Deux scénarios prospectifs contrastés pour le système agroalimentaire français à l'horizon 2040 (08/06/2018)
Dans une étude prospective à horizon 2040, parue dans la revue Science of the Total Environment en mai 2018, trois chercheurs (UMR Metis – Sorbonne Université-CNRS-EPHE) présentent deux visions contrastées des évolutions du système agroalimentaire français, en prenant en compte 33 régions agricoles.
La première vision insiste sur l'ouverture aux marchés internationaux, avec une spécialisation accrue des systèmes agricoles. La rentabilité du secteur animal nécessiterait alors un fort agrandissement des exploitations et une dépendance croissante à l'alimentation importée. La part des produits animaux dans la consommation humaine dépendrait classiquement des revenus individuels.
La seconde vision met en évidence les nouveaux liens entre les acteurs régionaux, pour un meilleur bouclage des cycles de nutriments : plus d'autonomie à l'échelle de l'exploitation et de la région, reconnexion de l'agriculture et de l'élevage et généralisation de l'agriculture biologique. La consommation de protéines animales se réduirait progressivement de moitié.
Ces scénarios ont été quantifiés avec la méthode GRAFS (Generalized Representation of Agro-Food Systems), qui bâtit une image complète des flux d'azote, de phosphore et de carbone, sur la base des données des 33 régions étudiées, et permet d'approcher les grandes caractéristiques des productions agricoles.
Résumé graphique : flux de l'azote (1000 tonnes/an)
Source : Science of the Total Environment
Dans le premier cas, la production végétale augmenterait de 15 %, doublant les exportations de céréales. La part des prairies dans l'alimentation du bétail serait réduite d'un tiers, l'importation de celle-ci devenant dominante. La France deviendrait importatrice net de produits agricoles et les transports de ces derniers augmenteraient de 35 %.
Dans le second scénario, la production végétale diminuerait de 20 % suite au passage au tout biologique, mais la réduction du cheptel français permettrait au pays de rester excédentaire, avec des exportations nettes de céréales à plus des deux tiers du niveau actuel. Aucune importation d'aliments pour animaux ne serait nécessaire. La production animale extensive répondrait aux besoins des 75 millions de Français dont le régime alimentaire aurait évolué. Les transports des produits agricoles seraient réduits de 93 %. Ce scénario contribue aux réflexions sur les systèmes agroalimentaires performants environnementalement, basé sur l'autonomie (engrais, aliments pour animaux), la reconnexion des cultures et de l'élevage, et une alimentation à protéines animales réduites.
José Ramanantsoa, Centre d'études et de prospective
Source : Science of the Total Environment
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