Animal-humain : relation, rupture, différence ? Une série de l'émission Matières à penser (11/12/2019)
Début novembre 2019, dans l'émission Matières à penser, le philosophe F. Worms a conduit cinq entretiens sur le thème « Animal humain », avec des experts de disciplines variées (neurobiologie, biologie, philosophie, sociologie). Tous soulignent la complexité des relations entre humain et animal. Le neurobiologiste A. Prochiantz, auteur de Singe toi-même, met en avant les spécificités humaines par rapport aux primates. Dans cette même logique, le philosophe E. Bimbenet, auteur notamment de l'essai Le complexe des 3 singes (essai sur l'animalité humaine), décrit le passage de l'anthropocentrisme au zoocentrisme, qui conduit parfois à considérer toute différence comme une discrimination, malgré les travaux en psychologie cognitive (études de M. Tomasello) attestant de l'inégalité des apprentissages entre les jeunes enfants et les primates. Ces deux intervenants préconisent, face aux controverses actuelles, de remettre à plat les enjeux de la relation Humain-Animal.
Le biologiste G. Boeuf évoque le destin commun de l'animal et de l'homme à travers l'imbrication du vivant. Il rappelle que l'humain a des comportements qu'un animal, même le plus évolué, n'aura jamais. Concernant les animaux de rente, la sociologue J. Porcher estime que l'élevage doit impliquer soins et respect. Leur mort peut être « adoucie et ritualisée ». Ensuite, il devient une « carcasse » faisant l'objet d'un travail humain. La zootechnie a conduit à considérer les animaux comme des machines, en ne considérant que la performance économique. À l'opposé, la libération animale, dont le principe est de refuser les aspects « contraignants » de l'élevage, pourrait faire disparaître la vie animale. Selon elle, la synthèse de viande artificielle, à partir de quelques cellules, paraît une solution permettant de « donner bonne conscience », mais ceux qui financent ces recherches soutiennent aussi le transhumanisme et la robotique (voir à ce sujet un précédent billet sur ce blog).
Enfin, V. Maris, philosophe de l'environnement et auteure notamment de La part sauvage du monde, s'est penchée sur l'interventionnisme auprès de la faune sauvage. L'homme doit-il aider les animaux en souffrance ou laisser faire la nature ? Une approche compassionnelle peut se justifier par le souci du bien-être animal ou de la préservation d'une espèce, mais une attitude non interventionniste est le signe que les humains acceptent de ne pas prendre entièrement le contrôle de la vie sauvage.
Madeleine Lesage, Centre d'études et de prospective
Source : France Culture
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