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08/02/2022

Investir dans le capital humain en agriculture

L'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et l'International Food Policy Research Institute (IFPRI) ont récemment publié les résultats de leurs travaux menés sur le capital humain en agriculture. L'investissement dans les compétences s'est élevé, en moyenne, entre 2015 et 2018, à seulement 3 % du total investi dans l'aide au développement agricole au niveau mondial (figure ci-dessous).

Fonds internationaux alloués au soutien en matière de développement, par secteur économique et thématique, pour la période 2015-2018

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Source : FAO

L'analyse s'est appuyée sur 20 études de dispositifs formels et informels visant à développer les compétences des agriculteurs, dont 9 ont fait l'objet d'une étude approfondie comportant une évaluation d'impacts. Ces études sont réparties dans le monde entier : Cameroun, Chili, Côte d'Ivoire, États-Unis, Inde, Indonésie, Kenya, Pérou, Rwanda. Les auteurs en dégagent six ensembles de recommandations, parmi lesquelles l'adaptation des modalités de formation au profil des agriculteurs, en mobilisant les outils numériques de manière adaptée aux compétences des apprenants. Il s'agit également d'accroître les budgets alloués à la formation et au conseil, de mettre en place des incitations à la formation et, surtout, de développer la recherche sur le capital humain en agriculture.

Source : FAO

17/01/2019

Les nouveaux entrants en agriculture, plus entrepreneurs que price takers

À l'échelle mondiale, le contexte réglementaire ou le paysage industriel influencent fortement les orientations techniques des agriculteurs qui s'installent. En revanche, les aptitudes individuelles et les choix personnels des nouveaux entrants expliqueraient en grande partie le dynamisme de leur exploitation, selon des travaux récemment publiés dans l'European Review of Agricultural Economics.

S'inscrivant dans le prolongement de recherches précédemment réalisées par les auteurs sur le secteur agricole, à partir des données rassemblées par le Global Entrepreneurship Monitor (GEM), cette analyse se focalise sur les nouveaux entrants, identifiés comme sources de dynamisme économique et d'emplois dans les espaces ruraux. Pour ce faire, les auteurs utilisent plusieurs théories généralement mobilisées dans l'étude des trajectoires d'entreprises, principalement dans le domaine industriel ou les services, plus rarement dans le secteur agricole. Ainsi, la théorie du management basé sur les ressources (Resource-Based View, RBV), met en avant la singularité des combinaisons de ressources matérielles et immatérielles des entreprises, notamment celles provenant du capital humain, pour dégager un avantage comparatif par rapport aux concurrents, au niveau national voire international. De son côté, la théorie institutionnelle introduit une dimension exogène importante, via le cadre réglementaire, les normes ou les représentations. Enfin, l'analyse industrielle s'intéresse plus au contexte sectoriel et aux situations de concurrence.

En combinant ces différentes lectures des dynamiques des entreprises, les auteurs ont calculé et hiérarchisé l'impact de divers facteurs a priori susceptibles d'influer sur le devenir des exploitations agricoles. En s'appuyant sur des données individuelles (près de 6 000 observations) couvrant la période 2004-2014, dans 90 pays, ils ont ainsi mesuré les interactions de différents paramètres avec la productivité du travail. En particulier, dans les pays ayant atteint un haut niveau de productivité, le capital humain est essentiel pour expliquer la performance des nouveaux agriculteurs. Le niveau de formation initiale, le capital social (réseaux de pairs), la créativité, les aptitudes à innover et à se saisir des opportunités, mais également les compétences techniques pour les mettre en œuvre, sont des moteurs de la croissance. Les auteurs concluent sur l'importance de favoriser la créativité et la faculté à s'insérer dans des réseaux, pas seulement agricoles, chez les futurs agriculteurs en formation.

Schématisation des facteurs expliquant au niveau individuel, ou à l'échelle nationale, la dynamique des trajectoires économiques des agriculteurs nouvellement installés

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Source : European Review of Agricultural Economics

Muriel Mahé, Centre d'études et de prospective

Source : European Review of Agricultural Economics

09:04 Publié dans Agriculteurs | Lien permanent | Tags : agriculteurs, nouveaux entrants, capital humain, formation, capital social, innovation |  Imprimer | | | | |  Facebook

06/06/2018

Écarts de salaires et barrières à la mobilité dans le secteur agricole

L'American Economic Journal a publié en avril 2018 un article visant à expliquer les différences de salaires entre l'agriculture et d'autres secteurs économiques. L'analyse microéconomique utilise la base de données américaine sur les ménages IPUMS, sur un échantillon de treize pays (riches et pauvres) pour la période 1970-2010. Cet article revêt un intérêt particulier dans la mesure où les freins à la mobilité des travailleurs agricoles vers des emplois non agricoles font l'objet de peu d'études.

Les auteurs montrent tout d'abord que les salaires dans l'agriculture sont inférieurs et les travailleurs moins éduqués que dans les autres secteurs. Par exemple, par rapport au cas spécifique des services qui utilisent une part importante de travailleurs qualifiés, le rapport est de un à trois pour les salaires, et de un à cinq pour le niveau d'éducation. Les auteurs estiment également, par secteur, le retour sur investissement scolaire en matière de salaire (« Returns to schooling », à savoir la valorisation du nombre d'années d'études en termes de salaire), alors que les travaux précédents le calculaient de façon agrégée. Ils montrent que ce retour sur investissement est plus faible dans le secteur agricole (voir figure).

Selon cet article, l'écart proviendrait davantage de la différence de « capacité intrinsèque » des travailleurs que de la manière dont le capital humain est valorisé dans chaque secteur. Pour le montrer, deux modèles multi-sectoriels ont été réalisés pour chacun de ces deux facteurs explicatifs. En comparant les gains de la mobilité du travail du secteur agricole vers un autre secteur de l'économie avec ceux constatés pour des travailleurs au Brésil, aux États-Unis et en Indonésie, les auteurs déduisent que le modèle basé sur les capacités intrinsèques aboutit à des résultats plus proches de la réalité.

Enfin, en estimant un niveau de capital humain par secteur (produit du retour sur investissement et du nombre d'années de scolarité), ils montrent que ce dernier explique une part plus importante de l'écart de salaire entre secteurs que ce que les travaux antérieurs avaient estimé. Est ensuite calculée la partie de cet écart non expliquée par la différence de capital humain et composée des barrières à la mobilité du travail de l'agriculture vers les autres secteurs : localisation géographique, facteurs sociétaux, etc. Les auteurs concluent que ces barrières sont faibles et bien inférieures à celles révélées par les travaux précédents.

Retour sur investissement scolaire en termes de salaire par secteur (agriculture, industrie, services) et par pays (selon le niveau de PIB/individu)

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Source : American Economic Journal: Macroeconomics

Raphaël Beaujeu, Centre d'études et de prospective

Source : American Economic Journal: Macroeconomics