Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

12/12/2017

Les instruments de marché peuvent-ils promouvoir la séquestration de carbone dans les sols agricoles ?

L'agriculture représentait 9,9 % des émissions de gaz à effet de serre européennes en 2014. Or, les sols agricoles ont une capacité de séquestration du carbone importante. La diffusion de pratiques agricoles favorables à cette séquestration pourrait donc aider l'Union européenne à atteindre ses objectifs de réduction des émissions : c'est l'idée de l'initiative « 4 pour 1000 » lancée à la COP 21 en 2015. Dans cette optique, des chercheurs allemands ont réalisé une expérience avec des agriculteurs pour évaluer l'impact potentiel de différents instruments économiques visant à promouvoir de telles pratiques agricoles. Les résultats de cette évaluation ex ante ont été publiés en octobre dans la revue Ecological Economics.

152 agriculteurs allemands ont pris part à cette expérience en participant à un jeu simulant la réalité d'une exploitation agricole, et ont été rémunérés sur la base de leurs décisions. Dans ce jeu, ils disposaient chacun d'une ferme de 100 hectares sur laquelle ils devaient répartir trois cultures (blé d'hiver, colza d'hiver, maïs ensilage), chacune ayant des coûts, des prix et des rendements différents, pour 5 saisons culturales. De plus, pour chaque assolement, ils pouvaient choisir de mettre en place des pratiques favorables au stockage de carbone dans les sols, ce qui augmentait également la probabilité qu'ils aient des rendements élevés. Ensuite, plusieurs instruments économiques pour promouvoir ces pratiques étaient introduits, parmi lesquels une subvention (de type mesure agro-environnementale et climatique), de 30 €/ha, et un certificat (type crédit carbone), dont le prix variait de manière aléatoire entre 25 et 35 €/ha. Chaque agriculteur rejouait alors 5 autres saisons en présence d'un des instruments. Les résultats de l'analyse statistique montrent que les instruments proposés permettent d'augmenter l'adoption de ces pratiques. Les auteurs trouvent également, contrairement à ce qui était attendu, que les certificats, qui ne garantissent pas un prix fixe et connu à l'avance à l'agriculteur, sont plus efficaces que les subventions.

Cet article illustre bien le potentiel des expériences économiques pour l'évaluation ex ante des politiques agricoles. Toutefois, les résultats sont à prendre avec précaution, leur transférabilité au monde réel dépendant fortement de la conception de l'expérience et des paramètres choisis. Ici, par exemple, l'adoption de pratiques favorables à la séquestration de carbone dans les sols n'est pas coûteuse pour les agriculteurs.

Estelle Midler, Centre d'études et de prospective

Source : Ecological Economics

16/05/2017

En Allemagne, les subventions au biogaz se capitalisent dans le prix des loyers agricoles

Dans la continuité des débats sur la compétition entre productions alimentaires et énergétiques, l'European Review of Agricultural Economics a publié, en avril, un article de deux chercheurs démontrant l'effet inflationniste des subventions au biogaz sur les prix des locations des terres, dans les régions du nord de l'Allemagne présentant une forte densité d'élevages.

Issu de la fermentation de déchets organiques, d'effluents d'élevage mais également de cultures énergétiques (comme le maïs), le biogaz peut constituer pour les agriculteurs un débouché alternatif pour leurs productions végétales, à l'instar des biocarburants. Pour ces derniers, les effets des subventions sur les loyers agricoles et leur captation par les propriétaires des terres ont bien été documentés. Les auteurs partent de cette base pour discuter les mécanismes sous-jacents à la détermination du prix des terres et construire leurs hypothèses de travail. D'une part, des différences pourraient apparaître selon que les usines de biogaz appartiennent aux agriculteurs ou à des investisseurs en capital. D'autre part, la rentabilité du biogaz étant accrue lorsqu'il est issu d'effluents d'élevage, les usines de production devraient plutôt se concentrer dans les zones d'élevage et, de fait, y accroître la compétition sur l'usage des cultures, et donc pousser à la hausse les loyers agricoles. Ces hypothèses sont testées dans le nord de l'Allemagne, région de fort développement des installations de biogaz, avec les données du dernier recensement agricole disponible dans ce pays (2010). Des outils d'économétrie spatiale sont mobilisés afin d'intégrer explicitement les effets d'interdépendance locale des loyers agricoles.

Les résultats prouvent que la densité des usines de biogaz est corrélée à un accroissement significatif des prix de location des terres arables, ce uniquement dans les régions de forte concentration d'élevages. Cet accroissement est estimé entre 61 et 141 € par hectare selon la densité régionale d'élevage (pour un loyer moyen de 402 €/ha) et se révèle indépendant de la forme de propriété des installations. Les auteurs concluent que cet effet inflationniste des subventions au biogaz, introduites par la loi allemande sur l'énergie renouvelable, a augmenté indirectement les coûts de production des éleveurs. Ils rappellent néanmoins que cette loi a été revue en 2012, 2014 et 2016 afin de réduire la pression sur l'usage des terres.

Effets marginaux de la densité en biogaz sur les loyers des terres arables, en fonction de la densité régionale en élevage

biogaz.jpg

Source : European Review of Agricultural Economics

Vanina Forget, Centre d'études et de prospective

Source : European Review of Agricultural Economics

11:21 Publié dans Biomasse/Biocarburants | Lien permanent | Tags : allemagne, biogaz, subvention, prix des terres |  Imprimer | | | | |  Facebook