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15/11/2021

Vers une recrudescence des acquisitions de terres agricoles par des investisseurs étrangers ?

Plus de dix ans après l’envolée des acquisitions de terres agricoles par des investisseurs étrangers, suivie d’une relative accalmie, le rapport Land Matrix de septembre 2021 s’inquiète d’un éventuel rebond, porté par la reprise économique post-Covid.

L’initiative internationale Land Matrix Project surveille depuis 2009 l’étendue et la nature réelle de la « ruée vers les terres », en répertoriant et analysant les projets de transactions foncières supérieures à 200 hectares qui impliquent un transfert de propriété, de droit d’exploitation ou de contrôle de la terre. Le réseau a ainsi documenté des transactions portant sur près de 30 millions d’hectares entre 2000 et 2020. Ce troisième rapport se base sur l’analyse de ces données et sur une revue de littérature pour mieux comprendre les impacts variés des acquisitions de terres à grande échelle.

Les auteurs considèrent que les transactions foncières étrangères à grande échelle n’ont dans l'ensemble pas tenu leurs promesses en matière de développement rural. Elles s’accompagnent souvent de peu de bénéfices socio-économiques, en matière d'infrastructures, de productivité ou d'emploi (figure ci-dessous). De plus, elles portent atteinte aux forêts tropicales, aux habitats naturels et à la biodiversité, aux frontières agricoles de l’Amazonie, de l’Asie du Sud-Est et du bassin du Congo.

Création potentielle d’emplois à travers les acquisitions de terres à grande échelle (par type de culture)

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Source : Land Matrix

Lecture : calculs effectués sur la base de données de la Land Matrix. Pour les cultures et les régions sélectionnées, la superficie totale est de 13 168 545 ha. Seules les transactions conclues ont été incluses, à l’exception des transactions abandonnées. Seules sont présentées les données relatives aux cultures associées à un potentiel de création d’emplois supérieur à 50 000 et pour lesquelles au moins 15 transactions ont été conclues dans les régions sélectionnées.

Selon les analyses de Land Matrix, ces terres acquises sont cultivées majoritairement pour approvisionner les marchés internationaux de produits de base. Elles accueillent en particulier près de 20 % de la surface mondiale de production d’huile de palme, 10 % de celles de caoutchouc et de betterave à sucre, 5 % de celle de canne à sucre, contre moins de 1 % de celle cultivée en maïs, blé et riz. Les productions agricoles issues de ce foncier ont donc un effet limité sur la sécurité alimentaire, mais elles provoquent une augmentation de la concurrence pour les terres.

Les auteurs de ce rapport montrent l’urgence de repenser les modalités d’acquisitions de terres à grande échelle, pour les transformer en contributions responsables et durables à un développement qui respecte les droits humains et l’environnement. Land Matrix présente ainsi 11 recommandations politiques pour l’avenir, à consulter en ligne.

Soulignons enfin la disponibilité des données sur le site internet de Land Matrix, permettant de visualiser les tendances à l'échelle mondiale ou nationale.

Cécile Poulain, Centre d'études et de prospective

Source : Land Matrix

12/03/2021

Une évaluation de l'impact des acquisitions foncières à grande échelle sur la sécurité alimentaire des pays cibles en Afrique

Depuis les années 2000, certains « pays en développement » sont la cible d'investisseurs visant à acquérir ou louer de larges étendues de terres agricoles. Dans un article publié dans World Development, trois chercheurs analysent ce phénomène qui suscite des interrogations quant à ses implications socio-économiques et environnementales, et est parfois présenté comme un moyen d'améliorer la productivité agricole et la sécurité alimentaire des pays cibles.

Pour l'évaluer, les auteurs ont analysé les transactions foncières à grande échelle recensées en Afrique, depuis 2000, dans la base de données Land Matrix. Au total, près de 500 transactions dans 38 pays africains ont été étudiées. Les auteurs ont d'abord estimé le niveau de sécurité alimentaire des pays cibles au regard des quatre critères utilisés par l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) : disponibilité, qualité et accessibilité de l'alimentation, stabilité des approvisionnements. Ils ont ensuite identifié le « critère prioritaire », c'est-à-dire celui qui était le plus dégradé. Enfin ils ont répertorié, pour chacune des transactions, la production envisagée (cultures alimentaires, polyvalentes ou spécifiquement de rente) et le débouché (marché local ou export). Sur cette base, ils ont déterminé le critère de la sécurité alimentaire que les investissements étaient le plus susceptible d'améliorer. En effet, une transaction associée à une production destinée aux marchés locaux permettra vraisemblablement de renforcer la disponibilité de l'alimentation dans le pays cible. A contrario, un investissement impliquant des cultures de rente destinées à l'export permettra probablement au pays cible d'accumuler des devises, et donc de renforcer sa capacité d'importation pour faire face à l'instabilité de ses propres approvisionnements.

Les auteurs montrent que, dans 14 pays, les transactions à grande échelle ne contribuent pas de manière appropriée à la sécurité alimentaire du pays cible, car elles améliorent un critère non prioritaire. Seuls 7 pays voient leur sécurité alimentaire renforcée de façon adéquate (figure ci-dessous). Dans ces conditions, les auteurs estiment que les investissements à grande échelle, tels qu'ils sont actuellement pratiqués, sont peu susceptibles d'améliorer la sécurité alimentaire des pays cibles.

Contribution des investissements à grande échelle à la sécurité alimentaire des pays cibles en Afrique

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Source : World Development

Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective

Source : World Development

04/10/2018

L'université Harvard et ses investissements fonciers

En septembre 2018, GRAIN consacre un rapport à l'université Harvard en tant qu'acteur majeur des investissements fonciers à l'échelle mondiale. Selon les auteurs, un réseau complexe et opaque de sociétés lui ont permis, jusqu’en 2017, d’acquérir 850 000 ha pour un montant de 930 millions de dollars. Ils s'appuient sur des données issues des déclarations d'impôt de l'université et de ses filiales, sur les investissements en ressources naturelles (données Preqin), des rapports universitaires ainsi que des témoignages des populations concernées. Les terres ont été achetées au Brésil, en Afrique du Sud, en Ukraine, en Nouvelle-Zélande, en Australie et aux États-Unis. Le rapport indique que ces transactions ont pu être sources de conflits avec les populations locales, et avoir des conséquences néfastes sur l'environnement et la ressource en eau. C'est notamment le cas dans la région du Cerrado au Brésil où des partenariats avec des sociétés locales ont permis de prendre le contrôle de grandes surfaces par la suite déforestées pour la culture du soja ou de la canne à sucre. Dans le cas présent, l'échec productif de ces investissements témoigne du caractère spéculatif des projets.

Terres agricoles du Fonds de dotation de l'université Harvard

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Source : GRAIN

Source : GRAIN

09:33 Publié dans Mondialisation et international, Territoires | Lien permanent | Tags : foncier, investissements fonciers, harvard |  Imprimer | | | | |  Facebook