Changement climatique et ressource en eau : 40% de personnes en plus seraient menacés par de graves pénuries d'eau à la fin du XXIe siècle (09/01/2014)
Le projet Inter-Sectoral Impact Model Intercomparison (ISI-MIP), coordonné par le Postdam Institute for Climate Impact Research (PIK), vient de publier ses premiers résultats dans une édition spéciale de la revue Proceedings of the National Academy of Sciences. Cette étude mobilise les savoirs de nombreux chercheurs à travers le monde autour de 11 modèles hydrologiques globaux forcés par 5 modèles climatiques. Sur ce dernier point, les chercheurs ont recouru aux scénarios d'émission de gaz à effet de serre du dernier rapport du GIEC. L'objectif est de synthétiser les connaissances sur les impacts du changement climatique sur la ressource en eau renouvelable, à l'échelle globale, et de révéler en particulier les zones d'incertitudes.
Cette approche multi-modèles permet d'estimer la part relative de tension sur la ressource en eau qui incombe au changement climatique, et celle due à la croissance démographique. Autrement dit, elle permet de distinguer la variation de l'offre en eau par rapport à l'évolution de la demande. Avec une augmentation d'environ 3°C de la température atmosphérique, le nombre de personnes menacées par de graves pénuries d'eau (moins de 500 m3 d'eau par an et par personne) augmenterait de 40%, suite aux modifications des régimes de pluie, par rapport aux tensions engendrées par l'évolution de la demande en eau seule (évolution démographique). Notons que la consommation d'eau moyenne dans le monde est de 1 200 m3 par an et par personne, voire plus dans les pays industrialisés.
De plus, l'étude permet d'affiner les connaissances sur les incertitudes liées à ces modèles, d'en dégager les résultats les plus robustes utiles à la gestion du risque. Ce travail collectif sera prolongé par des études approfondies sur l'évolution de la demande en eau par les différents usages (agriculture, industries, énergie, etc.) et par la prise en compte des innovations technologiques.
L'étude se divise en plusieurs volets, dont la localisation des régions du monde qui seront très affectées par la raréfaction de l'eau, ou encore la question agricole. Sur ce point, trois articles ont été publiés. Un premier traite de la réponse des cultures au changement climatique, donc en lien avec la sécurité alimentaire, soulignant que la paramétrisation du dioxyde de carbone (effets sur la photosynthèse et la transpiration), ainsi que du stress résultant du manque d'azote dans les modèles, restent un axe clé de recherche dans ce domaine. Le deuxième se concentre sur l'irrigation, limitée par la disponibilité de la ressource et la possible reconversion de surfaces irriguées en surfaces consacrées à l'agriculture pluviale. Le troisième traite des conséquences économiques des chocs biophysiques.
Élise Delgoulet, Centre d'études et de prospective
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