15/01/2021
Irriguer pour s'adapter au changement climatique et sécuriser la production alimentaire
60 % de la production alimentaire mondiale reposent aujourd'hui sur l'agriculture pluviale. Face au changement climatique qui modifie les régimes de précipitations et les températures, l'irrigation constitue une mesure d'adaptation efficace, si elle est utilisée de manière durable (non épuisement des ressources souterraines et de surface). Dans un article publié en novembre dans la revue PNAS, des chercheurs s'intéressent aux impacts potentiels du changement climatique sur la demande en eau d'irrigation, sa disponibilité, et quantifient la possible extension de l'irrigation, dans un scénario de référence (considérant la période 1996-2005) et dans le cas où les températures globales augmenteraient de 3°C par rapport au scénario de référence.
Leur approche comporte plusieurs étapes : i) l'identification des terres cultivées touchées par les pénuries d'eau de pluie, ii) l'estimation des besoins en eau d'irrigation et le relevé des zones de cultures pluviales à irriguer si les températures augmentaient, la cartographie iii) des régions agricoles où les eaux de surface et souterraines pourraient suffire à irriguer si des infrastructures légères étaient construites (ex. petits bassins de rétention) et iv) de celles nécessitant des infrastructures plus lourdes (ex. barrages), enfin v) l'estimation des surfaces irriguées, des volumes d'eau et du nombre de personnes qui pourraient être approvisionnées dans chaque scénario.
Les auteurs montrent que 86 % des terres cultivées (800 Mha) sont menacés par la rareté de l'eau de pluie dans le scénario de référence, et 93,5 % dans un climat 3°C plus chaud (870 Mha). Cette différence de 70 Mha nourrirait plus de 700 millions de personnes.
Cartographie des systèmes culturaux non irrigués qui seront menacés par la rareté des eaux de pluie
Source : PNAS
Lecture : les terres cultivées menacées par la rareté de l'eau de pluie dans le scénario de référence sont en gris. Les terres cultivées additionnelles menacées par la rareté de l'eau de pluie si les températures augmentaient de 3°C sont en rouge. Les zones en vert ne sont pas menacées tandis que celles en marron sont déjà irriguées.
Dans ces conditions, le recours à des infrastructures de stockage légères permettrait d'irriguer durablement 140 Mha de plus dans le scénario de référence, mais seulement 53 Mha supplémentaires dans un climat 3°C plus chaud (figure ci-dessous). Dans ce scénario, l'usage d'infrastructures de stockage plus lourdes permettrait d'étendre les surfaces irriguées de 281 Mha, pour un approvisionnement d'un milliard de personnes en plus. Selon les auteurs, les zones à fort potentiel pour étendre les surfaces irriguées se situent en Europe de l'Est, en Asie centrale, en Afrique sub-saharienne et en Amérique latine.
Potentiel d'expansion durable des surfaces irriguées au niveau mondial, consommation d'eau supplémentaire et nombre de personnes nourries, selon les conditions climatiques et les types d'irrigation
Source : PNAS
Lecture : le potentiel apporté par l'usage d'infrastructures légères est en rose foncé. Le potentiel apporté par l'usage d'infrastructures légères et un déficit d'irrigation de 20 % est en rose clair. Le potentiel apporté par l'usage d'infrastructures lourdes figure en bleu.
Estelle Midler, Centre d'études et de prospective
Source : PNAS
12:50 Publié dans Agronomie, Environnement | Lien permanent | Tags : eau, irrigation, pratiques agricoles, changement climatique | Imprimer | |
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