17/05/2016
Lancement de l’Agricultural Data Coalition et du Ag Data Transparency Evaluator aux États-Unis
Début mars, l'American Farm Bureau Federation, des universités américaines et des entreprises du secteur agricole ont formé l'Agricultural Data Coalition, dans le but d'aider les agriculteurs à mieux gérer l'ensemble de leurs données. En effet, l'exploitation des nombreuses informations récoltées par les agriculteurs suscite un certain intérêt et pourrait, par exemple, leur permettre de prendre des décisions économiques plus rapidement, d'identifier les marges d'amélioration sur leur exploitation ou encore de réduire leurs coûts de production. Cependant, la propriété, la confidentialité, la sécurité, la disponibilité, l'utilisation et la diffusion de ces informations, en particulier à des tierces parties (chercheurs, assureurs, gouvernement, fournisseurs d'intrants, etc.) font débat.
S'appuyant sur la charte des Principes pour la confidentialité et la sécurité des données (The Principles for Data Privacy and Security), mise en place en novembre 2014, l'Agricultural Data Coalition crée une plate-forme permettant de stocker les données des agriculteurs tout en en préservant le contrôle, et en particulier la diffusion. Grâce à cet outil, ils pourront se concentrer sur les décisions à prendre à partir de l'analyse de leurs informations, plutôt que sur la gestion de celles-ci.
En parallèle, un second outil, l'Ag Data Transparency Evaluator, a été installé par l'American Farm Bureau Federation et un ensemble d'acteurs de la filière agricole. L'objectif est d'aider les producteurs à analyser les contrats qui les lient aux fournisseurs de logiciels d'aide à la décision ou du machinisme : types de données collectées, propriété, utilisation et partage de ces données, confidentialité, sécurité. Dix questions permettent ainsi de déterminer le(s) type(s) d'informations récoltées et leur utilisation par le fournisseur de technologie. Les produits respectant la charte sont labellisés Ag Data Transparent.
Christophe Malvezin, Service Agricole et Agroalimentaire, Ambassade de France aux États-Unis
Sources : Ag Data Coalition, American Farm Bureau Federation
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Logiques d’acteurs et marchés fonciers en Roumanie
Dans le dernier numéro de Cahiers Agricultures, un article analyse les stratégies d’acteurs dans le domaine du foncier agricole en Roumanie. Les auteurs montrent que la faiblesse du marché foncier (achat-vente) dans ce pays est liée à l’offre très réduite. Les propriétaires privilégient en effet le mode de faire-valoir indirect (location ou métayage) pour des raisons :
- économiques : la location apporte un complément aux revenus du ménage et le métayage contribue à son alimentation ;
- patrimoniales : l’attachement à la terre et à la propriété privée demeure essentiel après l’expérience collectiviste.
Ainsi, les exploitations familiales et les sociétés commerciales (à capitaux étrangers et nationaux), qui ne peuvent pas accéder au foncier du fait de la faiblesse de l’offre, ont recours à la location de terres ou au métayage. Les deux chercheurs constatent que les sociétés commerciales, souvent en position de force au niveau financier, sont en mesure d’imposer les termes des contrats aux petits propriétaires fonciers, et donc des prix que les exploitations familiales ne peuvent pas concurrencer. À titre d’exemple, une société a dû négocier 764 contrats pour 630 ha pris en location. Les auteurs notent l’émergence, dans ce contexte, de phénomènes de « tenure inversée » qui s’inscrivent dans des dynamiques de concentration de terres à grande échelle : les petits propriétaires cèdent en faire-valoir indirect une partie ou la totalité de leurs disponibilités foncières à des tenanciers économiquement plus favorisés.
En complément de cet article, et toujours sur la Roumanie, signalons que l’association AGTER vient de publier un rapport qui, dans une première partie, traite de l’évolution historique des structures agraires jusqu’à nos jours, puis aborde les enjeux actuels de l’agriculture roumaine à travers un diagnostic agraire effectué dans la région de Mangalia (sud-est du pays). La deuxième partie analyse les aspects juridiques et socio-économiques liés au foncier, permettant de mieux comprendre le contexte global de l’agriculture roumaine, ses spécificités et ses besoins de réformes.
Céline Fabre, Centre d'études et de prospective
Sources : Cahiers Agricultures, AGTER
10:46 Publié dans Mondialisation et international | Lien permanent | Tags : roumanie, foncier | Imprimer | |
16/05/2016
Plantes et dioxyde de carbone : rétrospective et effets à horizon lointain
Dans un article paru dans Nature Climate Change, une équipe internationale de 32 chercheurs s'est intéressée à l'évolution du couvert végétal, soit environ 32 % de la surface de la Terre (plantes et forêts comprises), sur la période 1982-2009. Utilisant des données satellitaires pour déterminer la surface foliaire, leur travail montre une tendance globale à son augmentation pour 25 à 50 % du couvert (greening), et une diminution pour moins de 4 %. Les auteurs ont complété cette approche par des modèles globaux d'écosystèmes afin d'identifier les facteurs déterminants, et leurs poids respectifs dans ces évolutions passées. La fertilisation liée au dioxyde de carbone (CO2) expliquerait 70 % de cette augmentation de la surface foliaire, notamment au niveau des tropiques. D'autres facteurs comme le nitrogène (9 %), le changement climatique (hors effet CO2 ; 8 %) ou les modifications du type de couvert (4 %) contribuent également à ces évolutions. Les chercheurs soulignent enfin le rôle du changement climatique dans les hautes latitudes et sur le plateau tibétain, ainsi que celui de la modification du couvert végétal dans le sud-est de la Chine et à l'est des États-Unis.
Une seconde étude, publiée également dans Nature Climate Change, explore l'effet combiné d'une concentration plus importante de dioxyde de carbone dans l'atmosphère sur les rendements des cultures et sur la productivité de l'eau (i.e. quantité produite par unité d'eau). Les auteurs ont étudié 4 cultures (blé, maïs, soja et riz), mobilisant des modèles globaux du climat et de fonctionnement des cultures. Deux scénarios ont été considérés, avec comme principale différence le niveau de concentration de CO2. Cette dernière double entre 2000 et 2080 dans le premier cas, et est maintenue au niveau des années 2000 dans le second. L'étude conclut que le CO2 permet de compenser – complètement ou partiellement selon les cultures –, les effets du changement climatique et réduit la consommation d'eau (de 4 à 17 %). Les auteurs soulignent la nécessité de travaux de terrain, en particulier dans les zones arides où les incertitudes sur les effets du CO2 sont les plus importantes.
Élise Delgoulet, Centre d'études et de prospective
Sources : Nature Climate Change, Nature Climate Change, Science Daily, Science Daily
10:43 Publié dans 1. Prospective, Climat | Lien permanent | Tags : co2, couvert végétal | Imprimer | |
Des scénarios pour répondre à la demande globale alimentaire en 2050 sans déforestation
Six chercheurs de l'Institute of Social Ecology et de I'Institut de recherche en agriculture biologique à Vienne ont passé au crible 500 scénarios de production et demande alimentaires, avec comme contrainte initiale l'absence de déforestation à l'horizon 2050. Les principales variations entre ces scénarios tiennent au niveau des rendements, au pourcentage d'expansion des zones cultivées (0 à +70 %) en particulier sur les prairies très productives, à la composition du régime alimentaire des animaux d'élevage, à l'origine de la viande dans l'alimentation humaine (parts des ruminants, des monogastriques) et aux régimes alimentaires humains. Sont distingués les régimes suivants : VEGAN avec uniquement une base végétale (2 636 kcal/pers/jour), VEGETARIAN sans viande mais avec des œufs et du lait (2 636 kcal/pers/jour), MEAT (2 648 kcal/pers/jour), BAU en ligne avec les projections de la FAO en 2050 et RICH où le régime alimentaire nord-américain de 2000 domine (3 546 kcal/pers/jour). Tous ces régimes, sauf BAU, supposent une convergence mondiale des quantités ingérées per capita. La figure ci-dessous présente l'ensemble des scénarios, des hypothèses sous-jacentes et les résultats en termes de faisabilité. Cette dernière correspond à l'adéquation entre l'offre et la demande alimentaires. Si la demande est supérieure à l'offre de 5 % (cropland-limited) et/ou si les seuils écologiques de pâturage sont dépassés (grazing-land limited), le scénario est considéré comme non réalisable.
Scénarios et hypothèses sous-jacentes (régimes alimentaires en colonne, modes de production en ligne). Les zones en vert foncé correspondent aux scénarios considérés comme faisables, en vert clair comme probablement faisables. Les autres couleurs indiquent les raisons de la non faisabilité.
Source : Nature Communications
D'après le jeu d'hypothèses retenu, un peu moins de 60 % des scénarios sont jugés réalisables. Les hypothèses en termes de régimes alimentaires jouent un rôle important en comparaison avec celles touchant aux rendements ou à l'expansion des cultures. Tous les scénarios avec le régime VEGAN et 94 % dans le cas VEGETARIAN seraient réalisables, contre 2/3 en BAU et 15 % pour le régime MEAT. Par ailleurs, l'exercice de modélisation réalisé montre que la convergence des régimes alimentaires diminue l'autosuffisance des pays en développement. Néanmoins, cette étude ne tient pas compte des effets du changement climatique et n'intègre pas des considérations autres que biophysique (ex : flux de biomasse non contraint par des dimensions économiques ou des barrières à l'échange).
Élise Delgoulet, Centre d'études et de prospective
Source : Nature Communications
10:40 Publié dans 1. Prospective, Alimentation et consommation, Climat, Forêts Bois, Sécurité alimentaire | Lien permanent | Tags : demande alimentaire, production, déforestation | Imprimer | |
13/05/2016
Multiplication des éco-labels : un impact difficile à établir tant sur l'environnement que sur le commerce
Répondant à la montée des préoccupations environnementales, les dispositifs d'éco-étiquetage se sont beaucoup développés ces dernières années. Si leur diversité est aujourd'hui bien décrite, les conséquences de leur foisonnement pour un même secteur, voire un même produit, sont encore mal connues. Une publication récente, dans la collection Working Papers de l'OCDE, fait le point sur les recherches menées et identifie les questions restant à défricher.
La concurrence entre les labels permet-elle d'accroître le niveau d'exigence environnementale ou, a contrario, est-elle un moyen pour les entreprises de « verdir » leur offre ? La réponse n'est pas univoque : tout dépend du secteur et du type d'éco-étiquetage. Les modèles théoriques existants, peu nombreux à confronter plusieurs systèmes d'éco-étiquetage, ne permettent pas d'apporter une réponse claire. L'article se focalise ensuite sur quelques exemples (café, cacao, produits forestiers), ces marchés étant confrontés à une multiplication des éco-labels, d'origine non gouvernementale ou mis en avant par les négociants internationaux.
Selon une enquête menée par le Comittee on Sustainability Assessment auprès des producteurs de café et de cacao dans douze pays, ceux ayant fait le choix de plusieurs éco-labellisations ont des résultats économiques et une efficacité environnementale supérieurs à la moyenne. Le secteur forestier se caractérise quant à lui par la coexistence de deux standards internationaux portés par des ONG, FSC (Forest Stewardship Council) et PEFC (Program for the Endorsement of Forest Certification), qui convergent avec le temps. 10 % environ des forêts certifiées pourraient l'être sous les deux systèmes simultanément, sans qu'il soit actuellement possible de déterminer la portée environnementale ou économique de cette situation.
Enfin, le développement des étiquetages s'appuyant sur l'empreinte carbone ou environnementale, basé sur l'analyse du cycle de vie (ACV), pourrait devenir la source principale des perturbations des marchés intérieurs et internationaux, en raison des difficultés méthodologiques rencontrées pour vérifier les éléments affichés. Différentes initiatives sont actuellement en cours afin de limiter ces risques. Les auteurs rappellent à ce titre l'expérimentation menée en France qui couvrait, entre autres, le secteur de la production agricole.
Muriel Mahé, Centre d’études et de prospective
Source : OCDE
10:36 Publié dans Environnement | Lien permanent | Tags : ocde, eco-labels, environnement, commerce | Imprimer | |
Les soutiens ciblés et les mesures du 2e pilier de la PAC plus efficaces pour la création d'emplois
Alors qu'un projet de rapport intitulé Comment la PAC peut-elle améliorer la création d'emplois dans les zones rurales ? a été présenté par l'eurodéputé E. Andrieu, fin avril, en Commission Agriculture du Parlement européen, une étude a été publiée sur le même sujet par les services du Parlement. Les auteurs, un consortium de chercheurs autrichiens et britanniques, font un état de l'art des connaissances sur le sujet, complété par plusieurs études de cas.
De la littérature ressortent des conclusions mitigées sur les effets de la PAC sur l'emploi. Elle a certes permis le maintien en activité des exploitations agricoles, puisqu'il est estimé qu'une suppression des aides conduirait à la disparition de 30 % d'entre elles. Mais une majorité d'études conclut à des effets négatifs de cette politique sur l'emploi. Encouragée par la PAC, l'intensification de l'agriculture a conduit à une baisse constante de l'utilisation de main-d’œuvre dans le secteur depuis les années 1990. Cette baisse, surtout de la main-d’œuvre familiale, n'a pas été compensée par des créations dans d'autres secteurs tels que l'agroalimentaire.
Les effets sur l'emploi sont différents selon les types d'instruments. Les aides découplées apparaissent moins efficaces que celles liées aux mesures agro-environnementales, aux zones défavorisées ou aux investissements. Au sein du 1er pilier, les soutiens directs auraient créé plus d'emplois dans les pays ayant explicitement ciblé celles-ci sur la création d'emplois (Royaume-Uni, République Tchèque, Pologne). Mais, de manière générale, cette création serait plutôt liée aux mesures du 2e pilier.
Une part importante des emplois induits par la PAC sont non agricoles. Les études de cas amènent les auteurs à conclure que les régions qui ont fait le choix de la spécialisation agricole (ex : Nord-Pas de Calais) ont créé moins d'emplois que celles qui ont favorisé la diversification des activités, par exemple avec l'agro-tourisme (ex : Murcie en Espagne). Le programme LEADER, associant agriculteurs et acteurs ruraux, est un levier utile à ce titre.
De manière générale, les effets de la PAC sur l'emploi ont été assez peu étudiés et plusieurs questions mériteraient d'être approfondies selon les auteurs. À l'heure où l'emploi devient un enjeu prioritaire pour la Commission européenne, cette étude constitue un état des lieux utile.
Alexandre Martin, Centre d’études et de prospective
Sources : Parlement européen, Parlement européen
10:35 Publié dans 4. Politiques publiques, PAC, Travail et emploi | Lien permanent | Tags : pac, emplois | Imprimer | |
Évolutions structurelles des exploitations agricoles en Europe : sortie du document de référence d'un atelier organisé par la Comagri et le Parlement européen
Daté de mars 2016, ce rapport analyse les évolutions structurelles récentes des exploitations agricoles en Europe de l'Ouest, dans un premier temps, chez les dix nouveaux États membres dans un second temps, avant de développer des propositions détaillées pour améliorer les outils de la Politique Agricole Commune (PAC).
Parmi les principales conclusions de l'analyse des évolutions en Europe de l'Ouest, on peut noter le constat du maintien d'exploitations de tailles petite et moyenne, ces dernières générant globalement plus de richesse que les plus grandes structures. Les auteurs insistent sur le fait que de nombreuses grandes fermes, sur-endettées et particulièrement sensibles à la volatilité des prix, se montrent plus fragiles dans les conditions actuelles d'un marché des matières premières agricoles globalisé. Ils critiquent le fait qu'une part importante des subventions à l'agriculture soit destinée à un petit nombre d'exploitations, avant de proposer une refonte des dispositifs de la PAC pour relancer le développement d'une agriculture créatrice de richesses et productrice d'externalités positives.
En ce qui concerne les dix nouveaux membres de l'est du continent, le rapport insiste sur la grande diversité structurelle et les difficultés qu'ont les autorités de certains États à mettre en place les outils de la PAC. Entre autres recommandations, il est proposé de considérer les nombreuses petites exploitations dans leur diversité, afin de développer des outils adaptés à plusieurs catégories, et d'accélérer la professionnalisation et le développement vers des structures commerciales, avec par exemple des politiques de développement de la coopération adaptées localement.
Enfin, après une analyse fine du rôle des organisations de producteurs (OP), dans le pouvoir de négociation des agriculteurs avec l'aval, trois registres de recommandations sont développés : faire converger à l'échelle européenne les règles appliquées aux OP ; renforcer leurs marges de manœuvre en ce qui concerne la planification de la production ; imposer des tailles minimales d'OP et favoriser leurs regroupements pour accroître leurs pouvoirs de négociation.
Alexis Grandjean, Centre d'études et de prospective
Source : Parlement européen
10:33 Publié dans 4. Politiques publiques, Exploitations agricoles, PAC | Lien permanent | Tags : pac, stratégie europe 2020 | Imprimer | |
12/05/2016
Rapport de la Cour des comptes européenne sur les indicateurs de performance des paiement directs de la PAC
Ce rapport, intitulé Soutien aux revenus des agriculteurs : le système de mesure de la performance mis en place à la Commission est-il bien conçu et repose-t-il sur des données fiables ?, examine la nature et la représentativité des informations sur le revenu agricole collectées par les États membres et rassemblées au niveau européen. L'audit se base sur l'examen des informations communautaires et sur des visites dans six pays (Allemagne, Espagne, France, Pays-Bas, Pologne, Roumanie), représentant plus de 50 % du budget de l'Union consacré à l'agriculture. Les données examinées sont celles qui constituent les Comptes Économiques Agricoles (CEA), le Réseau d'Information Comptable Agricole (RICA) et les nouveaux indicateurs d'évaluation de performance du Cadre Commun de Suivi et d’Évaluation (CCSE) de la PAC.
Les principales critiques, déjà faites par la Cour en 2002 et 2007, sont que les définitions statistiques du « revenu agricole » ne permettent ni une estimation directe du niveau de vie des agriculteurs, ni d'évaluer la dépendance du secteur aux aides. Dans sa réponse publiée en annexe du rapport, la Commission rappelle que ces outils n'ont pas été créés avec cet objectif et indique que « les sources de revenus complémentaires qui ne présentent clairement pas un caractère agricole sont d'une importance mineure pour la PAC ». La Cour souligne néanmoins que, depuis 2014, le RICA collecte des informations complémentaires sur les autres revenus découlant d’activités liées à l'exploitation
Une attention particulière est à porter aux conclusions de la Cour des comptes, relatives aux nouveaux indicateurs de performance des aides directes du premier pilier, qui devront être mis en œuvre à mi-parcours de la programmation 2014-2020. Pour la Cour, ces indicateurs devront mesurer l'effet combiné des mesures. Elle recommande qu'ils se basent sur des valeurs de référence (revenus des exploitations, revenus des facteurs, revenus non-agricoles) et que le lien entre leur évolution et celle desdites mesures soit clairement établi.
Ce dernier point est à retenir à l'heure où les dispositifs de saisie des données pour le paiement des aides du premier pilier sont en cours de finalisation et où les États membres se mettent à peine en ordre de marche.
Gaétane Potard-Hay, Centre d’études et de prospective
Source : Cour des comptes européenne
10:31 Publié dans 4. Politiques publiques, PAC | Lien permanent | Tags : pac, paiements directs, cour des comptes européenne | Imprimer | |
Aide de l’UE en faveur des infrastructures rurales : une meilleure utilisation des ressources est possible
Dépeuplement et manque de possibilités économiques sont parmi les défis majeurs auxquels sont confrontées les zones rurales. Pour y répondre et accroître la croissance économique de ces territoires, l’Union européenne cofinance des infrastructures (routes, systèmes de gestion des eaux, équipements sociaux et culturels), dans le cadre des programmes de développement rural de ses États membres : 13 milliards d’euros pour la période 2007-2013, soit 13,5 % du FEADER programmé, pour un volume total d’investissements de 29 milliards d’euros.
La Cour des comptes européenne, dans l’exercice de sa mission d’audit de la performance et de la conformité, s’est intéressée à cet important domaine budgétaire encore très soutenu dans la programmation 2014-2020 : dans un rapport spécial publié en février dernier, elle établit, à partir d’un échantillon de 48 projets répartis dans cinq États membres – Allemagne (Saxe), Espagne (Estrémadure), Italie (Sicile), Pologne et Roumanie –, un constat mitigé sur l’utilisation des ressources allouées. Elle pointe notamment l’insuffisante coordination avec d’autres financements, nationaux ou européens (FEDER, fonds de cohésion), du fait de délimitations peu satisfaisantes et de la faiblesse des mécanismes devant garantir leur complémentarité. La figure ci-dessous montre comment une meilleure coordination pourrait conduire à une amélioration des résultats.
Coordination des sources de financement dans un secteur ou un territoire donné
Source : Cour des comptes européenne
La Commission européenne s’est attachée à renforcer la cohérence entre les différents fonds de l’UE pour la période de programmation 2014-2020, afin de remédier aux faiblesses du passé, en publiant notamment une communication le 14 décembre 2015 intitulée : « Optimiser la contribution des Fonds structurels et d’investissement européens à la stratégie de croissance de l’Union européenne » (voir à ce sujet un précédent billet sur ce blog).
Les États membres doivent de leur côté adopter une approche coordonnée et sélective de l’aide entre les différents échelons (national, régional, local) et secteurs (public/privé), en particulier dans le domaine des infrastructures rurales où la continuité du financement est essentielle.
Christine Cardinet, Centre d'études et de prospective
Source : Cour des comptes européenne
10:29 Publié dans 4. Politiques publiques, PAC | Lien permanent | Tags : infrastructure, cour des comptes européenne | Imprimer | |
Où en est l'expérimentation animale ?
Le dernier numéro du magazine de l'Inserm Science&Santé consacre un dossier à la recherche animale. Sont abordés tour à tour la réglementation sur le sujet, les apports du modèle animal à la recherche, les alternatives pour demain, et un dernier article porte sur la question : « Jusqu'où peut-on aller pour améliorer la santé humaine ? ». Malgré une réglementation européenne et française protectrice, l'expérimentation animale est contestée par différents acteurs. Une initiative citoyenne européenne a ainsi porté un avis critique auprès de la Commission européenne, qui l'a refusé : l'expérimentation animale se révèle encore indispensable pour certaines recherches, notamment la dernière phase de développement des médicaments, et une interdiction totale sur le territoire européen conduirait à une délocalisation de la recherche dans les pays tiers.
Plusieurs évolutions ont permis une amélioration des pratiques, en particulier l'application raisonnée de la règle des 3R (réduire, raffiner, remplacer). On peut également citer la présentation, par le Réseau d'études fonctionnelles chez les organismes modèles (EFOR), des 35 espèces disponibles, permettant une optimisation du nombre d'animaux utilisés et un choix pertinent de modèle. Des procédés réduisant la souffrance ou permettant d'éviter le sacrifice sont de plus en plus utilisés, telle l'imagerie par scanner.
Par ailleurs, les alternatives à l'expérimentation combinent différentes techniques, utilisées en plusieurs étapes. Tout d'abord, les modèles mathématiques in silico donnent des indications sur l'activité biologique d'un produit à partir de ses propriétés moléculaires. Après cette étape, les produits sont testés in vitro sur des cellules ou cultures cellulaires, par criblage à haut débit, avant de passer aux tests sur animaux, qui permettent de mesurer les effets sur un organisme entier et de détecter d'éventuels effets secondaires. Ces méthodes ont permis depuis 1990 une baisse de 40 % du nombre d'animaux utilisés.
Madeleine Lesage, Centre d'études et de prospective
Source : Inserm
10:27 Publié dans Enseignement et recherche, Santé et risques sanitaires | Lien permanent | Tags : inserm, expérimentation animale | Imprimer | |
11/05/2016
Insécurité alimentaire des ménages canadiens en 2014
Le 5 avril, le groupe de recherche canadien PROOF a publié son quatrième rapport sur l'insécurité alimentaire dans le pays. Les données utilisées proviennent de l'enquête annuelle Canadian Community Health Survey conduite par Statistique Canada, qui collecte des informations sur la santé d'un échantillon représentatif de 60 000 personnes. Depuis 2004, cette enquête comprend un module optionnel (Household Food Security Survey) permettant de mesurer, avec 12 questions, l'insécurité alimentaire vécue par les ménages au cours des douze derniers mois : les foyers sont ensuite classés en quatre catégories (sécurité alimentaire, insécurité alimentaire marginale, modérée, sévère). Pour l'enquête de 2014, le module a été administré dans 9 territoires et provinces, et les résultats présentés dans le rapport concernent 82 % de la population canadienne.
De manière générale, 12 % des foyers (3,2 millions de personnes) ont connu une situation d'insécurité alimentaire au cours des douze derniers mois. Près d'un million d'enfants de moins de 18 ans sont concernés, soit plus d'un enfant sur six, et la prévalence de l'insécurité alimentaire est plus forte dans le nord du pays.
Insécurité alimentaire des ménages au Canada en 2014
Source : PROOF
Parmi les résultats présentés, on peut retenir les éléments suivants :
- les ménages avec enfants de moins de 18 ans sont plus touchés (15,6 % en moyenne, et 33,5 % pour les familles monoparentales féminines) que les ménages sans enfants (10,4 % en moyenne, 15,7 % pour les personnes seules) ;
- 62,2 % des ménages en insécurité alimentaire sont salariés, et 61 % des foyers pour lesquels les aides sociales représentent la principale source sont concernés ;
- la prévalence de l'insécurité alimentaire est légèrement plus élevée en zones urbaines, avec de fortes variations entre villes : 1 ménage sur 6 à Peterborough (Ontario) contre 1 sur 14 à Québec.
Alors que le nombre de ménages en insécurité alimentaire reste plus élevé par rapport à 2008, et ce malgré des efforts en matière de lutte contre la pauvreté, les auteurs soulignent la nécessité d'une mobilisation de tous les niveaux de décision pour réduire ce phénomène, dont les impacts sur la santé des individus et sur le système de santé canadien sont importants.
Evolution de la prévalence des différents degrés d'insécurité alimentaire, de 2007 à 2014
Source : PROOF
Julia Gassie, Centre d'études et de prospective
Source : PROOF
10:24 Publié dans Alimentation et consommation | Lien permanent | Tags : canada, insécurité alimentaire | Imprimer | |
Une sociologie politique de la lutte contre le gaspillage alimentaire
La revue Gouvernement et action publique publie, dans sa dernière livraison, un article d’Armèle Cloteau (UVSQ) et Marie Mourad (Sciences Po Paris) intitulé « Action publique et fabrique du consensus. La ''lutte contre le gaspillage alimentaire'' en France et aux États-Unis ». L’argumentation développée dans cet article s’appuie sur 120 entretiens réalisés dans les deux pays.
Selon les auteurs, depuis la fin des années 2000, ce problème public a permis la convergence de différentes préoccupations : économie des ressources, gestion des déchets, aide alimentaire, etc. Des standards d’action mis au point par des pays comme le Royaume-Uni, souvent cité comme modèle, et promus par les organisations internationales, notamment la FAO, se diffusent dans les sphères gouvernementales. À travers le monde, ce sont parfois les mêmes acteurs (multinationales et réseaux d’ONG) qui s’engagent dans des dispositifs participatifs public/privé de lutte contre le gaspillage.
Dans le cadre de dispositifs comme le Pacte national de lutte contre le gaspillage alimentaire, en France, ou le Zero Food Waste Forum, aux États-Unis, des innovations sont discutées, notamment en matière de logistique. De nouveaux créneaux se structurent autour de la récupération des invendus, parfois redistribués aux plus démunis. Pour les auteurs, cette « approche réformiste d’amélioration progressive » a pour effet de marginaliser les acteurs porteurs d’un discours de sobriété et de réforme des systèmes alimentaires. « La lutte contre le gaspillage alimentaire se révèle alors être un modèle de prise en charge sectorielle et technicienne, reposant principalement sur l’innovation logistique et managériale, par opposition à des mesures prescriptives et à la politisation de l’enjeu ».
Florent Bidaud, Centre d’études et de prospective
Source: Gouvernement et action publique
10:22 Publié dans 4. Politiques publiques, Alimentation et consommation | Lien permanent | Tags : gaspillage, etats-unis, france | Imprimer | |
10/05/2016
Le syndrome du bien-être, Carl Cederström, André Spicer
Aujourd'hui, se préoccuper de son bien-être est une obligation mentale qui s'impose à chacun de nous. L'individu contemporain est sommé de surveiller sa santé, de canaliser son stress, de souhaiter et de trouver le bonheur. Ce livre ne critique ni n'encense ces évolutions, il cherche à les comprendre en montrant comment ce souci de soi s'est transformé en idéologie, en impératif moral, et en décrivant les tendances qui accompagnent ces nouvelles convictions : coaching, méditation, désir d'authenticité, créativité artistique, fitness, etc., sans oublier les nouveaux rapports à l'alimentation.
L'inquiétude relative au contenu de nos assiettes est centrale dans cette quête de la santé parfaite. Pour les auteurs, le plaisir des papilles et de la commensalité est de plus en plus remplacé par des impératifs diététiques et médicaux. Ce "manger sainement" s'exprime à travers une multitude d'attitudes et de pratiques : observance de régimes, jeûne, approvisionnement local, "fait maison", self-tracking, éducation nutritionnelle en entreprise, etc. Tout ceci procure à bon compte un sentiment de contrôle de soi, de développement personnel et d'élévation morale. Vivre de nouvelles expériences culinaires permet d'affirmer sa modernité et de se distinguer en société.
Ce rigorisme alimentaire modifie la façon dont nous percevons notre corps, ennemi qu'il faut discipliner au prix d'un contrôle tatillon des variations de poids. Dorénavant, manger génère de la tentation, de la honte et de l'anxiété. Plus globalement, les nouveaux "bien mangeants" stigmatisent les récalcitrants, ceux qui ingurgitent trop, trop souvent, trop gras, trop sucré, trop carné, tous les transgresseurs qui mettent en péril leur vie et l'ordre social, et coûtent à la société. Cette culpabilisation des déviants alimentaires, largement entretenue par le néo-hygiénisme des médias, charrie avec elle beaucoup de jugements moraux et de mépris social.
Selon Cederström et Spicer, plus nous démultiplions nos efforts pour accroître notre bien-être alimentaire, et plus nous devenons frustrés, angoissés, hypersensibles à des sources de mal-être. Au lieu de nous rendre heureux, ce nouvel ascétisme fabrique surtout du repli, du narcissisme, et nous enferme dans un cercle vicieux. Pour ne pas nous condamner à être des mangeurs malheureux, acceptons donc nos imperfections, notre finitude, arrêtons de repousser sans cesse nos limites et de vouloir tout contrôler.
Bruno Hérault, Centre d'études et de prospective
Lien : Éditions l'Échappée
10:13 Publié dans Alimentation et consommation | Lien permanent | Tags : bien-être | Imprimer | |
Abattoirs de Chicago, Jacques Damade
Ce petit livre raconte l'histoire de la plus grande entreprise humaine de mise à mort d'animaux. Au début du XIXe siècle, il y avait la plaine immense et sauvage du Middle West, qui se remplit progressivement de troupeaux de bovins et de porcs en semi-liberté. Puis fut créée en 1833 la municipalité de Chicago, dont on comptait seulement 4 500 habitants en 1835. C'est en 1848 qu'y fut construite la première gare, élément d'un vaste réseau ferré qui favorisera la circulation des bêtes et des hommes. Si les trains permettent d'acheminer les troupeaux, ils favorisent aussi l'expédition de la viande vers les consommateurs des grandes villes, et ce sont neuf compagnies de chemin de fer qui achètent 1,3 km2 de marécage, au sud de Chicago, pour y créer en 1865 l'Union Stock Yard and Transit Co ("The Yard"). On aménage le long des voies d'immenses parcs à bestiaux et on y centralise les abattoirs.
Pour alimenter les commerces de façon continue, on commence à pratiquer l'abattage d'été, d'où l'obligation de faire venir d'immenses quantités de glace du Wisconsin, puis le premier essai de wagon frigorifique, en 1867, à destination de Boston. C'est le début du bœuf bon marché et de la recherche incessante de nouveaux débouchés, toujours plus éloignés. Simultanément, l'abattage se rationalise, se technicise, devient un travail à la chaîne, fait de tâches distinctes, simplifiées, répétitives, réalisées en cadence : assommer, égorger, échauder, racler, éviscérer, nettoyer les carcasses, découper, scier, expédier, etc. Le temps est compté, il faut tuer en masse, les techniques sont de plus en plus ingénieuses, les dépôts de brevets se multiplient, le parcours de la viande se complexifie, l'organisation du travail est méthodique, efficace, rentable. L'année 1883, la ville ne compte que 400 000 habitants, mais elle devient le plus grand centre d'abattage du monde : 1,9 million de bovins, 5,65 millions de porcs, 750 000 moutons.
Sur ce flux animal se greffe un flux de travailleurs pauvres, chômeurs, vagabonds, prêts à tout pour obtenir un job, venus d'Irlande, de Pologne, d'Italie, de Lituanie, d'Allemagne, de Russie, mal payés, souvent blessés, vite remplacés, soumis à de terribles conditions de travail et aux violences entre communautés. Cette « Babel-Chicago » a ses quartiers, ses boutiques, ses traditions, ses nourritures. Plus tard, ces abattoirs de la toute puissance et de la démesure serviront de modèle aux autres industriels, en particulier ceux de l'industrie automobile.
Sur le même sujet, on pourra lire deux grands classiques : La jungle, d'Upton Sinclair (1906), et La mécanisation au pouvoir (chapitre 4, « La mécanisation et la mort : la viande »), de Siegfried Giedion, (1948). À noter également le témoignage récent de Stéphane Geffroy (À l'abattoir, Seuil, avril 2016).
Bruno Hérault, Centre d'études et de prospective
Lien : Éditions La Bibliothèque
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09/05/2016
10 clés pour réussir dans les circuits courts, Jacques Mathé
Alors que les producteurs fermiers font « figure d'exception dans une ruralité qui se cherche », par un sens du métier conservé et des signes de reconnaissance de la part de leurs clients, cet ouvrage est avant tout un guide, une « revue de détail des incontournables » pour réussir dans les circuits courts. S'appuyant sur une longue expertise au sein du réseau CER France, Jacques Mathé propose un « cadre de référence dans le pilotage des exploitations en circuits courts », structuré autour de 10 clés de succès et illustré de nombreux témoignages en France, mais aussi au Canada.
Demande soutenue, professionnalisation de l'offre, implication des collectivités territoriales sont les déterminants du développement des productions locales. Définies comme un « système productif qui met en avant des savoir-faire, des terroirs, des proximités relationnelles dans un lien direct entre le producteur et le consommateur », ces productions prennent des formes diverses dans leur commercialisation et impliquent un nouveau métier pour les agriculteurs, une modification du fonctionnement de l'exploitation, de l'allocation des moyens de production, le développement de nouvelles compétences. Souplesse, adaptabilité, qualités relationnelles, curiosité, ingéniosité, etc., sont indispensables.
Parce que « l'idéalisme ne doit pas faire oublier le réalisme », J. Mathé propose avec ce livre un outil de travail, 10 clés de base de réussite allant de la « bonne idée qui plaît au porteur de projet… et à ses futurs clients » (clé n°1) à « s'inspirer de l'expérience des producteurs pour réussir » (clé n°10). À titre d'exemple, la clé n°7 détaille un diagnostic des principaux points de vente fermiers, en vente directe (magasin à la ferme, vente en panier, drives fermiers, etc.) ou via un intermédiaire (grande distribution, commerce de proximité, restauration collective, etc.).
Ces clés sont aussi des entrées intéressantes pour saisir les enjeux du développement des circuits courts, et s'adressent donc plus largement aux acteurs du monde rural (conseillers, associations, financeurs, etc.), aux enseignants ou à tout autre personne intéressée.
Julia Gassie, Centre d'études et de prospective
Lien : Éditions France Agricole
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