17/10/2016
Le NEPAD préconise une « révolution verte » pour éradiquer la faim en Afrique d'ici 2025
Après une première version fin mai, le rapport final du NEPAD (Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique), Ending Hunger in Africa. The elimination of hunger and food insecurity on the African continent by 2025, a été présenté mi-septembre à Pretoria. L'objectif de ce rapport est d'étudier les conditions nécessaires pour atteindre l'engagement, pris par les chefs d’États africains lors de la déclaration de Malabo en juin 2014, d'éradiquer la faim chronique d'ici 2025, en passant de 19 % à 5 % de la population en situation d'insécurité alimentaire. Cette étude a été réalisée avec le Frederick S. Pardee Center for International Futures de l'université de Denver.
Pour atteindre cet objectif ambitieux, tout en réduisant le niveau des importations, dans un contexte de croissance démographique, le NEPAD considère que la production devra progresser de 61 % par rapport à 2015. Cette hausse nécessite une augmentation de la superficie agricole de 39 millions d'hectares (essentiellement en Afrique australe et de l'Est), une progression des rendements de 3,2 % par an (pour atteindre une moyenne de 4,9 t/ha en 2025), une croissance de 5,8 % des cheptels et une réduction de 9 % des pertes post-récoltes. Le rapport préconise une « révolution verte » pour l'agriculture africaine, en favorisant le recours aux engrais, aux semences améliorées, à la mécanisation et aux crédits, ainsi que le développement de l'irrigation et des infrastructures rurales. Cette révolution doit bénéficier aux grandes exploitations commerciales ainsi qu'aux petites structures, lesquelles représentent 95 % des exploitations agricoles en Afrique. Le NEPAD recommande également une hausse des aides publiques à destination des ménages pour soutenir la consommation alimentaire, à hauteur de 11,6 % du PIB en 2025 contre 9 % en 2015.
En conclusion de la présentation publique du rapport, le directeur général du NEPAD a insisté sur le fait que ce document doit contribuer à l'élaboration de politiques publiques adaptées, au niveau des États et des communautés économiques régionales.
Guillaume Furri, Conseiller pour les Affaires Agricoles, Service Économique Régional en Afrique Australe, Ambassade de France en Afrique du Sud
Source : NEPAD
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Mondialiser les normes sociales et environnementales : des propositions
En droit international, le droit commercial prime sur la protection de l'environnement ou les droits sociaux. Dans l'avant-dernier numéro de la revue Projet consacré à la mondialisation, A. Zacharie répertorie les leviers qui permettraient d'inverser cette hiérarchie des normes. L'organe de règlement des différends de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) dispose des moyens pour veiller au bon respect des règles du libre commerce, mais les droits sociaux de l'Organisation internationale du travail (OIT) ou les engagements climatiques internationaux ne disposent pas de telles instances juridictionnelles. Parallèlement, pour l'auteur, les multinationales bénéficient d'une asymétrie d'échelle qui leur permet de mettre en concurrence les politiques des États, tandis que le recours croissant à l'arbitrage leur confère la capacité d'attaquer juridiquement les lois sociales et environnementales. Ces clauses d'arbitrage incluses dans les accords d'investissement définissent des droits pour les multinationales plutôt qu'elles ne leur fixent des devoirs.
Afin de tendre vers un « plancher social et environnemental universel », le défi consiste, pour l'auteur, à identifier des mesures que les pays en développement ne considéreront pas comme protectionnistes du fait de leurs normes moins élevées. Il en déduit deux principes : prendre en compte les asymétries de développement et cibler les firmes plutôt que les États.
La déclinaison de ces principes peut se faire de diverses façons. La première option est la moins réalisable à court terme : rendre contraignantes l'ensemble des normes internationales au même titre que les règles du commerce. Une deuxième option consisterait à utiliser le marché européen comme levier pour promouvoir les normes sociales et environnementales, en les rendant obligatoires pour tous les produits importés. L'auteur considère que la compatibilité avec les règles de l'OMC pourrait être assurée, par exemple en ayant recours à une « traçabilité sociale et environnementale » des produits. Une troisième option, imaginée par l'économiste D. Rodrick, serait d'instaurer à l'OMC un « accord sur les sauvegardes sociales et environnementales », permettant aux pays en développement d'imposer aux multinationales des normes issues de leurs propres législations. Plutôt que de s'opposer sur l'accès aux marchés, pays riches et pays pauvres se trouveraient alliés dans la défense de leurs marges de manœuvre politiques respectives.
Bien que revêtant un caractère général, ces analyses concernent au premier chef le secteur agricole et agroalimentaire, dont les régulations sont en permanence l'objet de tensions entre pays du nord et du sud, mais aussi entre multinationales et États.
Alexandre Martin, Centre d’études et de prospective
Source : revue Projet
11:37 Publié dans Mondialisation et international | Lien permanent | Tags : droit, normes, social, environnement | Imprimer | |
14/10/2016
Seconde étude d’impacts sur les émissions agricoles européennes et l’adoption de leviers d’atténuation
Dans la continuité de sa publication EcAMPA de février 2015 (voir un précédent billet sur ce blog), le Joint Research Center a actualisé, cet été, son évaluation économique de la mise en œuvre d'actions d'atténuation par l'agriculture européenne. Cette étude repose, de manière générale, sur les mêmes outils de modélisation.
Deux différences sont néanmoins à relever par rapport à la version précédente. Tout d'abord les auteurs ont construit de nouveaux scénarios, sept sans compter le scénario de référence. Les quatre principaux intègrent une réduction obligatoire des émissions de gaz à effet de serre (GES) par l'agriculture européenne, à hauteur de 20 % par rapport à 2005 (objectif décliné pour chaque État avec un prix carbone de 50 €/tCO2éq). Ces quatre scénarios se différencient par leurs modalités pour atteindre cet objectif : introduction éventuelle de subvention (à hauteur de 80 %), caractère volontaire ou obligatoire des leviers d'atténuation, vitesse de déploiement des technologies.
De plus, de nouvelles actions d'atténuation s'ajoutent aux cinq préalablement étudiées : vaccination visant à réduire la production de méthane par les ruminants, augmentation de la part des légumineuses dans les prairies temporaires, sélection génétique des ruminants (amélioration de la production laitière), etc.
Les principaux résultats d'EcAMPA 2 à l'échelle de l'UE-28 sont :
- une baisse de 2,3 % des émissions en 2030 par rapport à 2005 dans le scénario de référence ; ce pourcentage atteint 14 % avec un taux de subvention de 80 % mais sans objectif de réduction défini ;
- une réduction des émissions (de -20%) qui passe essentiellement par un ajustement de la production (diminution de la taille des cheptels bovins de -16 % et de -9 % de la production de viande par rapport à la référence). Si les subventions atténuent ces impacts, les auteurs évaluent leur coût entre 188 et 278 € la tonne de CO2éq (prix 2030).
Enfin, cette étude explore les conséquences des fuites de carbone, qui réduisent les efforts d'atténuation de l'ordre de 30 %, un effet qui est moindre dans les scénarios avec subventions (14 % à 20%).
Élise Delgoulet, Centre d'études et de prospective
Source : Joint Research Center
11:33 Publié dans Climat | Lien permanent | Tags : ecampa, jrc, émissions agricoles, atténuation | Imprimer | |
13/10/2016
Forêt et bois : une contribution essentielle à l'atténuation du changement climatique
Alors que l'accord de Paris assouplit les règles de comptabilisation du carbone forestier dans les engagements des États, la FAO récapitule dans un rapport récent les différents leviers mobilisables pour l'atténuation du changement climatique (augmentation de la surface forestière, lutte contre la déforestation, bois énergie, bois construction, etc.), et les conditions économiques optimales de leur utilisation. Elle s'appuie sur des travaux théoriques récents et les programmes menés dans différents pays. Cette analyse fait écho à des travaux publiés récemment sur la forêt française.
Potentiel économique de la foresterie par rapport aux autres options d'atténuation dans le secteur de l'agriculture, la forêt et des autres usages des terres, par région en 2030 (d'après Smith et al.)
Source : FAO
Si le boisement et le reboisement restent les plus efficaces pour atténuer à court terme le réchauffement climatique, ils comportent de nombreuses limites : coût du foncier, sécurisation de la propriété, risques politiques. Combiner un coût réduit de plantation et une efficacité maximale de séquestration, qui sont les critères de sélection par la finance carbone, s'avère délicat quand le prix du carbone est faible.
La lutte contre la déforestation a un périmètre d'application restreint par nature, les pays développés ayant déjà adopté des mesures de restriction sur les défrichements forestiers. Dans les pays du Sud, la déforestation est liée à la qualité des sols et aux prix des productions agricoles substituées : dans la majorité des cas, l'avantage économique va aux cultures plutôt qu'au maintien de la forêt. D'où la nécessité de développer les incitations financières (via le programme REDD+ notamment).
Le rapport aborde également les émissions de carbone évitées par l'utilisation du bois-énergie ou matériau. L'amélioration de l'efficacité énergétique est un enjeu fort dans les pays où le bois est un combustible courant (Afrique surtout), en particulier pour la cuisson. Le bilan carbone du bois-énergie est quasiment nul lorsqu'il provient de forêts gérées durablement, en circuit court. Pour le bois-matériau, la difficulté de retracer le cycle de vie des produits, le manque de statistiques fiables sur la production et le commerce des matériaux compliquent l'évaluation du potentiel d'atténuation.
Pour une efficacité optimale, les politiques devraient combiner ces différents leviers (qui se renforcent mutuellement) et mettre en place des outils financiers adaptés.
Muriel Mahé, Centre d’études et de prospective
Source : FAO
11:30 Publié dans Climat, Forêts Bois | Lien permanent | Tags : fao, forêt, atténuation, changement climatique | Imprimer | |
Comment évaluer l'impact des politiques publiques : un guide publié par France Stratégie
France Stratégie, organisme d'expertise placé auprès du Premier ministre, vient de publier un guide à l'usage des décideurs et des praticiens, sur l'évaluation de l'impact des politiques publiques. En se focalisant sur les impacts, ce document se distingue de nombreuses autres publications, qui portent plutôt sur d'autres critères d'évaluation : pertinence, cohérence, efficacité, efficience (cf. schéma ci-dessous). Pour les auteurs, une évaluation d'impact « vise à établir la situation qu’aurait connue la société en l'absence de la politique évaluée ». Ils traitent le sujet sous l'angle de l'évaluation ex post, pour laquelle les données sont disponibles, contrairement à l'évaluation ex ante, qui va chercher à mesurer les impacts potentiels d'une politique non encore mise en œuvre sur la base de simulations.
Les critères d'évaluation d'une politique publique selon le SG-MAP
Source : SG-MAP (2015)
Cet ouvrage décrit, exemples à l'appui, l'ensemble des méthodes pour apprécier les impacts d'une politique publique. La présentation sous forme d'encadrés, avec mention des avantages, limites et références bibliographiques, pour chacune d'elles, confère à ce document un caractère très pédagogique. Est ensuite abordée, dans un deuxième chapitre, la question des effets indirects. Dans un troisième chapitre, les auteurs exposent l'approche qualitative, puis l'approche structurelle, toutes deux permettant d'expliquer les échecs ou succès d'une politique. Cette dernière approche consiste à utiliser un modèle pour réaliser des exercices contrefactuels correspondant à des simulations que l’on aurait pu observer en l’absence de politique publique. L'avant-dernier chapitre est consacré à la comparaison des effets de différents dispositifs concourant à un même objectif. L'un des exemples exposés par les auteurs est l'étude d'impact de plusieurs dispositifs d’emploi : contrat d’apprentissage, contrat de qualification, contrat d’adaptation, etc.
Le document se termine par un rappel des fondamentaux de l'évaluation, parmi lesquels nous retiendrons la nécessité d'anticiper les procédures d'accès aux données. Sur ce point, les auteurs préconisent que la mise en œuvre d'une nouvelle politique soit accompagnée d'un dispositif d'évaluation, mais aussi des moyens nécessaires à sa bonne réalisation, dont cet accès aux données.
Céline Fabre, Centre d'études et de prospective
Source : France Stratégie
11:28 Publié dans 2. Evaluation, 4. Politiques publiques | Lien permanent | Tags : france stratégie | Imprimer | |
Une étude du service économique de l'USDA fait le point sur les rapports fonciers aux États-Unis
Suite à une enquête statistique menée en 2014, par le service économique (ERS) de l'USDA et le service statistique agricole national, une étude approfondie publiée récemment fait un tour d'horizon de la question foncière aux États-Unis. Une des justifications de l'étude est l'âge avancé de nombreux farmers américains. Cette situation amène les auteurs à se poser la question des modalités de transmission des exploitations et d’installation des jeunes agriculteurs, le foncier en étant un déterminant important.
Parmi les principaux résultats de l'étude, on note un renforcement du faire-valoir indirect. Plus de la moitié des terres arables étaient louées en 2014, contre 25 % des prairies permanentes. On remarque par ailleurs que les terres portant les grandes cultures sont les plus louées. Un farmer locataire loue généralement à plusieurs propriétaires fonciers, avec qui il entretient des relations de long terme : malgré la renégociation de 70 % des baux chaque année, les liens sont généralement durables entre propriétaires et exploitants. Les jeunes agriculteurs commencent leur carrière sur des terres louées, et beaucoup acquièrent petit à petit une partie de leur Surface Agricole Utile (SAU). Enfin, sans grande surprise, les plus petits exploitants sont généralement propriétaires d'une part plus importante des terres qu'ils exploitent que les exploitants moyens à grands.
En ce qui concerne les propriétaires fonciers, la majorité d'entre eux ne sont pas des exploitants agricoles actifs. Plus du quart sont des agriculteurs à la retraite et la plupart ont des liens familiaux avec des exploitants en activité. D'après les analystes de l'ERS, dans les années à venir, les terres resteront une affaire familiale, avec une majorité de terres héritées ou vendues entre membres d'une même famille, et destinées à la location à un tiers. Enfin, l'étude traite du niveau d'implication des propriétaires dans les décisions des locataires. Ces derniers, qui louent leurs terres avec des baux très courts (un an dans 70 % des cas), sont souvent amenés à discuter leurs choix concernant leur inscription dans des programmes environnementaux et les régimes de subventions perçues de l’État. Entre ces discussions stratégiques et la renégociation permanente des conditions de location, le coût de transaction pour les locataires est considéré comme particulièrement élevé.
Alexis Grandjean, Centre d'études et de prospective
Source : USDA
11:27 Publié dans Exploitations agricoles, Mondialisation et international | Lien permanent | Tags : etats-unis, foncier | Imprimer | |
12/10/2016
L'empreinte foncière de la consommation des Européens
L'organisation Friends of the Earth a publié fin juillet un rapport analysant l'empreinte foncière de l'Union européenne. L'étude consiste à évaluer dans un premier temps la surface de terres (et ses localisations en reconstituant les chaînes de valeur), nécessaire pour subvenir aux consommations européennes, puis à en déduire les impacts environnementaux et sociaux. Le document associe une présentation générale des méthodes, des principaux résultats et des recommandations.
La méthode, qui n'est pas présentée de manière détaillée, se base sur des travaux de l'IIASA (landflow model) pour le calcul de l'empreinte foncière. On comprend que la mesure de l'impact environnemental et social de celle-ci est plus délicate. Elle se fait notamment en comparant, par le biais de matrices, l'empreinte foncière européenne et les problèmes environnementaux et sociaux (déforestation, dégradation des sols, etc.) présents dans les régions concernées.
L'empreinte foncière européenne, globalement stable depuis 2005, est estimée à 269 millions d'hectares (données 2010), dont 40 % hors de son sol. Cette proportion augmente progressivement depuis 1990 en ce qui concerne les terres cultivées. Les consommations animales et d'huiles végétales en sont les principaux moteurs.
Au-delà des limites méthodologiques, présentées partiellement, le rapport est surtout un appel à l'Union européenne pour qu'elle prenne en compte l'impact que ses consommations agricoles (alimentaires et non alimentaires) et que ses politiques (bio-énergies) ont sur l'usage des terres, en particulier dans les pays en développement. On pourra notamment rappeler ici (voir un précédent billet sur ce blog) une étude publiée en 2010 et analysant l'impact des choix de production européens sur leur « importation virtuelle de terre ».
Pour les auteurs, l'Union se doit de développer des méthodologies de calcul et de mettre en place un suivi d'indicateurs permettant de faire le lien entre ses consommations et leurs impacts à l'international.
Claire Deram, Centre d’études et de prospective
Source : Friends of the Earth
11:25 Publié dans Mondialisation et international | Lien permanent | Tags : foncier, empreinte foncière | Imprimer | |
La préservation de la biodiversité : de nouvelles compétences à développer en agriculture
Dans un avis rendu en septembre, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) identifie la connaissance des écosystèmes et des services qu'ils rendent comme un élément structurant des formations, tant initiales que continues, pour une multitude de métiers, parmi lesquels l'agriculture.
Le rapport en appui à l'avis rendu recense d'abord les différentes méthodes et modalités de comptabilisation des emplois concernés, directement ou indirectement, par la préservation et la restauration de la biodiversité. Il pointe les difficultés à mener ce type d'exercice, dans le cadre de la nomenclature actuelle des « métiers verts », « verdissants » ou des « éco-activités ». En effet, la gestion durable de la biodiversité et les activités de restauration ne sont pas explicitement identifiées, à l'exception de l'entretien et la valorisation des paysages.
L'agriculture et la sylviculture sont exemplaires à ce titre. Seuls les activités et les emplois concernés par l'agriculture biologique d'une part, le reboisement, la sensibilisation à la gestion et la protection des forêts, d'autre part, sont effectivement comptabilisés comme éco-activités par Eurostat. Le constat est identique en prenant l'entrée métiers, une partie minime des emplois de ces secteurs étant identifiée comme « verdissants ».
L'avis souligne pourtant la nécessité stratégique, pour la préservation de la biodiversité, de s'appuyer sur l'ensemble des chefs d'exploitation. Pour ce faire, se basant sur les auditions menées auprès de l'enseignement agricole, le rapporteur préconise de renforcer encore la compréhension des écosystèmes dans les formations techniques, et particulièrement dans le domaine de la production. La diffusion des techniques préservant la biodiversité auprès des agriculteurs installés devrait être assurée par les conseillers des chambres d'agriculture et des coopératives, lesquels devraient bénéficier de formations adaptées.
Comme pour la plupart des secteurs d'activité mentionnés, la préservation de la biodiversité se traduira plus par une évolution des métiers existants, ou le déplacement d'emplois, que par la création nette d'emplois. Une exception toutefois : le développement de l'agriculture biologique ou de la permaculture, plus utilisatrices de main-d’œuvre, devrait continuer à générer des emplois.
Muriel Mahé, Centre d’études et de prospective
Source : CESE
11:22 Publié dans Enseignement et recherche | Lien permanent | Tags : cese, biodiversité, métiers verts | Imprimer | |
11/10/2016
L'Anses publie les résultats de l’Étude Alimentation Totale infantile
Fin septembre, l'Anses a rendu publics les résultats de l’Étude Alimentation Totale infantile (EATi), portant sur les expositions alimentaires aux substances chimiques des enfants de moins de trois ans (non allaités), pour la France métropolitaine. Lancée suite à une autosaisine en 2010, cette étude, une des premières au niveau mondial, vient à la suite des deux premières EAT qui portaient sur les adultes et enfants de plus de trois ans, publiées en 2004 et 2011.
670 substances (cf. schéma ci-dessous) ont été étudiées et l'exposition alimentaire des enfants évaluée pour 500 d'entre elles. Les données de consommation sont issues d'une enquête transversale conduite en 2005 auprès d'un échantillon représentatif de 705 nourrissons et enfants en bas-âge, non allaités. Le plan d'échantillonnage (5 484 produits alimentaires), mené de juillet 2011 à juillet 2012, a permis de couvrir plus de 97 % du régime alimentaire de la population étudiée, les produits étant ensuite cuisinés de façon à refléter les pratiques des foyers. Sur cette base, une évaluation des risques toxicologiques et nutritionnels a été conduite.
Répartition des 670 substances analysées par familles
Source : Anses
Parmi les résultats généraux de l'EATi, l'Anses met en avant « un bon niveau de maîtrise sanitaire », puisque le risque peut être écarté pour 90 % des substances évaluées. Une « vigilance particulière » est toutefois nécessaire pour 9 substances, pour lesquelles « un nombre non négligeable d'enfants présente une exposition supérieure aux valeurs toxicologiques de référence », et le risque ne peut être écarté pour 7 autres substances. Par ailleurs, la couverture des besoins nutritionnels est « globalement satisfaisante » pour 12 minéraux, avec des insuffisances ou des excès d'apports dans certains cas.
Sur la base de ces résultats, l'Anses formule des recommandations générales (meilleure compréhension des contaminations, réduction de l'exposition, acquisition de connaissances pour affiner les évaluations de risque, points méthodologiques) et spécifiques (diversification alimentaire, eau de reconstitution des préparations infantiles, matériaux au contact des denrées). Enfin, des perspectives sont dressées : étude en cours sur les enfants allaités, étude du risque lié aux préparations à l'état nano-particulaire, acquisition nécessaire de données sur le caractère perturbateur endocrinien.
On pourra se reporter à la présentation vidéo de l'étude réalisée par l'Agence :
Julia Gassie, Centre d'études et de prospective
Source : Anses
11:18 Publié dans Alimentation et consommation, Santé et risques sanitaires | Lien permanent | Tags : eat, anses | Imprimer | |
Médiation animale : vers une meilleure prise en compte du bien-être de l'animal
La revue Le Point Vétérinaire a récemment consacré un article au colloque annuel de l'International association of human animal interaction (IAHAIO), qui s'est déroulé en juillet 2016. Cette manifestation a été l'occasion de dresser un bilan des techniques de médiation animale.
La médiation animale, c'est-à-dire l'aide thérapeutique que peut apporter le contact avec un animal, est utilisée depuis plusieurs dizaines d'années. On peut citer notamment la mise au point, à la fin des années 1970, de l'« intervention animale modulée précoce » (IAMP), dont le principe est de favoriser, chez des enfants ayant des troubles de langage, un mode de communication alternatif (tactile, gestuel, olfactif) en les mettant en contact avec des animaux.
Le recours à la médiation animale, outre des bienfaits sur la santé physique (baisse de la tension artérielle, régulation du rythme cardiaque) ou mentale (états dépressifs post-traumatiques notamment), contribue à améliorer les interactions sociales de personnes vivant isolées, par le lien direct avec l'animal d'abord, et par les contacts sociaux qu'il peut engendrer avec d'autres personnes ensuite (lors de promenades des chiens, par exemple). La médiation peut aussi faciliter la réinsertion des détenus, par la responsabilisation que leur donne le fait de s'occuper d'un être dépendant.
Lors de son intervention, Dennis Turner, éthologue à l'Institut d'éthologie appliquée et de psychologie animale de Zurich, a rappelé qu'il convient d'être attentif aux signaux de l'animal et donc de tenir compte aussi de son bien-être dans les actions de médiation. L'animal ne doit pas être limité à un outil au service de l'homme, mais doit pouvoir exprimer le comportement normal de son espèce, au moins sur des plages de temps réservées. Il estime ainsi que des recherches complémentaires permettraient de discerner comment l’animal perçoit les comportements humains et réagit en fonction de ces interactions, afin de mettre en parallèle ces données avec les bénéfices de la médiation animale pour les humains.
Madeleine Lesage, Centre d'études et de prospective
Source : Le Point Vétérinaire
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Ville affamée. Comment l'alimentation façonne nos vies, Carolyn Steel
« Les villes, comme les gens, sont ce qu'elles mangent ». Cette citation, reprise de la quatrième de couverture, illustre pleinement l'objet de cet ouvrage riche et dense, portant sur les relations entre nourriture et ville, et sur la façon dont la première a toujours façonné la seconde. Architecte, C. Steel a consacré sept ans à l'écriture de Hungry city, s'appuyant notamment sur son expérience d'animation du premier atelier de conception urbaine de la London School of Economics : la nourriture représente un « langage commun pour parler de la ville » entre acteurs (architectes, politiques, économistes, promoteurs, sociologues, ingénieurs, etc.). Rédigé à une période où les thématiques alimentaires prennent de plus en plus de place en Angleterre, cet ouvrage n'en traite pas moins de thèmes « essentiels aussi vieux que la civilisation », et se veut une « introduction à un mode de réflexion ».
Les six premiers chapitres suivent les grandes étapes alimentaires : « la terre », « l'approvisionnement », « marché et supermarché », « la cuisine », « à table », « les déchets ». Chacun comprend un portrait de Londres et de la situation anglaise, fait de larges détours historiques et identifie les problèmes actuels. À titre d'exemple, le second chapitre revient sur les modalités historiques d'approvisionnement des villes : si les problématiques varient selon les cas et les époques, certains enjeux restent d'actualité. Ainsi, pour l'auteur, « nous dépendons autant de nos livraisons à flux tendus, énergivores et congelées que les Romains de l'Antiquité dépendaient de leurs conquêtes territoriales, de leurs navires et de leurs esclaves ».
Le dernier chapitre, « Sitopia » (du grec ancien sitos, la nourriture), présente une réflexion sur l'utilisation de la nourriture pour repenser les villes à l'avenir. Partant du projet avorté d'éco-cité de Dongtan et faisant un détour par la façon dont les villes, et leur alimentation, ont été imaginées dans différentes utopies (la cité-État idéale de Platon, l'Utopie de More, les cités-jardins d'Howard notamment), C. Steel envisage à quoi ressemblerait une ville « sitopique », conçue à travers la nourriture et façonnée par elle. L'auteure termine son ouvrage en en appelant à l'implication de chacun au travers de « petites réponses », vecteurs de changements par leur agrégation.
Julia Gassie, Centre d'études et de prospective
Lien : Rue de l'échiquier
11:06 Publié dans Alimentation et consommation, Société | Lien permanent | Tags : système alimentaire, ville, steel | Imprimer | |
10/10/2016
Le paysage, Thierry Paquot
Les discussions sur le paysage font souvent référence à l'agriculture, soit pour considérer, de façon positive, qu'elle entretient et modèle les espaces vécus (jolies collines verdoyantes des régions d'élevage, beaux damiers colorés des zones de plaine, etc.), soit au contraire pour déplorer sa destruction des images ancestrales (disparition des haies et des bocages, tristesse de l'openfield, enfrichement des terres peu accessibles aux agro-équipements, etc.). L’intérêt de cet ouvrage est de "désagricoliser" le débat. Il explique, d'une part, qu'il y a une multitude d'acteurs, de processus et d'activités qui façonnent les paysages. Il montre, d'autre part, que les paysages agraires ne sont qu'un type parmi d'autres d'ordonnancement visuel du territoire : paysages naturels, urbains, péri-urbains, commerciaux, industriels, routiers, etc.
L'auteur privilégie une approche sensible et fait la part belle à l'histoire des idées et des théories, à l'analyse des sentiments et des représentations sociales. Après avoir retracé l'histoire du concept de "paysage", issu du vocabulaire des peintres, il indique comment diverses disciplines se sont emparées de la "question paysagère", depuis la suprématie ancienne des géographes jusqu'à l'actuelle domination des philosophes. Le chapitre suivant explore le "sentiment paysager" à travers les âges et dresse le portrait de quelques penseurs essentiels : Thomson, de Laprade, Reclus, Mornet, Paulhan, Dauzat. D'autres pages, très intéressantes, sont consacrées aux différents enjeux véhiculés par le paysage : objet de reproductions picturales et de jugements esthétiques ; support de promotion touristique ; argument de marketing territorial et politique ; capital à patrimonialiser, à protéger ou à classer. Quant au dernier chapitre, il décrit les métiers qui interviennent directement sur le paysage (les "paysagistes" d'aujourd'hui n'étant plus que des dessinateurs de jardins...), mais aussi tous les autres acteurs qui concourent à leur production : jardiniers du dimanche, apprentis horticulteurs, habitants, aménageurs, architectes, écologues, paysans, ou plutôt "paysangistes", pour reprendre la formule de Jacques Simon.
Au total, ce livre vivant et instructif, complété d'une importante bibliographie, est une très bonne introduction à la géo-histoire de la pensée paysagère.
Bruno Hérault, Centre d'études et de prospective
Lien : éditions La Découverte
11:09 Publié dans Environnement, Société, Territoires | Lien permanent | Tags : paysage, paquot | Imprimer | |
Le Joint Research Center (Centre commun de recherche)
Le Centre commun de recherche (JRC) est une direction générale de la Commission européenne, placée sous la responsabilité du commissaire européen à la Culture, l'Éducation, la Jeunesse et la Citoyenneté. Il a été créé dans le cadre du traité Euratom de 1957, dont l'objectif était de promouvoir la sûreté et la sécurité nucléaire. Le JRC est défini comme « une organisation de soutien aux politiques publiques orientées vers le client et fondée sur la recherche ». Plus de 3000 personnes travaillent au JRC, 77 % sur des projets scientifiques (dont des chercheurs), 21 % au sein de services supports ou administratifs, et les 2 % restants sur le démantèlement nucléaire et la gestion des déchets. Il est composé de sept instituts répartis dans cinq États membres : Institut de prospective technologique à Séville (Institute for Prospective Technological Studies, IPTS), Institut de l'environnement et du développement durable (Institute for Environment and Sustainability, IES) à Ispra, etc.
Le financement du JRC est assuré principalement par le Programme-cadre de recherche et d'innovation, Horizon 2020, pour l'ensemble des thématiques traitées. Son budget annuel est de l'ordre de 330 millions d'euros. Des fonds additionnels viennent de travaux supplémentaires réalisés pour les services de la Commission ou de contrats passés avec des tiers (ex : industries).
Depuis sa création, le JRC, se positionnant en tant que centre de référence, a développé des compétences et outils pour étudier les politiques publiques européennes. 10 champs thématiques sont actuellement identifiés, en particulier « agriculture et sécurité alimentaire » et « santé et protection des consommateurs », ses productions faisant fréquemment l'objet de billets sur ce blog. Prospective et évaluation font partie des travaux conduits par le Centre : par exemple, des publications récentes ont traité des priorités de recherche pour l'alimentation en 2050, de l'évaluation de l'impact de la mesure « diversité d'assolement », etc. Enfin, parmi les outils produits ou utilisés, peuvent être cités les bases de données (ex : AFOLU data portal), les sites d'information comme l'observatoire sur la bioéconomie, les travaux de modélisation par exemple via le modèle Capri dans EcAMPA (voir un autre billet sur ce blog), les cartes sur l'érosion des sols ou la pollinisation, etc.
Élise Delgoulet, Centre d'études et de prospective
Sources : Joint Research Center, Joint Research Center
11:04 Publié dans Enseignement et recherche | Lien permanent | Tags : portrait, jrc | Imprimer | |
07/10/2016
Le Plan Bleu : analyse rétrospective des exercices prospectifs
Dans le dernier numéro de la revue Sciences Eaux & Territoires, un article de S. Fernandez et S. Treyer retrace la prise en compte de la ressource en eau dans les prospectives du Plan Bleu. Ce dernier a été lancé en 1977 par les gouvernements des pays riverains de la Méditerranée, signataires de la Convention pour la protection de la mer Méditerranée contre la pollution (1976). Cet article rétrospectif montre que si « le Plan Bleu a réussi à instaurer un dialogue avec et entre les pays », « il a aussi participé d'une dépolitisation plus générale de la question de l'eau qui rend invisibles les choix qui sous-tendent la manière dont l'eau est gouvernée ». À ce titre, les auteurs soulignent la lecture principalement technique de la « gestion de la demande de l'eau » dans ces prospectives environnementales régionalisées, une lecture qui concentre la réflexion sur l'utilisation optimale de l'eau, écartant de la discussion les questions de répartition de la ressource et de gouvernance.
Source : Sciences Eaux & Territoires
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Une estimation des budgets de la R&D agricole dans le monde
La revue Nature a publié mi-septembre une synthèse sur les dépenses de Recherche & Développement dans le secteur agricole à travers le monde. Les chiffres étayent la thèse d’une double « transition historique » de la R&D. En premier lieu, il s'agit d'une transition entre les pays développés de longue date et les pays émergents (Chine, Brésil et Inde). Selon les auteurs, le secteur agricole et agroalimentaire représente de l’ordre de 5 % de ces dépenses, avec 69,3 milliards de dollars en 2011. 55 % des investissements sont réalisés dans les pays à hauts revenus, contre 69 % en 1980. En second lieu, la recherche est de plus en plus tirée par le secteur privé : 52 % des investissements contre 42 % en 1980 pour les pays à hauts revenus, 35,5 % contre 11 % pour les pays à revenus moyens. La délocalisation de la R&D de certaines firmes multinationales joue ici un rôle important.
Un schéma interactif en ligne permet de visualiser ces évolutions :
Source : Nature
En contrepoint de ces évolutions encourageantes pour les pays émergents, les auteurs déplorent le retrait relatif de la dépense publique dans les pays développés et le niveau toujours très bas de l’investissement dans les pays les moins avancés. Ces deux évolutions ne paraissent pas de bon augure face aux défis alimentaires de 2050.
Source : Nature
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