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13/06/2019

Prospective « Zéro émission nette (ZEN) 2050 » : imaginer et construire une France neutre en carbone

L'association française des entreprises pour l'environnement (EpE) a publié, en mai 2019, les résultats d'une prospective sur la neutralité carbone de la France métropolitaine en 2050, compatible avec la croissance économique. Menée par 27 entreprises membres, assistées par un consortium d'experts (Enerdata, Solagro, Carbone 4, Cired), et partagée avec différentes parties prenantes (ONG, scientifiques, organisations professionnelles, etc.), cette étude contribue, selon ses auteurs, à une « appropriation collective » du sujet.

Le rapport s'ouvre sur une analyse de l'évolution des modes de vie, avec la présentation de neuf portraits de ménages français en 2050, caractérisés par leurs besoins de consommation – et donc des niveaux d’émissions de gaz à effet de serre (GES) – et leur motivation à évoluer vers un mode de vie moins carboné. Le document propose ensuite une analyse systémique puis multi-sectorielle des efforts de réduction des GES, afin d'atteindre un niveau d'émissions résiduelles de 100 MtC02eq/an en 2050, ces émissions étant compensées par un puits de carbone équivalent.

Émissions de GES en France (2015-2050, MtCO2eq), par secteurs

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Source : EpE

Le secteur agriculture et alimentation devrait réduire de moitié ses émissions (42 MtC02eq/an en 2050 contre 92 aujourd'hui). La trajectoire proposée par les auteurs nécessite d'amplifier certaines tendances alimentaires : réduction du gaspillage et de la consommation de viande. Côté production, l'effort consisterait en la forte limitation des engrais azotés (- 80 % d'émissions de N2O), l'amélioration de l'efficacité énergétique et la méthanisation des effluents d'élevage (70 %), dans le cadre d'un modèle prônant la qualité alimentaire et combinant agro-écologie et agriculture de précision. Une extension modérée de la forêt, la limitation de l'artificialisation des terres et la séquestration du carbone dans les sols agricoles doubleraient la capacité actuelle de capture du carbone. Enfin, la biomasse agricole, forestière et issue des déchets remplacerait en partie les énergies fossiles (biogaz, agro-carburants, biométhane, bois-énergie), à hauteur de 336 TWh/an, face à une demande estimée à 944 TWh/an en 2050.

Le rapport souligne enfin le rôle structurant de la biomasse pour la transition climatique. Il préconise une gouvernance intersectorielle, encadrée localement et nationalement, pour gérer les concurrences entre les usages de la biomasse, le marché ne pouvant faire seul cet arbitrage.

Claire Bernard-Mongin, Centre d'études et de prospective

Source : EpE

10/05/2019

Le point sur les services écosystémiques de l'agriculture et de la forêt françaises

Pilotée par le ministère de la Transition Écologique et Solidaire, la plate-forme EFESE (Évaluation française des écosystèmes et des services écosystémiques) regroupe des travaux d'évaluation approfondis sur différents types d'écosystèmes français et leurs services. Elle a publié en avril les messages clés issus de la première phase de son programme (2012-2018), portant sur les milieux agricoles, forestiers, urbains, montagneux, aquatiques et marins.

Pour ce qui est des écosystèmes agricoles, qui couvrent 54 % du territoire métropolitain (surface agricole utilisée), l'évaluation montre qu'ils sont porteurs d’une biodiversité riche. Son amplitude et son abondance diminuent toutefois du fait des pratiques agricoles (dont l’usage des produits phytosanitaires), de la simplification des structures paysagères et notamment des réductions des prairies (semi-)permanentes, de la végétation ligneuse et des zones humides. Ces dernières entraînent de façon synergique et avérée la disparition de populations d'oiseaux, de chauves-souris, d'insectes et de la faune des sols, en particulier en grandes cultures. De plus, la teneur moyenne en carbone organique des sols de ces milieux et leur activité biologique ont diminué dans plusieurs régions.

La forêt française couvre, quant à elle, le tiers du territoire métropolitain, avec des tendances plus positives, tant du point de vue de la richesse locale en espèces d’arbres que de diverses caractéristiques reconnues comme importantes pour la biodiversité. Après une phase d’érosion, à la fin des années 1980, l’abondance des oiseaux communs forestiers s’est ainsi stabilisée. Toutefois, de nombreuses espèces de plantes, d'oiseaux et de mammifères de milieux forestiers sont toujours considérées comme menacées. De plus, les forêts métropolitaines ont été fragilisées par les tempêtes et sécheresses des deux dernières décennies, dans un contexte d’augmentation des risques liés, entre autres, au changement climatique.

EFESE fait aussi le compte des services, marchands ou non (largement majoritaires), rendus par ces différents écosystèmes aux agriculteurs et à la société française. À titre d'exemple, les exploitants bénéficient des services de régulation des ravageurs, des maladies et des adventices, de la structuration du sol et de la pollinisation fournis par les écosystèmes agricoles.

Vanina Forget, Centre d'études et de prospective

Source : ministère de la Transition Écologique et Solidaire

12:52 Publié dans 2. Evaluation, Environnement | Lien permanent | Tags : efese, écosystèmes, services écosystémiques, agriculture, forêt |  Imprimer | | | | |  Facebook

15/02/2019

La bioéconomie basée sur la forêt en Europe, une stratégie efficace pour décarboner l'économie mondiale

Telle est la principale conclusion d'un article publié dans la revue Forests en janvier 2019 par une équipe de chercheurs allemands ayant modélisé l'impact, sur les émissions de gaz à effet de serre (GES), d'une hausse de 1 % de la consommation intermédiaire européenne de produits forestiers. La baisse des émissions au niveau mondial serait nettement plus importante, en utilisant ce levier bioéconomique forestier, qu'avec un développement d'une bioéconomie basée sur l'agriculture.

Pour analyser l'impact d'une augmentation de la consommation, dans les process industriels, de produits forestiers en substitution à d'autres intrants, les auteurs ont utilisé un modèle d'équilibre général, qui décrit le fonctionnement de l'économie mondiale de façon globale et détaillée par régions. Ce modèle GTAP est mis à disposition par un réseau international de chercheurs travaillant sur des questions de politique économique (commerce notamment), et qui coopèrent pour produire une base de données économiques cohérente. Les auteurs ont recouru à plusieurs modules complémentaires, de façon à mieux couvrir les problématiques d'usages des sols, à décrire les impacts sur le secteur agricole et à calculer les conséquences en matière d'émissions de GES.

Selon le modèle, une hausse de 1 % de la consommation intermédiaire de produits forestiers, par les 28 pays de l'Union européenne (UE), déplace les équilibres au sein des matières premières renouvelables, notamment en modifiant les rapports de prix des produits et des facteurs de production. D'un côté, la consommation européenne plus importante de bois se traduit par une extension des surfaces forestières, au détriment de l'agriculture, par une augmentation des échanges intra-européens et des importations de produits forestiers en provenance de pays tiers. De l'autre, elle conduit à une hausse des prix des produits agricoles en Europe et à une stimulation de la production dans le reste du monde. Au total cependant, les effets sur le commerce mondial agricole et alimentaire sont négligeables.

In fine, remplacer 1 % de matières premières non forestières par du bois, dans la production industrielle, permettrait de réduire les émissions mondiales de GES de 17,25 Mteq CO2, y compris hors UE (Russie et États-Unis notamment), et ce sans accroître la déforestation en zones tropicales grâce aux contraintes européennes sur le commerce du bois (règlement FLEGT).

Impact d'une hausse de 1 % de la consommation de produits forestiers sur le commerce des pays européens ( %)

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Source : Forests

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : Forests

07/01/2019

« Éloge de l'arbre »

Dans son supplément Idées daté du 22 décembre 2018, Le Monde consacrait une double page à un « éloge de l'arbre », « cet être vertical dont la présence obstinée triomphe sur le temps », « compagnon discret et quotidien ». Alors que se multiplient ouvrages et émissions sur le sujet, l'article rappelle la considération portée à l'arbre dans les rites, par les théologiens, les philosophes, les savants, etc., depuis l'Antiquité jusqu'au romantisme de la fin du XVIIIe siècle. La redécouverte actuelle se produit dans un contexte marqué par une amélioration forte des connaissances du règne végétal et par la crise écologique amenant à un regard inédit sur la nature. Ainsi, le champ de la considération s'élargit aujourd'hui aux plantes (après les animaux). On constate une recrudescence des visites en forêt, le tout dans une réflexion plus large sur la « réinsertion de l'humanité au sein de la nature ». Enfin, ce ne sont plus uniquement les populations qui sont considérées, mais également les individus.

Source : Le Monde

08:50 Publié dans Forêts Bois, Société | Lien permanent | Tags : arbre, forêt, histoire, philosophie, règne végétal |  Imprimer | | | | |  Facebook

06/11/2018

Capter le carbone via les forêts et l'agriculture aux États-Unis : un potentiel difficile à réaliser

Le World Resources Institute entame une série de travaux visant à identifier les moyens, dans les différents pays signataires de l'accord de la COP 21, d'augmenter la captation du carbone atmosphérique pour respecter les engagements pris à Paris. La première analyse se concentre sur l'agriculture et la forêt aux États-Unis.

Ces deux secteurs pourraient ainsi contribuer à capter environ 900 Mteq CO2 supplémentaires par an, dont près d'un tiers proviendrait de la reforestation de terres non agricoles (friches minières, landes, etc.). Selon les méthodes mobilisées (changement de pratiques agricoles ou de gestion forestière, modification des assolements, agroforesterie, replantations, etc.), le coût marginal estimé resterait de l'ordre de 50 à 100 $ par tonne, avec des risques d'augmentation au fur et à mesure de l'accroissement des conflits d'usage des terres (usages alimentaires, énergétiques, production de fibres, urbanisation). D'autres freins, tels que le manque de financements et la structure de la propriété, sont également identifiés.

Les auteurs pointent par ailleurs de nombreuses incertitudes persistant en matière d'évaluation des flux et des stocks de carbone. En particulier, l'insuffisance de données sur la captation de carbone par les sols et l'impact d'une gestion adaptée, a jusqu'à présent limité la prise en compte de ce potentiel dans la plupart des travaux disponibles.

Approches visant à réduire la concentration du carbone dans l'atmosphère

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Source : World Resources Institute

Source : World Resources Institute

08:38 Publié dans Agronomie, Climat, Forêts Bois | Lien permanent | Tags : etats-unis, carbone, agriculture, forêt, cop21 |  Imprimer | | | | |  Facebook

05/10/2018

Mesurer plus précisément la déforestation par le biais des images satellitaires

Une équipe de chercheurs a récemment développé un modèle d'analyse des images satellitaires permettant d'identifier plus précisément les causes de la régression du couvert forestier. Ces travaux ont été publiés dans Science en septembre.

Il est aujourd'hui possible de visualiser les changements d'usage des sols et la « disparition » des forêts. Le site Global Forest Watch proposé par le World Resource Institute, permet de voir les variations du couvert forestier entre différentes périodes, avec une couverture géographique détaillée. En revanche, il était difficile jusqu'alors de déterminer les raisons de cette disparition par le seul examen des images. En combinant l'analyse spatiale avec des éléments statistiques (démographie, incendies de forêt, développement économique, etc.), il est désormais possible d'en connaître la typologie : déforestation pour l'agriculture ou l'urbanisation, incendie, exploitation forestière, défrichement temporaire.

Principaux moteurs de la perte de couvert forestier entre 2001 et 2015

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Source : Science

Ces développements permettent de mieux comprendre les écarts entre la réduction des surfaces observée par les satellites et les changements d'usage des sols déclarés par les pays. Ils devraient aussi faciliter le ciblage des actions menées pour limiter la déforestation.

Source : Science

09:40 Publié dans Forêts Bois | Lien permanent | Tags : forêt, déforestation, images satellitaires, sols, usage des sols |  Imprimer | | | | |  Facebook

13/09/2018

La valeur d'avenir de la forêt dépend de l'aversion au risque de son propriétaire

C'est la conclusion de travaux récents de recherche sur l'impact de la sensibilité au risque des propriétaires forestiers, dans un contexte de volatilité des prix de vente des bois.

Les principes de la gestion forestière prennent appui sur les travaux de Faustmann (cf. article de la Revue forestière française). Il a, le premier, déterminé la valeur d'une forêt (sa valeur d'avenir puisque les gains ne se réaliseront que de manière très différée et à plusieurs reprises sur le long terme) et l'âge optimal d'exploitabilité des bois (par conséquent le rythme de rotation des coupes au sein de l'aménagement forestier). La limite de l'approche proposée par Faustmann réside en particulier dans la non prise en compte des incertitudes, notamment de prix.

Si différents travaux ont porté sur l'adaptation des choix de gestion des peuplements à la volatilité des prix des produits forestiers, aucun n'a jusqu'alors intégré la sensibilité du propriétaire au risque. En effet, ce dernier peut retarder une coupe en espérant notamment un redressement des cours : il arbitre alors entre l'immobilisation financière prolongée et l'espérance d'un gain accru, celui-ci étant tiré d'un accroissement du volume (poursuite de la croissance des arbres non coupés) et d'une augmentation hypothétique des prix.

Afin de mieux représenter le comportement du propriétaire, les auteurs ont construit un modèle basé sur une approche heuristique de la décision de réaliser ou non une coupe de bois, dans un contexte de volatilité des prix. Cette décision dépend en particulier du degré d'aversion au risque du gestionnaire, du niveau des prix, du taux d'intérêt, etc. Ils comparent alors les performances obtenues par le modèle en matière de valeur d'avenir de la forêt, et l'impact sur la durée des rotations, avec les résultats tirés de l'approche de Faustmann ou d'une stratégie de prix de réserve.

Les auteurs démontrent ainsi que, quel que soit le degré de volatilité des prix ou le niveau des taux d'intérêt, une telle approche de la décision de récolte permet de mieux optimiser la valeur d'avenir pour une certaine catégorie d'aversion au risque. Pour s'approcher encore plus de la réalité, il serait toutefois intéressant d'introduire une tolérance au risque variable dans le temps (le propriétaire devenant de plus en plus averse au risque quand le peuplement vieillit et acquiert de la valeur) ou d'autres hypothèses de distribution des prix.

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : Land Economics

10:22 Publié dans Forêts Bois | Lien permanent | Tags : forêt, valeur d'avenir, risque, aversion |  Imprimer | | | | |  Facebook

11/07/2018

Anticiper les changements climatiques en Nouvelle-Aquitaine pour agir dans les territoires

Cinq ans après un premier rapport, le comité scientifique régional AcclimaTerra vient de publier une nouvelle édition. Sous la direction d'H. Le Treut, cette deuxième livraison est le fruit de la mobilisation d'environ 240 chercheurs. Elle intègre le périmètre élargi de la Nouvelle-Aquitaine et de nouvelles thématiques et disciplines (dont les sciences humaines). Face à la complexité des questions climatiques et de la transition environnementale, la région représente un espace d'action, de réflexion, de débat et d'éducation citoyenne, l'adaptation devant se concevoir avant tout à l'échelle des territoires. S'adressant à l'ensemble des acteurs concernés (élus, citoyens, etc.), les auteurs veulent accompagner cette démarche (défi de l'interface entre diagnostic scientifique et « complexité du fait social ») et fournissent des informations pour aider à la prise de décision. Une lecture à plusieurs niveaux est ainsi proposée (ouvrage, synthèse, infographies, compléments disponibles en ligne, etc.).

Évolution des émissions de gaz à effet de serre par secteur et par gaz, entre 1990 et 2015

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Source : AcclimaTerra

Après un rappel des données clés de la région la plus vaste de France (5,9 millions d'habitants, 84 % du territoire occupés par l'agriculture et la forêt, etc.), quinze chapitres présentent des analyses détaillées sur des thématiques variées : dépendance entre climat local et climat global, approches historique et juridique, santé environnementale, milieux naturels, territoires urbains, massifs montagneux, etc. La ressource en eau, l'agriculture, la forêt, la pêche et la conchyliculture font ainsi l'objet de développements intéressants.

Extrait (volet « adaptation ») de l'infographie synthétisant le chapitre consacré à la pêche et à la conchyliculture

acclimaterra2.jpg

Source : AcclimaTerra

De la conclusion, il ressort que tous les territoires de la Nouvelle-Aquitaine sont, à des degrés divers, vulnérables au changement climatique, ce qui appelle, pour les auteurs, des actions différenciées tenant compte des inégalités. Ils soulignent également des besoins de travaux scientifiques, par exemple pour mieux établir les risques et estimer la vulnérabilité des territoires. Ils identifient par ailleurs des actions nécessaires dans divers domaines (ressource en eau, forêt, montagne, zones humides, pêche, conchyliculture, etc.). Ils insistent aussi sur l'urgence à agir en matière agricole, en mettant à profit les débats actuels, entre autres sur les produits phytosanitaires : repenser les systèmes de production en tenant compte de la durabilité économique et de la diversité des exploitations, ainsi que des changements d'habitudes alimentaires.

Julia Gassie, Centre d'études et de prospective

Source : AcclimaTerra

07/06/2018

Les risques professionnels des travailleurs de l'agriculture, de la pêche et de la forêt augmenteront avec le changement climatique

L'Anses a publié en avril 2018 les résultats d'une expertise collective sur les risques induits par le changement climatique, à l'horizon 2050, sur la santé des travailleurs. À partir de la littérature scientifique, les auteurs identifient les évolutions climatiques et environnementales les plus probables, et les relient aux risques professionnels via les « circonstances d'exposition » de chacun. L'agriculture, la foresterie, la pêche et l'aquaculture apparaissent fortement exposées.

Risques liés au changement climatique par secteur d’activité

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Source : Anses

La hausse des températures augmentera l'exposition à la chaleur et la pénibilité du travail, avec des impacts directs et indirects sur les risques professionnels, particulièrement forts pour les métiers d'extérieur. Chez les travailleurs agricoles, la chaleur pourrait conduire au développement de maladies chroniques, notamment respiratoires. Les sécheresses agricoles, plus longues et plus intenses, généreront des hausses de concentrations atmosphériques de poussières, contribuant à ces pathologies et aux expositions aux substances pesticides et biocides. Par ailleurs, la chaleur aggravera les feux de forêts et les risques professionnels directs en foresterie.

Le changement global modifiera les zones de répartition de vecteurs de maladies infectieuses (moustiques, tiques, etc.), faisant ainsi évoluer les risques (en particulier infectieux et allergiques) liés aux agents biologiques, notamment pour les personnes travaillant en milieu naturel ou en contact avec des animaux. Dans le milieu agricole, l’utilisation potentiellement plus importante de produits phytosanitaires, en réaction à d’éventuelles augmentations des pathologies des cultures et des animaux d’élevage, pourrait accroître le risque chimique.

Enfin, les modifications de la fréquence et de l’intensité de certains aléas climatiques (inondations, submersions, sécheresses, feux de forêts, etc.) pourront conduire à une augmentation des risques, en particulier accidentels, de fatigue physique et psychique, dans le monde agricole et forestier. L'augmentation de la fréquence des tempêtes sera un risque direct pour les travailleurs en extérieur et notamment de la pêche.

L'Anses conclut le rapport par plusieurs recommandations à destination du monde du travail et de la recherche afin de mieux anticiper et prévenir ces risques.

Vanina Forget, Centre d'études et de prospective

Source : Anses

14/05/2018

Désigner les arbres, un acte de sylviculture hautement subjectif

C'est ce que démontre une étude récemment publiée dans la revue PLoS ONE, à partir de l'analyse des choix d'arbres à exploiter dans le cadre d'éclaircies au sein de peuplements sur-capitalisés. L'acte de désignation des arbres est essentiel en matière de gestion sylvicole : il permet progressivement de choisir et élever, dans les conditions les plus favorables (accès à la lumière et à l'eau), les plus beaux spécimens (souvent d'un point de vue économique) d'un peuplement forestier. Il s'agit alors d'identifier par une marque (martelage), les arbres à abattre (ou à conserver, dans les premières éclaircies) par le bûcheron. Pour ce faire, les forestiers s'appuient sur les préconisations des guides sylvicoles, les objectifs de gestion du peuplement, et leur propre évaluation des arbres in situ.

Afin de mesurer l'impact du facteur humain dans cette sélection, les auteurs ont utilisé les résultats de tests de désignation menés dans 12 marteloscopes (espaces forestiers à vocation pédagogique), répartis sur tout le territoire de la Grande-Bretagne, avec 19 équipes de 9 à 20 personnes. Au total, 36 opérations de martelage ont été analysées selon deux axes : l'intensité plus ou moins forte du martelage (nombre d'arbres désignés par personne) et la convergence en matière de choix d'arbres (nombre de fois où l'arbre a été retenu).

Dans le cadre de l'étude, les situations proposées étaient globalement équivalentes, seule la localisation géographique variant : peuplements soumis à une faible intensité de gestion dans lesquels il fallait proposer une éclaircie, avec une majorité de forêts résineuses. Deux modalités d'éclaircie ont été comparées : « éclaircie par le bas » (suppression des arbres dominés par les sujets à conserver) et « éclaircie par le haut » (suppression de sujets co-dominants).

Répartition empirique des opérations de martelage selon le degré de convergence des évaluations (test statistique du Kappa), d'une convergence nulle (k < 0,1 ; « Poor ») à parfaite (k>0,9 ; « Perf. »)

Noir : éclaircies par le bas – Rouge : éclaircies par le haut

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Source : PLoS ONE

Les résultats montrent qu'il n'y a pas de consensus en matière de désignation, et le dissensus est plus prononcé lors des éclaircies par le haut. Pour parvenir à cette conclusion, les auteurs se sont notamment inspirés de travaux menés dans le domaine médical, sur l'analyse de la convergence des diagnostics. Ils ont tenté d'expliquer, sans succès, une partie de ces différences d'évaluation par le niveau de compétences ou le degré de complexité du peuplement : à rebours des hypothèses préalables, les experts les plus chevronnés se sont avérés les moins convergents dans leurs avis, et les peuplements apparemment les plus complexes à évaluer facilitent des prises de décision similaires. Un travail plus fin d'analyse des comportements serait ainsi nécessaire pour approfondir ces premiers éléments.

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : PLoS ONE

13:45 Publié dans Forêts Bois, Travail et emploi | Lien permanent | Tags : forêt, martelage, sylviculture |  Imprimer | | | | |  Facebook

06/02/2018

Développement d'une bioéconomie forestière européenne : bilan des connaissances et perspectives

Dans une récente publication, le European Forest Institute fait le point sur des réflexions publiées ces derniers mois sur la bioéconomie liée à la forêt, et présente un état des lieux des connaissances et des questions de recherche. Les différents articles thématiques abordent des points particulièrement sensibles, parmi lesquels : la disponibilité de la ressource, les conséquences sur la biodiversité, l'impact des types de propriété forestière, la contribution à l'atténuation ou à l'adaptation au changement climatique, l'emploi et les compétences dans la filière, etc.

Dans ce dernier cas, les auteurs relèvent la difficulté de disposer de statistiques couvrant l'étendue de la filière, notamment dans un contexte de développement de nouveaux usages pour le bois. Ils identifient aussi un risque important pour l'essor de cette bioéconomie : le développement du travail illégal dans l'exploitation forestière qui, en diminuant la rentabilité des exploitants légaux, pourrait conduire à une forte hausse des accidents et à des difficultés croissantes pour trouver des entreprises de travaux forestiers, intermédiaires entre forêt et industrie. Ce risque est d'autant plus important qu'au cours des 20 dernières années, dans tous les pays européens, propriétaires publics et industries de transformation ont massivement externalisé l'exploitation forestière.

Source : European Forest Institute

10:12 Publié dans Biomasse/Biocarburants, Forêts Bois | Lien permanent | Tags : efi, bioéconomie forestière, forêt |  Imprimer | | | | |  Facebook

07/07/2017

Quel niveau de prélèvement optimal en forêt finlandaise à l'horizon 2100 ?

À 100 millions de m³ par an, le niveau de prélèvement dans les forêts finlandaises prévu par la stratégie nationale pour la bioéconomie est nettement supérieur aux 65 millions actuels. Ce niveau est-il soutenable en matière de production forestière, de stocks, de biodiversité et de balance carbone ? C'est ce qu'une équipe de chercheurs a voulu tester, à climat constant et à l'horizon de 90 ans. Un article dans Forest Policy Economics en rend compte.

Pour ce faire, les auteurs ont utilisé les dernières données d'inventaire forestier, ainsi que des modèles de croissance forestière. Ils ont également formulé diverses hypothèses sur l'utilisation du bois (matériau ou combustible) et sur les cycles de vie des produits. L'exercice a consisté à maximiser la production de bois (bois d’œuvre et bois énergie) et la rentabilité de la gestion forestière, tout en imposant l'atteinte d'un niveau de prélèvement variant, selon cinq scénarios, de 40 Mm³ à 100 Mm³ en moyenne annuelle pour les 9 tranches successives de 10 ans (soit de 2010 à 2100).

Les variations induites par l'intensité de la gestion sur la dynamique, la composition et l'âge moyen des peuplements, le taux de bois mort et le pourcentage de feuillus, ont permis d'établir, d'une part, les conséquences sur les stocks et l'accroissement annuel forestiers et, d'autre part, sur des indicateurs de biodiversité.

À climat inchangé, et sans modification sensible des sylvicultures (pas de fertilisation ni de recours accrus aux plantations), il apparaît que les niveaux de prélèvement de 80 Mm³ et 100 Mm³ ne peuvent pas être maintenus de manière régulière sur l'ensemble de la période. Les auteurs ont ainsi calculé que le niveau maximal de prélèvement, pour une alimentation régulière de l'industrie de transformation, était de 73 Mm³ (scénario « soutenable »). Par ailleurs, plus le niveau de prélèvement annuel est élevé, moins la proportion de bois d’œuvre est importante et plus celle d'épicéa est forte.

Mix produits prélevés en fonction des différents scénarios de prélèvement en forêt finlandaise

Référence (Ref) : répartition actuelle des volumes prélevés entre 2004 et 2013. Scénarios de prélèvement annuel de 40 Mm³ (S40) à 100 Mm³ (S100). SUS est le scénario « soutenable »

finlande2.jpg

Source : Forest Policy and Economics

Enfin, à climat et risques (sanitaires et climatiques) constants, les objectifs de production de bois, de contribution à la balance carbone et de protection de la biodiversité apparaissent contradictoires, rendant indispensable une approche globale.

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : Forest Policy and Economics

15:39 Publié dans 1. Prospective, Forêts Bois | Lien permanent | Tags : forêt, finalnde, prélèvement |  Imprimer | | | | |  Facebook

06/07/2017

La forêt européenne, au cœur d'attentes contradictoires

Conscients de la multiplicité des attentes envers les forêts européennes, assez souvent contradictoires, un groupe pluridisciplinaire de chercheurs européens a récemment publié un état des lieux des dernières connaissances scientifiques. Ils alertent sur les incohérences ou contradictions des politiques de l'UE, renforcées par les engagements internationaux.

Vue générale de l'utilisation du bois en Europe, en équivalent m³ de bois

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Source : EASAC

De fait, la forêt reste de la responsabilité des pays membres, les politiques forestières nationales obéissant à des objectifs différents. Cependant, certaines politiques européennes ont un impact fort dans ce domaine : les politiques climatique et énergétique, notamment, comportent des dispositions relatives à la forêt ou à la production de biomasse. Aussi, après une présentation générale de la forêt européenne et des politiques dédiées, les auteurs ont-ils choisi d'approfondir les aspects liés aux engagements internationaux (climat, biodiversité) ou aux politiques européennes (énergie, climat). Compte tenu de l'hétérogénéité des forêts européennes, ils distinguent, enfin, les opportunités pour la gestion forestière selon les trois grands types de forêt (boréales, tempérées et méditerranéennes).

Parmi les nombreux éléments identifiés, les auteurs insistent sur l'utilisation de biomasse forestière à des fins énergétiques, compte tenu de la parité carbone (temps nécessaire pour reconstituer le stock de carbone après exploitation énergétique). Si l'utilisation de résidus d'exploitation ou de transformation contribue positivement à la lutte contre le changement climatique, l'emploi d'arbres dans leur totalité n'est amorti qu'au bout de plusieurs décennies, voire siècles, en fonction de la source d'énergie fossile considérée et de l'essence retenue.

Diagramme théorique de la dette et de la parité carbone

bois-europe2.jpg

Source : EASAC

Arbitrant entre les différents objectifs en matière de production de bois, de biodiversité et de lutte contre le changement climatique, les auteurs formulent, en conclusion, plusieurs recommandations susceptibles de guider les décideurs politiques à l'échelle nationale ou européenne : elles vont de la conception de nouveaux outils de gestion forestière à la révision des niveaux de référence pour la comptabilité LULUCF.

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : European Academies Science Advisory Council (EASAC)

15:35 Publié dans 4. Politiques publiques, Forêts Bois | Lien permanent | Tags : politiques européennes, forêt |  Imprimer | | | | |  Facebook

18/04/2017

Modéliser les causes de la déforestation et identifier les zones à risque pour mieux cibler les politiques

Déterminer, d'une part, la pression humaine sur la forêt et localiser, d'autre part, les zones potentiellement impactées, tel est l'objectif d'une nouvelle approche de modélisation de la déforestation en Guyane, détaillée dans un article récent publié par Global Change Biology.

La modélisation de la déforestation s'appuie généralement sur des cartographies très précises des zones soumises à une forte pression des populations. Si certaines approches ont intégré des facteurs explicatifs d'ordre économique, concilier des paramètres de spatialité (micro versus macro) et de temporalité (court terme versus long terme) différentes pose de nombreux problèmes méthodologiques. Le modèle présenté résout ce dilemme en couplant un modèle géospatial de la déforestation, à l'échelle du pixel d'observation (permettant de simuler les zones à risque en matière de déforestation), et des sous-modèles macroéconomiques, visant à expliciter les phénomènes socio-économiques à l'origine de la déforestation.

Diagramme général de fonctionnement du modèle de déforestation en Guyane

guyane.jpg
Source : Global Change Biology

Ces derniers sont zonés de façon à isoler chaque facteur prépondérant, permettant une approche régionalisée de la pression de déforestation. Trois zones ont ainsi été déterminées, obéissant chacune à des logiques différentes et à un sous-modèle spécifique : la région côtière, au nord, concentrant l'essentiel de la population et des défrichements à des fins agricoles ; la zone aurifère où la déforestation dépend essentiellement de la production d'or ; le domaine forestier permanent (forêts domaniales) où la pression provient de l'exploitation forestière. Cette spécialisation territoriale est rendue nécessaire par les temporalités différentes qui régissent la déforestation induite : de court terme dans le cas de la production d'or, à plus long terme pour les défrichements sous la pression démographique.

Au vu des simulations rétrospectives, ce type de modèle paraît robuste à la fois à un niveau local et à une échelle plus macro-économique. Il offre de nouvelles perspectives pour guider les politiques en faveur de la déforestation, notamment dans le cadre des programmes REDD+. Toutefois, l'application de cette méthode à d'autres territoires dépend fortement de l'accès à des données annuelles spatialisées de déforestation, mais aussi de la capacité à réaliser un zonage socio-économique, pour en identifier au plus près les facteurs.

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : Global Change Biology

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16/01/2017

Indicateurs de gestion durable des forêts et bioéconomie européenne soutenable

Le risque est grand que la pression pour une mobilisation accrue de bois, afin de contribuer à la bioéconomie, ne se traduise par une réduction des autres services rendus par la forêt. Il est donc important de compléter les jeux d'indicateurs de gestion durable, développés au niveau européen, pour prendre en compte tous les enjeux actuels du secteur forestier. Tel est l'objet d'une publication récente de l'European Forest Institute.

Les indicateurs de gestion durable forestière, mis en place au milieu des années 1990 dans le cadre d'une initiative pan-européenne, sont largement et régulièrement utilisés par les pays européens (ex : dernière édition 2015 en France, publiée en mars 2016), ainsi que par les institutions internationales. Toutefois, ils restent centrés sur la forêt et l'utilisation traditionnelle des produits forestiers (papier, sciages). De son côté, la stratégie européenne en faveur de la bioéconomie, focalisée sur les technologies utilisant les produits de la photosynthèse, met en avant l'utilisation de la biomasse forestière et fait l'impasse sur les autres services forestiers (biodiversité, loisirs, stockage du carbone). Ainsi, les indicateurs permettant de mesurer la réalité de la bioéconomie sont à la fois nombreux, épars et sectoriels.

Indicateurs actuels de gestion durable forestière (en noir) et indicateurs complémentaires (en bleu) sur l'ensemble de la chaîne de valeur forêt-bois

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Source : European Forest Institute

L'étude a donc eu pour objectif d'identifier des indicateurs pertinents qui pourraient compléter le jeu actuel dans deux directions :

- mieux suivre les impacts de la gestion forestière durable sur les services écosystémiques et intégrer l'ensemble de la chaîne de valeur de la biomasse forestière ;

- les croiser avec les différentes dimensions liées à la bioéconomie, et mesurer les interactions avec les autres secteurs.

S'appuyant sur une expérience de 20 ans en matière d'indicateurs partagés, le secteur forestier est largement précurseur. Alors que l'analyse identifie près de 70 indicateurs potentiels, parmi les 200 recensés dans la bibliographie (pour l'essentiel provenant d'autres secteurs), l'European Forest Institute propose trois stratégies possibles, non exclusives, capitalisant sur l'existant : compléter le jeu actuel par des items liés à la bioéconomie ; développer un jeu indépendant d'indicateurs en partant du cadre fourni par la stratégie européenne ; mettre en place des indicateurs clés intersectoriels (par exemple développés par Eurostat ou l'Agence européenne pour l'environnement).

Muriel Mahé, Centre d’études et de prospective

Source : European Forest Institute

09:39 Publié dans Biomasse/Biocarburants, Forêts Bois | Lien permanent | Tags : efi, bioéconomie, évaluation, indicateurs, forêt |  Imprimer | | | | |  Facebook