13/01/2022
Olivier Lepiller, Tristan Fournier, Nicolas Bricas, Muriel Figuié (dir.), Méthodes d'investigation de l'alimentation et des mangeurs, Éditions Quæ, décembre 2021, 244 pages
Cet ouvrage fait une présentation critique de quinze méthodes utilisées par différentes disciplines (anthropologie, économie, géographie, nutrition, sociologie) pour étudier les phénomènes alimentaires. La « fiction introductive » plonge le lecteur dans l'élaboration d'un projet scientifique pluri-disciplinaire et met en exergue les défis posés par le traitement d'un objet de recherche (cadrage, définitions, approches, échantillons, etc.). Les méthodes (figure ci-dessous) sont décrites dans trois parties, offrant un panorama précis et nuancé. La première s'intéresse à la mesure des pratiques et des représentations des individus, la deuxième au suivi « à la trace » des mangeurs et des aliments, la troisième aux modalités d'appréhension de la construction collective du fait alimentaire.
Carte cognitive des méthodes présentées dans l'ouvrage
Source : éditions Quæ
La présentation de chaque méthode traite des éléments historiques, des aspects techniques (ex. niveau de collecte : individu, ménage, population), des conditions de validité, des considérations éthiques et déontologiques, des exemples d'utilisation dans différents contextes, des liens entre disciplines, etc. L'ouvrage propose ainsi des rappels sur des méthodes connues et dont les résultats sont fréquemment utilisés : mesures de la consommation (rétrospectives ou prospective), indicateurs de sécurité alimentaire, économie expérimentale, recherche-action, etc. Il invite aussi à considérer les opportunités offertes par d'autres approches plus confidentielles, comme le photovoice (identification des environnements alimentaires du point de vue des habitants), la méthode follow-the-thing développée en géographie, ou encore les ateliers-théâtre. Enfin, la dimension évaluative est présente, en particulier pour traiter de l'impact des actions de prévention et de promotion de la santé nutritionnelle, et de la durabilité des innovations alimentaires.
De manière générale, la nature multi-dimensionnelle de l'alimentation nécessite de croiser les regards et les méthodes d'analyse. Pour ce faire, les contributions réunies dans cet ouvrage apportent des éclairages importants, tant sur chaque méthode que sur les articulations et complémentarités possibles. Elles intéresseront autant les utilisateurs des méthodes que les utilisateurs des résultats produits.
Julia Gassie, Centre d'études et de prospective
Lien : Éditions Quæ
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07/07/2016
Mangeurs sous influences ? Sens et cerveau en dialogue
Le 21 juin dernier s'est tenue la Conférence annuelle Benjamin Delessert consacrée au thème « Mangeurs sous influences ? Sens et cerveau en dialogue ». À cette occasion, le prix Jean Trémollières a été remis à Yann Cornil pour sa thèse en sciences de gestion Essais sur la perception sensorielle et le marketing alimentaire, effectuée à l'INSEAD. Plusieurs intervenants ont exposé tour à tour les résultats de leurs travaux.
Parmi les nombreux éléments présentés, on peut retenir l'intervention de S. Chambaron (Inra-Centre des Sciences du Goût et de l'Alimentation), dont les travaux « visent à comprendre comment les choix alimentaires peuvent être influencés par des odeurs auxquelles nous ne prêtons pas attention », utilisées comme « amorces ». Ainsi, des personnes exposées à une odeur subtile (i.e. perçue non consciemment par les individus) de melon ont tendance à choisir, par rapport à un groupe contrôle, des entrées à base de légumes et à éviter celles à haute densité énergétique. Les effets d'une odeur subtile de poire sont similaires sur le choix du type de dessert. L'étude de l'impact de différents signaux (odeur d'un aliment gras sucré et/ou message explicite de prévention) met en évidence, contre toute attente, qu'avec l'exposition au message de prévention, le choix des individus se porte plus sur un dessert à haute densité énergétique, et que avec une exposition simultanée aux deux signaux étudiés, ce dessert est encore plus choisi. Se dégagent de ces travaux des éléments intéressants en termes d'outils d'intervention publique.
Dans ses expériences sur simulation sensorielle et marketing, s'appuyant en particulier sur des études expérimentales auprès d'adultes et d'enfants français et américains, Y. Cornil a cherché à démontrer « qu'il est possible d'encourager les consommateurs à choisir de plus petites portions, sans ''coût hédonique'' (diminution des attentes de plaisir) ni perte économique ». Le plaisir sensoriel, stimulé par imagerie, en fournissant par exemple des détails riches sur les aliments dans les menus, incite ainsi à des choix plus sains. Un « triple gain » est alors mis en avant : pour les consommateurs (santé et plaisir), pour les producteurs et restaurateurs (intérêt économique).
Julia Gassie, Centre d'études et de prospective
Lien : Institut Benjamin Delessert
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