13/06/2019
Limiter les fuites de carbone dans le secteur agricole dues aux politiques climatiques
Dans un billet publié en mai 2019, A. Matthews s'intéresse aux fuites de carbone dans le secteur agricole entraînées par les politiques climatiques, en s’appuyant sur les résultats de deux études : l'une, publiée en 2019, du Conseil de l’économie environnementale danois et traitant des différents secteurs économiques du pays ; l'autre, EcAMPA 2, publiée en 2016 par le Joint Research Center, et portant sur l’agriculture de l’Union européenne (UE) (voir à ce sujet un précédent billet sur ce blog).
De manière générale, on parle de « fuites de carbone » quand la réduction des émissions de gaz à effet de serre, dans un pays donné, peut conduire à l’augmentation des émissions dans d'autres pays. Le « taux de fuite » est ainsi le rapport, en pourcentage, entre cette augmentation globale et la réduction au niveau national. Ces fuites sont transmises par plusieurs canaux rappelés dans l'article : différentiel de compétitivité-coût, effets sur le prix de l'énergie, retombées technologiques, etc.
La première étude indique que le secteur agricole danois présente un taux de fuite supérieur aux autres secteurs (75 % contre 52 % pour l'économie dans son ensemble), en raison notamment d'importations de produits animaux de substitution, issus de pays hors UE, où l'intensité des émissions est plus élevée. Ce chiffre doit cependant être interprété avec précaution car, pour l'élevage, le modèle utilisé n'autorise, comme moyen de diminuer les émissions, qu'une réduction de l'activité. Pour le secteur agricole à l'échelle de l'UE, l’étude EcAMPA 2 propose plusieurs scénarios et quantifie les taux de fuite associés. Les taux les plus bas (figure ci-dessous) se retrouvent notamment dans deux scénarios, l'un comportant des subventions technologiques pour l'élevage à l'échelle nationale (SUB80_noT), l'autre caractérisé par un effort coordonné des pays européens sur l’ensemble du secteur agricole (SUB801V_15).
A. Matthews conclut son article en présentant cinq options pour réduire les fuites de carbone en agriculture : avoir une approche coordonnée au niveau international ; encourager les innovations portant sur des technologies à faibles émissions afin de conserver les niveaux de production agricole ; taxer le carbone aux frontières ; allouer des quotas d’émissions à titre gratuit ; recycler les recettes d'une taxe carbone dans l'investissement en technologies de réduction des émissions de l'agriculture.
Transferts d'émissions de CO2 des différents scénarios de l'étude EcAMPA 2 (pourcentage par rapport à un scenario de référence)
Source : Joint Research Center
Pacôme Dupont-Guianvarch, Centre d'études et de prospective
Source : CAPreform
09:34 Publié dans 4. Politiques publiques, Climat | Lien permanent | Tags : danemark, ecampa, carbone, politiques climatiques | Imprimer | |
14/10/2016
Seconde étude d’impacts sur les émissions agricoles européennes et l’adoption de leviers d’atténuation
Dans la continuité de sa publication EcAMPA de février 2015 (voir un précédent billet sur ce blog), le Joint Research Center a actualisé, cet été, son évaluation économique de la mise en œuvre d'actions d'atténuation par l'agriculture européenne. Cette étude repose, de manière générale, sur les mêmes outils de modélisation.
Deux différences sont néanmoins à relever par rapport à la version précédente. Tout d'abord les auteurs ont construit de nouveaux scénarios, sept sans compter le scénario de référence. Les quatre principaux intègrent une réduction obligatoire des émissions de gaz à effet de serre (GES) par l'agriculture européenne, à hauteur de 20 % par rapport à 2005 (objectif décliné pour chaque État avec un prix carbone de 50 €/tCO2éq). Ces quatre scénarios se différencient par leurs modalités pour atteindre cet objectif : introduction éventuelle de subvention (à hauteur de 80 %), caractère volontaire ou obligatoire des leviers d'atténuation, vitesse de déploiement des technologies.
De plus, de nouvelles actions d'atténuation s'ajoutent aux cinq préalablement étudiées : vaccination visant à réduire la production de méthane par les ruminants, augmentation de la part des légumineuses dans les prairies temporaires, sélection génétique des ruminants (amélioration de la production laitière), etc.
Les principaux résultats d'EcAMPA 2 à l'échelle de l'UE-28 sont :
- une baisse de 2,3 % des émissions en 2030 par rapport à 2005 dans le scénario de référence ; ce pourcentage atteint 14 % avec un taux de subvention de 80 % mais sans objectif de réduction défini ;
- une réduction des émissions (de -20%) qui passe essentiellement par un ajustement de la production (diminution de la taille des cheptels bovins de -16 % et de -9 % de la production de viande par rapport à la référence). Si les subventions atténuent ces impacts, les auteurs évaluent leur coût entre 188 et 278 € la tonne de CO2éq (prix 2030).
Enfin, cette étude explore les conséquences des fuites de carbone, qui réduisent les efforts d'atténuation de l'ordre de 30 %, un effet qui est moindre dans les scénarios avec subventions (14 % à 20%).
Élise Delgoulet, Centre d'études et de prospective
Source : Joint Research Center
11:33 Publié dans Climat | Lien permanent | Tags : ecampa, jrc, émissions agricoles, atténuation | Imprimer | |