18/06/2019
Une étude prospective sur la durabilité de la pêche en haute mer
La pêche en haute mer ne représente que 4 % des captures annuelles mondiales de poisson, mais elle connaît un développement rapide. Les prises hauturières sont ainsi passées de 450 000 tonnes en 1950 à 4,3 millions en 2014, ce qui interroge sur la durabilité de cette activité, comme le font plusieurs chercheurs dans ce document de travail de l'International Institut for Environment and Development.
Leur approche combine prospective et modélisation. Dans un premier temps, des experts ont été mobilisés pour élaborer différents scénarios relatifs au devenir de la pêche hauturière aux horizons 2030, 2050 et 2090. Ces scénarios ont ensuite alimenté un modèle bio-économique visant à quantifier les impacts économiques et écologiques des futurs envisagés.
Structure du modèle bio-économique
Source : IIED
Trois scénarios ont été retenus et modélisés pour les trois horizons. Le premier fait l'hypothèse d'une coopération internationale renforcée permettant une gestion durable des ressources halieutiques. Le deuxième suppose, à rebours, une montée des nationalismes et des rivalités croissantes, principalement dans les pays riches. Cela se traduit par une exploitation plus intense de la haute mer par les pays développés, chacun d'entre eux cherchant à maximiser les revenus tirés de cette ressource commune. Le troisième scénario anticipe lui aussi un développement de la pêche hauturière, mais plus large puisque les pays à bas revenus y prendraient part également.
Sur le plan économique, la modélisation montre que la pêche en haute mer n'est viable dans aucun des scénarios envisagés, en raison de ses coûts. Dans les deux derniers scénarios, son développement n'est possible que parce qu'elle est subventionnée et emploie des travailleurs sous-rémunérés, voire forcés. Sur le plan écologique, ces mêmes scénarios se traduisent par un fort déclin des stocks de poissons et de leur diversité, en raison d'un effort de pêche important et d'un changement climatique marqué qui impacte la ressource. L'indice d'abondance moyenne des espèces diminuerait ainsi, d'ici 2090, de 29 à 67 % dans ces deux scénarios, contre 3 à 8 % dans le premier. Partant de ces constats, les auteurs appellent à la mise en œuvre rapide d'une gouvernance internationale permettant une exploitation durable de la haute mer.
Mickaël Hugonnet, Centre d'études et de prospective
Source : IIED
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03/07/2018
Subventions et travail forcé à la rescousse de la rentabilité de la pêche en haute mer
Poursuivant le travail engagé sur la base de la géolocalisation des flottes de pêche en haute mer (voir à ce sujet un précédent billet sur ce blog), des chercheurs ont évalué la rentabilité de cette activité au regard des captures réalisées (article publié en juin dans Science Advances).
Grâce au repérage des bateaux et au suivi de leur activité au cours d'une année (2016), ils ont reconstitué les coûts de fonctionnement (essentiellement carburant et personnel) de la flotte. Même avec des salaires minorés, afin d'intégrer l'importance du travail forcé sur certains navires navigant en eaux internationales, le produit de la pêche est, dans 19 % des cas, insuffisant pour couvrir les coûts de production. En Chine, à Taïwan et en Russie, soit plus de la moitié de cette flotte, les subventions, pratique courante dans ce secteur, sont indispensables pour équilibrer l'activité.
Revenus de la pêche en haute mer, avant subvention, selon les zones de pêche
Source : Science Advances
Les auteurs nuancent leurs résultats en fonction des zones de pêche, l'éloignement par rapport aux zones économiques exclusives aggravant le déficit de l'activité. Les types de bateau et de pêche sont aussi des facteurs de variation : par exemple, le chalutage de fond est, dans les deux tiers des cas, non profitable, tout en étant à l'origine d'importantes dégradations des fonds marins.
Source : Science Advances
09:36 Publié dans Pêche et aquaculture | Lien permanent | Tags : pêche, haute mer, subventions, travail forcé, géolocalisation | Imprimer | |