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09/02/2018

Le nouveau capitalisme agricole. De la ferme à la firme, François Purseigle, Geneviève Nguyen, Pierre Blanc (dir.)

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En France, les politiques publiques, la recherche scientifique et les représentations sociales privilégient, de longue date, le modèle de l'agriculture familiale, celui d'une organisation productive de dimension humaine où les propriétaires des moyens de production gèrent l'entreprise et y travaillent. Il s'agirait là d'une constante à protéger, d'un invariant agricole à prolonger. Dans le même temps, partout dans le monde s'imposent des formes non familiales de rapport au foncier, de capitalisation des exploitations, de financiarisation, de management du travail, de spécialisation technique, de commercialisation des produits, etc. Les fermes intègrent de plus en plus des caractéristiques de la firme industrielle et commerciale, et ce nouvel esprit productiviste symbolise l'étape actuelle du capitalisme agricole.

En s'appuyant principalement sur les résultats du programme de recherche ANR Agrifirme (2010-2013), le pari – tout à fait réussi – du livre, est de cerner les contours de cette recomposition agraire, d'en comprendre les grandes tendances et d'en souligner la diversité géographique et sectorielle. La dizaine de chapitres, tous très documentés, répond à la fois à une forte ambition théorique (construire un cadre d'analyse interdisciplinaire capable de saisir les mutations en cours) et à un réel souci empirique (décrire des situations concrètes variées). Quatre figures typiques sont privilégiées : les firmes financières et spéculatives, les firmes de groupe, les firmes commerciales de production, et enfin les formes nouvelles d'intégration vers l'amont agricole.

La richesse du livre est telle qu'on se contentera ici d'en donner un aperçu général. Une première série de textes est consacrée aux approches économique et sociologique de la firme agraire : racines historiques, zones de développement, caractéristiques, finalités, spécialisations, statuts juridiques, acteurs concernés, modes de fonctionnement, etc. Un deuxième ensemble de chapitres s'intéresse aux dimensions géographique et géopolitique de ces firmes : stratégies de localisation, relations avec les populations locales ou les autorités politiques, enjeux de puissance commerciale, inscription dans les relations internationales et la mondialisation, etc. Très intéressantes sont, entre autres, les pages dédiées à la description de situations nationales : Afrique du Sud, Indonésie, Argentine, Brésil, Arabie saoudite, etc. Au total, l'ouvrage offre un large tour d'horizon du processus de modernisation des activités agricoles et montre comment s'affirment, à l'échelle de la planète, des agricultures sans agriculteurs.

Bruno Hérault, Centre d'études et de prospective

Lien : Presses de Sciences Po