11/07/2022
Controverses sur les modifications ciblées du génome appliquées aux animaux d’élevage
Dans cet article publié en mai 2022, les auteurs analysent les prises de position d'acteurs français (scientifiques, professionnels, représentants de la société civile, etc.) sur la question des animaux génétiquement modifiés (AGM). L'arrivée d'outils de modification génétique ciblée, comme CRISPR-Cas9, a multiplié les travaux de recherche dans le domaine végétal, mais aussi animal. Hormis les questions scientifiques, les auteurs distinguent deux types d'argumentaire émergeant des premières prises de position. Les promoteurs veulent sortir de l'ancien débat sur les OGM en nommant différemment ces nouvelles techniques (NBT, édition du génome) et en présentant leur intérêt sous l'angle du bien-être animal dans les élevages (écornage des vaches, modification in ovo du sexe des poussins pour éviter le broyage des mâles, etc.). Leurs détracteurs, quant à eux, les appellent « nouveaux OGM » ou « OGM cachés », et y voient plutôt un outil pour poursuivre l'intensification des élevages, les détournant alors d'une évolution vers des systèmes plus durables.
Source : INRAE Productions animales
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31/05/2022
Bataille des brevets autour de la propriété intellectuelle des nouvelles techniques d’édition du génome
Le site Inf’OGM analyse une décision récente sur les nouvelles techniques d’édition de gènes CRISPR-Cas9. Le 1er mars 2022, l’Office des brevets et des marques des États-Unis a mis fin à un litige sur leur propriété industrielle. Il attribue le brevet de cette technique sur les cellules eucaryotes (animales et végétales) au Broad Institute (Harvard) et celui sur les cellules procaryotes à l’université de Californie (Berkeley). De son côté, l’Office européen des brevets n’a délivré qu’un seul brevet, à l’université de Berkeley, accueillant la chercheuse J. Doudna. Rappelons que celle-ci a rédigé en 2012, avec E. Charpentier, le premier article scientifique sur cette technique, récompensée en 2020 par le prix Nobel de chimie.
Source : Inf’OGM
15:27 Publié dans OGM, Société | Lien permanent | Tags : génome, brevet, crispr-cas9 | Imprimer | |
13/02/2020
Les enjeux éthiques de la modification du génome des animaux
Après un avis consacré aux nouvelles techniques d'amélioration génétique des plantes (2018), le comité consultatif d'éthique commun Inra-Cirad-Ifremer a publié, fin 2019, un avis sur la modification génétique des animaux par les technologies d’édition du génome. Les auteurs rappellent l'importance, pour la compréhension des mécanismes d'expression et de régulation des gènes (via leur inactivation ou modification ciblée), des techniques récentes d'édition du génome et de mutagenèse dirigée (notamment Crispr-Cas9 – voir à ce sujet un précédent billet sur ce blog). Elles posent de nouvelles questions éthiques à la sélection génétique animale, analysées dans cet avis.
Le comité se penche d'abord sur l'édition du génome des animaux de rente. Toutes les espèces domestiques sont en effet potentiellement concernées par des modifications de ce type, visant à améliorer la santé des animaux (ex. : résistance à l'influenza aviaire pour les volailles), à modifier des caractères liés à l'élevage (ex. : bovins sans cornes) ou des caractères de production (ex. : inhibition de la production de protéines allergènes). Le comité estime que la prise en compte et l'amélioration du bien-être animal doivent être au cœur des nouvelles stratégies de sélection, sans toutefois chercher à adapter des animaux à des conditions d'élevage difficiles.
Pour les auteurs, de telles modifications génétiques doivent procurer des avantages aux animaux, aux consommateurs et à la société. Ils recommandent alors que chaque projet de recherche soit soumis à un comité réunissant chercheurs, acteurs des filières et société civile, en amont des travaux.
Dans une deuxième partie, le comité étudie les techniques d'édition du génome des espèces considérées comme nuisibles, notamment celle du forçage génétique (gene drive), pour contenir les populations d'insectes ravageurs ou vecteurs de maladies. Ce forçage repose sur la propagation des modifications génétiques apportées et il contredit donc les mesures habituelles de biosécurité (confinement). Les auteurs considèrent que, vu le caractère « rudimentaire » des connaissances actuelles, ces techniques comportent trop d'incertitudes sur leur efficacité et leurs effets écosystémiques : ils invoquent le principe de précaution et appellent à développer des travaux de recherche dédiés avant de permettre leur utilisation.
Jean-Noël Depeyrot, Centre d'études et de prospective
Source : Inrae
09:45 Publié dans Enseignement et recherche, Société | Lien permanent | Tags : éthique, génome, animaux, mutagenèse, crispr-cas9 | Imprimer | |
06/09/2018
Les impacts potentiels, pour l'élevage, des animaux génétiquement modifiés
Le 21 juin dernier, l'Académie vétérinaire a consacré une séance à l'apport des nouvelles technologies génomiques en élevage, s'intéressant tant aux espèces aviaires qu'aux ruminants et à la filière ostréicole. Parmi les cas présentés figure la technologie CRISPR Cas-9 (voir à ce sujet un précédent billet, un second billet et une brève sur ce blog) et son utilisation pour supprimer les protéines allergisantes du blanc d’œuf, avec la perspective de diminuer certains risques allergiques alimentaires. S'agissant des maladies animales, des recherches sont conduites pour supprimer la transmission de l'influenza aviaire grâce à l'obtention de poulets génétiquement modifiés. En matière de bien-être animal, a été également mentionnée l'insertion d'un marqueur sur un chromosome sexuel permettant de différencier embryons mâles et femelles au niveau de l’œuf avant l'éclosion. Ceci contribuerait à résoudre une question éthique en mettant fin à l'élimination des poussins mâles, et permettrait aussi une utilisation industrielle des œufs embryonnés (production de vaccins par exemple).
Source : Académie vétérinaire de France
09:35 Publié dans 5. Fait porteur d'avenir, Enseignement et recherche | Lien permanent | Tags : génétique, élevage, génomique, crispr-cas9, bien-être animal | Imprimer | |
06/03/2017
L'Académie des sciences se penche sur les enjeux éthiques liés à la technologie CRISPR-Cas9
L'Académie des sciences a organisé un colloque, le 21 février dernier, sur les questions éthiques soulevées par la technologie CRISPR-Cas9, spécialement consacré aux enjeux pour le secteur agricole. Cette technologie représente une véritable révolution en ingénierie génétique (voir à ce sujet un précédent billet sur ce blog), permettant d'intervenir directement sur le code génétique de tous les êtres vivants. Ce complexe enzymatique ouvre de nombreuses voies de recherche et présente déjà des applications potentielles dans le secteur de la santé, mais aussi de la production agricole et de l'industrie agroalimentaire (voir un autre billet sur ce blog).
Le développement rapide de cette technologie, grâce à sa puissance, sa polyvalence et sa simplicité, n'est pas sans susciter de nombreux défis éthiques. Le colloque a permis en particulier d'aborder ceux liés aux applications pour les plantes cultivées et les animaux d'élevage.
Source : Académie des sciences
09:23 Publié dans Enseignement et recherche | Lien permanent | Tags : crispr-cas9, ethique | Imprimer | |
17/11/2016
Une revue du potentiel des techniques d'ingénierie génétique CRISPR-Cas9
Dans le numéro de septembre 2016 de Nature Biotechnology, J. Doudna et R. Barrangou passent en revue les perspectives offertes par la technologie CRISPR-Cas9 (voir à ce sujet un précédent billet sur ce blog), en termes de recherche fondamentale mais aussi d'applications pratiques. Quatre ans seulement après la publication dans Science de l'article fondateur, cette technologie issue d'un mécanisme bactérien de lutte contre les virus a connu un développement scientifique particulièrement intense dans de nombreux domaines de la biologie. Les auteurs reviennent ainsi sur les principales voies de recherche développées aujourd'hui dans plus de cinquante pays sur le système CRISPR-Cas9 : de l'étude au perfectionnement des outils d'ingénierie génétique, jusqu'à leur application concrète. En effet, ce système, par sa plasticité, sa sélectivité et un coût de mise en œuvre déjà faible, ouvre de nombreuses et prometteuses possibilités concrètes, qui ne sont pas sans poser des questions écologiques et éthiques.
Par exemple, les recherches progressent rapidement dans l'intervention sur le génome des micro-organismes, ouvrant la voie à des moyens de lutte inédits contre les bactéries et virus, capables de cibler des pathogènes au sein d'une population bactérienne, et constituant alors un nouveau type d'antibiotiques à action spécifique. Dans le secteur agricole, de nombreux développements montrent que les outils CRISPR pourraient accélérer la sélection génétique de caractères ciblés. Leur combinaison avec la génomique statistique a déjà permis le développement de porcs protégés contre des virus ou de vaches laitières dépourvues de cornes. Par ailleurs, de nombreux travaux sont déjà menés sur les plantes cultivées (maïs, soja, tomate), et des champignons blancs génétiquement édités pour résister au brunissement ont été autorisés à la production et la commercialisation aux États-Unis, où ils ne sont pas considérés comme « génétiquement modifiés » car ils ne contiennent aucun ADN étranger (à l'inverse des premières générations d'OGM).
C'est probablement dans l'industrie agroalimentaire que les utilisations du système CRISPR-Cas9 sont les plus avancées. C'est d'ailleurs à partir de travaux sur les souches bactériennes lactiques destinées à la fabrication de yaourts que les mécanismes immunitaires des bactéries ont été mis en évidence, conduisant rapidement à la découverte du complexe CRISPR-Cas9. Différentes souches de bactéries lactiques ont ainsi pu être vaccinées contre des virus néfastes. Si les opportunités semblent évidentes en termes de recherche, les techniques d'édition génétique (voire de propagation rapide par gene-drive) soulèvent toutefois de nouvelles questions réglementaires et sociétales.
Jean-Noël Depeyrot, Centre d'études et de prospective
Source : Nature Biotechnology
10:27 Publié dans 5. Fait porteur d'avenir, Agronomie, Enseignement et recherche, IAA, Protection des végétaux et des animaux | Lien permanent | Tags : crispr-cas9 | Imprimer | |
08/04/2016
CRISPR-Cas9 : une révolution pour l'ingénierie génétique
Le 22 mars 2016, Emmanuelle Charpentier et Jennifer Doudna ont présenté à l'Académie des Sciences leur découverte des mécanismes moléculaires CRISPR-Cas9, expliquant de manière très pédagogique le fonctionnement de ce complexe, son utilisation comme outil d'ingénierie génétique et les enjeux portés par cette révolution technologique, notamment dans le secteur agricole.
E. Charpentier a ainsi expliqué comment des travaux de recherche fondamentale en biologie bactérienne ont permis la mise en évidence d'un véritable système immunitaire chez les bactéries, leur permettant notamment de faire face aux agressions de virus. Ce système immunitaire adaptatif repose sur un complexe associant des portions de génome viral intégrées au chromosome bactérien (Clustered Regularly Interspersed Palindromic Repeats) à une protéine enzymatique de type Cas, capable de découper l'ADN. Les séquences CRISPR, issues de virus précédemment rencontrés par les lignées bactériennes, produisent des sections d'ARN, qui s'associent étroitement avec les protéines Cas ; ce complexe est alors capable, lors d'une agression virale, de reconnaître très spécifiquement l'ADN viral, par complémentarité avec l'ARN associé, et de le découper, stoppant ainsi l'agression.
L'association protéine-ARN confère à ce système une efficacité et une spécificité très importantes, qui en ont fait rapidement un véritable "scalpel" pour intervenir sur l'ADN : en modifiant la séquence d'ARN associée, on peut choisir de façon très précise l'endroit où l'ADN sera découpé. Si certaines technologies permettaient déjà d'intervenir de façon ciblée sur l'ADN, elles nécessitaient des développements dédiés pour chaque utilisation ; le complexe CRISPR-Cas9 offre en revanche une souplesse et une précision inédites qui en font une véritable innovation de rupture en matière d’ingénierie génétique.
J. Doudna a developpé les opportunités offertes par cette technologie, mais aussi ses enjeux environnementaux et éthiques. En effet, la technologie CRISPR-Cas9 permet des modifications du génome de tout être vivant, de façon précise, efficace et peu onéreuse. La puissance de cet outil offre de nouvelles opportunités de recherche, fondamentale ou appliquée (notamment pour la production de biocarburants et la chimie biosourcée), mais doit aussi susciter des réflexions approfondies en termes d'éthique et de biodiversité, et pose la question du statut des organismes ainsi modifiés.
Jean-Noël Depeyrot, Centre d'études et de prospective
Source: Académie des sciences
10:17 Publié dans Enseignement et recherche | Lien permanent | Tags : académie des sciences, crispr-cas9 | Imprimer | |