire », les auteurs évoquent principalement la question de l'érosion et mettent aussi l’accent sur les nutriments, comme le phosphore dont la principale source provient de formations géologiques (roches phosphatées) inégalement réparties dans le monde. Pour conclure, trois axes stratégiques pour les sols sont cités : le carbone organique (séquestration et émissions), l’érosion et les nutriments.

Source : Science

09:03 Publié dans Climat, Environnement, Sécurité alimentaire | Lien permanent | Tags : sols, changement climatique, sécurité alimentaire |  Imprimer | | | | |  Facebook

25/05/2015

Effets sanitaires possibles des dynamiques environnementales des microorganismes

Le 19 mai dernier, un colloque organisé par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) dans le cadre du « programme national de recherche environnement santé travail » (PNR EST), en collaboration notamment avec l’Ademe et le ministère en charge de l’Écologie, a fait un point sur les interactions possibles entre les microorganismes pathogènes et le milieu extérieur. Ont notamment été présentés des travaux relatifs aux effets sanitaires des dynamiques environnementales liées à des microorganismes, et l’impact possible du changement climatique sur la survenue de maladies vectorielles a été abordé par plusieurs intervenants. En effet, un réchauffement de la température fait partie des facteurs de résistance des arthropodes vecteurs et facilite leur extension.

Cyril Caminade, chercheur à l’institut des maladies infectieuses de l’université de Liverpool (Royaume-Uni), a présenté une étude sur l’impact du réchauffement climatique sur certaines maladies vectorielles, parmi lesquelles la fièvre de la vallée du Rift, zoonose qui a un fort impact sur l’élevage en Afrique. Par ailleurs, parmi les autres zoonoses préoccupantes en lien avec l’environnement et le changement climatique figurent les maladies vectorielles transmises par les tiques. Sur ce point, une équipe de recherche associant l’Anses et l’École nationale vétérinaire d'Alfort développe un outil de dépistage des pathogènes pouvant être portés par différentes espèces de tiques : des essais menés en France, aux Pays-Bas et au Danemark ont permis la détection de portages de pathogènes inattendus sous les latitudes d’Europe du Nord concernées.

Ainsi, les travaux de recherche présentés mettent en évidence l’influence des écosystèmes sur les pathogènes et les hôtes (vecteurs et hôtes définitifs). Une meilleure compréhension de ces facteurs permettra de progresser dans la prévention de ces risques.

Madeleine Lesage, Centre d’études et de prospective

Lien : Anses

09:20 Publié dans Climat, Santé et risques sanitaires | Lien permanent | Tags : anses, microorganismes |  Imprimer | | | | |  Facebook

10/04/2015

La sécurité sanitaire des aliments face au changement climatique

Food Research International a publié un numéro spécial sur les risques sanitaires alimentaires et les impacts attendus du changement climatique. L’éditorial rédigé à cette occasion propose un tour d’horizon intéressant sur cette problématique, mettant en perspective les articles de ce numéro au regard de la littérature existante.

Dans un premier temps, une recherche bibliographique sur Scopus (base de données d’articles publiés dans des revues à comité de lecture) avec les expressions « climate change » et « food safety » (ou « food chemistry ») met en évidence la relative nouveauté de ce sujet interdisciplinaire (33 publications en juillet 2014, contre 20 en 2010). L’éditorial montre aussi l’évolution des connaissances sur ce sujet via les travaux cités dans les derniers rapports du GIEC, des informations de plus en plus nombreuses mais jugées limitées (peu de résultats de terrain ou d’analyses quantitatives par exemple).

Puis, des impacts attendus du changement climatique sont développés dans l’éditorial : maladies d’origine alimentaire et micro-organismes, mycotoxines, ainsi que nuisibles et usages de pesticides. Sur ce dernier point, une revue de la littérature scientifique est proposée, qui conclut à une utilisation potentiellement accrue de pesticides (doses, fréquences, volumes et diversité des produits appliqués). De plus, le changement climatique augmenterait la volatilité et la vitesse de dégradation de ces pesticides.

Au-delà de ces conclusions essentiellement qualitatives, ce numéro considère aussi des approches quantitatives (analyse statistique et études de terrain). Il est complété par des travaux mobilisant des scénarios climatiques afin d’évaluer les impacts des évolutions du climat sur la distribution des mycotoxines (en Espagne et en Belgique), des toxines paralysantes des algues (PSP) ou encore du Vibrio parahaemolyticus dans les huîtres. Un article présente également les résultats d’une étude Delphi sur les stratégies d’adaptation pour garantir une sécurité sanitaire des aliments dans le temps long.

Nombre d’articles de cette livraison de Food Research International sont issus des travaux réalisés dans le cadre du projet européen Veg-i-Trade, centré sur les produits frais, lancé en 2010 pour une durée de 4 ans et financé par le septième programme-cadre européen (2007-2013) pour la recherche et le développement technologique.

Élise Delgoulet, Centre d’études et de prospective

Source : Food Research International