15/03/2018
Impacts de la PAC sur le marché des terres agricoles en Pologne : d'importantes différences suivant les contextes régionaux
Une équipe d'économistes de l'Institut de développement rural et agricole de l'Académie polonaise des sciences a publié, dans Land Use Policy, une analyse des impacts des aides de la politique agricole commune (PAC) sur l'allocation des ressources foncières agricoles dans le pays. Si la capitalisation des droits à paiements dans le prix des terres a été largement étudiée et les facteurs de sa variabilité identifiés, les chercheurs mettent en évidence le rôle incitatif des aides dans le cadre de conflits sur l'accès aux ressources, dans des contextes socio-économiques particuliers aux différentes régions polonaises.
Afin d'isoler les impacts propres aux aides de la PAC, les auteurs ont utilisé le modèle d'équilibre général calculable POLTERM. Après avoir déterminé des zones homogènes de niveaux d'impacts, ils ont cherché à y corréler les caractéristiques régionales pour mesurer et expliquer, par des facteurs associés, les mécanismes de l'influence de la PAC sur les marchés fonciers. Cette analyse des variations de prix des terres et des baux, ainsi que de l'usage agricole ou non des terres à l'échelle intermédiaire des régions (NUTS 2), a mis en évidence des particularités locales marquées.
Impacts des aides des premier et second piliers de la PAC sur le prix des terres agricoles polonaises, de 2004 à 2013 ( %), par région
Source : Land Use Policy
Les analyses montrent que si les prix ont fortement crû près des villes (ex : régions de Ślaskie, Dolnoślaskie and Łódzkie), cette augmentation est avant tout liée aux reconversions de terres agricoles en terrains constructibles, générant des conflits d'usage importants entre agriculture et développement urbain. Le poids des aides de la PAC est relativement faible, dans l'augmentation des prix des terres dans les régions agricoles éloignées des centres urbains, où les grandes structures issues de l'époque communiste dominent. A contrario, dans les zones où les exploitations de petite taille sont nombreuses, les subventions ont sensiblement contribué à freiner la concentration des terres et à réduire le dynamisme du marché foncier. Comme le soulignent les chercheurs, si les subventions ont limité la déprise agricole dans plusieurs territoires, elles ne contribuent pas à limiter l'artificialisation des sols et freinent les ré-allocations entre petits agriculteurs.
Alexis Grandjean, Centre d'études et de prospective
Source : Land Use Policy
11:02 Publié dans 4. Politiques publiques, PAC | Lien permanent | Tags : pologne, foncier, prix des terres | Imprimer | |
16/05/2017
En Allemagne, les subventions au biogaz se capitalisent dans le prix des loyers agricoles
Dans la continuité des débats sur la compétition entre productions alimentaires et énergétiques, l'European Review of Agricultural Economics a publié, en avril, un article de deux chercheurs démontrant l'effet inflationniste des subventions au biogaz sur les prix des locations des terres, dans les régions du nord de l'Allemagne présentant une forte densité d'élevages.
Issu de la fermentation de déchets organiques, d'effluents d'élevage mais également de cultures énergétiques (comme le maïs), le biogaz peut constituer pour les agriculteurs un débouché alternatif pour leurs productions végétales, à l'instar des biocarburants. Pour ces derniers, les effets des subventions sur les loyers agricoles et leur captation par les propriétaires des terres ont bien été documentés. Les auteurs partent de cette base pour discuter les mécanismes sous-jacents à la détermination du prix des terres et construire leurs hypothèses de travail. D'une part, des différences pourraient apparaître selon que les usines de biogaz appartiennent aux agriculteurs ou à des investisseurs en capital. D'autre part, la rentabilité du biogaz étant accrue lorsqu'il est issu d'effluents d'élevage, les usines de production devraient plutôt se concentrer dans les zones d'élevage et, de fait, y accroître la compétition sur l'usage des cultures, et donc pousser à la hausse les loyers agricoles. Ces hypothèses sont testées dans le nord de l'Allemagne, région de fort développement des installations de biogaz, avec les données du dernier recensement agricole disponible dans ce pays (2010). Des outils d'économétrie spatiale sont mobilisés afin d'intégrer explicitement les effets d'interdépendance locale des loyers agricoles.
Les résultats prouvent que la densité des usines de biogaz est corrélée à un accroissement significatif des prix de location des terres arables, ce uniquement dans les régions de forte concentration d'élevages. Cet accroissement est estimé entre 61 et 141 € par hectare selon la densité régionale d'élevage (pour un loyer moyen de 402 €/ha) et se révèle indépendant de la forme de propriété des installations. Les auteurs concluent que cet effet inflationniste des subventions au biogaz, introduites par la loi allemande sur l'énergie renouvelable, a augmenté indirectement les coûts de production des éleveurs. Ils rappellent néanmoins que cette loi a été revue en 2012, 2014 et 2016 afin de réduire la pression sur l'usage des terres.
Effets marginaux de la densité en biogaz sur les loyers des terres arables, en fonction de la densité régionale en élevage
Source : European Review of Agricultural Economics
Vanina Forget, Centre d'études et de prospective
11:21 Publié dans Biomasse/Biocarburants | Lien permanent | Tags : allemagne, biogaz, subvention, prix des terres | Imprimer | |