11/12/2020
Des inégalités foncières au cœur des inégalités sociétales
L'International Land Coalition (ILC) publie un rapport de synthèse sur les inégalités foncières dans le monde. Il présente les principaux résultats de 17 études menées dans le cadre d'un vaste partenariat international auquel participe le Cirad. Ces inégalités sont à la fois causes et conséquences d'autres inégalités (sociales, économiques, politiques, environnementales ou territoriales). Pour les auteurs, lutter contre ces disparités foncières revient alors à s'attaquer aux grandes crises contemporaines (démocratique, climatique, sanitaire, migratoire, économique).
Les inégalités foncières et leurs liens avec d'autres formes d'inégalités et de crises mondiales
Source : International Land Coalition
S’appuyant sur une revue de la littérature et sur les données existantes, le rapport donne à voir, dans les différentes régions du monde, les enjeux et mécanismes qui conduisent à l'accroissement de la concentration des terres agricoles, observé depuis 1980. Ainsi, selon un rapport de la FAO (Food and agriculture organization) de novembre 2019, 1 % des exploitations les plus importantes travaillent 70 % des terres agricoles de la planète.
Le rapport propose ensuite une analyse de ces inégalités foncières, à partir de données habituellement non prises en compte pour la mesurer. En effet, dans la littérature, la concentration des terres est souvent estimée à partir des recensements agricoles nationaux, via un indicateur statistique (coefficient de Gini) calculé uniquement à partir de la superficie des exploitations. Si celui-ci met en perspective, sur le long terme, les inégalités foncières entre les pays, il ne reflète qu’un certain niveau d'inégalités dans la répartition des surfaces des structures agricoles. Cet indicateur unidimensionnel ne prend pas en compte les multiples composantes de l'inégalité foncière comme, par exemple, la valeur des terres, la propriété multiple, les agriculteurs sans-terre, le contrôle réel de ces terres par les producteurs, etc. Les auteurs montrent pourtant qu'en prenant simplement en compte la valeur foncière, la propriété multiple et la privation de terres, l'inégalité foncière s'accroît de 41 % en moyenne par rapport à celle identifiée au moyen du coefficient de Gini. Ces travaux mettent également en évidence des différences régionales, comme l'illustre la figure ci-dessous.
Différences des niveaux d'inégalités mesurés par le coefficient de Gini habituel et prenant en compte
les propriétés multiples de parcelles, la valeur des terrains et la population d'agriculteurs sans-terre
Source : International Land Coalition
Lecture : en rose, niveau d'inégalité foncière selon le coefficient de Gini calculé à partir de la superficie des terres agricoles. En gris, l'inégalité foncière mesurée par la méthode développée par Bauluz et al. (2020) intégrant la propriété multiple de parcelles et la valeur foncière. En bleu foncé, la mesure précédente (barre grise) intégrant les agriculteurs sans-terre comme variable supplémentaire.
Jérôme Lerbourg, Centre d'études et de prospective
Source : International Land Coalition
09:30 Publié dans Production et marchés, Société | Lien permanent | Tags : foncier, inégalités sociales, coefficient de gini | Imprimer | |
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