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09/06/2020

Dualisme de l’agriculture antillaise et agro-écologie

Un article publié dans l'European Journal of Agronomy évalue la nature et l’ampleur des pratiques agro-écologiques en Martinique et Guadeloupe. Alors que la plupart des travaux se fondent souvent sur un seul indicateur, V. Angeon (INRAE) et ses collègues ont analysé un échantillon de 215 structures au moyen de plusieurs variables : surface agricole totale et part cultivée avec des pratiques agro-écologiques, marge brute par hectare, etc. Cinq types de structures sont identifiés. Il apparaît notamment que les petites et moyennes exploitations diversifiées, entrepreneuriales ou familiales, dont la production est orientée vers le marché local, présentent fréquemment des pratiques agro-écologiques (ex. : rotation des cultures dans 30 % à 65 % des cas selon la catégorie). À l’opposé, les structures spécialisées dans la production de banane ou de canne à sucre destinée à l’export ont des pratiques moins agro-écologiques. Pour les auteurs, l’introduction de l’élevage dans ces exploitations valoriserait les légumineuses associées à la culture de la banane tandis que le jus de canne serait une alternative à l'alimentation animale importée.

Source : European Journal of Agronomy

11:13 Publié dans Agriculteurs, Agronomie | Lien permanent | Tags : antilles, agro-écologie, martinique, guadeloupe |  Imprimer | | | | |  Facebook

21/01/2020

Vers le « zéro chlordécone » : 48 propositions pour réparer les préjudices occasionnés en Guadeloupe et en Martinique

L'Assemblée nationale a publié en décembre le rapport d'une Commission d'enquête sur les impacts économique, sanitaire et environnemental de l’utilisation du chlordécone comme insecticide agricole en Guadeloupe et Martinique, ainsi que sur les responsabilités publiques et privées dans la prolongation de son autorisation. L'objectif était également d'évaluer la nécessité et les modalités d'une indemnisation des préjudices pour ces territoires.

Autorisé à la vente entre 1972 et 1993, le chlordécone fut utilisé, dans les plantations de bananes antillaises, pour lutter contre le charançon, en dépit de sa dangerosité pour l'environnement et la santé humaine. Cette toxicité avait ainsi été constatée dès les années 1970 (scandale d'Hopewell, classement de la molécule comme « cancérigène possible » en 1979, etc.). Depuis, le lien épidémiologique a été démontré entre cette substance et l'incidence du cancer de la prostate, de troubles du neuro-développement de l'enfant et de la prématurité des naissances. Malgré le retrait de l'autorisation du chlordécone en 1993, les terres et eaux antillaises sont encore contaminées du fait de sa forte rémanence dans les sols. Ainsi, la molécule est présente dans 36 % des échantillons d'eau analysés en Basse-Terre de Guadeloupe et 90 % des sources martiniquaises seraient pollués. Cette contamination se retrouve par la suite dans les denrées alimentaires produites localement (ex. : racines et tubercules, élevages de ruminants, crustacés).

Pathologies étudiées et modes d'action susceptibles d'expliquer les principales associations observées en lien avec les expositions environnementales au chlordécone

Chlordecone1.jpg

Source : Assemblée nationale

Le rapport retrace l'histoire de l'usage de cette molécule et de son autorisation en agriculture. Il démontre la responsabilité de multiples acteurs, au premier rang desquels l’État qui, en autorisant la molécule alors que sa toxicité et sa rémanence étaient avérées, a mis en danger les populations locales. Les auteurs citent ensuite les acteurs privés (producteurs et distributeurs de chlordécone, représentants du secteur de la banane) qui ont joué un rôle important dans le maintien de la molécule sur le marché, et ce même après le retrait de son homologation.

Les députés présentent enfin 49 recommandations pour « sortir » du chlordécone et réparer les préjudices, parmi lesquelles la co-construction du prochain « plan chlordécone » avec les populations locales, la réalisation d'une cartographie intégrale de l'état de contamination des sols, un dépistage et un suivi sanitaire systémiques et gratuits pour les populations les plus exposées. Ils recommandent également un accompagnement des agriculteurs dans les démarches de dépollution, un financement prioritaire de la recherche sur les effets du chlordécone sur la santé et la mise en place d'un fonds d’indemnisation pour les victimes atteintes de pathologies occasionnées par l'exposition à cette molécule.

Estelle Midler, Centre d'études et de prospective

Source : Assemblée nationale

17/09/2019

Fonctionnement de la concurrence en Outre-mer

Début juillet 2019, l'Autorité de la concurrence a publié un avis sur le fonctionnement de la concurrence dans les Départements et régions d'Outre-mer (DROM), actualisant une première livraison de 2009. Plusieurs constats généraux sont posés pour les cinq territoires étudiés (Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion, Mayotte). D'après des travaux de l'Insee repris dans l'avis, les écarts de prix à la consommation par rapport à la métropole persistent, ils sont significatifs et en grande partie imputables aux produits alimentaires (tableau ci-dessous). De plus, les spécificités fiscales (régime de TVA, octroi de mer), géographiques et économiques (marchés étroits, fort déséquilibre commercial, échanges commerciaux en grande majorité avec la métropole), peuvent affecter ces prix.

Écarts de prix, en 2015, entre DROM et métropole selon trois indicateurs (indice de Fisher, panier local acheté en métropole, panier métropolitain acheté localement)

DROM.jpg

Source : Autorité de la concurrence, d'après données Insee, calculs et tableau Autorité de la concurrence

Note de lecture : un ménage métropolitain augmenterait ses dépenses alimentaires de 47,9 % en Martinique s'il consommait les mêmes produits et services qu'en France métropolitaine. À l'inverse, un ménage martiniquais réduirait de 22,6 % ses dépenses alimentaires s'il consommait en France métropolitaine à l'identique de sa consommation martiniquaise. Au final, les prix alimentaires sont 38,2 % plus élevés en Martinique qu'en France métropolitaine.

L'Autorité analyse ensuite finement le fonctionnement des différents marchés ultramarins, de l'amont à l'aval, les coûts et chiffres d'affaire de la distribution de produits de grande consommation, ainsi que les enjeux associés au commerce en ligne. On peut notamment retenir que la vente au détail est dominée par les grandes enseignes nationales, les enseignes de hard discount étant peu présentes. De même, produits à marques de distributeur et premiers prix jouent un rôle limité, à l'inverse des promotions sur des produits à marque nationale. Créé en 2012, le « Bouclier qualité-prix » (BQP) est largement salué mais rencontre des difficultés de mise en œuvre. L'import direct (produits achetés directement par les distributeurs auprès des fournisseurs métropolitains ou étrangers) augmente depuis 2009, représentant 45 % de la part moyenne (en valeur) des importations dans les achats de marchandise. Toutefois, spécialisés et localisés dans les DROM, les grossistes-importateurs conservent un rôle important. Par ailleurs, la production locale est limitée et peu compétitive, bien que prédominante dans certains cas : produits frais et ultra-frais, spécificités culinaires et culturelles, marques locales notoires. Les possibilités d'exportation sont très réduites (hors bananes et produits de la filière sucrière), et les subventions et l'octroi de mer jouent un rôle déterminant, pour ce segment en cours de structuration. Enfin, l'Autorité considère que les « produits de dégagement » (issus principalement de l'élevage, viande fraîche de volaille en particulier), ne peuvent être considérés comme concurrents de l'offre locale car non substituables.

Enfin, l'Autorité énonce dix-neuf recommandations visant à i) améliorer les études de prix et encourager l'action des observatoires des prix, marges et revenus, ii) évaluer les conditions d'application de l'octroi de mer, iii) réformer le BQP, iv) améliorer la régulation du fonctionnement des marchés, v) encourager une organisation plus efficace des filières locales (structuration, différenciation par des signes de qualité), vi) favoriser le développement du commerce en ligne.

Julia Gassie, Centre d'études et de prospective

Source : Autorité de la concurrence